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04/10/2012 | FRANCE | N°11-18050

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 04 octobre 2012, 11-18050


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article 2270-1 du code civil, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Banque d'arbitrage et de crédit (BAC) a été dirigée jusqu'en 1991 par M. X... ; qu'à la suite d'un contrôle de la Commission bancaire (la commission) critiquant sa gestion, le conseil d'administration de la BAC a destitué M. X... de ses fonctions le 23 octobre 1991, tandis que celui-ci démiss

ionnait de la présidence le 31 octobre suivant ; qu'une information judiciaire...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article 2270-1 du code civil, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Banque d'arbitrage et de crédit (BAC) a été dirigée jusqu'en 1991 par M. X... ; qu'à la suite d'un contrôle de la Commission bancaire (la commission) critiquant sa gestion, le conseil d'administration de la BAC a destitué M. X... de ses fonctions le 23 octobre 1991, tandis que celui-ci démissionnait de la présidence le 31 octobre suivant ; qu'une information judiciaire a été ouverte par le procureur de la République contre personne non dénommée du chef de diverses infractions à la législation sur les sociétés et de communication de renseignements inexacts à la commission ; que la BAC s'est constituée partie civile le 7 mai 1992 ; que M. X... a été inculpé le 18 novembre 1992 ; que le 7 juillet 2003, le juge d'instruction a rendu une ordonnance de non-lieu, confirmée par la chambre de l'instruction de la cour d'appel par arrêt du 19 novembre 2003 ; que les pourvois formés contre cet arrêt par les parties civiles ont été déclarés irrecevables par arrêt du 26 janvier 2005 de la chambre criminelle de la Cour de cassation; que M. X... a assigné la BAC le 24 janvier 2008 sur le fondement de l'article 1382 du code civil en indemnisation de ses préjudices professionnel, économique et moral causés par les dénonciations qualifiées de calomnieuses et d'abusives ;
Attendu que pour dire prescrite l'action engagée par M. X..., la cour d'appel énonce que le choix fait par celui-ci d'une procédure civile fondée sur l'article 1382 du code civil entraîne l'application de l'article 2270-1 du même code et qu'il y a lieu, dès lors, de retenir comme point de départ de la prescription la manifestation du dommage, soit la date à laquelle M. X... s'est trouvé en situation de s'expliquer sur la portée des accusations dont il faisait l'objet au sens de l'article 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l'homme, à savoir en l'espèce son inculpation le 18 novembre 1992 ;
Qu'en statuant comme elle l'a fait, alors que le point de départ de la prescription prévue par l'article 2270-1 susvisé devait être fixé à la date à laquelle la décision de non-lieu était devenue définitive, la cour d'appel a violé ce texte ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 2 mars 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne M. Y..., ès qualités, aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et le condamne à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, signé et prononcé par M. Bizot, conseiller doyen, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile, en l'audience publique du quatre octobre deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Defrenois et Levis, avocat aux Conseils, pour M. X...

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR déclaré prescrite, par application de l'article 2270-1 du code civil, l'action en responsabilité civile délictuelle engagée par M. Sarkis X... à l'encontre de la société BAC ;
AUX MOTIFS, D'UNE PART, QUE la BAC soulève deux prescriptions prévues tant par l'article 2270-1 du Code civil dans sa rédaction antérieure à la loi du 17.juin 2008, que par l'article L. 225- 254 du code de commerce ;
que l'appelant .fonde son action sur l'article 1382 du code civil en réparation des faits précités (constitution de partie civile du 7 mai 1992, courrier du 27 juin 1994, maintien de la constitution de partie civile par le liquidateur amiable le 24 mai 2002) qualifiés à la fois de dénonciations calomnieuses et de dénonciations abusives ou téméraires ;
qu'aux termes de l'article 2270-1 du code civil : « Les actions en responsabilité civile extra- contractuelle se prescrivent par 10 ans à compter de la manifestation du dommage ou de son aggravation. » ;
Considérant que les parties s'opposent sur le point de départ de la prescription
- l'inculpation de Sarkis X... soit le 18 novembre 1992 pour l'intimée,
- le jour où la décision de non-lieu est devenue définitive selon l'appelant qui soutient qu'il n'a pu agir valablement avant une notification de l'arrêt de rejet rendu par la chambre criminelle de la cour de cassation le 26 janvier 2005 ;
que le choix d'une procédure civile fondée sur l'article 1382 du code civil entraîne l'application de l'article 2270-1 du même code ; qu'il y a lieu de retenir, comme point de départ de la prescription de la présente action civile, pour la réparation des dénonciations qualifiées tant de calomnieuses que d'abusives ou téméraires, la manifestation du dommage, soit la date à laquelle Sarkis X... s'est trouvé en situation de s'expliquer sur la portée des accusations dont il faisait l'objet au sens de l'article 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l'homme, à savoir en l'espèce son inculpation le 18 novembre 1992 ; qu'il y a lieu, en conséquence, sans qu'il soit nécessaire d'examiner l'autre fin de non-recevoir, de réformer le jugement et de déclarer prescrite l'action engagée par Sarkis X... par l'assignation du 24 janvier 2008 ;
1°) ALORS QUE l'article 2270-1 du code civil, dans sa rédaction antérieure à la loi du 17 juin 2008 applicable au litige, dispose que les actions en responsabilité civile extra-contractuelle se prescrivent par dix ans à compter de la manifestation du dommage ou de son aggravation ; que s'agissant d'une action en responsabilité extra-contractuelle en vu d'obtenir réparation du préjudice résultant d'une dénonciation calomnieuse, cette action se prescrit par dix ans à compter de la date de la décision définitive d'acquittement, de relaxe ou de non-lieu déclarant non fondée l'accusation et permettant de caractériser la dénonciation calomnieuse; qu'en l'espèce, en faisant courir le délai de prescription de l'action en responsabilité extra contractuelle à compter de la date de l'inculpation de M. Sarkis X... du 18 novembre 1992, au motif inopérant qu'à compter de cette inculpation M. X... était en mesure de s'expliquer sur la portée des accusations dont il faisait l'objet, et non à compter de la décision définitive de non-lieu du 26 janvier 2005, la cour d'appel a violé les articles 2270-1 du code civil, dans sa rédaction antérieure à la loi du 17 juin 2008 applicable au litige, et 1382 du même code.
2°) ALORS QUE l'article 2270-1 ancien du code civil dispose que les actions en responsabilité civile extra-contractuelle se prescrivent par dix ans à compter de la manifestation du dommage ou de son aggravation ; qu'en s'abstenant de rechercher si entre l'inculpation du 18 novembre 1992 et l'ordonnance de non-lieu du 26 janvier 2005, le préjudice matériel subi par M. X..., compte tenu des 13 années de procédure ayant suivi cette inculpation, ne s'était pas aggravé, justifiant un report du point de départ du délai de prescription au jour de la décision définitive de non-lieu rendue le 26 janvier 2005, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 2270-1 du code civil.
ET AUX MOTIFS, D'AUTRE PART, QU 'à la date à laquelle une décision de non-lieu rendue en faveur de Sarkis X... est devenue définitive celui-ci disposait de la faculté d'engager cumulativement :
- dans les trois mois, devant le tribunal correctionnel, une action civile en dommages et intérêts dans les conditions de l'article 91 du code de procédure pénale.
- dans les trois ans, devant le tribunal correctionnel, une action pénale sur le fondement de l'article 226-10 du code pénal, la prescription du délit étant suspendue tant que la fausseté du fait dénoncé n'a pas été, légalement déclarée ;
Considérant que la loi du 23 décembre 1980 a modifié les dispositions de l'article 10 du code de procédure pénale et mis fin au principe de la solidarité des prescriptions pénales et civiles, que le régime de la prescription civile est exclusivement fixé par le code civil ; que la prescription n'a pas été suspendue ; que l'appelant qui ne justifie pas de l'existence d'une force majeure, bénéficiait de possibilités d'actions en vue d'obtenir la réparation du préjudice allégué ;
3°) ALORS QUE la prescription d'une action en responsabilité extra contractuelle ne peut courir qu'à compter du jour où celui contre lequel on l'invoque a pu agir valablement; qu'en faisant courir le délai à compter de la date d'inculpation de M. X..., au visa des différentes procédures qui s'offraient à lui après la décision de non-lieu définitive du 26 janvier 2005, la cour d'appel s'est prononcée par un motif inopérant et n'a pas recherché, ainsi qu'il le lui était demandé, si M. X... était en mesure d'agir à compter de son inculpation en 1992 et avant que n'intervienne la décision définitive de non-lieu du 26 janvier 2005, pour obtenir réparation du préjudice résultant d'une dénonciation calomnieuse ; que ce faisant, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles 2270-1 et 2251 du code civil et 226-10 du code pénal.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 11-18050
Date de la décision : 04/10/2012
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Analyses

RESPONSABILITE DELICTUELLE OU QUASI DELICTUELLE - Dommage - Réparation - Action en responsabilité - Prescription - Point de départ - Dénonciation calomnieuse

PRESCRIPTION CIVILE - Prescription décennale - Article 2270-1 du code civil - Délai - Point de départ - Action en responsabilité pour dénonciation calomnieuse

Viole l'article 2270-1 du code civil, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008, la cour d'appel qui déclare prescrite l'action en responsabilité pour dénonciation calomnieuse sur le fondement de l'article 1382 du code civil d'une personne, en retenant comme point de départ du délai de prescription la date de son inculpation, alors que celui-ci devait être fixé à la date à laquelle l'ordonnance de non-lieu était devenue définitive


Références :

article 2270-1 du code civil, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 02 mars 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 04 oct. 2012, pourvoi n°11-18050, Bull. civ. 2012, II, n° 162
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2012, II, n° 162

Composition du Tribunal
Président : M. Loriferne
Avocat général : M. Maître
Rapporteur ?: M. Taillefer
Avocat(s) : SCP Defrenois et Levis, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 10/09/2013
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.18050
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