LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Joint les pourvois n° E 12-28.572 et B 13-11.921, qui attaquent le même arrêt ;
Sur les moyens uniques de chaque pourvoi, rédigés en termes identiques, réunis :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 20 mai 2010), que, saisis à la requête de la société Crédit foncier de France, des immeubles appartenant à M. X... ont été adjugés, par jugements du 22 février 1996, à la société Compagnie financière de marchand de biens Volney ; que M. X... ayant été mis en redressement puis liquidation judiciaires les 23 novembre 2000 et 22 novembre 2001, des jugements du 19 mars 2004 ont attribué les prix d'adjudication aux sociétés Crédit foncier de France et Auxiliaire du Crédit foncier de France ; que, signifiés au liquidateur le 4 mai 2004, ils ont fait l'objet d'un appel le 4 juin 2004 par M. X... seul, tandis que la déclaration d'appel du liquidateur a été déposée au greffe le 15 juin 2004 ;
Attendu que M. X... et son liquidateur font grief à l'arrêt d'avoir déclaré ces appels irrecevables à la demande des intimés, alors, selon le moyen :
1°/ que le débiteur peut toujours, en vertu de son droit propre, continuer à défendre à une procédure de saisie immobilière introduite contre lui par un créancier avant l'ouverture de la procédure et continuée après jugement d'ouverture ; qu'en l'espèce, par décision du 22 février 1996, le tribunal de grande instance de Créteil avait déclaré la société COFIMAB adjudicataire, d'un immeuble de M. X... ; que ce dernier a été placé en liquidation judiciaire par jugement du 22 novembre 2001 ; que par jugement du 19 mars 2004, le tribunal a ensuite constaté le versement du prix de l'adjudication entre les mains du créancier et jugé l'adjudicataire libéré et, attribué à un créancier poursuivant le prix d'adjudication ; qu'en conséquence, M. X... était recevable à contester le paiement, entre les mains du créancier poursuivant, du prix d'adjudication de son immeuble saisi et, en conséquence, à relever appel du jugement du 19 mars 2004 ; qu'en retenant le contraire, la cour d'appel a violé l'article L. 622-9 du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises ;
2°/ que l'irrégularité qui affecte la déclaration d'appel en raison du défaut de pouvoir né de l'ouverture d'une procédure de liquidation des biens ou de liquidation judiciaire déjà ouverte à l'encontre de l'appelant, peut être couverte par l'intervention du liquidateur après l'expiration du délai légal pour interjeter appel lorsqu'il fait siennes les conclusions du débiteur ; qu'en l'espèce, par conclusions au fond puis par conclusions sur incident, M. X... et son liquidateur ont conclu ensemble sur la recevabilité de leur appel et sur le fond ; qu'il en résulte que le liquidateur a régularisé l'appel conservatoire formé dans le délai d'appel par M. X... ; qu'en se fondant néanmoins, pour retenir que l'appel de M. X... était irrecevable, de même que celui, tardif, du liquidateur, l'appel irrecevable de M. X... n'ayant pu préserver son droit d'appeler hors délai contre les jugements entrepris, sur la circonstance inopérante que l'appel de M. X... ne visait pas à défendre les intérêts de la masse de ses créanciers, la cour d'appel a violé l'article 126 du code de procédure civile ;
3°/ que la règle du dessaisissement étant édictée dans l'intérêt des créanciers, seul le liquidateur judiciaire peut s'en prévaloir ; qu'en l'espèce, le liquidateur judiciaire avait conclu à la recevabilité de l'appel formé par le débiteur dessaisi mais régularisé par lui ; qu'en déclarant néanmoins l'appel irrecevable, la cour d'appel a violé les articles L. 622-9 du code de commerce dans sa rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises, ensemble l'article 122 du code de procédure civile ;
Mais attendu, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 622-9, alinéa 1er, du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises, les droits et actions du débiteur concernant son patrimoine sont exercés pendant toute la durée de la liquidation judiciaire par le liquidateur ; qu'aucun droit propre faisant échec à ce dessaisissement n'autorise le débiteur en liquidation judiciaire à contester seul l'attribution à un créancier du prix d'adjudication d'un immeuble et à relever, en conséquence, appel des décisions relatives à cette attribution ;
Attendu, d'autre part, que c'est à bon droit que la cour d'appel a retenu que ni la déclaration d'appel du liquidateur faite hors du délai du recours qui lui était ouvert par la signification du 4 mai 2004 ni ses conclusions postérieures par lesquelles il s'est associé à l'appel du débiteur n'ont pu régulariser la procédure ;
Attendu, enfin, que les intimés sont recevables à invoquer le défaut de qualité du débiteur à interjeter appel seul d'une décision concernant son patrimoine ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois ;
Condamne la Selarl Gauthier-Sohm, en sa qualité de liquidateur judiciaire de M. X..., aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du treize novembre deux mille treize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen identique produit aux pourvois par la SCP Monod et Colin, avocat aux Conseils, pour M. X... et la société Gauthier-Sohm, ès qualités,
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé l'ordonnance du conseiller de la mise en état ayant déclaré irrecevables les appels de M. X... et de Me Y... ès qualités de liquidateur à la liquidation judiciaire de M. X... ;
AUX MOTIFS QU'à bon droit, le conseiller de la mise en état a rappelé que le mandataire judiciaire désigné par le tribunal a seul qualité pour agir au nom et dans l'intérêt collectif des créanciers, en sorte que son administré, dessaisi de l'administration de ses biens, ne peut exercer seul une voie de recours, sauf pour relever appel, à titre conservatoire d'un jugement défavorable à la masse des créanciers et à condition que le mandataire liquidateur s'associe ultérieurement à cet appel ; que les deux procédures d'attribution du prix, ayant donné lieu aux deux jugements entrepris, opposaient la société COFIMAB, adjudicataire, au seul créancier disposant d'une inscription hypothécaire sur les immeubles, objets de l'adjudication, la société CREDIT FONCIER DE FRANCE et la société AUXILIAIRE DU CREDIT FONCIER DE FRANCE, M. Z..., créancier inscrit postérieurement à la publication du jugement d'adjudication, s'en étant rapporté à justice sur l'attribution du prix à la société CREDIT FONCIER DE FRANCE et n'ayant pas interjeté appel du jugement du 19 mars 2004 ; qu'il en résulte que M. X... n'a pas relevé appel pour protéger les intérêts de la masse de ses créanciers, mais qu'il l'a fait pour protéger ses propres intérêts contre ceux de l'unique créancier qui a été rempli de ses droits ; qu'il s'en déduit que son appel est irrecevable, de même que celui, tardif, de Me Y..., ès qualités, l'appel irrecevable de M. X... n'ayant pu préserver son droit d'appeler hors délai contre les jugements entrepris ;
ALORS, de première part, QUE le débiteur peut toujours, en vertu de son droit propre, continuer à défendre à une procédure de saisie immobilière introduite contre lui par un créancier avant l'ouverture de la procédure et continuée après jugement d'ouverture ; qu'en l'espèce, par décision du 22 février 1996, le tribunal de grande instance de Créteil avait déclaré la société COFIMAB adjudicataire, d'un immeuble de M. X... ; que ce dernier a été placé en liquidation judiciaire par jugement du 22 novembre 2001 ; que par jugement du 19 mars 2004, le tribunal a ensuite constaté le versement du prix de l'adjudication entre les mains du créancier et jugé l'adjudicataire libéré et, attribué à un créancier poursuivant le prix d'adjudication ; qu'en conséquence, M. X... était recevable à contester le paiement, entre les mains du créancier poursuivant, du prix d'adjudication de son immeuble saisi et, en conséquence, à relever appel du jugement du 19 mars 2004 ; qu'en retenant le contraire, la cour d'appel a violé l'article L. 622-9 du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises ;
ALORS, de deuxième part et en tout état de cause, QUE l'irrégularité qui affecte la déclaration d'appel en raison du défaut de pouvoir né de l'ouverture d'une procédure de liquidation des biens ou de liquidation judiciaire déjà ouverte à l'encontre de l'appelant, peut être couverte par l'intervention du liquidateur après l'expiration du délai légal pour interjeter appel lorsqu'il fait siennes les conclusions du débiteur ; qu'en l'espèce, par conclusions au fond puis par conclusions sur incident, M. X... et Me Y..., ès qualités de liquidateur à sa liquidation judiciaire, ont conclu ensemble sur la recevabilité de leur appel et sur le fond ; qu'il en résulte que le liquidateur a régularisé l'appel conservatoire formé dans le délai d'appel par M. X... ; qu'en se fondant néanmoins, pour retenir que l'appel de M. X... était irrecevable, de même que celui, tardif, de M. Y..., ès qualités, l'appel irrecevable de M. X... n'ayant pu préserver son droit d'appeler hors délai contre les jugements entrepris, sur la circonstance inopérante que l'appel de M. X... ne visait pas à défendre les intérêts de la masse de ses créanciers, la cour d'appel a violé l'article 126 du code de procédure civile ;
ALORS, de troisième part et en toute hypothèse, QUE la règle du dessaisissement étant édictée dans l'intérêt des créanciers, seul le liquidateur judiciaire peut s'en prévaloir ; qu'en l'espèce, le liquidateur judiciaire avait conclu à la recevabilité de l'appel formé par le débiteur dessaisi mais régularisé par lui ; qu'en déclarant néanmoins l'appel irrecevable, la cour d'appel a violé les articles L. 622-9 du code de commerce dans sa rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises, ensemble l'article 122 du code de procédure civile.