La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

27/11/2012 | FRANCE | N°12-85344

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 27 novembre 2012, 12-85344


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :

- M. Michel X...,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de VERSAILLES, en date du 10 avril 2012, qui, dans l'information suivie contre lui du chef d'infractions à la législation sur les stupéfiants, a prononcé sur le maintien de la saisie de sommes inscrites au crédit de comptes bancaires ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 13 novembre 2012 où étaient présents : M. Louvel président, M. Beauvais conseille

r rapporteur, Mme Guirimand, MM. Guérin, straehli, Finidori, Monfort, Buisson cons...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :

- M. Michel X...,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de VERSAILLES, en date du 10 avril 2012, qui, dans l'information suivie contre lui du chef d'infractions à la législation sur les stupéfiants, a prononcé sur le maintien de la saisie de sommes inscrites au crédit de comptes bancaires ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 13 novembre 2012 où étaient présents : M. Louvel président, M. Beauvais conseiller rapporteur, Mme Guirimand, MM. Guérin, straehli, Finidori, Monfort, Buisson conseillers de la chambre, Mme Divialle, MM. Maziau, Barbier conseillers référendaires ;
Avocat général : M. Boccon-Gibod ;
Greffier de chambre : M. Bétron ;
Sur le rapport de M. le conseiller BEAUVAIS, les observations de la société civile professionnelle ROCHETEAU et UZAN-SARANO, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général BOCCON-GIBOD ;

Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle, en date du 19 septembre 2012, prescrivant l'examen immédiat du pourvoi ;

Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, du premier protocole additionnel à ladite convention, de l'article préliminaire et des articles 706-141 à 706-154 du code de procédure pénale, 131-21 et 222-37 du code pénal ;
"en ce que l'arrêt attaqué a ordonné le maintien de saisie de la saisie du solde créditeur des quatre comptes bancaires, opérée par procès-verbaux du 6 décembre 2011, dont est titulaire M. X... ;
"aux motifs que si la juridiction d'appel ne peut modifier le fondement juridique de la décision du premier juge il lui appartient le cas échéant de substituer ses propres motifs ; qu'en l'espèce, l'ordonnance dont appel de maintien de saisie pénale prévue par l'article 706-154 du code de procédure pénale vise les articles 706-141 à 706-147, 706-153 et 706-154 du même code ainsi que l'article 131-21 du code pénal ; que l'article 706-141 du code de procédure pénale consacré aux saisies spéciales dispose qu'elles s'appliquent afin de garantir la peine complémentaire de confiscation selon les conditions définies à l'article 131-21 du code pénal ; que ce dernier article dispose en son alinéa 6 que lorsque la loi qui réprime le crime ou le délit le prévoit, la confiscation peut aussi porter sur tout ou partie des biens appartenant au condamné, quelle qu'en soit la nature, meubles ou immeubles, divis ou indivis ; que l'article 222-49 du code pénal dispose que « dans les cas prévus aux articles 222-34, 222-35, 222-36, 222-37 et 222-38 du code pénal, peut également être prononcée la confiscation de tout ou partie des biens ud condamné, quelle qu'en soit la nature, meubles ou immeubles, divis ou indivis ; que M. X... a été mis en examen d'infractions à la législation sur les stupéfiants, délit notamment prévu par l'article 222-37 du code pénal ; que, dès lors, M. X... encourt la confiscation de tout ou partie de ses biens, quelle qu'en soit la nature, meubles ou immeubles, divis ou indivis, sans qu'il soit nécessaire d'établir qu'ils proviendrait des infractions reprochées et sans qu'il y ait à ce jour à apprécier si le tribunal, à supposer qu'il soit saisi et entre en voie de condamnation, estimera justifié de confisquer ces sommes ; que les énonciations du mémoire de M. X... quant à « l'origine » des dites sommes sont inopérantes ; que l'ordonnance du 12 décembre 2011 de maintien de saisie pénale des soldes créditeurs des quatre comptes bancaires destinée à garantir la possible peine de confiscation sera confirmée ;
"1°) alors que le juge d'instruction ne peut, de sa seule initiative, autoriser un officier de police judiciaire à procéder à la saisie de tout ou partie du patrimoine de la personne mise en cause ; qu'en l'espèce, il ressort de la procédure que le juge d'instruction du tribunal de grande instance de Nanterre a, sans que le procureur de la République l'ait saisi d'une requête en ce sens, autorisé un officier de police judiciaire à procéder à la saisie non pas d'un seul compte bancaire clairement identifié mais de la totalité des sommes détenues par M. X... à la Banque postale et à la Caisse d'épargne ; qu'en déclarant régulière la saisie du patrimoine de M. X... autorisée par un juge d'instruction sans préalablement y avoir été requis par le procureur de la République, la chambre de l'instruction a violé les textes susvisés ;
"2°) alors qu'en toute hypothèse, le juge d'instruction ne peut, de sa seule initiative, autoriser un officier de police judiciaire à procéder à la saisie d'un compte bancaire déterminé que s'il est établi que les sommes détenues sur ce compte représentent le produit direct ou indirect de l'infraction poursuivie ; qu'en affirmant qu'il était différent de connaître l'origine des sommes inscrites sur les comptes bancaire de M. X..., la chambre de l'instruction a violé les textes susvisés" ;
Vu l'article 706-148 du code de procédure pénale ;
Attendu qu'il résulte de ce texte que, si l'enquête porte sur une infraction punie d'au moins cinq ans d'emprisonnement, le juge d'instruction peut, dans les cas prévus aux cinquième et sixième alinéas de l'article 131-21 du code pénal, sur requête du procureur de la République ou d'office après avis du ministère public, ordonner la saisie de tout ou partie des biens, lorsque la loi qui réprime le crime ou le délit prévoit la confiscation de tout ou partie des biens du condamné ou lorsque l'origine de ces biens ne peut être établie ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure qu'au cours d'une information ouverte contre M. X... du chef d'infractions à la législation sur les stupéfiants, le juge d'instruction a, le 12 décembre 2011, au visa des articles 131-21 du code pénal, 706-153 et 706-154 du code de procédure pénale, rendu une ordonnance maintenant la saisie, opérée le 6 décembre 2011 sur son autorisation, des sommes inscrites au crédit de quatre comptes ouverts à la Caisse d'Epargne et à la Banque Postale au nom de M. X..., en retenant que ces sommes constituaient le produit direct ou indirect des infractions poursuivies ; que le mis en examen a interjeté appel de cette décision ;
Attendu que, pour confirmer, par substitution de motifs, l'ordonnance entreprise et rejeter l'argumentation de M. X... qui faisait valoir que les sommes inscrites au crédit de ses comptes bancaires avaient une origine sans rapport avec les infractions pour lesquelles il avait été mis en examen, l'arrêt énonce que, selon l'article 131-21, alinéa 6, du code pénal, lorsque la loi qui réprime le crime ou le délit le prévoit, la confiscation peut porter sur tout ou partie des biens appartenant au condamné ; que les juges ajoutent que M. X..., mis en examen pour infractions à la législation sur les stupéfiants, et notamment pour le délit visé à l'article 222-37 du code pénal, encourt la confiscation de tout ou partie de ses biens, sans qu'il soit nécessaire d'établir qu'ils proviendraient des infractions reprochées ;
Mais attendu qu'en se déterminant ainsi, la chambre de l'instruction, qui, sous le couvert d'une substitution de motifs, a en réalité modifié le fondement de la saisie effectuée, laquelle constituait, au sens de l'article 706-148 du code de procédure pénale, une saisie de patrimoine nécessitant l'avis préalable du ministère public, a méconnu le texte susvisé et le principe ci-dessus rappelé ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Versailles, en date du 10 avril 2012, et, pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ;
RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Versailles, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Versailles et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt-sept novembre deux mille douze ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 12-85344
Date de la décision : 27/11/2012
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

INSTRUCTION - Mesures conservatoires - Saisie de patrimoine - Avis préalable du ministère public - Nécessité

Encourt la censure l'arrêt d'une chambre de l'instruction qui, pour confirmer l'ordonnance du juge d'instruction prescrivant, au visa de l'article 706-154 du code de procédure pénale, le maintien de la saisie de sommes inscrites au crédit des comptes bancaires d'une personne mise en examen des chefs d'infractions à la législation sur les stupéfiants comme étant le produit direct ou indirect des infractions, et pour écarter son argumentation selon laquelle l'origine des fonds saisis était sans rapport avec ces infractions, retient, en substituant ses motifs à ceux du premier juge, que la personne en cause encourt, en application des articles 131-21, alinéa 6, et 222-49, alinéa 2, du code pénal, la confiscation de ses biens quelle qu'en soit l'origine, alors que la mesure litigieuse constituait une saisie de patrimoine, au sens de l'article 706-148 du code de procédure pénale, qui nécessitait l'avis préalable du ministère public


Références :

article 706-148 du code de procédure pénale

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 10 avril 2012

Sur l'avis préalable du ministère public, s'agissant d'une saisie de sommes d'argent versées sur un compte bancaire et d'une saisie patrimoine, à rapprocher :Crim., 18 septembre 2012, pourvoi n° 12-80662, Bull. crim. 2012, n° 193 (rejet)

arrêt cité


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 27 nov. 2012, pourvoi n°12-85344, Bull. crim. criminel 2012, n° 259
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2012, n° 259

Composition du Tribunal
Président : M. Louvel
Avocat général : M. Boccon-Gibod
Rapporteur ?: M. Beauvais
Avocat(s) : SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:12.85344
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award