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11/09/2013 | FRANCE | N°13-84857

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 11 septembre 2013, 13-84857


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :

- M. Patrick X...,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de NÎMES, en date du 21 juin 2013, qui, dans la procédure suivie contre lui des chefs de viols et agressions sexuelles aggravés, a rejeté sa demande de mise en liberté ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 5 et 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 137 à 150, 181, 201, 658, 659, 591 et

593 du code de procédure pénale,
"en ce que l'arrêt attaqué a rejeté la deman...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :

- M. Patrick X...,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de NÎMES, en date du 21 juin 2013, qui, dans la procédure suivie contre lui des chefs de viols et agressions sexuelles aggravés, a rejeté sa demande de mise en liberté ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 5 et 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 137 à 150, 181, 201, 658, 659, 591 et 593 du code de procédure pénale,
"en ce que l'arrêt attaqué a rejeté la demande de mise en liberté formée par le demandeur en refusant de constater l'expiration de son titre de détention ;
"aux motifs que « par arrêt en date du 13 septembre 2012, M. X... a été renvoyé devant la cour d'assises du Gard pour des faits de viols et de viols aggravés commis entre 2002 et 2010 ; que M. X..., né le 18 décembre 1985, est devenu majeur le 18 décembre 2003 ; que la cour d'assises du Gard, par arrêt du 30 mai 2013, s'est déclarée incompétente en raison des faits commis antérieurement à cette date ; que, par requête en date du 6 juin 2013, le procureur général près la cour d'appel de Nîmes a adressé une requête à la chambre criminelle de la Cour de cassation, au visa de l'article 659 du code de procédure pénale, aux fins de voir constater le conflit négatif de juridictions ; qu'à ce jour, la chambre Criminelle de la Cour de cassation n'a pas encore statué ; Attendu que M. X... a été placé en détention provisoire le 28septembre 2010 ; qu'il était détenu à la date de l'arrêt de mise en accusation du 13 septembre 2012, qui a acquis un caractère définitif et qu'en application des dispositions de l'article 181 du code de procédure pénale, le mandat de dépôt décerné contre lui conservera sa force exécutoire jusqu'au 13 septembre 2013 ; que M. X... est donc détenu en vertu d'un titre de détention parfaitement valide ; qu'en son dernier alinéa, l'article 148-1 du code de procédure pénale prévoit qu'en cas de décision d'incompétence, et généralement dans tous les cas où aucune juridiction n'est saisie, la chambre de l'instruction connaît des demandes de mise en liberté ; qu'en conséquence, la demande de mise en liberté déposée par M. X... conformément aux dispositions de l'article 148-6 du code de procédure pénale est recevable ; qu'à la date de l'arrêt de mise en accusation, soit le 13 septembre 2012, M. X... était détenu depuis moins de deux ans ; que, compte tenu de la multiplicité des faits reprochés, de leur durée et des dénégations de M. X... nécessitant de très nombreuses mesures d'instruction, auditions, expertises médicales et psychologiques et de longues et difficiles investigations (notamment les auditions de nombreux témoins), l'instruction a été conduite avec une particulière diligence ; que M. X... a comparu devant la cour d'assises du Gard moins de neuf mois à compter de l'arrêt de mise en accusation ; qu'enfin, le procureur général près la cour d'appel de Nîmes a, dès le 6 juin 2013, saisi la chambre criminelle de la Cour de cassation aux fins de trancher le conflit négatif de juridictions ; qui 'il est ainsi démontré que les décisions successives sont intervenues avec diligence et que compte tenu de l'exercice des voies de recours les diverses juridictions ont statué dans des délais raisonnables, la détention provisoire n'ayant pas elle-même excédé un délai raisonnable, au regard des critères de l'article 144-1 du code de procédure pénale ; que les charges qui pèsent sur M. X... se rapportent à des faits criminels multiples qui ont causé un trouble exceptionnel et persistant à l'ordre public en raison des circonstances de leur commission tant au regard de leur nature, de leur durée que du contexte de menaces, de chantage et de manipulation mentale dans lequel ils ont été commis ; que ces faits ont entraîné chez les trois parties civiles des répercussions graves et durables sur leur état de santé physique et psychique, vivant, comme leurs proches, dans une angoisse permanente d'être confrontées à l'accusé ; que, contrairement à ce que soutient le conseil de M. X..., il ne s'agit donc pas là d'une conception abstraite de l'ordre public ("décroissant nécessairement au fil du temps") ; que la remise en liberté de M. X... serait de nature à nuire au bon déroulement du procès, les débats étant oraux, un risque de pression sur les victimes, particulièrement vulnérables et éprouvées, ainsi que sur les témoins, n'étant pas à exclure y compris à ce stade certes ultime mais décisif de la procédure, et ce d'autant que l'intéressé se propose de résider à Montpellier, ville très proche du lieu des faits et du domicile des parties civiles ; qu'il est essentiel de préserver la sérénité des débats en cour d'assises ; qu'en cet état ni le contrôle judiciaire ni l'assignation à domicile avec surveillance électronique ne peuvent empêcher les risques de pression sur les témoins et les victimes ; que, s'agissant de mesures -qui laissent intacts tous les moyens de communication possible -qui sont totalement dépourvues de réel caractère coercitif ; qu'ainsi, il est démontré que la détention provisoire constitue l'unique moyen de parvenir aux objectifs suivants et que ceux-ci ne sauraient être atteints en cas de placement sous contrôle judiciaire ou d'assignation à résidence avec surveillance électronique : -empêcher une pression sur les témoins ou les victimes ainsi que sur leur famille, -mettre fin au trouble exceptionnel et persistant à l'ordre public provoqué par la gravité de l'infraction, les circonstances de sa commission ou l'importance du préjudice qu'elle a causé » ;
"alors que le caractère non avenu d'un arrêt de mise en accusation emporte nécessairement nullité de cet arrêt, lequel ne saurait alors servir de support à la validité du mandat de dépôt criminel; qu'ainsi, la chambre de l'instruction ne pouvait, sans méconnaître ce principe et les dispositions susvisées, refuser de prendre en considération l'arrêt de la chambre criminelle qui avait expressément déclaré l'arrêt de mise en accusation du 13 septembre 2012 non avenu, à la suite de la décision d'incompétence de la cour d'assises et, partant, refuser de constater l'irrégularité de la détention du demandeur, aux motifs inopérants et erronés, qu'il avait été placé en détention provisoire le 28 septembre 2010, qu'il était détenu à la date de l'arrêt de mise en accusation du 13 septembre 2012, et qu'en application de l'article 181 du code de procédure pénale, le mandat de dépôt décerné contre lui conservera sa force exécutoire jusqu'au 13 septembre 2013" ;
Attendu que, pour écarter le moyen pris du caractère non avenu de l'arrêt de mise en accusation, support à la validité du titre de détention, l'arrêt retient, après avoir rappelé que le procureur général près la Cour d'appel avait adressé à la chambre criminelle le 6 juin 2013 une requête au visa de l'article 659 du code de procédure pénale, que M. X... était détenu à la date de l'arrêt de mise en accusation du 13 septembre 2012 et qu'en application des dispositions de l'article 181 du code de procédure pénale, le mandat de dépôt décerné contre lui conservait ainsi sa force exécutoire jusqu'au 13 septembre 2013 ;
Attendu qu'en l'état de ces seules énonciations, la chambre de l'instruction a fait l'exacte application des textes visés au moyen ;
D'où il suit que le moyen ne peut qu'être écarté ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles préliminaire, 137 à 150 du code de procédure pénale, 5 et 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 591 et 593 du code de procédure pénale,
"en ce que l'arrêt attaqué a rejeté la demande de mise en liberté formée par le demandeur;
"aux motifs que « par arrêt en date du 13 septembre 2012, M. X... a été renvoyé devant la cour d'assises du Gard pour des faits de viols et de viols aggravés commis entre 2002 et 2010 ; que M. X... , né le 18 décembre 1985, est devenu majeur le 18 décembre 2003 ; que la cour d'assises du Gard, par arrêt du 30 mai 2013, s'est déclarée incompétente en raison des faits commis antérieurement à cette date ; que, par requête en date du 6 juin 2013, le procureur général près la cour d'appel de Nîmes a adressé une requête à la chambre criminelle de la Cour de cassation, au visa de l'article 659 du code de procédure pénale, aux fins de voir constater le conflit négatif de juridictions ; qu'à ce jour, la chambre criminelle de la Cour de cassation n'a pas encore statué ; que M. X... a été placé en détention provisoire le 28septembre 2010 ; qu'il était détenu à la date de l'arrêt de mise en accusation du 13 septembre 2012, qui a acquis un caractère définitif et qu'en application des dispositions de l'article 181 du code de procédure pénale, le mandat de dépôt décerné contre lui conservera sa force exécutoire jusqu'au 13 septembre 2013 ; que M. X... est donc détenu en vertu d'un titre de détention parfaitement valide ; qu'en son dernier alinéa, l'article 148-1 du code de procédure pénale prévoit qu'en cas de décision d'incompétence, et généralement dans tous les cas où aucune juridiction n'est saisie, la chambre de l'instruction connaît des demandes de mise en liberté ; qu'en conséquence, la demande de mise en liberté déposée par M. X... conformément aux dispositions de l'article 148-6 du code de procédure pénale est recevable ; qu'à la date de l'arrêt de mise en accusation, soit le 13 septembre 2012, M. X... était détenu depuis moins de deux ans ; que, compte tenu de la multiplicité des faits reprochés, de leur durée et des dénégations de M. X... nécessitant de très nombreuses mesures d'instruction, auditions, expertises médicales et psychologiques et de longues et difficiles investigations (notamment les auditions de nombreux témoins), l'instruction a été conduite avec une particulière diligence ; que M. X... a comparu devant la cour d'assises du Gard moins de neuf mois à compter de l'arrêt de mise en accusation ; Qu'enfin, le procureur général près la cour d'appel de Nîmes a, dès le 6 juin 2013, saisi la chambre criminelle de la Cour de cassation aux fins de trancher le conflit négatif de juridictions ; qui 'il est ainsi démontré que les décisions successives sont intervenues avec diligence et que compte tenu de l'exercice des voies de recours les diverses juridictions ont statué dans des délais raisonnables, la détention provisoire n'ayant pas elle-même excédé un délai raisonnable, au regard des critères de l 'article 144-1 du code de procédure pénale ; Attendu que les charges qui pèsent sur M. X... se rapportent à des faits criminels multiples qui ont causé un trouble exceptionnel et persistant à l'ordre public en raison des circonstances de leur commission tant au regard de leur nature, de leur durée que du contexte de menaces, de chantage et de manipulation mentale dans lequel ils ont été commis ; que ces faits ont entraîné chez les trois parties civiles des répercussions graves et durables sur leur état de santé physique et psychique, vivant, comme leurs proches, dans une angoisse permanente d'être confrontées à l'accusé ; que contrairement à ce que soutient le conseil de M. X..., il ne s'agit donc pas là d'une conception abstraite de l'ordre public ("décroissant nécessairement au fil du temps") ; que la remise en liberté de M. X... serait de nature à nuire au bon déroulement du procès, les débats étant oraux, un risque de pression sur les victimes, particulièrement vulnérables et éprouvées, ainsi que sur les témoins, n'étant pas à exclure y compris à ce stade certes ultime mais décisif de la procédure, et ce d'autant que l'intéressé se propose de résider à Montpellier, ville très proche du lieu des faits et du domicile des parties civiles ; qu'il est essentiel de préserver la sérénité des débats en cour d'assises ; qu'en cet état ni le contrôle judiciaire ni l'assignation à domicile avec surveillance électronique ne peuvent empêcher les risques de pression sur les témoins et les victimes ; que, s'agissant de mesures -qui laissent intacts tous les moyens de communication possible -qui sont totalement dépourvues de réel caractère coercitif ; qu'ainsi il est démontré que la détention provisoire constitue l'unique moyen de parvenir aux objectifs suivants et que ceux-ci ne sauraient être atteints en cas de placement sous contrôle judiciaire ou d'assignation à résidence avec surveillance électronique : -empêcher une pression sur les témoins ou les victimes ainsi que sur leur famille, -mettre fin au trouble exceptionnel et persistant à l'ordre public provoqué par la gravité de l'infraction, les circonstances de sa commission ou l'importance du préjudice qu'elle a causé ;
"alors que le rejet d'une demande de mise en liberté doit être motivé conformément aux exigences de l'article 144 du code de procédure pénale ; que dès lors, la chambre de l'instruction, qui s'est fondée sur la nécessité de préserver la sérénité des débats, critère non prévu par la loi et, de manière totalement abstraite, sur le trouble grave et persistant à l'ordre public ainsi que sur le risque de pressions sur les victimes et les témoins, n'a pas légalement justifié sa décision" ;
Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la chambre de l'instruction s'est déterminée par des considérations de droit et de fait répondant aux exigences des articles 143-1 et suivants du code de procédure pénale et a souverainement apprécié que la détention provisoire n'excédait pas un délai raisonnable, sans méconnaître les dispositions conventionnelles invoquées ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Louvel président, M. Moreau conseiller rapporteur, M. Pometan, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : M. Bétron ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 13-84857
Date de la décision : 11/09/2013
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

REGLEMENT DE JUGES - Conflit de juridictions - Conflit négatif - Juridictions d'instruction et de jugement - Chambre de l'instruction - Arrêt de renvoi devant une cour d'assises - Décision d'incompétence de la cour d'assises - Saisine de la Cour de cassation en règlement de juges - Validité du mandat de dépôt criminel - Annulation de l'arrêt de mise en accusation - Absence d'influence

INSTRUCTION - Mandat - Mandat de dépôt - Détention provisoire - Mandat de dépôt antérieur à l'arrêt de mise en accusation - Arrêt de mise en accusation devenu non avenu - Mise en liberté (non)

A fait une exacte application des articles 181 et 659 du code de procédure pénale, la chambre de l'instruction qui, pour écarter le moyen pris du caractère non avenu de l'arrêt de mise en accusation, support à la validité du titre de détention, a retenu, après avoir rappelé que le procureur général avait adressé à la chambre criminelle une requête au visa de l'article 659 du code de procédure pénale, que le demandeur était détenu à la date de l'arrêt de mise en accusation et qu'en application des dispositions de l'article 181 du code de procédure pénale, le mandat de dépôt décerné contre lui conservait ainsi sa force exécutoire jusqu'à l'expiration du délai d'un an


Références :

articles 181 et 659 du code de procédure pénale

Décision attaquée : Chambre de l'instruction de la cour d'appel de Nîmes, 21 juin 2013

Sur la validité du mandat de dépôt criminel en cas d'arrêt de règlement de juges annulant l'arrêt de mise en accusation, à rapprocher :Crim., 8 octobre 2013, pourvoi n° 13-85014, Bull. crim. 2013, n° 189 (rejet). Sur la nécessité pour le procureur de la République de saisir la chambre criminelle de la Cour de cassation en règlement de juges si la cour d'assises se déclare incompétente pour juger un accusé au motif qu'il était mineur au moment des faits, à rapprocher :Crim., 15 mars 2006, pourvoi n° 06-81028, Bull. crim. 2006, n° 83 (cassation)


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 11 sep. 2013, pourvoi n°13-84857, Bull. crim. criminel 2013, n° 179
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2013, n° 179

Composition du Tribunal
Président : M. Louvel
Avocat général : M. Boccon-Gibod (premier avocat général)
Rapporteur ?: M. Moreau
Avocat(s) : Me Spinosi

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:13.84857
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