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13/01/2012 | FRANCE | N°11-10224

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 13 janvier 2012, 11-10224


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., alors qu'il circulait à motocyclette, a été victime, à l'âge de 29 ans, d'un accident de la circulation impliquant le véhicule conduit par M. Y..., assuré auprès de la société Mutuelle assurance artisanale de France (la MAAF) ; qu'il a assigné devant un tribunal de grande instance M. Y... et la MAAF ainsi que la Caisse de compensation des services sociaux de la Principauté de Monaco, et Axa assurances, l'assureur de son employeur, « assureur-loi » au sens

de la législation monégasque sur les accidents du travail, aux fins ...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., alors qu'il circulait à motocyclette, a été victime, à l'âge de 29 ans, d'un accident de la circulation impliquant le véhicule conduit par M. Y..., assuré auprès de la société Mutuelle assurance artisanale de France (la MAAF) ; qu'il a assigné devant un tribunal de grande instance M. Y... et la MAAF ainsi que la Caisse de compensation des services sociaux de la Principauté de Monaco, et Axa assurances, l'assureur de son employeur, « assureur-loi » au sens de la législation monégasque sur les accidents du travail, aux fins d'indemnisation de ses préjudices ;
Sur le moyen unique, pris en sa troisième branche, tel que reproduit en annexe :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de fixer comme il l'a fait la somme due au titre du poste relatif à la perte de gains professionnels futurs ;
Mais attendu qu'il ressort de l'arrêt et des productions que la cour d'appel, en déduisant de l'indemnité due à la victime par la MAAF et M. Y..., la créance de l'assureur-loi, comprenant la rente capitalisée, pour une somme de 167 590, 04 euros, et la rente déjà versée d'un montant de 72 075 euros, non contesté par les parties, n'a pas modifié les termes du litige ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu que le moyen unique, pris en ses deuxième, quatrième et sixième branches du moyen n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Mais sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article 4 du code de procédure civile ;
Attendu que l'objet du litige est fixé par les prétentions respectives des parties ;
Attendu qu'en réparation des préjudices consécutifs à l'accident dont M. X... a été victime, l'arrêt condamne in solidum M. Y... et la MAAF notamment au paiement d'une rente trimestrielle de 1 567, 28 euros au titre du poste des dépenses d'assistance, à échoir à compter du jour de l'arrêt, rente indexée dont le versement serait suspendu en cas d'hospitalisation prise en charge par un organisme social, d'une durée supérieure à 45 jours ;
Qu'en retenant une cause de suspension du service de la rente trimestrielle qu'aucune des parties à l'instance n'avait invoquée, la cour d'appel, qui a modifié les termes du litige, a violé le texte susvisé ;
Et sur le moyen unique, pris en sa cinquième branche :
Vu l'article 3 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 et le principe de la réparation intégrale du préjudice ;
Attendu que le préjudice d'établissement consiste en la perte d'espoir et de chance de réaliser un projet de vie familiale en raison de la gravité du handicap ;
Attendu que pour limiter à la somme de 530 134, 51 euros la condamnation in solidum de M. Y... et de la MAAF et rejeter la demande d'indemnisation du préjudice d'établissement invoqué par M. X..., l'arrêt retient que le tribunal lui a alloué de ce chef la somme de 30 000 euros en fonction du caractère plus compliqué de la vie amoureuse de la victime et de sa possibilité de fonder une famille ; que M. X... demande 55 000 euros du chef de ce poste de préjudice en indiquant que, compte tenu de ses handicaps, il est certain qu'il aura d'importantes difficultés voire une impossibilité à fonder une famille ou à lier une relation amoureuse, surtout de nos jours dans une société fondée sur la réussite sociale et l'aspect physique ; qu'en l'absence de toutes pièces permettant de mesurer l'impact prétendu du handicap sur la vie amoureuse de la victime, la cour d'appel ne pouvant anticiper l'existence d'un préjudice in futurum sur des considérations générales concernant les rapports de la société et d'un sujet présentant un handicap, étant observé enfin que les troubles ressentis par la victime dans ses conditions d'existence personnelles familiales et sociales ont été indemnisées au titre du déficit fonctionnel permanent ;
Qu'en statuant ainsi, alors, d'une part, que le préjudice d'établissement à raison d'un handicap physique ayant créé une incapacité permanente partielle de 67 % constitue un poste de préjudice distinct du poste de préjudice du déficit fonctionnel permanent dans sa dimension intégrant les troubles ressentis dans les conditions d'existence personnelles, familiales et sociales, d'autre part, qu'il ressortait de ses propres constatations que M. X... restait atteint, après consolidation des séquelles d'une amputation partielle du membre inférieur gauche, d'une quasi complète paralysie du plexus brachial gauche de la main à l'épaule, la cour d'appel a violé le texte et le principe susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ses dispositions prévoyant la suspension, en cas d'hospitalisation prise en charge par un organisme social, d'une durée supérieure à 45 jours, de la rente trimestrielle de 1 567, 28 euros versée in solidum par M. Y... et la MAAF à M. X..., au titre des dépenses de tierce personne, à échoir à compter du jour de l'arrêt, et limitant à la somme de 530 134, 51 euros la condamnation in solidum de M. Y... et de la MAAF, après avoir rejeté la demande d'indemnisation du préjudice d'établissement, l'arrêt rendu le 6 octobre 2010, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;
Condamne M. Y... et la MAAF aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne in solidum la MAAF, M. Y... à payer à M. X... la somme globale de 2 500 euros ; rejette les autres demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du treize janvier deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Coutard et Munier-Apaire, avocat aux Conseils pour M. X...

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR limité la condamnation in solidum de Monsieur Y... et de la MAAF à la somme de 530. 134, 51 euros en réparation des préjudices consécutifs à l'accident dont Monsieur X... a été victime et à une rente trimestrielle de 1. 567, 28 euros au titre des dépenses de tierce personne à échoir à compter du jour de l'arrêt, rente indexée dont le versement serait suspendu en cas d'hospitalisation prise en charge par un organisme social, d'une durée supérieure à 45 jours et D'AVOIR, fixé la créance de la compagnie AXA à la somme de 933. 254, 44 € ;
AUX MOTIFS QUE, « Déficit fonctionnel permanent : 241 200 € ; ce poste de préjudice inclut, pour la période postérieure à la date de consolidation, les atteintes aux fonctions physiologiques, la perte de la qualité de vie et les troubles ressentis par la victime dans ces conditions d'existence personnelles familiales et sociales ; le tribunal a alloué de ce chef à M. X... la somme de 234 500 € ; ce dernier demande à la cour d'évaluer à 268 000 € l'indemnisation de ce prejudice tandis que la MAAF et M. Y... offrent 234 500 € ; selon l'expertise les séquelles comportent une amputation du pied gauche et une paralysie quasi complète du plexus brachial gauche caractérisé par une paralysie complète de la main et du poignet alors que la paralysie de l'épaule gauche du coude gauche est incomplète ; l'expert précise que M. X... est gaucher et que sa main est totalement non fonctionnelle et que son coude est très peu fonctionnel ; elles comportent également des douleurs diffuses en rapport réel avec l'amputation du pied gauche et les séquelles du plexus brachial gauche ; enfin il existe des séquelles plus discrètes au niveau du rachis cervical et du membre inférieur gauche au-dessous de l'amputation, l'expert précisant que la gravité des séquelles du membre supérieur gauche potentialise la gravité des séquelles du membre inférieur gauche ; l'indemnisation du déficit fonctionnel permanent comportant aussi les incidences personnelles psychologiques et sociales du passage au statut d'handicapé pour lesquelles M. X... a sollicité l'allocation séparée d'une somme de 100 000 € au titre d'un préjudice moral et psychologique ne peut être opérée séparément du déficit fonctionnel permanent ; compte tenu de l'ensemble de ces éléments et de l'âge de M. X... à la date de consolidation (35 ans), le déficit fonctionnel permanent est apprécié par la cour à la somme de 241 200 € (...) ; Préjudice esthétique : 30 000 € ; le tribunal a alloué de ce chef la somme de 45 000 €, M. X... sollicitant la confirmation de cette somme et la MAAF proposant celle de 30 000 € ; outre l'amputation du pied nécessitant le port d'une prothèse et l'existence d'une très légère boiterie, il existe une déformation du membre inférieur gauche et une amyotrophie majeure ; l ‘ " expertise décrit diverses cicatrices au niveau du membre inférieur ainsi que dans la région sous claviculaire gauche, cervicale gauche, au-dessous du mamelon gauche, en regard de la tête cubitale gauche, de la face antérieure du biceps gauche ; en regard de ces éléments et du jeune âge de l'intéressé, la cour fixe à 30 000 € l'indemnisation devant être opérée de ce chef (... ; Préjudice d'établissement : rejet ; le tribunal a alloué de ce chef la somme de 30 000 € en fonction du caractère plus compliqué de la vie amoureuse de la victime et de sa possibilité de fonder une famille ; la MAAF a conclu au rejet de cette demande, arguant que le tribunal s'est fondé sur une supposition de principe sans autres éléments de justification ; M. X... demande 55 000 € du chef de ce poste de prejudice en indiquant que, compte tenu de ses handicaps, il est certain qu'il aura d'importantes difficultés (voire une impossibilité) à fonder une famille ou a lier une relation amoureuse, " surtout de nos jours dans une société fondée sur la réussite sociale et l'aspect physique " ; en l'absence de toutes pièces permettant de mesurer l'impact prétendu du handicap sur la vie amoureuse de M. X..., et la cour ne pouvant anticiper l'existence de ce chef d'un préjudice in futurum sur des considérations générales concernant les rapports de la société et d'un sujet présentant un handicap, étant observé enfin que les troubles ressentis par la victime dans ses conditions d'existence personnelles familiales et sociales ont été indemnisées au titre du déficit fonctionnel permanent, la demande tendant à l'indemnisation d'un préjudice d'établissement est rejetée ; Préjudice moral et psychologique : rejet, pour les motifs précédemment développés dans le cadre de l'indemnisation du déficit fonctionnel permanent ; Tierce personne : M. X... demande :- d'une part sur une période de 9 années allant de la date de son retour au domicile jusqu'au jugement à intervenir un capital de 217 733 € correspondant à 3 h 40 de tierce personne par jour sur 412 jours par an à 16 €/ heure, somme dont il déduit la créance correspondante de la compagnie AXA s'élevant à 100 440 € (soit 930 € x 12 mois x9 ans),- d'autre part pour la période postérieure une rente viagère annuelle de 24 192, 64 € calculée sur les bases chiées suivantes : (412 x 3, 67 x 16) x 22. 642 (€ de rente à compter du jour de l'assignation) = 547 769, 75 €. La MAAF et M. Y... proposent une indemnisation basée sur un taux horaire de 12 € et une période de référence annuelle de 400 jours ; la durée journalière de 3 h 40 retenue par l'expert Z... dans son rapport du 18 avril 2007 n'est pas contestée par la MAAF et par M. Y... de même que la prise en considération de deux périodes distinctes, ces intimés discutant le coût horaire et le nombre de jours annuels utiles et nécessaires ; l'expertise du professeur Z... en date du 18 avril 2007 prévoit l'attribution d'une tierce personne non spécialisée pour une durée de 3 h 40/ jour tous les jours de la semaine afin de pallier l'impossibilité ou la difficulté d'effectuer certains actes de la vie quotidienne : réalisation et prise des repas, réalisation des courses, activités domestiques, habillage ; la première période court du 19 juillet 2000, date du départ du centre de Valenton (expertise Z... du 18 avril 2007) jusqu'au jour du présent arrêt ; en l'absence de tout document justificatif de l'emploi d'une tierce personne, l'indemnisation sera opérée au titre des frais divers évalués par la cour sur une base de 11 €/ heure sur 365 jours soit sur 10 ans un mois et 26 jours : 3707 jours x 3h40 x 11 € = 138 641, 80 € Après déduction sur la même période de la rente réglée par la compagnie AXA, s'élevant à 930 €/ mois selon les écritures concordantes de M. X..., de la MAAF et de M. Y... : 138 641, 80 €-113 460 € = 25 181, 80 € Pour la période postérieure au présent arrêt, la cour, considérant l'absence de spécialisation de l'aide nécessaire à la victime ainsi que l'incidence de la réduction du taux des charges patronales pour ce handicapé présentant un déficit fonctionnel permanent de 67 %, estime devoir fixer le taux horaire de la tierce personne à la somme de 15 € sur une période de 365 jours ; la capitalisation est effectuée par application de la valeur de l'euro de rente viager issue du barème publié à la Gazette du Palais du 7 au 9/ 11/ 2004 chez ce sujet âgé de 41 ans au moment de la liquidation de la rente par le présent arrêt (15 € x 3h40 x 365 jours) x 21, 235 = 395 289, 53 C. En l'absence de production par la compagnie AXA du montant de sa créance capitalisée de tierce personne à échoir, la cour applique le même coefficient de capitalisation à la rente mensuelle de 930 € versée par cette compagnie, soit : 930 € x 12x21, 235 = 262 164, 4 € 395 289, 53 €-262 164, 4 € = 133 125, 13 €, soit par an : 133125, 13/ 21, 235 = 6 269, 14 € et par trimestre : 6 262, 14 €/ 4 = 1567, 28 € Perte de gains professionnels futurs : M. X..., livreur au moment de l'accident, exposant qu'il prévoyait d'ouvrir un magasin de fruits et légumes, sollicite au titre d'une incidence professionnelle définitive la somme de 461 896, 80 € résultant de la capitalisation viagère d'un salaire mensuel moyen de l'ordre de 1700 €, soit après déduction de la créance de l'assureur-loi (167 590, 04 €) la somme de 294 306, 76 € ; la MAAF et M. Y..., observant que la victime était vendeur salarié en fruits et légumes lors de l'accident, qu'elle n'est pas inapte à exercer un emploi, notamment pour travailleur handicapé, et ne justifie d'aucune initiative de reclassement, offre la somme de 220 992 € avant la déduction de la créance de l'assureur-loi, résultant de la capitalisation d'un salaire mensuel de 1000 € avec un coefficient d'euro de rente temporaire jusqu'à 65 ans ; le salaire de référence de 938, 57 € par mois perçu lors de l'accident-admis par les parties-ayant servi de base à l'indemnisation de la perte de gains professionnels actuels sera retenu pour l'indemnisation de la perte de gains professionnels futurs à l'exclusion de toute considération sur un projet professionnel, non matérialisé par un quelconque début d'exécution, ou sur un salaire moyen anticipé, purement hypothétique ; en conséquence, le calcul sera effectué à partir du salaire capitalisé de 1000 € proposé par la MAAF et M. Y... de la date de consolidation (1 er juillet 2004) jusqu'au présent arrêt, salaire affecté pour la suite, pour tenir comptede la difficulté de l'employabilité de M. X... lié à son handicap-l'expert Z... ayant souligné le caractère très limité des capacités de reconversion de la victime-du coefficient d'euro de rente viager issu du barème publié à la Gazette du Palais du 7 au 9/ 11/ 2004, soit : 1000 € x 72 mois = 72 000 € 1000 € x 12 mois x 21, 235- = 254 820 € 72000 € + 254820 € = 326820 € déduction de la rente capitalisée d'AXA correspondante, non contestée : 326 820 €- (72 075 € + 167 590, 04 €) = 87154, 154, 96 € (..) Préjudice total : 10 229, 89 € + 46 200 € + 241 200 € + 45 000 € + 30 000 € + 30 000 € + 25 181, 80 € + 87 154, 96 € + 15 167, 86 € = 530 134, 51 €, outre la rente viagère de tierce personne de 1 567, 28 € par trimestre (...) ; Créance de la compagnie AXA : la demande de cette compagnie est représentée par la somme totale de 1 010 105, 70 €, la compagnie AXA faisant grief au premier juge de n'avoir pas tenu compte de ce qu'elle devait prendre en charge les frais de tierce personne ; les sommes de 255 925 € (dépenses de santé) imputées sur le poste ` dépenses de santé actuelles', 62 040 € (indemnités journalières) imputées sur le poste'perte de gains professionnels actuels', 72 075 € et 167 590, 04 € (rente et capital de rente accident du travail) imputées sur le poste'perte de gains professionnels futurs'ne sont pas discutées par la MAAF qui les a reprises dans ses écritures ; pour le surplus, c'est-à-dire pour la rente de tierce personne, la cour a retenu la somme mensuelle non contestée de 930 € réglée par AXA, soit 113. 460 € pour la rente de tierce personne échue à ce jour et celle de 262 164, 4 € pour la rente à échoir, imputée sur le poste 'tierce personne'; la créance totale d'AXA s'élève donc à la somme de 933. 254, 44 € » ;

1°/ ALORS, D'UNE PART, QUE l'objet du litige est fixé par les prétentions respectives des parties, de sorte que méconnaît les termes du litige le juge qui alloue à une partie moins qu'il n'a été offert par son adversaire ; qu'en l'espèce, dans leurs conclusions d'appel (p. 6 et 7), la société MAAF et M. Y... offraient une rente trimestrielle de 1. 610 euros, en proposant un euro de rente de 22, 096 et une période de référence annuelle de 400 jours, et ils ne demandaient pas la suspension de cette rente en cas d'hospitalisation de M. X... ; qu'en cet état, la cour d'appel ne pouvait ni allouer à M. X... une rente trimestrielle de 1. 567, 28 euros au titre des dépenses de tierce personne à échoir à compter du jour de l'arrêt, en fixant la valeur de l'euro de rente à 21, 235 et la période de référence annuelle à 365 jours (arrêt, p. 7), ni retenir que cette rente serait suspendue en cas d'hospitalisation prise en charge par un organisme social d'une durée supérieure à 45 jours (arrêt, p. 10), sans violer les articles 4 et 16 du Code de procédure civile ;
2°/ ALORS, D'AUTRE PART, QUE l'objet du litige est fixé par les prétentions respectives des parties, de sorte que méconnaît les termes du litige le juge qui alloue à une partie moins qu'il n'a été offert par son adversaire ; qu'en l'espèce, la cour d'appel ayant elle-même relevé que la société MAAF et M. Y... proposaient une indemnisation basée sur un taux horaire de 12 euros et une période de référence annuelle de 400 jours (arrêt, p. 7, alinéa 1er), la cour d'appel ne pouvait retenir un taux horaire de 11 euros et une période de référence annuelle de 365 jours pour calculer la somme due à M. X... au titre des dépenses de tierce personne sur la période antérieure à l'arrêt (arrêt, p. 7, alinéas 5 et suiv.), sans violer les articles 4 et 16 du Code de procédure civile ;
3°/ ALORS, AUSSI, QUE les juges du fond sont liés par les conclusions prises devant eux et ne peuvent modifier les termes du litige dont ils sont saisis ; qu'en l'espèce, pour calculer la somme due à M. X... au titre de la perte de gains professionnels futurs, M. X... (conclusions, p. 17), la société MAAF et M. Y... (conclusions, p. 8) et la société AXA (conclusions, p. 4) s'accordaient à déduire la somme de 167. 590, 04 euros au titre de la rente capitalisée de la société AXA ; qu'en cet état, la cour d'appel ne pouvait déduire la somme de 72. 075 euros en plus de celle de 167. 590, 04 euros, en prétendant que ces sommes correspondaient à « la rente capitalisée d'AXA, non contestée » (arrêt, p. 8), sans violer l'article 4 du Code de procédure civile ;
4°/ ALORS, EN OUTRE, QUE la réparation du préjudice de la victime doit être intégrale ; qu'en l'espèce, dans ses conclusions délaissées (p. 22 et 23), M. X... sollicitait la somme de 45. 000 euros au titre de son préjudice esthétique en faisant valoir qu'il était constitué non seulement par des cicatrices et une jambe sectionnée mais en outre par un bras atrophié ; qu'en limitant la réparation de ce chef de préjudice à la somme de 30. 000 euros au regard de l'amputation du pied de M. X..., de ses cicatrices et de son jeune âge, sans répondre au moyen tiré de ce que son préjudice devait aussi tenir compte de l'atrophie de son bras gauche, et sans motiver son arrêt sur ce point, la cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;
5°/ ALORS, DE SURCROÎT, QUE le juge, qui constate l'existence d'un préjudice, doit l'indemniser en évaluant son montant ; qu'en l'espèce, la cour d'appel ne pouvait rejeter la demande d'indemnisation de M. X... au titre des difficultés à lier une relation amoureuse du fait de son handicap, lequel est distinct du déficit fonctionnel permanent, au prétexte que les pièces versées aux débats ne lui permettaient pas « de mesurer l'impact du handicap sur la vie amoureuse de M X... » dont elle constatait l'existence dans son principe et que ce préjudice ne peut être réparé séparément du déficit fonctionnel permanent ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé l'article 1382 du Code civil ;
6°/ ALORS, ENFIN, QUE dans ses conclusions délaissées (p. 23), M. X... demandait la réparation du préjudice moral et psychologique dont il avait été victime du fait des huit procédures judiciaires qu'il avait été contraint d'engager pour obtenir l'indemnisation de ses préjudices et du fait de la résistance de la MAAF, qui ne lui avait versé spontanément que la somme de 3049 € en huit années ; qu'en ne répondant pas à ce moyen, la cour d'appel a violé l'article 455 du Code du procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 11-10224
Date de la décision : 13/01/2012
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Analyses

ACCIDENT DE LA CIRCULATION - Indemnisation - Victime - Préjudice corporel - Préjudice d'établissement - Définition

RESPONSABILITE DELICTUELLE OU QUASI DELICTUELLE - Dommage - Préjudice personnel - Préjudice détablissement - Définition - Portée RESPONSABILITE DELICTUELLE OU QUASI DELICTUELLE - Dommage - Préjudice personnel - Préjudice d'établissement - Préjudice distinct du déficit fonctionnel permanent - Portée

Le préjudice d'établissement consiste en la perte d'espoir et de chance de réaliser un projet de vie familiale en raison de la gravité du handicap. Dès lors, encourt la cassation l'arrêt qui rejette la demande d'indemnisation de ce poste de préjudice au motif que les troubles ressentis par la victime dans ses conditions d'existence personnelles, familiales et sociales ont été indemnisés au titre du déficit fonctionnel permanent, alors que le préjudice d'établissement à raison d'un handicap physique ayant crée une incapacité permanente partielle de 67 % constitue un poste de préjudice distinct et que la victime reste atteinte, après consolidation, des séquelles d'une amputation partielle du membre inférieur gauche et d'une paralysie quasi-complète de la main à l'épaule


Références :

article 3 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 et le principe de la réparation intégrale du préjudice

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 06 octobre 2010

Sur la définition du préjudice d'établissement, à rapprocher :2e Civ., 12 mai 2011, pourvoi n° 10-17148 , Bull. 2011 , II, n° 106 (cassation partielle)


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 13 jan. 2012, pourvoi n°11-10224, Bull. civ. 2012, II, n° 9
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2012, II, n° 9

Composition du Tribunal
Président : M. Loriferne
Avocat général : M. Lautru
Rapporteur ?: Mme Bouvier
Avocat(s) : Me Le Prado, Me de Nervo, SCP Coutard et Munier-Apaire

Origine de la décision
Date de l'import : 01/12/2012
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.10224
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