LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le deuxième moyen, pris en sa première branche, et sur le troisième moyen, réunis :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 16 juin 2009) que les 1er et 22 juillet 1998, M. X... a été mis en redressement puis liquidation judiciaires ; que, le 9 avril 1999, M. X... a saisi la commission nationale de désendettement des rapatriés réinstallés dans une profession non salariée (la Conair), pour bénéficier du dispositif légal et réglementaire d'aide au désendettement des rapatriés, qui a rejeté sa demande le 4 décembre 2002 ; que, le 30 septembre 2003, M. X... a déféré la décision de rejet implicite, émise par le chef du gouvernement à la suite de son recours gracieux, au tribunal administratif qui l'a rejetée le 18 octobre 2007 ; que celui-ci en a relevé appel devant la cour administrative d'appel ; que, par jugement du 29 octobre 2008, le tribunal a ordonné la reprise des effets de la liquidation judiciaire prononcée à l'encontre de M. X... et a dit que les organes de la procédure étaient à nouveau saisis ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'avoir ordonné la reprise des effets de la procédure de liquidation judiciaire prononcée le 22 juillet 1998 à son encontre et dit que les organes de la procédure étaient à nouveau saisis, alors, selon le moyen :
1°/ que seules les parties introduisent l'instance, hors les cas où la loi en dispose autrement ; qu'en confirmant le jugement du 29 octobre 2008 rendu par le tribunal de commerce de Perpignan qui a ordonné la reprise des effets de la procédure de liquidation judiciaire prononcée à l'encontre de M. X..., lorsqu'aucun texte n'autorisait les premiers juges à se saisir d'office comme ils l'ont fait, la cour d'appel a violé l'article 1er du code de procédure civile et excédé ses pouvoirs en consacrant un excès de pouvoir ;
2°/ que la sanction qui s'attache à la violation de l'obligation pour le juge administratif de se prononcer dans un délai raisonnable sur une demande d'admission au dispositif de désendettement des rapatriés réinstallés dans une profession non salariée ne peut consister qu'en la réparation du préjudice résultant éventuellement du délai subi par les créanciers du demandeur dont les poursuites ont été suspendues ; qu'en jugeant que la suspension automatique des poursuites prévue par les dispositions relatives au désendettement des rapatriés réinstallés dans une profession non salariée devait être écartée comme contraire aux exigences de l'article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales au motif que la durée de la procédure devant les juridictions administratives n'était pas déterminée ni déterminable de sorte que le droit des créanciers de M. X... d'accéder à un tribunal était privé de sa substance, lorsque l'éventuel préjudice que subissaient ces créanciers ne pouvait donner lieu qu'à une action en responsabilité contre l'Etat et non à la levée de la suspension des poursuites, la cour d'appel a violé l'article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
3°/ que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en se prévalant de l'atteinte portée aux droits de créanciers autres que le syndicat des copropriétaires de la Résidence Saint-Georges lorsqu'aucune partie ne s'était référée à la situation de ces autres créanciers, sans qu'il ressorte de l'arrêt que cette circonstance ait été préalablement soumise aux débats, les juges du fond ont violé l'article 16 du code de procédure civile ;
Mais attendu que si l'article 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales permet à l'Etat de limiter le droit d'accès à un tribunal dans un but légitime, c'est à la condition que la substance même de ce droit n'en soit pas atteinte et que, si tel est le cas, les moyens employés soient proportionnés à ce but ; qu'ayant exactement retenu que les dispositions relatives au désendettement des rapatriés réinstallés dans une profession non salariée organisent, sans l'intervention d'un juge, une suspension automatique des poursuites, d'une durée indéterminée, portant atteinte, dans leur substance même, aux droits des créanciers, privés de tout recours, tandis que le débiteur dispose de recours suspensifs devant les juridictions administratives, dont le dernier est toujours pendant devant la cour administrative d'appel de Marseille et que la demande initiale à la Conair date du 9 avril 1999, et que le syndicat des copropriétaires et d'ailleurs d'autres créanciers, dont la créance est établie et remonte à plus de dix années, se trouvent empêchés d'agir par l'exercice de recours sur le mérite desquels il n'a pas encore été statué définitivement, aucune date d'audience n'ayant été fixée, la cour d'appel en a déduit à bon droit, abstraction faite du motif surabondant critiqué par la troisième branche, que c'est par une juste appréciation que le premier juge, révoquant le sursis à statuer précédemment accordé, qui ne constitue pas une saisine d'office mais une simple reprise d'instance, a ordonné la reprise des effets de la procédure de liquidation judiciaire ; que le moyen, qui ne peut être accueilli en sa troisième branche, n'est pas fondé pour le surplus ;
Et attendu que les autres griefs ne seraient pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le conseiller doyen faisant fonction de président, à l'audience publique du onze avril deux mille douze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par Me Foussard, avocat aux Conseils pour M. X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
L'arrêt attaqué encourt la censure ;
EN CE QU'il a ordonné la reprise des effets de la procédure de liquidation judiciaire prononcée le 22 juillet 1998 (et non le 29 juillet 1998 comme l'indique par erreur le jugement entrepris confirmé) à l'encontre de M. X... et dit que les organes de la procédure étaient à nouveau saisis ;
ALORS QU'en première instance comme en appel, les débats sont publics sauf les cas où la loi exige qu'ils aient lieu en chambre du conseil ; que les exceptions à la règle des débats publics sont d'interprétation stricte ; que si le juge statue sur l'ouverture d'une liquidation judiciaire après que les débats ont eu lieu en chambre du conseil, les débats sur la fin de la suspension d'une liquidation judiciaire sont publics ; qu'en ordonnant la reprise des effets de la procédure de liquidation judiciaire prononcée à l'encontre de M. X... après que les débats se sont déroulés en chambre du conseil, la cour d'appel a violé les articles L. 621-1 et L. 641-1 du code de commerce, dans leur rédaction issue de la loi n° 2005-845 du 26 juillet 2005 ou, subsidiairement, l'article L. 621-27 du même code dans sa rédaction issue de l'article 36 de la loi n° 85-98 du 25 janvier 1985 telle que modifiée par la loi n° 94-475 du 10 juin 1994.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
L'arrêt attaqué encourt la censure ;
EN CE QU'il a ordonné la reprise des effets de la procédure de liquidation judiciaire prononcée le 22 juillet 1998 (et non le 29 juillet 1998 comme l'indique par erreur le jugement entrepris confirmé) à l'encontre de M. X... et dit que les organes de la procédure étaient à nouveau saisis ;
ALORS QUE, PREMIEREMENT, seules les parties introduisent l'instance, hors les cas où la loi en dispose autrement ; qu'en confirmant le jugement du 29 octobre 2008 rendu par le tribunal de commerce de PERPIGNAN qui a ordonné la reprise des effets de la procédure de liquidation judiciaire prononcée à l'encontre de M. X..., lorsqu'aucun texte n'autorisait les premiers juges à se saisir d'office comme ils l'ont fait, la cour d'appel a violé l'article 1er du code de procédure civile et excédé ses pouvoirs en consacrant un excès de pouvoir ;
ALORS QUE, DEUXIEMEMENT, le liquidateur a seul qualité pour agir au nom et dans l'intérêt des créanciers ; qu'en autorisant le syndicat des copropriétaires de la Résidence SAINT GEORGES à défendre sur l'appel de M. X..., en tant que créancier de M. X..., lorsque M. Z..., en qualité de liquidateur à la liquidation judiciaire de M. X..., était partie défenderesse en cause d'appel et avait seul qualité pour l'être, les juges du second degré ont violé les articles L. 641-4 et L. 622-20 du code de commerce dans leur rédaction issue de la loi n° 2005-845 du 26 juillet 2005 ou, subsidiairement, les juges du second degré ont violé les articles L. 622-4 et L. 621-39 du code de commerce dans leur rédaction issue de la loi n° 85-98 du 25 janvier 1985.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
L'arrêt attaqué encourt la censure ;
EN CE QU'il a ordonné la reprise des effets de la procédure de liquidation judiciaire prononcée le 22 juillet 1998 (et non le 29 juillet 1998 comme l'indique par erreur le jugement entrepris confirmé) à l'encontre de M. X... et dit que les organes de la procédure étaient à nouveau saisis ;
AUX MOTIFS QUE « si l'article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales permet à l'État de limiter le droit d'accès à un tribunal dans un but légitime, c'est à la condition que la substance même de ce droit n'en soit pas atteinte et que, si tel est le cas, les moyens employés soient proportionnés à ce but ; que M. X... ayant saisi le 9 avril 1999 la Conair, sa demande a été déclarée inéligible le 4 décembre 2002 ; qu'il a alors formé, le 18 avril 2008, un recours préalable devant le Premier ministre ; qu'en l'état de la décision implicite de rejet de ce recours, il a saisi, le 30 septembre 2003, d'une requête en annulation de cette décision implicite le tribunal administratif de Montpellier, lequel a rejeté ce recours par ordonnance du 18 octobre 2007 ; que M. X... a alors frappé, le 17 décembre 2007, cette décision d'un recours devant la cour administrative d'appel de Marseille, lequel est toujours pendant ; que le syndicat des copropriétaires et d'ailleurs d'autres créanciers, dont la créance est établie et remonte à plus de dix années, se trouvent empêchés d'agir par l'exercice de recours sur le mérite desquels il n'a pas encore été statué définitivement, aucune date d'audience n'ayant été fixée ; qu'il apparaît ainsi que le dispositif invoqué par l'appelant, en ce qu'il organise, sans l'intervention d'un juge, une suspension automatique des poursuites - d'une durée indéterminée et indéterminable compte tenu de l'exercice prévisible des voies de recours ultérieures et de l'impossibilité pour les créanciers d'influer sur ces procédures - portant atteinte dans leur substance même aux droits desdits créanciers privés de tout recours, alors que le débiteur dispose, lui, de recours suspensifs devant les juridictions administratives, méconnaît les exigences de l'article 6 § 1 susvisé ; que c'est donc par une juste appréciation que le premier juge, révoquant le sursis à statuer précédemment accordé, a ordonné la reprise des effets de la procédure de liquidation judiciaire » ;
ALORS QUE, PREMIEREMENT, la sanction qui s'attache à la violation de l'obligation pour le juge administratif de se prononcer dans un délai raisonnable sur une demande d'admission au dispositif de désendettement des rapatriés réinstallés dans une profession non salariée ne peut consister qu'en la réparation du préjudice résultant éventuellement du délai subi par les créanciers du demandeur dont les poursuites ont été suspendues ; qu'en jugeant que la suspension automatique des poursuites prévue par les dispositions relatives au désendettement des rapatriés réinstallés dans une profession non salariée devait être écartée comme contraire aux exigences de l'article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales au motif que la durée de la procédure devant les juridictions administratives n'était pas déterminée ni déterminable de sorte que le droit des créanciers de M. X... d'accéder à un tribunal était privé de sa substance, lorsque l'éventuel préjudice que subissaient ces créanciers ne pouvait donner lieu qu'à une action en responsabilité contre l'Etat et non à la levée de la suspension des poursuites, la cour d'appel a violé l'article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
ALORS QUE, DEUXIEMEMENT, le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en se prévalant de l'atteinte portée aux droits de créanciers autres que le syndicat des copropriétaires de la Résidence SAINT GEORGES lorsqu'aucune partie ne s'était référée à la situation de ces autres créanciers, sans qu'il ressorte de l'arrêt que cette circonstance ait été préalablement soumise aux débats, les juges du fond ont violé l'article 16 du code de procédure civile.