LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique ;
Vu l'article 1998 du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que les époux X... ayant décidé de vendre un garage, leur notaire, M. Y..., a établi en faveur de M. Z..., avec possibilité de substitution, un projet de promesse de vente, non signé, mentionnant un prix de 25 000 euros qu'il a adressé au notaire de ce dernier ; que devant le refus des époux X... de signer la vente en faveur de la SCI VAGRJ se présentant comme substituée dans les droits de M.Gossa, cette dernière les a assignés pour faire juger que la vente était parfaite ;
Attendu que, pour accueillir cette demande, l'arrêt retient que dans divers courriers que M. Y... a adressés à son confrère ou à la mairie il s'est présenté comme le mandataire des époux X... et qu'il ressort de l'ensemble des éléments un accord sur la chose et le prix;
Qu'en statuant ainsi, alors que le mandat apparent ne peut être admis pour l'établissement d'un acte par un notaire instrumentaire avec le concours d'un confrère, les deux officiers publics étant tenus de procéder à la vérification de leurs pouvoirs respectifs, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 25 octobre 2011, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier ;
Condamne la SCI VAGRJ aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la SCI VAGRJ à payer aux époux X... la somme globale de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt mars deux mille treize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par Me Le Prado, avocat aux Conseils, pour M. Michel X..., Mme Marie A...
Il est fait grief à l'arrêt attaqué :
D'AVOIR dit et jugé parfaite le vente entre les époux X... et la SCI VAGRJ ;
AUX MOTIFS QU'« il convient de relever en premier lieu que les époux X... ne contestent pas la réalité du projet de vente d'un box, étant rappelé que le consentement des parties n'est soumis à aucune condition de forme, le juge disposant d'un pouvoir souverain pour apprécier l'existence de l'accord ; en premier lieu que c'est à tort que les intimés soutiennent que le notaire n'est jamais le mandataire de ses clients, dès lors qu'il existe des éléments qui permettent de faire légitimement penser à l'autre partie qu'il avait le pouvoir de les engager ; qu'en effet, dans les divers courriers qu'il a adressé à son confrère ou à la mairie de Saint Laurent du Var Maître Y... s'est toujours présenté comme le mandataire des époux X... et ce sans aucune réserve, écrivant notamment à Maître B..., notaire de l'acquéreur, dans un fax du 13 novembre 2008 : "mon client est en mesure de régulariser la vente" ; par ailleurs que, contrairement à ce que prétendent les époux X..., se fondant il est vrai sur un courrier que leur a adressé Maître Y... après l'introduction de l'instance devant le Tribunal et qui est en contradiction avec ses correspondances précédentes, aucun des courriers du notaire ne met en évidence un désaccord sur le prix ; qu'il suffira à cet égard de relever que le projet de compromis adressé par l'étude de Maître Y... par mail du 2 octobre 2008 mentionne un prix de vente de 25.000 € ; que, dans son courrier du 13 novembre 2008, il indique seulement que seules quatre pièces manquent encore, mais que, "comme prévu", la signature de l'acte authentique pourra intervenir le 17 novembre ; que, bien plus, dans la déclaration d'intention d'aliéner qu'il adresse à la mairie de Saint-Laurent du Var, au nom des époux X..., le 13 novembre 2008, il mentionne, là encore, le prix de vente de 25.000 € ; qu'il ressort de l'ensemble de ces éléments un accord sur la chose et le prix au sens de l'article 1583 ; que c'est en vain que Monsieur et Madame X... soutiennent qu'ils ne connaissent que Monsieur Z... et non la société V.A.G.R.J. le projet de compromis de vente établi par leur notaire, Maître Y..., prévoyant expressément une faculté de substitution au profit de toute personne physique ou morale que l'acquéreur, Monsieur Z..., se réserve de désigner ; qu'il convient en conséquence de réformer la décision querellée et d'accueillir la demande principale de la SCI V.A.G.R.J. » ;
ALORS QUE si le mandant peut être engagé sur le fondement d'un mandat apparent, même en l'absence d'une faute susceptible de lui être reprochée, il faut pour cela que la croyance du tiers à l'étendue des pouvoirs du mandataire soit légitime, ce caractère supposant que les circonstances autorisaient le tiers à ne pas vérifier les limites exactes de ces pouvoirs ; que cette croyance cesse d'être légitime lorsqu'un acte est établi par un notaire instrumentaire avec le concours d'un confrère, les deux officiers publics étant tenus de procéder à la vérification de leurs pouvoirs respectifs ; qu'en l'espèce, pour déclarer parfaite la vente entre les époux X... et la SCI VAGRJ, la Cour d'appel a décidé qu'il existait des éléments qui permettaient de faire légitimement penser à la SCI VAGRJ, par l'intermédiaire de Maître B..., notaire, que Maître Y..., notaire, avait le pouvoir d'engager les époux X... et notamment de fixer le prix de vente du bien ; qu'en reconnaissant de la sorte l'existence d'un mandat apparent, qui aurait permis de rendre valable la détermination du prix, sans prendre en compte l'obligation qu'avait Maître B... de vérifier les pouvoirs de son confrère et en ignorant ainsi la condition de légitimité de la croyance créée, la Cour d'appel a violé, par refus d'application, les principes du mandat apparent et l'article 1998 du Code civil.