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05/06/2012 | FRANCE | N°11-18210

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 05 juin 2012, 11-18210


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le premier moyen, pris en sa deuxième branche :
Vu l'article 1134 du code civil ;
Attendu selon l'arrêt attaqué et les productions, que la société Val Invest (la société) était titulaire d'un compte courant dans les livres de la société Bordelaise de CIC, aux droits de laquelle vient la société Banque CIC Sud-Ouest (la banque), M. X... (la caution) s'étant rendu caution de ses engagements à concurrence de 180 000 euros ; que suivant convention de cession de créances professionnelles, la sociét

é a cédé à la banque une créance détenue sur la société Lancaster Perpign...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le premier moyen, pris en sa deuxième branche :
Vu l'article 1134 du code civil ;
Attendu selon l'arrêt attaqué et les productions, que la société Val Invest (la société) était titulaire d'un compte courant dans les livres de la société Bordelaise de CIC, aux droits de laquelle vient la société Banque CIC Sud-Ouest (la banque), M. X... (la caution) s'étant rendu caution de ses engagements à concurrence de 180 000 euros ; que suivant convention de cession de créances professionnelles, la société a cédé à la banque une créance détenue sur la société Lancaster Perpignan (le débiteur cédé), pour laquelle la banque a versé une avance sur le compte courant de la société ; que cette cession a été notifiée au débiteur cédé ; que cette créance n'a pas été réglée ; que les soldes du compte courant et du compte " Dailly " étant débiteurs, la banque a mis la société en demeure de les régulariser, puis, l'a assignée en paiement, ainsi que la caution ; que ces dernières ont conclu au rejet de la demande, notamment au titre du compte " Dailly " ; que par la suite, la société a été mise en redressement puis liquidation judiciaires, M. Y... étant désigné liquidateur ;
Attendu que pour débouter la banque de sa demande en paiement de la somme de 37 837, 93 euros dirigée à l'encontre de la société et de la caution, l'arrêt retient que le cessionnaire d'une créance professionnelle, qui a notifié la cession en application de l'article L. 313-28 du code monétaire et financier et bénéficie d'un recours en garantie contre le cédant, garant solidaire, est tenu de justifier d'une demande amiable adressée au débiteur cédé ou de la survenance d'un événement rendant impossible le paiement et que les dispositions de l'article 10 de la convention cadre n'étaient pas susceptibles d'exonérer la banque, après la notification de la cession, de cette obligation ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté qu'aux termes de cette convention souscrite entre la banque cessionnaire et la société cédante, cette dernière s'interdisait d'exiger de la banque l'accomplissement d'une formalité quelconque ou une intervention de quelque nature que ce soit auprès du débiteur cédé et la déchargeait de toute responsabilité en cas de non-recouvrement, pour quelque motif que ce soit, des créances cédées, la cour d'appel a violé, par refus d'application, le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté la société Bordelaise de CIC de sa demande en paiement de la somme de 37 837, 93 euros dirigée à l'encontre de la société Val Invest et de M. X..., l'arrêt rendu le 22 mars 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier, autrement composée ;
Condamne M. Y..., en qualité de liquidateur judiciaire de la société Val Invest, et M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du cinq juin deux mille douze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Didier et Pinet, avocat aux Conseils pour la société Banque CIC Sud-Ouest
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté la Société bordelaise de CIC de sa demande en paiement de la somme de 37. 837, 93 euros dirigée tant à l'encontre de la société Val invest que de monsieur X... ;
AUX MOTIFS QU'il est constant que dans le cadre de la convention de cession de créances professionnelles conclue le 4 novembre 2008 entre la Société Bordelaise de CIC et la société Val Invest, celle-ci a cédé à la banque, selon bordereau du 5 novembre 2008, une créance de 117. 208, 00 euros sur la société Perpignan Lancaster, correspondant à une facture de travaux éditée le 29 octobre 2008 et payable à 30 jours, qui a donné lieu à une avance de 50. 399, 44 euros créditée le 13 novembre 2008 sur le compte courant de la société Val Invest ; que par lettre recommandée avec demande d'avis de réception en date du 13 novembre 2008, la Société Bordelaise de CIC a notifié la cession de créance à la société Perpignan Lancaster conformément à l'article L. 313-28 du code monétaire et financier ; que cette notification, à laquelle est joint l'acte d'acceptation de la cession à retourner, signé, à la banque, l'a été dans les formes prévues à l'article R. 313-15 prévoyant notamment le mode de règlement et l'indication de la personne à l'ordre de laquelle ce règlement doit être effectué ; qu'il est en effet précisé que le règlement, à l'ordre de la Société Bordelaise de CIC, doit être fait soit par chèque ou billet à ordre en joignant le talon détachable figurant au bas de la lettre de notification, soit par virement sur un compte (n° ...) en précisant la référence dossier ; qu'il résulte du second alinéa de l'article L. 313-24 du code monétaire et financier que sauf convention contraire, le signataire de l'acte de cession ou de nantissement est garant solidaire des créances cédées ou données en nantissement ; qu'il est cependant de principe que si le cessionnaire d'une créance professionnelle, qui a notifié la cession en application de l'article L. 313-28, bénéficie d'un recours en garantie contre le cédant, garant solidaire, sans avoir à justifier préalablement d'une poursuite judiciaire contre le débiteur cédé ou même de sa mise en demeure, il n'en est pas moins tenu de justifier d'une demande amiable adressée à ce débiteur ou de la survenance d'un événement rendant impossible le paiement ; qu'en l'occurrence, postérieurement à la notification de la cession, aucune demande amiable, visant à obtenir le paiement de la créance cédée, n'a été adressée à la société Perpignan Lancaster ; que, contrairement à ce que soutient la Société Bordelaise de CIC, l'indication, dans la lettre de notification du 13 novembre 2008, reçue le 17 novembre par son destinataire, du mode de règlement et de la personne à l'ordre de laquelle le règlement doit être effectué, ne peut tenir lieu de demande amiable adressée au débiteur cédé, dès lors qu'à cette date, la créance cédée, à échéance du 29 novembre 2008, n'était pas encore exigible et qu'aucun événement particulier ne s'était produit entre la cession et la notification, rendant le paiement d'ores et déjà impossible ; qu'au surplus, il n'est pas allégué que postérieurement à la notification, la société Perpignan Lancaster a clairement exprimé sa décision de ne pas accepter la cession et son refus de payer directement la banque, dans des conditions de nature à dispenser celle-ci de toute demande amiable, préalable à l'exercice de son recours en garantie contre la société Val Invest, cédant ; que les dispositions de l'article 10 de la convention cadre, selon lesquelles le client s'interdit d'exiger de la banque l'accomplissement d'une formalité quelconque ou une intervention de quelque nature que ce soit auprès du débiteur cédé, et le décharge de toute responsabilité en cas de non-recouvrement, pour quelque motif que ce soit, des créances cédées, n'étaient pas davantage susceptibles d'exonérer la Société Bordelaise de CIC, après la notification de la cession, de son obligation d'adresser à la société Perpignan Lancaster cette demande amiable ; que l'absence de demande amiable de paiement, dont se prévaut la société Val Invest pour s'opposer au recours en garantie exercé à son encontre, peut également être invoquée par monsieur X..., en sa qualité de caution de la société, s'agissant d'une exception inhérente à la dette au sens de l'article 2313 du code civil ; que la Société Bordelaise de CIC doit en conséquence être déboutée de sa demande en paiement de la somme de 37. 837, 93 euros au titre du solde débiteur du compte « Dailly », dirigée tant à l'encontre de la société Val Invest que de monsieur X..., les autres moyens développés par les appelants étant surabondants ;
1°) ALORS QUE le cessionnaire d'une créance professionnelle bénéficie d'un recours en garantie contre le cédant, garant solidaire, sans avoir à justifier préalablement d'une poursuite judiciaire contre le débiteur cédé ou même de sa mise en demeure ; qu'il n'est pas davantage tenu de procéder à une demande amiable de paiement à l'égard du débiteur cédé avant de s'adresser au cédant ; qu'en retenant que l'exposante ne pouvait obtenir paiement de sa créance auprès de ses garants au motif qu'elle n'avait pas adressé de demande amiable au débiteur cédé, la cour d'appel a violé l'article L. 313-24 du code monétaire et financier ;
2°) ALORS en tout état de cause QUE l'article 10 de la convention cadre de cessions de créances professionnelles conclue entre la Société bordelaise de CIC et la société Val invest stipulait que « le client s'interdit d'exiger de la banque l'accomplissement d'une formalité quelconque ou une intervention de quelque nature que ce soit auprès du débiteur cédé, et le décharge de toute responsabilité en cas de non recouvrement pour quelque motif que ce soit des créances cédées » ; qu'en retenant néanmoins que cette disposition n'était pas susceptible d'exonérer la Société bordelaise de CIC de son obligation d'adresser une demande amiable préalable à la société cédée, la cour d'appel a violé par refus d'application l'article 1134 du code civil ;
3°) ALORS subsidiairement QUE l'absence de demande amiable préalable doit être considérée comme une fin de non-recevoir sans influence sur le bien-fondé de la demande ; qu'en déboutant l'exposante de sa demande en paiement dirigée contre la société Val invest et contre monsieur X... au motif qu'elle n'avait pas adressé préalablement au débiteur cédé de demande amiable, la cour d'appel a violé l'article 122 du code de procédure civile et les principes qui régissent l'excès de pouvoir ;
4°) ALORS subsidiairement QU'à supposer que l'absence de demande amiable préalable soit constitutive d'une exception de procédure, elle serait également sans influence sur le bien-fondé de la demande ; que qu'en déboutant l'exposante de sa demande en paiement dirigée contre la société Val invest et contre monsieur X... au motif qu'elle n'avait pas adressé préalablement au débiteur cédé de demande amiable, la cour d'appel a violé les articles 73 et 108du code de procédure civile ensemble les principes qui régissent l'excès de pouvoir ;
5°) ALORS subsidiairement QUE le cessionnaire de créances professionnelles n'est pas tenu préalablement à l'exercice de son recours contre le cédant d'adresser au débiteur cédé une mise en demeure de payer ; qu'en retenant, pour débouter l'exposante de son recours contre le garant, que l'indication faite au cédé d'avoir à payer sa dette à la SBCIC dès son échéance ne pouvait tenir lieu de demande amiable adressée au débiteur cédé « dès lors qu'à cette date, la créance cédée, à échéance du 29 novembre 2008, n'était pas encore exigible », la cour d'appel, qui a en réalité exigé une mise en demeure du cédé, a violé l'article L. 313-24 du code monétaire et financier.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté la Société bordelaise de CIC de sa demande en paiement de la somme de 37. 837, 93 euros dirigée tant à l'encontre de la société Val invest que de monsieur X... ;
AUX MOTIFS QUE l'absence de demande amiable de paiement, dont se prévaut la société Val Invest pour s'opposer au recours en garantie exercé à son encontre, peut également être invoquée par monsieur X..., en sa qualité de caution de la société, s'agissant d'une exception inhérente à la dette au sens de l'article 2313 du code civil ; que la Société Bordelaise de CIC doit en conséquence être déboutée de sa demande en paiement de la somme de 37. 837, 93 euros au titre du solde débiteur du compte « Dailly », dirigée tant à l'encontre de la société Val Invest que de monsieur X..., les autres moyens développés par les appelants étant surabondants ;
ALORS QUE le défaut de demande amiable ne constitue pas une exception inhérente à la dette ; qu'en déboutant l'exposante de sa demande en paiement dirigée contre monsieur X..., caution de la société val invest, au motif erroné que le défaut de demande amiable serait une exception inhérente à la dette, la cour d'appel a violé l'article 2313 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 11-18210
Date de la décision : 05/06/2012
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

CESSION DE CREANCE - Cession de créance professionnelle - Cessionnaire - Recours contre le cédant - Garantie du cédant à l'égard du cessionnaire - Conditions - Demande préalable de paiement au débiteur cédé - Convention contraire - Validité

Sauf convention contraire, l'exercice par le cessionnaire d'une créance professionnelle, qui a notifié la cession en application de l'article L. 313-28 du code monétaire et financier, du recours en garantie, dont il bénéficie en vertu des dispositions de l'article L. 313-24 du même code, contre le cédant, suppose qu'il justifie d'une demande amiable adressée au débiteur cédé ou de la survenance d'un événement rendant impossible le paiement. Dès lors, viole par refus d'application l'article 1134 du code civil, la cour d'appel qui, pour rejeter la demande en paiement de la créance cédée formée par la banque cessionnaire à l'encontre de la société cédante, retient que la convention souscrite entre ces dernières n'était pas susceptible d'exonérer la banque, après notification de la cession, de son obligation d'adresser une demande amiable préalable au débiteur cédé, alors qu'elle avait constaté qu'aux termes de cette convention, la société cédante s'interdisait d'exiger de la banque l'accomplissement d'une formalité quelconque ou une intervention de quelque nature que ce soit auprès du débiteur cédé et la déchargeait de toute responsabilité en cas de non-recouvrement, pour quelque motif que ce soit, des créances cédées


Références :

Cour d'appel de Montpellier, Chambre civile 2, 22 mars 2011, 10/05880
article 1134 du code civil

Décision attaquée : Cour d'appel de Montpellier, 22 mars 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 05 jui. 2012, pourvoi n°11-18210, Bull. civ. 2012, IV, n° 112
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2012, IV, n° 112

Composition du Tribunal
Président : M. Espel
Avocat général : Mme Bonhomme
Rapporteur ?: Mme Robert-Nicoud
Avocat(s) : Me Haas, SCP Didier et Pinet

Origine de la décision
Date de l'import : 05/09/2013
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.18210
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