LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen relevé d'office, après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile :
Vu les articles 552 et 1406 du code civil, ainsi que l'article 1469, alinéa 3, du même code ;
Attendu qu'il résulte des deux premiers de ces textes que l'immeuble construit sur le terrain propre à l'un des époux, pendant la durée du mariage et à l'aide de fonds provenant de la communauté, constitue lui-même un bien propre, sauf récompense due par l'époux à la communauté ; que, selon le troisième, la récompense est égale au profit subsistant quand la valeur empruntée a servi à acquérir, à conserver ou à améliorer un bien qui se retrouve, au jour de la liquidation de la communauté, dans le patrimoine emprunteur ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'après le prononcé du divorce de M. X... et de Mme Y..., le 18 octobre 2002, un différend les a opposés sur la récompense due par l'épouse à la communauté au titre du financement de la construction, pendant le mariage, d'une maison d'habitation sur un terrain lui appartenant en propre ;
Attendu qu'après avoir retenu, par motifs propres et adoptés, que si les relevés de comptes bancaires de Mme Y... permettaient d'établir que sa mère avait effectué plusieurs versements d'un montant total de 548, 81 euros, ces quelques éléments ne prouvaient pas que la construction de l'immeuble avait été financée intégralement par Mme Y..., une telle somme étant insuffisante à permettre l'édification d'une maison d'habitation, et que, dans son attestation, la mère de Mme Y... ne soutenait d'ailleurs pas avoir financé intégralement la construction, l'arrêt décide que la maison constitue un acquêt de communauté et, après avoir constaté que " la valeur du bien " est de 53 356 euros, fixe à 26 678 euros le montant de la récompense due par la communauté à M. X... " au titre de son apport dans la construction du bien commun " ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'immeuble litigieux, édifié sur un terrain propre de l'épouse, constituait lui-même un bien propre, et que cette dernière devait à la communauté une récompense égale, non à la valeur du bien, mais à la plus-value procurée par la construction au fonds sur lequel celle-ci était implantée et déterminée d'après la proportion dans laquelle les fonds empruntés à la communauté avaient contribué au financement de l'amélioration du bien propre de l'épouse, la cour d'appel a, par refus d'application, violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a confirmé le jugement ayant constaté que la communauté se trouve composée d'une maison d'habitation édifiée sur un terrain propre de l'épouse sis ... et fixé à 26 678 euros la récompense due par la communauté à M. X... au titre de son apport dans la construction du bien commun, l'arrêt rendu le 16 février 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion, autrement composée ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six septembre deux mille douze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par Me Carbonnier, avocat aux Conseils, pour Mme Y....
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR constaté que la communauté des époux Y...-X... était composée d'une maison édifiée sur un terrain propre de l'épouse, et fixé à 26. 678 euros la récompense due par la communauté à Monsieur X... au titre de son apport dans la construction du bien commun,
AUX MOTIFS QUE " les différents bons de livraisons, pour des matériaux, établis au cours des années 1992 et 1993, versés aux débats au nom de l'appelante (et non au nom de sa mère Madame X... Marie-Renée) soit sous son nom de femme mariée de X... Huguette pour des montants de 102 F ; 190, 40 F ; 345 F ; 316, 30 F ; 3015 F ; 1504 F ; 2875 F soit sous son nom patronymique propre de X... Marie Georges (ses deux autres prénoms) pour des montants de 6934 F ; 4058 ; 2400 F soit un total de 21. 739, 70 Fou 3. 314, 19 euros ne permettent pas d'établir que l'édification de la maison aurait été intégralement financée par la mère de l'appelante ; Que par ailleurs la production des relevés de comptes de l'appelante permet d'établir que sa mère a effectué plusieurs versements de 300 F pour un montant total de 3. 600 F soit 548, 81 euros ; Que ces quelques éléments n'établissent pas, tant s'en faut, que la construction de cet immeuble a été financée intégralement par Madame Marie-Renée Y... ; Qu'au demeurant, cette dernière, dans son attestation du 2 juin 2009 indique qu'elle a aidé sa fille Marie Georges Huguette pour la construction de sa maison mais ne soutient pas avoir financé intégralement la construction de cet immeuble ; qu'au vu des pièces versées aux débats et en l'absence d'élément nouveau susceptible d'être soumis à son appréciation la Cour s'appropriant l'exposé des faits établis par les premiers juges estime que ces derniers par des motifs pertinents qu'elle approuve, ont fait une exacte appréciation des faits de la cause et du droit des parties " (arrêt, p. 3),
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE " Madame Y... soutient qu'aucune récompense ne serait due par elle à la communauté, la construction édifiée sur le terrain lui appartenant en propre n'ayant pas été réglée avec des fonds provenant du ménage mais par sa propre mère. Aucun document établi en ce sens et signé des parties ne se trouve cependant produit aux débats, ni aucune attestation susceptible d'en démontrer l'existence. Au contraire, les bons de livraisons produits aux débats par Marie Georges Huguette Y... (plinthes, moquettes) et les factures (Ets AH-HOT fils, Quincaillerie des 600, au nom de Huguette X..., SCPR au nom de Marie Georges Y...) ne permettent pas, dans la mesure où la requérante porte les trois prénoms, Marie, Georges et Huguette, de considérer que les commandes ont été effectuée ; par sa mère. De même façon, il n'est nullement démontré par Marie Georges Huguette Y..., sur laquelle pèse la charge de la preuve à cet égard, que les virements apparaissant sur son compte bancaire et sur ses compte et plan épargne logement BNPI aient comme origine le compte de sa mère X... Marie René, à l'exception de 4 virements de 300 francs en avril mai, juin et juillet 1992 sur le Plan d'Epargne Logement et des virements mensuels, de 300 francs également, sur le compte chèque sur la période d'août 1992 à mai 1993, soit, sur la période, une somme de 3 600 francs insuffisante à permettre l'édification d'une maison d'habitation. Au regard des éléments produits aux débats et une mesure d'instruction il'étant pas destinée à suppléer la carence des parties dans l'administration de la preuve, il n'y a pas 1ieu à organisation d'une mesure d'expertise " (jugement, p. 3 et 4),
ALORS QUE tout jugement doit, à peine de nullité, être motivé ; que la contradiction de motifs équivaut à un défaut de motif ;
Qu'en l'espèce, la cour d'appel a tout d'abord énoncé qu'il n'était pas démontré que Madame Marie-George Y... n'apportait pas la preuve que l'édification de la maison sur le terrain lui appartenant en propre « aurait été intégralement financée par s a mère », que les éléments produits aux débats « n'établissent pas, tant s'en faut, que la construction de cet immeuble a été financée intégralement » par celle-ci, et « qu'au demeurant, cette dernière, dans son attestation du 2 juin 2009 indique qu'elle a aidé sa fille pour la construction de sa maison, mais ne soutient pas avoir financé intégralement la construction de cet immeuble » ; qu'après avoir ainsi reconnu que la construction avait, pour partie au moins, été édifiée par des deniers propres à Madame Y..., ceux de sa mère, quand bien même ce ne serait pas intégralement, la cour d'appel a fixé à 26. 678 € la récompense due par la communauté à Monsieur X... au titre de son apport dans la construction du bien commun, soit la moitié de la valeur de l'immeuble fixée par les juges du fond à 53. 356 € ;
Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel s'est prononcée par des motifs contradictoires et a ainsi violé l'article 455 du code de procédure civile ;
ALORS QUE ce n'est que lorsqu'il a tiré un profit personnel des biens de la communauté, que l'époux en doit la récompense ;
Qu'en l'espèce, la cour d'appel a reconnu que l'édification de la maison sur le terrain appartenant en propre à Madame Marie-Georges Y... l'avait été, pour partie au moins, grâce à ses deniers propres, quand bien même ce ne serait pas intégralement ; que la cour d'appel a néanmoins fixé à 26. 678 € la récompense due par la communauté à Monsieur X... au titre de son apport dans la construction du bien commun, soit la moitié de la valeur de l'immeuble fixée par les juges du fond à 53. 356 € ;
Qu'en ne distinguant pas les paiements faits par Madame Y... grâce à ses fonds propres des paiements qui auraient pu être faits par des fonds communs, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences de ses propres constatations et privé sa décision de base légale au regard de l'article 1437 du code civil.