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28/11/2012 | FRANCE | N°11-61192

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 28 novembre 2012, 11-61192


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon le jugement attaqué (tribunal d'instance de Villejuif, 17 novembre 2011), que lors du premier tour des élections des membres titulaires du comité d'entreprise de la société Compagnie Corsair, le syndicat Union française des pilotes de ligne affilié à la CFTC (UFPL-CFTC) a obtenu au moins 10 % des suffrages exprimés dans le collège spécifique constitué en application de l'article L. 6524-2 du code des transports tandis que le Syndicat général des compagnies aériennes, également affilié à l

a CFTC (SGCA-CFTC), obtenait lui aussi un tel score sur l'ensemble des c...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon le jugement attaqué (tribunal d'instance de Villejuif, 17 novembre 2011), que lors du premier tour des élections des membres titulaires du comité d'entreprise de la société Compagnie Corsair, le syndicat Union française des pilotes de ligne affilié à la CFTC (UFPL-CFTC) a obtenu au moins 10 % des suffrages exprimés dans le collège spécifique constitué en application de l'article L. 6524-2 du code des transports tandis que le Syndicat général des compagnies aériennes, également affilié à la CFTC (SGCA-CFTC), obtenait lui aussi un tel score sur l'ensemble des collèges ; que l'UFPL-CFTC a désigné un délégué syndical par lettre du 14 juin 2011 et le SGCA-CFTC trois délégués syndicaux par lettre du 8 août suivant ; que l'employeur a contesté ces désignations au motif qu'au regard de l'effectif de l'entreprise, le nombre cumulé de délégués syndicaux des organisations syndicales UFPL et SGCA, toutes deux affiliées à la CFTC, ne pouvait être supérieur à trois ;

Attendu que la société fait grief au jugement de la débouter de ses demandes tendant à annuler l'une des désignations litigieuses en appliquant les règles statutaires, ou à défaut à annuler les trois désignations opérées par lettre du 8 août 2011 en application de la règle chronologique et en enjoignant au SGCA de désigner deux délégués syndicaux dans un délai de quinze jours à compter du prononcé du jugement, alors, selon le moyen :
1°/ qu'ayant constaté que le syndicat catégoriel UFPL et le syndicat inter-catégoriel SGCA étaient tous deux affiliés à la même organisation CFTC, le juge d'instance ne pouvait, sans violer les articles L. 2143-3 et R. 2143-2 ainsi que l'article L. 2143-4 du code du travail qui autorise la désignation d'un délégué syndical supplémentaire dans les entreprises de plus de cinq cents salariés, refuser de constater que le nombre cumulé de délégués syndicaux ne pouvait être supérieur à trois au sein de l'entreprise Corsair et d'annuler en conséquence l'une des quatre désignations litigieuses ;
2°/ qu'en vertu de l'article L. 6524-2 du code des transports, "par dérogation aux articles L. 2314-8 et L. 2314-11 du code du travail, dans les entreprises de transport et de travail aérien, lorsque le nombre de personnels navigants techniques est au moins égal à vingt-cinq au moment de la mise en place ou du renouvellement des délégués du personnel, de la délégation unique du personnel ou des représentants du personnel au comité d'entreprise, cette catégorie constitue un collège spécial" ; que ce texte n'a ni pour objet ni pour effet de déplafonner le nombre de délégués syndicaux déterminé par la loi, de sorte qu'en considérant qu'il s'agissait d'une dérogation aux articles L. 2143-3, L. 2143-4 et R. 2143-2 du code du travail, le juge d'instance a violé l'ensemble des textes susvisés ;
3°/ que selon l'alinéa 2 de l'article L. 6524-2 du code des transports, "lorsque dans un établissement de l'entreprise il est constitué un collège électoral en application de l'alinéa précédent, ce collège est représenté au comité central d'entreprise par un délégué titulaire et un délégué suppléant" ; que cette disposition n'est dérogatoire qu'en ce qui concerne la représentation au comité central d'entreprise et ne saurait être étendue à l'institution distincte des délégués syndicaux ; qu'en se référant à cette dernière disposition, le juge d'instance s'est déterminé par des motifs inopérants, privant ainsi sa décision de base légale au regard tant du texte susvisé que de l'article L. 2143-3 du code du travail ;
Mais attendu que l'acquisition de la qualité d'organisation syndicale représentative par un syndicat représentant le personnel navigant technique résultant de l'application des dispositions combinées des articles L. 6524-2 et L. 6524-3 du code des transports emporte nécessairement le droit à une représentation propre de ce syndicat qui ne se confond pas avec celle dont peut disposer un syndicat inter-catégoriel affilié à la même confédération ; qu'il en résulte qu'un syndicat représentant le personnel navigant technique, dès lors qu'il est représentatif, peut désigner un nombre de délégués syndicaux au moins égal à un et correspondant à l'effectif de la catégorie de personnel qu'il représente, sans que cette ou ces désignations ne s'imputent sur le nombre de délégués syndicaux dont peut disposer, en fonction de l'effectif total de l'entreprise, un syndicat inter-catégoriel affilié à la même confédération ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Corsair à payer aux défendeurs la somme globale de 2 500 euros ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit novembre deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat aux Conseils, pour la société Corsair
Le pourvoi reproche au jugement attaqué d'AVOIR débouté la société CORSAIR de ses demandes tendant à constater que le nombre cumulé de délégués syndicaux des organisations syndicales SGCA et UFPL, toutes deux affiliées à la CFTC, ne peut être supérieur à trois, à voir en conséquence annuler l'une des désignations litigieuses en appliquant les règles statutaires, ou à défaut à voir annuler les trois désignations opérées par courrier du 8 août 2011 reçu le 10 août 2011 en application de la règle chronologique et en enjoignant l'UPCI-CFTC (SGCA) de désigner deux délégués syndicaux dans un délai de 15 jours à compter du prononcé du jugement ;
AUX MOTIFS QUE « par courrier daté du 14 juin 2011, L'UNION FRANÇAISE DES PILOTES DE LIGNE (l'UFPL), organisation syndicale affiliée à la CFTC, a procédé à la désignation de Monsieur Nicolas X... en qualité de délégué syndical ; qu'aux termes d'un courrier daté du 8 août 2011, le SYNDICAT GENERAL DES COMPAGNIES AERIENNES-CFTC TRANSPORTS (le syndicat SGCA) a notamment désigné Madame Anne-Véronique Y..., Monsieur Gary Z... et Madame Nathalie A... en qualité de délégués syndicaux (p.2) ; … ; que si une confédération syndicale et les organisations syndicales qui lui sont affiliées ne peuvent, en application du principe d'unicité de représentation syndicale et d'égalité de traitement des syndicats, désigner ensemble un nombre de délégués syndicaux supérieur à celui prévu par la loi, il n'en va pas de même, soit lorsqu'une convention ou un accord collectif exprès prévoit des dérogations plus favorables, soit lorsque la loi a instauré une dérogation ; qu'aux termes de l'article L6524-2 du code des transports, applicable en l'espèce, par dérogation aux articles L2314-8 et L2324-11 du code du travail, dans les entreprises de transport et de travail aérien, lorsque le nombre de personnels navigants techniques est au moins égal à 25 au moment de la mise en place du renouvellement des délégués du personnel, cette catégorie constitue un collège spécial. Lorsque dans un ou plusieurs établissements de l'entreprise il est constitué un collège électoral en application de l'alinéa précédent, ce collège est représenté au comité central d'entreprise par un délégué titulaire et un délégué suppléant ; qu'en l'espèce, en application des articles L2143-3 et 12 du code du travail, compte tenu des effectifs de la société CORSAIR, chaque syndicat représentatif dans la société peut désigner deux délégués syndicaux maximum, sous réserve de l'article L2143-4 ; qu'au vu de ce texte, et des résultats aux dernières élections professionnelles, il est établi et non contesté que le syndicat SGCA-CFTC dispose de la possibilité de désigner un délégué syndical supplémentaire, soit trois délégués au total ; que par ailleurs, la disposition dérogatoire susvisée autorise le syndicat UFPL-CFTC, bien qu'affilié à la même confédération nationale que le syndicat SGCA, à procéder à la désignation de deux délégués syndicaux, cumulativement avec les délégués syndicaux désignés par ce dernier, au-delà du seuil légal s'agissant d'une représentation autonome ; que par conséquent, la SA Compagnie CORSAIR est déboutée de sa demande d'annulation des désignations de Madame Anne-Véronique Y..., Monsieur Gary Z... et Madame Nathalie A... en qualité de délégués syndicaux de la SGCA d'une part, de celle de Monsieur Nicolas X... en qualité de délégué syndical de l'UFPL d'autre part » ;
ALORS, D'UNE PART, QU'ayant constaté que le syndicat catégoriel UFPL et le syndicat inter-catégoriel SGCA étaient tous deux affiliés à la même organisation CFTC, le juge d'instance ne pouvait, sans violer les articles L.2143-3 et R.2143-2 ainsi que l'article L.2143-4 du Code du Travail qui autorise la désignation d'un délégué syndical supplémentaire dans les entreprises de plus de 500 salariés, refuser de constater que le nombre cumulé de délégués syndicaux ne pouvait être supérieur à trois au sein de l'entreprise CORSAIR et d'annuler en conséquence l'une des quatre désignations litigieuses ;
ALORS, D'AUTRE PART, QU'en vertu de l'article L.6524-2 du Code des transports, « par dérogation aux articles L.2314-8 et L.2314-11 du code du travail, dans les entreprises de transport et de travail aérien, lorsque le nombre de personnels navigants techniques est au moins égal à vingt-cinq au moment de la mise en place ou du renouvellement des délégués du personnel, de la délégation unique du personnel ou des représentants du personnel au comité d'entreprise, cette catégorie constitue un collège spécial » ; que ce texte n'a ni pour objet ni pour effet de déplafonner le nombre de délégués syndicaux déterminés par la loi, de sorte qu'en considérant qu'il s'agissait d'une dérogation aux articles L.2143-3, L.2143-4 et R.2143-2 du Code du travail, le juge d'instance a violé l'ensemble des textes susvisés ;
ALORS, DE TROISIEME PART, QUE selon l'alinéa 2 de l'article L.6524-2 du Code des transports, « lorsque dans un établissement de l'entreprise il est constitué un collège électoral en application de l'alinéa précédent, ce collège est représenté au comité central d'entreprise par un délégué titulaire et un délégué suppléant » ; que cette disposition n'est dérogatoire qu'en ce qui concerne la représentation au Comité Central d'Entreprise et ne saurait être étendue à l'institution distincte des délégués syndicaux ; qu'en se référant à cette dernière disposition, le juge d'instance s'est déterminé par des motifs inopérants, privant ainsi sa décision de base légale au regard tant du texte susvisé que de l'article L.2143-3 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11-61192
Date de la décision : 28/11/2012
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Analyses

SYNDICAT PROFESSIONNEL - Représentativité - Détermination - Syndicats inter-catégoriel et catégoriel - Affiliationà une même confédération - Autonomie du syndicat catégoriel - Portée

SYNDICAT PROFESSIONNEL - Délégué syndical - Désignation - Nombre de délégués - Nombre légal - Désignations excédentaires - Pluralité de syndicats affiliés à une même confédération - Conditions - Détermination - Portée SYNDICAT PROFESSIONNEL - Droits syndicaux - Exercice - Domaine d'application - Délégué syndical - Désignation par un syndicat représentatif catégoriel - Possibilité - Portée

L'acquisition de la qualité d'organisation syndicale représentative par un syndicat représentant le personnel navigant technique résultant de l'application des dispositions combinées des articles L. 6524-2 et L. 6524-3 du code des transports emporte nécessairement le droit à une représentation propre de ce syndicat qui ne se confond pas avec celle dont peut disposer un syndicat inter-catégoriel affilié à la même confédération. Un syndicat de pilotes de ligne, dès lors qu'il est représentatif, peut donc désigner un nombre de délégués syndicaux au moins égal à un et correspondant à l'effectif de la catégorie de personnel qu'il représente, sans que cette ou ces désignations ne s'imputent sur le nombre de délégués syndicaux dont peut disposer, en fonction de l'effectif total de l'entreprise, un syndicat inter-catégoriel affilié à la même confédération


Références :

articles L. 2143-3 et L. 2143-4 du code du travail

articles L. 6524-2 et L. 6524-3 du code des transports

Décision attaquée : Tribunal d'instance de Villejuif, 17 novembre 2011

Sur le principe selon lequel deux syndicats affiliés à une même confédération ne peuvent désigner ensemble un nombre de délégués syndicaux supérieur au nombre légal, à rapprocher :Soc., 10 mai 2012, pourvoi n° 11-21356, Bull. 2012, V, n° 145 (rejet)

arrêt cité. Sur le droit d'un syndicat représentatif catégoriel à désigner des délégués syndicaux, à rapprocher :Soc., 2 mars 2011, pourvoi n° 10-60157, Bull. 2011, V, n° 66 (cassation)


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 28 nov. 2012, pourvoi n°11-61192, Bull. civ. 2012, V, n° 310
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2012, V, n° 310

Composition du Tribunal
Président : M. Lacabarats
Avocat général : M. Finielz (premier avocat général)
Rapporteur ?: M. Béraud
Avocat(s) : SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP Fabiani et Luc-Thaler

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.61192
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