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08/10/2013 | FRANCE | N°13-85014

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 08 octobre 2013, 13-85014


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :

- M. Patrick X...,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de NÎMES, en date du 2 juillet 2013, qui, dans la procédure suivie contre lui des chefs de viols et agressions sexuelles aggravés, a prolongé à titre exceptionnel sa détention provisoire ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 24 septembre 2013 où étaient présents : M. Louvel président, M. Barbier conseiller rapporteur, Mme Guirimand, MM. Beauvais, Gu

érin, Straehli, Finidori, Monfort, Buisson, Mme Chaubon, M. Germain, Mme Drai, M. S...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :

- M. Patrick X...,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de NÎMES, en date du 2 juillet 2013, qui, dans la procédure suivie contre lui des chefs de viols et agressions sexuelles aggravés, a prolongé à titre exceptionnel sa détention provisoire ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 24 septembre 2013 où étaient présents : M. Louvel président, M. Barbier conseiller rapporteur, Mme Guirimand, MM. Beauvais, Guérin, Straehli, Finidori, Monfort, Buisson, Mme Chaubon, M. Germain, Mme Drai, M. Sadot, Mme Duval-Arnould, conseillers de la chambre, Mme Moreau, MM. Maziau, Talabardon, Beghin, conseillers référendaires ;
Avocat général : M. Cordier ;
Greffier de chambre : M. Bétron ;
Sur le rapport de M. le conseiller référendaire BARBIER, les observations de Me SPINOSI, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général CORDIER ;
Vu le mémoire et les observations complémentaires produits ;
Attendu que M. X..., mis en examen des chefs de viols sur mineures de 15 ans, agressions sexuelles sur mineures de 15 ans, viols et viols sur concubin, faits commis de 2002 à juin 2010, puis placé sous mandat de dépôt, a été renvoyé devant la cour d'assises du Gard par ordonnance du juge d'instruction du 15 mai 2012 ; que l'intéressé ayant interjeté appel de cette décision, la chambre de l'instruction a prononcé sa mise en accusation devant la même juridiction criminelle par arrêt du 13 septembre 2012 ;
Attendu que la cour d'assises, le 30 mai 2013, s'est déclarée incompétente pour juger des faits antérieurs au 18 décembre 2003 alors que l'accusé était mineur, a dit n'y avoir lieu à disjonction et a renvoyé le ministère public à mieux se pourvoir ; que par requête en règlement de juges du 6 juin 2013, le procureur général près la cour d'appel de Nîmes a saisi la chambre criminelle du conflit négatif de compétence en application de l'article 659 du code de procédure pénale ; que par arrêt du 26 juin 2013, la chambre criminelle, réglant de juges, a renvoyé l'intéressé devant la cour d'assises des mineurs du Gard ;
Attendu que par réquisitions écrites en date du 6 juin 2013, le procureur général a saisi, au visa des articles 181 et 144 du code de procédure pénale, la chambre de l'instruction d'une demande aux fins de prolongation de la détention provisoire de M. X... pour une nouvelle durée de six mois à compter du 12 septembre 2013 ; que par l'arrêt attaqué, la chambre de l'instruction a prolongé la détention provisoire le 2 juillet 2013 ;
En cet état :
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 5 et 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 137 à 150, 181, 201, 658, 659, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a prolongé la détention provisoire du demandeur en refusant de constater l'expiration de son titre de détention ;
"aux motifs que M. X... né le 18 décembre 1985 est devenu majeur le 18 décembre 2003 ; que la cour d'assises du Gard, par arrêt du 30 mai 2013 s'est déclarée incompétente pour les faits commis antérieurement à cette date mais n 'a pas ordonné de disjonction pour les faits reprochés à l'accusé pendant sa majorité, estimant que les faits reprochés formaient un tout indivisible ; que, par requête en date du 6 juin 2013, le procureur général près la cour d'appel de Nîmes a adressé une requête à la chambre criminelle de la Cour de cassation, au visa de l'article 659 du code de procédure pénale, aux fins de voir constater le conflit négatif de juridictions entre l'arrêt de la chambre de l'instruction du 13 septembre 2012 et l'arrêt de la cour d'assises du Gard du 30 mai 2013, les deux arrêts étant passés en force de chose jugée et de renvoyer l'affaire devant la cour d'assises des mineurs du Gard pour juger M. X... de l'ensemble des faits reprochés en tant que mineur et en tant que majeur ;
Attendu qu'à ce jour, la chambre criminelle de la Cour de cassation n'a pas encore statué sur cette requête ;
Attendu d'une part que selon l'article 181-7° alinéa du code de procédure pénale , et sauf disposition expresse contraire, le mandat de dépôt criminel conserve sa force exécutoire lors du prononcé de la décision de mise en accusation et l'accusé reste détenu sous réserve des dispositions des deux alinéas suivants de ce même article ;
Attendu d'autre part que la procédure de "règlement de juges" prévue par les articles 658 à 661 du code de procédure pénale :
- a pour seul objet de régler un conflit négatif de compétence entre deux juridictions dont les décisions définitives et contradictoires par suite duquel le cours de la justice se trouve interrompu en désignant la juridiction à laquelle sera renvoyée la connaissance de la procédure en cause - n'emporte pas une quelconque remise en cause du "fond"- et constitue enfin une "raison de droit" au sens de l'article 181 (9°alinéa) du code de procédure pénale empêchant toute audience sur le fond tant qu'il n'a pas été statué sur la requête ; que M. X... est détenu depuis le 28 septembre 2010; qu'il a comparu détenu devant la cour d'assises du Gard ; que le titre de détention criminelle n'a pas expiré le 30 mai 2013 comme le soutient le conseil de l'accusé mais expirera le 13 septembre 2013, soit à l'expiration d'une année de détention provisoire après l'arrêt de la Chambre de l'Instruction, ainsi que le prévoit l'article 181 du code de procédure pénale ; qu'en application de l' alinéa 9 de ce même article, la chambre de l'instruction peut, à titre exceptionnel, par une décision rendue conformément à l'article 144 du code de procédure pénale, ordonner la prolongation de la détention provisoire pour une nouvelle durée de six mois dès lors qu'il existe des raisons défait ou de droit faisant obstacle à sa comparution en audience de jugement en l'espèce, des raisons de droit, la cour d'assises des mineurs n'étant pas encore désignée par la chambre criminelle de la Cour de cassation saisie avec une particulière diligence pour la poursuite de la procédure, en l'état du conflit négatif de juridictions élevé par l'arrêt de la cour d'assises du Gard le 30 mai 2013 et de la requête de M. le procureur général près la cour d'appel de Nîmes adressée à la chambre criminelle de la Cour de cassation, le 6 juin 2013 »;
"alors que le caractère non avenu d'un arrêt de mise en accusation emporte nécessairement nullité de cet arrêt, lequel ne saurait alors servir de support à la validité du mandat de dépôt criminel ; qu'ainsi, la chambre de l'instruction ne pouvait, sans méconnaître ce principe et les dispositions susvisées, refuser de prendre en considération l'arrêt de la chambre criminelle qui avait expressément déclaré l'arrêt de mise en accusation du 13 septembre 2012 non avenu, à la suite de la décision d'incompétence de la cour d'assises et, partant, prolonger la détention de l'exposant en refusant de constater son irrégularité, aux motifs inopérants et erronés, que selon l'article 181, 7° alinéa, du code de procédure pénale, le mandat de dépôt criminel conserve sa force exécutoire lors du prononcé de la décision de mise en accusation et l'accusé reste détenu sous réserve des dispositions des deux alinéas suivants de ce même article" ;

Attendu que l'arrêt de règlement a renvoyé la cause et l'accusé en l'état où ils se trouvent ; qu'il s'ensuit que l'intéressé a été renvoyé détenu devant la cour d'assises des mineurs du Gard ;
Que d'une part, l'arrêt de règlement de juges n' a annulé l'arrêt de mise en accusation qu'en ce qu'il a renvoyé l'accusé devant une juridiction incompétente pour juger des faits dont elle était saisie ;
Que d'autre part, l'annulation de l'arrêt, dans la limite ainsi fixée, a été sans incidence sur la validité du mandat de dépôt criminel ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 5 et 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 137 à 150, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a prolongé la détention provisoire du demandeur pour une durée de six mois à compter du 12 septembre 2013 ;
"aux motifs que la remise en liberté de M. X... serait de nature à nuire au bon déroulement du procès, les débats étant oraux, un risque de pression sur les victimes particulièrement vulnérables et éprouvées ainsi que sur les témoins n'étant pas à exclure y compris à ce stade certes ultime mais décisif de la procédure; qu'il est essentiel de préserver la sérénité des débats en cour d'assises ; qu'en outre, les charges qui pèsent sur M. X... se rapportent à des faits criminels multiples qui ont causé un trouble exceptionnel et persistant à l'ordre public en raison des circonstances de leur commission tant au regard de leur nature, de leur durée que du contexte de menaces, de chantage et de manipulation mentale dans lequel ils ont été commis; qu'ils ont entraîné chez les trois jeunes femmes victimes des répercussions graves et durables sur leur état de santé physique et psychique, vivant, comme leurs proches, dans une angoisse permanente d'être confrontées à l'accusé ; qu'en cet état ni le contrôle judiciaire ni l'assignation à domicile avec surveillance électronique ne peuvent empêcher ces risques de pression sur les témoins et les victimes s'agissant de mesures :- qui laissent intacts tous les moyens de communication possible - qui sont totalement dépourvues de réel caractère coercitif ; qu'ainsi, il est démontré que la détention provisoire constitue l'unique moyen de parvenir aux objectifs suivants et que ceux-ci ne sauraient être atteints en cas de placement sous contrôle judiciaire ou d'assignation à résidence avec surveillance électronique :- empêcher une pression sur les témoins et les victimes ainsi que sur leur famille ;- mettre fin au trouble exceptionnel et persistant à l'ordre public provoqué par la gravité de l'infraction, les circonstances de sa commission ou l'importance du préjudice qu'elle a causé »;
"1) alors que la prolongation de la détention provisoire doit être motivée conformément aux exigences de l'article 144 du code de procédure pénale ; que dès lors, la chambre de l'instruction, qui s'est fondée sur la nécessité de préserver la sérénité des débats, critère non prévu par la loi et, de manière totalement abstraite, sur le trouble grave et persistant à l'ordre public ainsi que sur le risque de pressions sur les victimes et les témoins, n'a pas légalement justifié sa décision ;
"2) alors qu'en tout état de cause, la prolongation des effets de l'ordonnance de mise en accusation au-delà d'un an n'est possible que si les autorités démontrent avoir apporté une diligence particulière à la poursuite de la procédure ; que dès lors, la chambre de l'instruction ne pouvait valablement prolonger la détention provisoire du mis en examen sans avoir précisé, comme l'y invitait le mémoire régulièrement déposé (pp. 6-7), en quoi les autorités avaient apporté une diligence particulière à la poursuite de la procédure" ;
Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la chambre de l'instruction, qui n'a pas méconnu les dispositions conventionnelles invoquées, s'est déterminée par des considérations de droit et de fait répondant aux exigences des articles 143-1 et suivants et 181 du code de procédure pénale ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le huit octobre deux mille treize ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 13-85014
Date de la décision : 08/10/2013
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

REGLEMENT DE JUGES - Conflit de juridictions - Conflit négatif - Juridictions d'instruction et de jugement - Chambre de l'instruction - Arrêt de renvoi devant une cour d'assises - Décision d'incompétence de la cour d'assises - Saisine de la Cour de cassation en règlement de juges - Validité du mandat de dépôt criminel - Annulation de l'arrêt de mise en accusation - Absence d'influence

Dans le cas où une cour d'assises, s'étant déclarée incompétente pour juger certains des faits reprochés à un accusé alors qu'il était encore mineur, a dit n'y avoir lieu à disjonction et a renvoyé le ministère public à mieux se pourvoir, l'arrêt de règlement de juges, rendu ensuite de cette décision par la chambre criminelle, n'annule l'arrêt de mise en accusation qu'en ce qu'il a renvoyé l'accusé devant une juridiction incompétente pour juger des faits dont elle était saisie, ladite annulation étant, dans la limite ainsi fixée, sans incidence sur la validité du mandat de dépôt criminel


Références :

articles 181 et 659 du code de procédure pénale

Décision attaquée : Chambre de l'instruction de la cour d'appel de Nîmes, 02 juillet 2013

Sur la validité du mandat de dépôt criminel en cas d'arrêt de règlement de juges annulant l'arrêt de mise en accusation, à rapprocher :Crim., 8 octobre 2013, pourvoi n° 13-84857, Bull. crim. 2013, n° ??? (rejet)


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 08 oct. 2013, pourvoi n°13-85014, Bull. crim. criminel 2013, n° 189
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2013, n° 189

Composition du Tribunal
Président : M. Louvel
Avocat général : M. Liberge
Rapporteur ?: M. Barbier
Avocat(s) : Me Spinosi

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:13.85014
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