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13/02/2013 | FRANCE | N°12-84311

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 13 février 2013, 12-84311


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur les pourvois formés par :

- Le procureur général près la cour d'appel d'Amiens,
- L'Etat français, partie civile,

contre l'arrêt de ladite cour d'appel, chambre correctionnelle, en date du 9 novembre 2011, qui, dans la procédure suivie contre M. Jean-Yves X... et Madame Francine Y..., épouse X..., du chef d'escroquerie, a annulé des pièces de la procédure, renvoyé le ministère public à mieux se pourvoir et déclaré irrecevable la constitution de partie civile de l'Etat fra

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Joignant les pourvois en raison de la connexité ;

I-Sur le pourvoi du pro...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur les pourvois formés par :

- Le procureur général près la cour d'appel d'Amiens,
- L'Etat français, partie civile,

contre l'arrêt de ladite cour d'appel, chambre correctionnelle, en date du 9 novembre 2011, qui, dans la procédure suivie contre M. Jean-Yves X... et Madame Francine Y..., épouse X..., du chef d'escroquerie, a annulé des pièces de la procédure, renvoyé le ministère public à mieux se pourvoir et déclaré irrecevable la constitution de partie civile de l'Etat français ;

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;

I-Sur le pourvoi du procureur général :

Attendu qu'aucun moyen n'est produit ;

II-Sur le pourvoi de l'Etat français :

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 313-1 du code pénal, 385, 591 et 593 du code de procédure pénale, 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l'homme, défaut de motifs ;

" en ce que, l'arrêt attaqué a annulé les procès-verbaux de placement en garde à vue et les procès-verbaux d'audition ainsi que les convocations du 19 mai 2009, puis ordonné la cancellation de certaines pièces, prononcé en conséquence l'annulation du jugement du 9 septembre 2010, renvoyé le ministère public à se mieux pourvoir et déclaré irrecevable la constitution de partie civile de l'État Français ;

" aux motifs tout d'abord qu'en l'état des débats s'étant tenus devant la cour, le 12 octobre 2011, il est constant que les gardes à vue sous lesquelles ont été placés les deux prévenus par les enquêteurs de la DIPJ de Lille-antenne d'Amiens se sont déroulées conformément aux prescriptions du code de procédure pénale, alors en vigueur, et sous le contrôle du parquet d'Amiens, tandis que Mme Y... a pu, comme elle en avait formulé la demande, s'entretenir, le 18 mai 2009, à 18 heures 20, avec son conseil, pour la durée réglementaire ; qu'il reste pour autant, tout aussi constant, au regard des derniers développements de la jurisprudence en la matière, et notamment la décision du Conseil constitutionnel en date du 30 juillet 2010 et les arrêts de la cour de cassation rendus les 15 avril 2011, que les prévenus ont été entendus par les enquêteurs sous le régime de la garde à vue, sans avoir pu bénéficier de l'assistance effective du conseil de leur choix, ni de s'être vus notifier leur droit de se taire, de sorte que les procès verbaux de placement en garde à vue et d'audition pendant ladite garde à vue seront annulés, faute de répondre aux exigences de la convention européenne des droits de l ‘ homme, en ce que les prévenus entendus sans l'assistance d'un avocat et n'ayant pas renoncé expressément à cette assistance, ont, de ce fait, été privés de leurs droits à un procès équitable ;

" et aux motifs encore que, s'agissant des perquisitions effectuées durant les gardes à vue, ces opérations ont été menées, le 18 mai 2009, au siège de la SARL Auto Plus sise à ... de sorte que, si les personnes gardées à vue n'ont pas été, pour ces actes de procédure intéressant ladite Sarl, assistés d'un conseil, il n'est pas rapporté que ces diligences aient été en lien direct avec lesdites gardes à vue, ni qu'elles aient pour support nécessaire lesdits placements en garde à vue, alors même qu'il s'agissait d'obtenir la communication de documents commerciaux ayant vocation à être communiqués pour faire preuve de droits ou obligations ; que ces documents placés sous main de justice ont été trouvés au siège de l'entreprise, et non au domicile des prévenus, étant relevé que la société Auto Plus n'était pas mise en cause en qualité de personne morale pénalement responsable ; qu'aussi, les prévenus ne sauraient se plaindre d'une mesure d'investigation qui ne les concernait pas à titre personnel, ni ne justifient d'une atteinte portée aux droits de la défense, les concernant, de sorte que l'annulation de cette mesure d'investigation, cotée PV 2008/ 00111/ 09, ne saurait être à bon droit être prononcée, et ce d'autant que ladite perquisition, telle que réalisée, n'avait pas pour support nécessaire le placement en garde à vue de M. X..., ce dernier ayant été interrogé après ladite perquisition ; que concernant les convocations par officier de police judiciaire, notifiées aux prévenus le 19 mai 2009, en vue de leur comparution devant le tribunal correctionnel d'Amiens, à son audience du 19 octobre 2009, il sera observé que les auditions des personnes placées en garde à vue n'ont été suivies d'aucune autre investigation, et notamment de confrontations avec d'anciens clients ou partenaires commerciaux, ni du recueil des observations éventuelles de l'administration fiscale ou encore de vérifications concernant la situation juridique, financière et fiscale de la SARL Auto Plus, au demeurant non mise en cause en qualité de personne morale pénalement responsable, en application des dispositions de l'article 121-2 du code pénal, alors applicable au temps des faits reprochés... qu'en l'état des investigations ainsi clôturées par les auditions des personnes gardées à vue, il apparaît que le parquet d'Amiens a retenu la prévention d'escroquerie, telle qu'analysée et détaillée par le rapport de synthèse établi le 10 juin 2009 par les enquêteurs ; aussi lesdites convocations par officier de police judiciaire doivent-elles être considérées comme ayant eu pour support nécessaire les procès-verbaux des auditions de prévenus au cours de leur garde à vue, leur nullité sera en conséquence constatée, de même que celle du jugement entrepris, le ministère public étant renvoyé à se pourvoir aux fins qu'il lui appartiendra ;

" 1°) alors qu'en application de l'article 385 du code de procédure pénale, qui est d'application générale, les exceptions de nullité, en tant qu'elles visent la saisine du tribunal correctionnel et les actes antérieurs à cette saisine, doivent être invoquées, à peine d'irrecevabilité in limine litis et avant toute défense au fond ; qu'en l'espèce, les juges du second degré constatent que les exceptions de nullité ont été invoquées par les prévenus dans le cadre de conclusions du 5 avril 2011 sans avoir été invoquées devant les premiers juges (p. 5, alinéa 3), ce qui résulte également de l'examen du jugement et des pièces de procédure antérieures au jugement ; qu'il était dès lors exclu que les juges du fond considèrent les exceptions de nullité comme recevables et admettent d'en examiner le bien fondé ; qu'en décidant le contraire, les juges du fond ont violé les textes susvisés et notamment l'article 385 du code de procédure pénale ;

" 2°) alors que, l'obligation faite aux parties d'invoquer l'exception de nullité in limine litis, avant toute défense au fond, s'impose quand bien même la consécration jurisprudentielle de la règle susceptible de fonder l'exception de nullité ne serait intervenue que postérieurement à la date des débats devant le premier juge ; que de ce point de vue également, l'arrêt attaqué a été rendu en violation des textes susvisés et notamment de l'article 385 du code de procédure pénale ;

" 3°) alors que, le prévenu, qui n'a pas observé l'obligation où il se trouve de soulever l'exception de nullité in limine litis et avant toute défense au fond, est forclos à le faire, quel que soit le contenu de la règle sur le fondement de laquelle l'irrégularité peut être constatée ou l'objet de la formalité qui n'aurait pas été respecté ; qu'en décidant le contraire, les juges du fond ont de nouveau violé les textes susvisés ;

" 4°) alors que, le droit au procès équitable est suffisamment garanti dès lors que les faits matériels permettant d'établir l'irrégularité étant apparus antérieurement aux débats devant le juge de première instance, le prévenu a été en mesure, à cette date, d'articuler une exception de nullité ; que tel est le cas en l'espèce dans la mesure où, en toute hypothèse, à la date des débats devant le premier juge (10 juin 2010), les prévenus pouvaient poser une question prioritaire de constitutionnalité, en invoquant l'inconstitutionnalité des dispositions législatives relatives à la garde à vue pour inviter le juge correctionnel soit à surseoir à statuer, une question similaire ayant d'ores et déjà été posée, soit à renvoyer la question devant la chambre criminelle de la Cour de cassation ; que de ce point de vue également, l'arrêt attaqué doit être censuré pour violation des textes susvisés " ;

Vu l'article 385 du code de procédure pénale ;

Attendu que, selon ce texte, les exceptions de nullité en tant qu'elles visent la saisine du tribunal correctionnel et les actes antérieurs à cette saisine, doivent être présentées, avant toute défense au fond ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que M. X... et Mme Y... ont présenté, pour la première fois en cause d'appel, une demande d'annulation des procès verbaux de leurs auditions et des actes qui en étaient le support nécessaire, aux motifs qu'ils n'avaient pu bénéficier de l'assistance d'un avocat au cours de leur garde à vue et que le tribunal n'avait pu être valablement saisi de ces exceptions, l'évolution de la jurisprudence de la Cour de cassation étant postérieure à la date de l'audience de jugement ;

Attendu que, pour déclarer cette demande recevable et y faire droit, l'arrêt prononce par les motifs repris au moyen ;

Mais attendu qu ‘ en statuant ainsi, la cour d'appel a méconnu les texte et principe ci-dessus rappelés ;

D'où il suit que la cassation est encourue ;

Et attendu que si, par application de l'article 567 du code de procédure pénale, la partie civile ne peut se pourvoir que quant aux dispositions relatives à ses intérêts civils, cette restriction aux effets de son pourvoi n'a pas lieu lorsque, comme en l'espèce, il n'a été statué que sur la validité de la poursuite ; qu'en conséquence, la juridiction de renvoi sera tenue de statuer sur la prévention tant du point de vue pénal que du point de vue civil ;

Par ces motifs :

CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, tant pénales que civiles, l'arrêt susvisé de la cour d'appel d'Amiens, en date du 9 novembre 2011, et pour qu'il soit à nouveau jugé conformément à la loi,

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel d'Amiens autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel d'Amiens et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Louvel président, Mme Ract-Madoux conseiller rapporteur, M. Dulin conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Leprey ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 12-84311
Date de la décision : 13/02/2013
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

CASSATION - Pourvoi - Pourvoi de la partie civile - Arrêt n'ayant statué que sur la validité de la poursuite

Si, par application de l'article 567 du code de procédure pénale, la partie civile ne peut se pourvoir qu'à l'encontre des dispositions relatives à ses intérêts civils, cette restriction aux effets de son pourvoi n'a pas lieu, lorsqu'il n'a été statué que sur la validité de la poursuite. La juridiction de renvoi est donc tenue de statuer tant du point de vue pénal que du point de vue civil


Références :

article 567 du code de procédure pénale

Décision attaquée : Cour d'appel d'Amiens, 09 novembre 2011

Sur l'étendu du pourvoi de la partie civile lorsqu'il n'a été statué que sur la validité des poursuites, dans le même sens que :Crim., 17 mars 1993, pourvoi n° 92-82348, Bull. crim. 1993, n° 124 (2) (cassation)

arrêt cité ;Crim., 6 février 2001, pourvoi n° 00-84692, Bull. crim. 2001, n° 34 (2) (cassation)

arrêt cité


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 13 fév. 2013, pourvoi n°12-84311, Bull. crim. criminel 2013, n° 40
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2013, n° 40

Composition du Tribunal
Président : M. Louvel
Avocat général : M. Bonnet
Rapporteur ?: Mme Ract-Madoux
Avocat(s) : Me Foussard

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.84311
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