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29/05/2013 | FRANCE | N°12-10027

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 29 mai 2013, 12-10027


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur la première branche du second moyen :
Vu les articles 1108 et 1134 du code civil, ensemble l'article 1397 du même code ;
Attendu qu'aux termes du sixième alinéa du dernier des textes susvisés, le changement du régime matrimonial a effet entre les parties à la date de l'acte ou du jugement qui le prévoit ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... et Mme Y... se sont mariés le 30 juin 2005 après avoir adopté le régime de la séparation de biens ; que par acte notarié du 30 octobre 20

07, ils sont convenus d'adjoindre à leur régime une société d'acquêts, seul le m...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur la première branche du second moyen :
Vu les articles 1108 et 1134 du code civil, ensemble l'article 1397 du même code ;
Attendu qu'aux termes du sixième alinéa du dernier des textes susvisés, le changement du régime matrimonial a effet entre les parties à la date de l'acte ou du jugement qui le prévoit ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... et Mme Y... se sont mariés le 30 juin 2005 après avoir adopté le régime de la séparation de biens ; que par acte notarié du 30 octobre 2007, ils sont convenus d'adjoindre à leur régime une société d'acquêts, seul le mari apportant à celle-ci des biens présents désignés et les acquêts à venir, l'épouse ne contribuant en aucune manière à l'extension de cette société ; que le 27 janvier 2009, M. X... a assigné son épouse pour en voir prononcer la nullité ;
Attendu que pour annuler l'acte du 30 octobre 2007, après avoir relevé que M. X... avait une parfaite connaissance des biens et droits de la société d'acquêts ceux-ci étant parfaitement identifiables tant dans leur composition que dans leur nature, l'arrêt retient que la modification du régime matrimonial ne peut être convenue par les époux que dans l'intérêt de la famille, lequel fait l'objet d'une appréciation d'ensemble, et, qu'en l'espèce, la société d'acquêts constituée par les parties ne satisfait que les seuls intérêts de Mme Y... alors qu'elle est excessivement défavorable à M. X..., en sorte que la condition posée par l'article 1397 du code civil tenant à la satisfaction de l'intérêt familial n'est pas remplie ; qu'il en déduit que ce dernier est bien fondé à réclamer l'annulation de l'acte litigieux ;
Qu'en statuant ainsi alors que le changement de régime matrimonial ayant produit effet s'impose à chacun des époux, de sorte que, à défaut d'invoquer un vice du consentement ou une fraude, aucun d'eux ne peut être admis à le contester sur le fondement de l'article 1397 du code civil, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 2 novembre 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Grenoble ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. X... et le condamne à payer à Mme Y... la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf mai deux mille treize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Gaschignard, avocat aux Conseils, pour Mme Y....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
:
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir annulé l'acte notarié en date du 30 octobre 2007 emportant constitution d'une société d'acquêts entre Monsieur X... et Madame Y... ;
AUX MOTIFS QUE par conclusions signifiées le 9 mars 2011, Madame Y... demande à la cour, au visa de l'article 1397 du Code civil de confirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris, de condamner Monsieur X... au paiement d'une somme de 7.500 euros pour frais non répétibles d'instance, de le condamner aux entiers dépens, ceux d'appel devant être distraits au profit de son avoué ; qu'elle fait valoir à l'appui que l'acte est valable pour avoir été reçu plus de deux ans après le mariage, ne pas contrevenir aux intérêts de la famille, ne pas nécessiter de liquidation préalable du régime matrimonial antérieur et s'inscrire dans le cadre de la liberté laissée aux époux en matière de conventions matrimoniales, en rappelant que la lésion n'est pas une cause de rescision des conventions créant les sociétés d'acquêts et que celle litigieuse n'est pas contraire aux bonnes moeurs ; qu'elle ajoute que l'article 1844-1 du Code civil est inapplicable en l'espèce, la société d'acquêts n'ayant de société que le nom et indique qu'il existe un aléa résultant de la clause de tontine y insérée qui accroît le patrimoine du dernier vivant, ce qui fait obstacle à tout caractère lésionnaire ; que la société d'acquêts constituée par les parties ne satisfait que les seuls intérêts de Madame Y... alors qu'elle est excessivement défavorable à Monsieur X... en sorte que la condition posée par l'article 1397 tenant à la satisfaction de l'intérêt familial n'est pas remplie ;
ALORS QUE tenu d'analyser les prétentions et moyens proposés par les parties, le juge doit se référer aux dernières conclusions produites ; qu'en se prononçant au visa des conclusions produites le 9 mars 2011 par Madame Y... quand celle-ci avait produit le 16 septembre 2011 ses dernières conclusions, dont la teneur différait substantiellement des précédentes, la cour d'appel a violé les articles 455 et 954 du code de procédure civile.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
:
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir annulé l'acte notarié en date du 30 octobre 2007 emportant constitution d'une société d'acquêts entre Monsieur X... et Madame Y... ;
AUX MOTIFS QUE selon l'article 1397 du Code civil, la modification du régime matrimonial ne peut être convenue par les époux que dans l'intérêt de la famille ; que celui-ci n'est pas défini par le texte, en sorte qu'il convient là encore de procéder à une appréciation d'ensemble, à l'effet de déterminer si la création de la société d'acquêts entre les parties satisfait ou non à cette condition ; qu'en premier lieu, il convient de relever qu'alors qu'une telle société a pour objet de mettre en commun les acquêts respectifs des époux, force est de constater qu'au cas particulier, seuls ceux de Monsieur X... ont été apportés dans celle constituée avec Madame Y... qui n'a procédé à aucun apport ; qu'en outre, dans l'hypothèse de biens à échoir à raison d'une succession, d'une donation ou d'un legs, les dettes qui le grèveraient resteraient propres à Monsieur X... si elles devaient excéder leur valeur, alors même qu'ils tomberaient dans la société ; qu'en second lieu si le souci d'assurer la situation pécuniaire du conjoint survivant peut être de nature à répondre à un intérêt familial justifiant la modification du régime matrimonial, ce principe trouve sa limite dans le fait que la situation nouvellement créée ne doit pas être excessivement défavorable à l'autre partie, la satisfaction de l'intérêt d'un membre de la famille ne pouvant être assurée au prix d'une trop grande atteinte portée aux intérêts de l'autre époux ; qu'au cas particulier, dans l'hypothèse du pré-décès de Monsieur X..., Madame Y..., de neuf ans sa cadette, deviendrait, par le jeu de la clause d'attribution intégrale de la société d'acquêts au survivant insérée à l'acte, attributaire de toute la société, qui comprend la quasi-totalité de l'important patrimoine de Monsieur X..., à l'exception de ses quelques biens à caractère personnel alors qu'en cas de pré-décès de l'épouse, Monsieur X... ne recouvrerait que les biens dont il a fait apport à la société litigieuse ; qu'il résulte de ce qui précède que la société d'acquêts constituée par les parties ne satisfait que les seuls intérêts de Madame Y... alors qu'elle est excessivement défavorable à Monsieur X... en sorte que la condition posée par l'article 1397 tenant à la satisfaction de l'intérêt familial n'est pas remplie ;
1°- ALORS QUE l'époux signataire d'une convention portant changement de régime matrimonial ne peut se prévaloir d'une prétendue contrariété à l'intérêt de la famille pour, hors de tout vice du consentement et de tout motif d'ordre public, demander l'annulation de cette convention ; qu'en prononçant, à la demande de Monsieur X..., la nullité de l'acte du 30 octobre 2007 au motif que celui-ci n'aurait pas été passé dans l'intérêt de la famille, la cour d'appel a violé les articles 1108 et 1397 du Code civil ;
2°- ALORS QUE les époux organisent librement leur régime matrimonial sous la seule réserve de ne pas porter atteinte à l'intérêt de leur famille ; que le souci d'assurer la situation pécuniaire de l'un des conjoints répond à intérêt familial de nature à justifier la modification du régime matrimonial, une telle modification n'étant pas nulle du seul fait qu'elle apporte des avantages matériels à un seul des conjoints et est susceptible de léser l'autre ; qu'en prononçant la nullité de l'acte du 30 octobre 2007 au motif qu'elle apportait des avantages matériels à la seule épouse et au détriment de l'intérêt du mari, la cour d'appel, qui s'est prononcée par des motifs impropres à caractériser une atteinte à l'intérêt de la famille, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1397 du Code civil ;
3°- ALORS QUE la modification du régime matrimonial peut avoir pour cause et pour objet la volonté de l'un des époux de gratifier l'autre ; qu'en décidant que l'acte du 30 octobre 2007 était contraire à l'intérêt de la famille au motif que la société d'acquêts était « excessivement défavorable à Monsieur X... » sans répondre aux conclusions qui faisaient valoir que le mari avait librement voulu gratifier son épouse après des années de vie commune, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 12-10027
Date de la décision : 29/05/2013
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Analyses

REGIMES MATRIMONIAUX - Mutabilité judiciairement contrôlée - Changement de régime - Convention entre époux - Nullité - Conditions - Détermination - Portée

REGIMES MATRIMONIAUX - Mutabilité judiciairement contrôlée - Changement de régime - Effets - Effets à l'égard des époux - Point de départ - Détermination - Portée

Le changement du régime matrimonial, qui a effet entre les parties à la date de l'acte ou du jugement qui le prévoit, s'impose à chacun des époux de sorte que, à défaut d'invoquer un vice du consentement ou une fraude, aucun d'eux ne peut être admis à le contester sur le fondement de l'article 1397 du code civil


Références :

articles 1108 et 1134 du code civil, ensemble l'article 1397 du même code

Décision attaquée : Cour d'appel de Grenoble, 02 novembre 2011

Sur les conditions de la nullité de la convention de changement de régime matrimonial de deux époux, à rapprocher :1re Civ., 17 février 2010, pourvoi n° 08-14441, Bull. 2010, I, n° 42 (rejet)

arrêt cité. Sur le point de départ des effets du changement de régime matrimonial dans les rapports entre époux, à rapprocher :1re Civ., 25 octobre 2005, pourvoi n° 03-13226, Bull. 2005, I, n° 392 (rejet)


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 29 mai. 2013, pourvoi n°12-10027, Bull. civ. 2013, I, n° 115
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2013, I, n° 115

Composition du Tribunal
Président : M. Charruault
Avocat général : Mme Petit (premier avocat général)
Rapporteur ?: M. Savatier
Avocat(s) : SCP Gaschignard, SCP Laugier et Caston

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.10027
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