LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé le 27 octobre 1996 en qualité de vendeur tourisme par la société Havas Voyages, aux droits de laquelle se trouve la société American express voyages d'affaires ; que le salarié, qui exerçait en dernier lieu les fonctions de responsable clientèle, a été licencié par lettre du 2 août 2007 ; que contestant son licenciement et invoquant le non-respect de la procédure disciplinaire prévue par la convention collective applicable, il a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;
Sur le moyen unique, pris en sa troisième branche :
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de dire son licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse et de le débouter de ses demandes à ce titre, alors, selon le moyen, qu'aux termes de l'article 53 de la convention collective nationale de travail du personnel des agences de voyages et de tourisme "En cas de saisine (de la commission de conciliation), (…), les motifs de la mesure envisagée par l'employeur doivent être indiqués par écrit au salarié et être communiqués à la commission" ; que le salarié devant, aux termes de la loi, de toute façon se voir indiquer les motifs de la décision envisagée lors de l'entretien préalable, la convention collective, en imposant l'indication des motifs par écrit, a nécessairement voulu que cette indication limite les termes du différend au sens d'une formalité substantielle ; que les juges du fond ont constaté que M. X... ne s'était pas vu indiquer par écrit les motifs de la mesure envisagée par l'employeur ; que pour juger, malgré tout, que le licenciement de M. X... avait une cause réelle et sérieuse, les juges du fond ont affirmé que ce dernier avait bien connaissance des faits qui lui étaient reprochés au moment de l'entretien préalable ; qu'en statuant ainsi, les juges du fond ont violé l'article 53 de la convention collective nationale de travail du personnel des agences de voyages et de tourisme, ensemble l'article L. 1232-1 du code du travail ;
Mais attendu que la cour d'appel a constaté que le salarié avait eu connaissance des faits qui lui étaient reprochés et qu'il avait donné des éléments de réponse aux membres de la commission de conciliation, de sorte que l'irrégularité tenant au non-respect par l'employeur de son obligation d'indiquer par écrit au salarié les motifs de la mesure envisagée à son encontre n'avait pas eu pour effet de priver l'intéressé d'assurer utilement sa défense devant la commission ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le moyen unique, pris en ses première et deuxième branches :
Vu les articles 53 et 57 de la convention collective nationale de travail du personnel des agences de voyages et de tourisme du 12 mars 1993 ;
Attendu que, selon l'article 53 de cette convention, dans ses dispositions applicables en cas de rétrogradation ou de licenciement, "l'entretien préalable est de droit ; les parties ont la faculté de saisir pour avis la commission de conciliation de l'entreprise ; dans les entreprises ne comportant pas de commission de conciliation, les parties ont la faculté de saisir pour avis la commission paritaire nationale ; cette faculté devra être indiquée au salarié dans la lettre de convocation à l'entretien préalable ; la saisine de l'une ou l'autre de ces commissions doit être faite dans un délai de deux jours ouvrés à l'issue de l'entretien préalable ; l'employeur suspend sa décision de sanction durant ce délai dans l'attente de la décision qui sera prise par le salarié ; en cas de saisine, la décision de l'employeur est suspendue jusqu'à l'avis de la commission" ; que, selon l'article 57 de la convention, "en matière disciplinaire, en cas de partage des voix, le différend pourra être porté dans les huit jours, à la demande de l'une ou de l'autre des parties, devant la commission paritaire nationale" ; qu'il résulte de ces textes que la consultation de l'une ou l'autre des commissions, dont la saisine suspend la décision de l'employeur, constitue pour le salarié une garantie de fond qui oblige l'employeur à informer le salarié de la faculté pour lui de saisir la commission de conciliation de l'entreprise lorsqu'elle existe ou à défaut la commission paritaire nationale et, en cas de partage des voix devant la commission de l'entreprise, de la possibilité de porter le différend devant la commission paritaire nationale ; que dès lors, le licenciement prononcé sans que le salarié ait été informé de la faculté de saisir cet organisme est privé de cause réelle et sérieuse ;
Attendu que pour dire que la procédure conventionnelle a été respectée et que le licenciement est fondé sur une cause réelle et sérieuse, l'arrêt retient, par motifs propres et adoptés, qu'il résulte des articles 52 et suivants de la convention collective nationale de travail du personnel des agences de voyages et de tourisme que l'employeur doit mentionner dans la lettre de convocation à l'entretien préalable au licenciement la faculté pour le salarié de saisir pour avis la commission de conciliation dans l'entreprise et en cas d'absence d'une commission d'entreprise, la faculté de saisir la commission paritaire nationale ; que l'employeur a bien informé M. X... de sa faculté de saisir la commission de conciliation de l'entreprise ; qu'il n'était tenu à aucune obligation d'information sur la saisine de la commission nationale en cas de partage de voix de la commission d'entreprise ; que le défaut d'information, à le supposer avéré, ne peut violer une garantie de fond; qu'en effet, une fois appliquées les dispositions conventionnelles l'employeur peut poursuivre l'application et la mise en oeuvre de son pouvoir disciplinaire ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que le salarié n'avait pas été avisé de la faculté de porter le différend devant la commission paritaire nationale en cas de partage des voix de la commission de conciliation de l'entreprise, ce dont il résultait que le licenciement était privé de cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 18 janvier 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Bordeaux ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse ;
Condamne la société American express voyages d'affaires aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société American express voyages d'affaires à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept juin deux mille douze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat aux Conseils, pour M. X....
Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR jugé que le licenciement de Monsieur X... avait été prononcé dans le respect de la procédure disciplinaire instituée par la convention collective applicable des Agences de Voyage et de Tourisme et d'avoir ainsi débouté M. X... de ses demandes d'indemnités de licenciement sans cause réelle et sérieuse formulées suite à la méconnaissance de cette procédure constitutive d'une garantie de fond.
AUX MOTIFS PROPRES QUE Sur la violation des procédures conventionnelles et légales La Convention Collective des Agences de Voyage et de Tourisme prévoit dans ses articles 52 à 64 une procédure de disciplinaire. M. X... soulève l'irrégularité de la procédure disciplinaire qui s'est déroulée devant la commission de conciliation de l'entreprise. Selon lui : - il est impossible de considérer que la commission de conciliation de l'entreprise ait eu une composition valable et respectueuse de l'article 6 § 1 de la CEDH - la procédure exigeait une notification écrite et non orale des motifs de la mesure envisagée par l'employeur - le salarié aurait du être averti qu'en cas de partage de voix, le différend pouvait être porté dans les 8 jours à la demande de l'une ou l'autre des parties devant la commission nationale. A la lecture des articles applicables de la convention collective ci-dessus mentionnée, il apparaît que la lettre de convocation à l'entretien préalable au licenciement doit mentionner en cas d'absence de commission de conciliation dans l'entreprise, la faculté de saisir pour avis la commission paritaire nationale ; il s'agit de la seule obligation d'information de l'employeur. Dans la mesure où l'entreprise disposait d'une commission de conciliation, elle a bien informé M. X..., dans la lettre de convocation à l'entretien préalable, de cette faculté et elle n'était tenue à aucune autre obligation d'information sur la saisine d'une commission nationale en cas de partage des voix. De plus, c'est à juste titre que les premiers juges ont considéré que la composition interne de cette commission ne pouvant être assimilée à un tribunal, les règles du procès impartial ne peuvent lui être applicables, d'autant que face aux représentants de la direction se trouvaient deux représentants du personnel qui ont défendu les intérêts de M. X... ainsi que cela résulté du procès-verbal du 27 juillet. Enfin, les premiers juges ont légitiment constaté que les griefs à l'encontre de M. X... avaient bien été communiqués aux membres de la commission de discipline, que M. X..., assisté d'un représentant du personnel au moment de l'entretien préalable, avait bien connaissance des faits qui lui étaient reprochés (il avait d'ailleurs donné des éléments de réponse aux représentants du personnel de la commission de conciliation).
AUX MOTIFS, éventuellement ADOPTES, QUE a)Sur la composition de la Commission : Cette Commission interne à l'entreprise ne peut être assimilée à un tribunal et dès lors les dispositions de l'article 6 paragraphe 1 de la CESDH n'ont pas vocation à s'appliquer à la procédure dont a fait l'objet M. X.... De plus, la composition de cette Commission de conciliation d'entreprise s'est réunie en donnant un avis sur le licenciement du salarié, étant observé que face aux représentants de la direction, se trouvaient deux représentants du personnel, ce qui atteste du respect de l'impartialité de cette structure. Enfin, cette Commission n'est pas davantage une juridiction et M. X... ne s'est nullement vu imposer un « procès partial ». Aucune irrégularité ne vice donc la composition querellée. b) Sur la violation de la Convention Collective alléguée : Il s'évince de la simple chronologie des faits et des événements procéduraux qu'à la date de la saisine de la Commission idoine, M. X... avait bien connaissance des faits qui lui étaient reprochés et s'était vu assisté par un représentant du personnel lors de l'entretien préalable de rigueur. Dès lors, M. X... ne peut opposer à l'employeur un défaut de respect des droits de la défense alors même que les motifs de la mesure envisagée ont été débattus tant devant la Commission ad hoc que lors de l'entretien préalable. Et M. X... a bien reçu l'information selon laquelle il lui était possible de saisir la Commission interne de conciliation. Ainsi, M. X... a bien reçu l'information selon laquelle il lui était possible de saisir la Commission interne de conciliation. Ainsi, M. X... argue à tort de la violation d'une garantie de fond dans son cas. En outre, il est faux de prétendre qu'un partage de voix de la Commission de conciliation générait, pour l'employeur, de l'informer de la saisine de la Commission paritaire nationale. Car l'article 53 de la Convention collective prévoit seulement que la lettre de convocation à l'entretien préalable doit indiquer la faculté pour le salarié de saisir pour avis la Commission de conciliation de l'entreprise, ou à défaut, la Commission paritaire nationale. C'est ce qui a été fait sans grief causé à M. X..., la société n'étant pas dans l'obligation d'indiquer à M. X... que suite au partage de voix, il lui revenait, de facto, de saisir la Commission nationale. De plus, un défaut d'information, à le supposer avéré, ne peut violer une garantie de fond rendant un licenciement sans cause réelle et sérieuse. En effet, une fois appliquées, les dispositions conventionnelles protectrices, l'employeur peut tout à fait poursuivre l'application et la mise en oeuvre de son pouvoir disciplinaire. Dans le cas d'espèce, M. X... a bien été informé de la possibilité de saisine de la Commission de conciliation à entretien préalable. Monsieur X... s'est exécuté. Dès lors, aucune irrégularité n'affecte le déroulement de la phase conventionnelle. Par conséquent, le Conseil déboutera M. X... de sa demande à titre principal aux fins de voir déclarer son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse.
ALORS, D'UNE PART, QUE, la consultation d'un organisme chargé, en vertu d'une disposition conventionnelle de donner son avis sur la mesure disciplinaire envisagée par l'employeur constitue pour le salarié une garantie de fond si bien que le licenciement prononcé sans que le salarié ait été avisé qu'il pouvait saisir cet organisme est sans cause réelle et sérieuse ; qu'aux termes de l'article 57 de la Convention collective des Agences de voyage et de tourisme, « Les avis de la commission de conciliation sont formulés à la majorité des membres la constituant (…) ; en cas de partage des voix, le différend pourra être porté dans les 8 jours, à la demande de l'une ou de l'autre des parties, devant la commission paritaire nationale » ; que la Cour d'appel a constaté que la Commission de conciliation de l'entreprise a abouti à un partage de voix et que M. X... n'avait pas été avisé de la possibilité de saisir la Commission paritaire nationale ; que pour juger, malgré tout, que le licenciement de M. X... avait une cause réelle et sérieuse, les juges du fond ont affirmé que l'art.53 de la Convention collective n'obligeait pas la société d'indiquer au salarié qu'il pouvait saisir, en cas de partage des voix, la Commission paritaire nationale ; qu'en statuant ainsi, alors qu'ils ont eux-mêmes constaté que M. X... avait été privé de la possibilité d'exercer une garantie de fond, les juges du fond ont violé l'article 57 de la convention collective, ensemble les articles L.1332-2 et L1232-1 et du Code du travail.
ALORS, D'AUTRE PART, QUE, la consultation d'un organisme chargé, en vertu d'une disposition conventionnelle, de donner son avis sur la mesure disciplinaire de l'employeur constitue une garantie de fond lorsque sa saisine suspend la mesure de l'employeur jusqu'à l'avis ; qu'aux termes de l'article 53 de la Convention collective des Agences de voyage et de tourisme, « En cas de saisine (de la Commission), la décision de l'employeur est suspendue jusqu'à l'avis de la commission » et aux termes de l'article 57 «Les avis de la commission de conciliation sont formulés à la majorité des membres la constituant (…) ; en cas de partage des voix, le différend pourra être porté dans les 8 jours, à la demande de l'une ou de l'autre des parties, devant la commission paritaire nationale » ; que les juges du fond ont constaté un partage des voix et donc l'absence d'avis de la commission de conciliation de l'entreprise ; qu'ils ont également constaté que M. X... n'avait pas été informé de la possibilité de saisir la Commission paritaire nationale ; que pour juger, malgré tout, que le licenciement de M. X... avait une cause réelle et sérieuse, les juges du fond ont affirmé qu'à supposer même le défaut d'information avéré, l'employeur peut tout à fait poursuivre l'application et la mise en oeuvre de son pouvoir disciplinaire ; qu'en statuant ainsi, les juges du fond ont violé les articles 53 et 57 de la Convention collective des Agences de voyage et de tourisme, et ensemble les articles L.1332-2 et L1232-1 et du Code du travail.
ALORS, DE SURCROÎT, QUE, aux termes de l'article 53 de la Convention collective nationale de travail du personnel des agences de voyages et de tourisme « En cas de saisine (de la Commission de conciliation), (…), les motifs de la mesure envisagée par l'employeur doivent être indiqués par écrit au salarié et être communiqués à la commission » ; que le salarié devant, aux termes de la loi, de toute façon se voir indiquer les motifs de la décision envisagée lors de l'entretien préalable, la convention collective, en imposant l'indication des motifs par écrit, a nécessairement voulu que cette indication limite les termes du différend au sens d'une formalité substantielle ; que les juges du fond ont constaté que M. X... ne s'était pas vu indiquer par écrit les motifs de la mesure envisagée par l'employeur ; que pour juger, malgré tout, que le licenciement de M. X... avait une cause réelle et sérieuse, les juges du fond ont affirmé que ce dernier avait bien connaissance des faits qui lui étaient reprochés au moment de l'entretien préalable ; qu'en statuant ainsi, les juges du fond ont violé l'article 53 de la Convention collective nationale de travail du personnel des agences de voyages et de tourisme, ensemble l'article L.1232-1 du Code du travail.