LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 2 février 2012), que la Société navigation de plaisance Boat service (la société SNP) titulaire de contrats de distribution exclusive de bateaux "Mangusta" consentis par les sociétés Overmarine SPA et Overmarine Due (les sociétés Overmarine), a fait l'objet d'une procédure de sauvegarde le 7 avril 2009 ; que les sociétés Overmarine ont déclaré leurs créances qui ont été admises ; que le 7 avril 2010, le tribunal a arrêté un plan de sauvegarde et désigné M. X... (le commissaire à l'exécution du plan) en qualité de commissaire à l'exécution du plan ; que le 20 août 2010, les sociétés Overmarine ont résilié les contrats de distribution exclusive ; que le 24 décembre 2010 la société SNP, se prévalant notamment de la rupture brutale des relations commerciales établies, a assigné les sociétés Overmarine en paiement de diverses sommes ; qu'elle a assigné en jugement commun le commissaire à l'exécution du plan ; que celui-ci a formé une demande incidente pour obtenir le paiement à la société SNP, des mêmes sommes, mais sur le fondement de l'article 1382 du code civil ; que les sociétés Overmarine ont soulevé une fin de non-recevoir, en raison de l'existence d'une clause compromissoire, ainsi que l'incompétence du tribunal ; que le commissaire à l'exécution du plan, a formé contredit à l'encontre du jugement ayant retenu la compétence du tribunal arbitral ;
Attendu que le commissaire à l'exécution du plan fait grief à l'arrêt d'avoir dit qu'il n'avait pas qualité à agir à l'encontre des sociétés Overmarine en indemnisation du préjudice résultant pour la société SNP de la résiliation des contrats de partenariat et n'avait pas formulé contre ces sociétés de demande autonome en sa qualité de commissaire à l'exécution du plan, n'avait ni intérêt ni qualité pour frapper seul de contredit le jugement attaqué, et d'avoir rejeté comme irrecevable le contredit formé contre le jugement rendu le 16 juin 2011, alors, selon le moyen, que le commissaire à l'exécution du plan est habilité à engager des actions dans l'intérêt collectif des créanciers ; que, dans l'hypothèse d'une rupture brutale et non justifiée des relations commerciales unissant le débiteur et un tiers, quand une part prépondérante de l'activité du débiteur reposait sur l'existence et la pérennité de ces relations contractuelles, le commissaire à l'exécution du plan, chargé de veiller à la bonne exécution de ce plan, et d'engager les actions dans l'intérêt collectif des créanciers, a qualité pour exercer, aux côtés du débiteur in bonis, maître de ses biens depuis l'adoption du plan de continuation, une action en responsabilité à l'encontre du tiers cocontractant fautif afin de reconstituer l'actif du débiteur et de sauvegarder le gage des créanciers ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé l'article L. 626-25 du code de commerce ;
Mais attendu, qu'ayant constaté que la société SNP n'avait pas formé de contredit, puis énoncé, à bon droit, que le commissaire à l'exécution du plan, qui a qualité pour intenter des actions en responsabilité délictuelle afin obtenir le paiement de sommes réparant le préjudice collectif des créanciers résultant d'une diminution ou d'une aggravation du passif, ne peut agir contre un cocontractant du débiteur qu'il ne représente pas, l'arrêt retient que la demande formée par le commissaire à l'exécution du plan ne tend qu'à obtenir le paiement de sommes au seul profit de la société SNP, débiteur « in bonis », de l'exact montant auquel la société SNP évalue son préjudice personnel résultant de la résiliation sans préavis des contrats de partenariat dont elle demande elle-même le paiement aux sociétés Overmarine, et ne peut s'analyser en une action tendant à la défense des intérêts collectifs des créanciers ; que par ces énonciations, constatations et appréciations, dont il résultait que le commissaire à l'exécution du plan n'avait ni intérêt ni qualité pour former contredit, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X..., ès qualités, aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quatre juin deux mille treize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Gadiou et Chevallier, avocat aux Conseils, pour M. X...
Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR dit que Maître X... en sa qualité de commissaire à l'exécution du plan de la société SNP BOAT SERVICE, qui n'avait pas qualité pour agir à l'encontre des sociétés OVERMARINE en indemnisation du préjudice résultant pour la SNP BOAT SERVICE de la résiliation des contrats de partenariat et n'avait pas formulé contre ces sociétés de demande autonome en sa qualité de commissaire à l'exécution du plan, n'avait ni intérêt ni qualité pour frapper seul de contredit le jugement attaqué, et D'AVOIR, en conséquence, rejeté comme irrecevable le contredit formé par Maître X... ès-qualités contre le jugement rendu le 16 juin 2011 ;
AUX MOTIFS QUE « si le commissaire à l'exécution du plan a qualité, en application de l'article L. 626-25 du code de commerce, pour engager des actions dans l'intérêt collectif des créanciers, il n'a pas qualité pour représenter le débiteur redevenu in bonis ; qu'ainsi, s'il a qualité pour intenter des actions tendant à reconstituer l'actif du débiteur dans l'intérêts des créanciers et à agir dans le cadre d'une action en responsabilité délictuelle pour obtenir le paiement des sommes réparant le préjudice collectif des créanciers résultant d'une diminution d'actif ou d'une aggravation de passif, il ne peut en revanche agir contre un cocontractant du débiteur qu'il ne représente pas ; qu'en l'espèce, Me X... a demandé devant les premiers juges, agissant sur le fondement des articles 1382 et 1383 du code civil, de « dire et juger que le préjudice des créanciers sera intégralement et utilement réparé par l'allocation au bénéfice du débiteur des sommes qu'il réclame à l'encontre des sociétés OVERMARINE DUE SARL et OVERMARINE SPA, l'accueil de ces demandes reconstituant l'actif du débiteur et le gage des créanciers » ; qu'il n'a formulé aucune demande de condamnation des défendeurs à lui verser, ès-qualités, lesdites sommes ;qu'il précise demander ainsi « la réparation en nature du préjudice causé aux créanciers » en reconstituant « le patrimoine de la société en sauvegarde à leur égard » ; que cependant cette action du commissaire à l'exécution du plan de la société SNP, qui ne tend qu'à obtenir le paiement de sommes au seul profit de la société SNP, débiteur in bonis, de l'exact montant auquel la société SNP évalue son préjudice personnel résultant de la résiliation sans préavis de contrats de partenariat dont elle demande elle-même le paiement aux sociétés OVERMARINE, ne peut s'analyser en une action tendant à la défense des intérêts collectifs des créanciers, préjudice particulier distinct de celui subi par la SNP BOAT SERVICE dont Me X... ne caractérise pas en tout état de cause l'existence ; que par ces demandes, Me X..., ès-qualités, s'est en réalité contenté de soutenir celles présentées par le débiteur ; qu'il s'ensuit que Me X..., ès-qualités de commissaire à l'exécution du plan de la SNP BOAT SERVICE, n'avait pas qualité pour agir à l'encontre des sociétés OVERMARINE DUE et OVERMARINE SPA en indemnisation du préjudice subi par la SNP résultant de la résiliation des contrats de partenariat ; qu'il n'avait pas plus, dès lors, intérêt ni qualité pour frapper seul de contredit le jugement attaqué ; que le contredit formé par Me X..., ès-qualités, sera en conséquence rejeté comme étant irrecevable, sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens des parties » (arrêt p. 7) ;
ALORS QUE le commissaire à l'exécution du plan est habilité à engager des actions dans l'intérêt collectif des créanciers ; que, dans l'hypothèse d'une rupture brutale et non justifiée des relations commerciales unissant le débiteur et un tiers, quand une part prépondérante de l'activité du débiteur reposait sur l'existence et la pérennité de ces relations contractuelles, le commissaire à l'exécution du plan, chargé de veiller à la bonne exécution de ce plan, et d'engager les actions dans l'intérêt collectif des créanciers, a qualité pour exercer, aux côtés du débiteur in bonis, maître de ses biens depuis l'adoption du plan de continuation, une action en responsabilité à l'encontre du tiers cocontractant fautif afin de reconstituer l'actif du débiteur et de sauvegarder le gage des créanciers ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé l'article L. 626-25 du code de commerce.