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13/07/2011 | FRANCE | N°10-19734

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 13 juillet 2011, 10-19734


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 143-6 du code rural ensemble l'article L. 412-5 du même code ;
Attendu que le droit de préemption de la société d'aménagement foncier et d'établissement rural ne peut s'exercer contre le preneur en place, son conjoint ou son descendant régulièrement subrogé dans les conditions prévues à l'article L. 412-5 que si ce preneur exploite le bien concerné depuis moins de trois ans ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 26 avril 2010), que la Société d

'aménagement foncier Aveyon Lot Tarn (la SAFALT) a exercé son droit de préemptio...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 143-6 du code rural ensemble l'article L. 412-5 du même code ;
Attendu que le droit de préemption de la société d'aménagement foncier et d'établissement rural ne peut s'exercer contre le preneur en place, son conjoint ou son descendant régulièrement subrogé dans les conditions prévues à l'article L. 412-5 que si ce preneur exploite le bien concerné depuis moins de trois ans ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 26 avril 2010), que la Société d'aménagement foncier Aveyon Lot Tarn (la SAFALT) a exercé son droit de préemption et retrocédé des parcelles de terres appartenant à la société de Cazette, préalablement données à bail pour partie à M. X... puis vendues à ce dernier sous condition suspensive, cette vente devant être ultérieurement réitérée par acte authentique ; que M. X... a assigné la SAFALT et la société de Cazette en annulation des décisions de préemption et des ventes subséquentes ; qu'il a par la suite également assigné la SAFALT ainsi que les différents rétrocessionnaires en annulation des décisions de rétrocession ;
Attendu que pour accueillir ces demandes, l'arrêt retient que l'article L. 143-6 du code rural exclut le droit de préemption de la SAFER lorsque le preneur en place exploite le bien depuis plus de trois ans, sans exiger d'autre condition de ce dernier, et notamment le fait qu'il soit également titulaire d'un droit de préemption ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'article L. 143-6 du code rural ne peut s'appliquer qu'au profit d'un preneur en place remplissant les conditions prévues par l'article L. 412-5 du même code, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 26 avril 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Toulouse ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse, autrement composée ;
Condamne les consorts X..., la société de Cazette, la SCI Domaine de Roquecourbe, la SCI Saint-Hubert, les époux Y..., M. Z..., Mme A..., M. B... et les époux C... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne les consorts X... à payer à la SAFALT la somme de 2 500 euros ; rejette les demandes des consorts X... et de M. Z... ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du treize juillet deux mille onze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils pour la SAFALT
Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR annulé les décisions de préemption de la SAFALT et d'AVOIR, en conséquence, annulé les différentes ventes intervenues au profit de la SAFALT, ainsi que les décisions de rétrocession et tous les actes de ventes subséquents titrant les rétrocessionnaires, ordonné la restitution du prix de vente à chaque rétrocessionnaire et déclaré parfaites les ventes entre chacun des consorts X... et les vendeurs initiaux ;
AUX MOTIFS QUE selon l'article L 143-1 du code rural dans sa rédaction applicable présent litige, le droit de préemption de la Safer a vocation à jouer en cas d'aliénation à titre onéreux de fonds agricoles ou de terrains à vocation agricole, quelle que soit leur dimension sous réserve des dispositions prévues au premier alinéa de l'article L 143-7 ; que l'article L 143-6 alinéa 1er du même code dispose que le droit de préemption de la Safer ne peut primer les droits de préemption établis dans les textes en vigueur au profit de l'État des collectivités publiques des établissements publics et des cohéritiers bénéficiaires de l'attribution préférentielle prévue à l'article 832-1 du code civil ; que l'alinéa 2 de ce texte précise que ce droit de préemption ne peut s'exercer contre le preneur en place, son conjoint ou son descendant régulièrement subrogé dans les conditions prévues à l'article L 412-5 que si ce preneur exploite le bien concerné depuis moins de trois ans ; qu'il résulte des dispositions de l'article L 412-5 que bénéficie du droit préemption le preneur ayant exercé au moins pendant trois ans la profession agricole et exploitant par lui-même ou par sa famille le fonds mis en vente ; qu'il peut exercer personnellement ce droit, soit pour exploiter lui-même , soit pour faire assurer l'exploitation du fonds par son conjoint ou le partenaire avec lequel il est lié par un pacte civil de solidarité participant à l'exploitation ou par un descendant si ce conjoint, partenaire ou descendant a exercé la profession agricole pendant trois ans au moins ou est titulaire d'un diplôme d'enseignement agricole ; qu'il peut aussi subroger, dans l'exercice de ce droit, son conjoint ou le partenaire participant à l'exploitation ou un descendant majeur ou mineur émancipé qui remplisse les conditions prévues à l'alinéa précédent ; que le droit de préemption ne peut être exercé si, au jour où il fait connaître sa décision d'exercer ce droit, le bénéficiaire (preneur ou subrogé) est déjà propriétaire de parcelles représentant une superficie supérieure à trois fois la surface minimum d'installation ; que l'article R 143-7 prévoit « lorsqu'un droit préemption ou un droit préférentiel primant celui de la Safer en application des articles L 143-6 et L 143-8 est susceptible d'être exercé avant l'aliénation, le notaire chargé d'instrumenter doit informer la société de l'existence de ce droit. Hors le cas de l'adjudication forcée ou volontaire, le même notaire fait connaître à la société dans le délai de huit jours à compter de la date à laquelle il en a eu connaissance la décision explicite ou implicite prise sur la préemption par le titulaire de ce droit prioritaire. Le délai d'exercice de préemption de la société court à compter de la date de réception de cette décision. La société peut dans tous les cas déclarer exercer son droit de préemption sous réserve que le titulaire d'un droit qui prime le sien ne l'exerce pas » ; qu'en l'espèce, lorsque les actes sous seing privé de vente ont été conclus entre la SCA de Cazette et les époux Jean-Luc X... d'une part, la SCA de Cazette et la SCI du domaine de Roque courbe et M. Jean-Philippe X... d'autre part, les preneurs exploitaient les parcelles objet la vente depuis plus de trois ans ; qu'il n'est pas contesté que M. Jean-Luc X... et M. Jean-Philippe X... sont propriétaires de plus de trois SMI et ne peuvent donc exercer un droit de préemption ; que toutefois ainsi que l'a justement relevé le premier juge, les termes de l'article L. 143-6 du code rural sont parfaitement clairs. Ils excluent le droit de préemption de la Safer lorsque le preneur en place exploite le bien depuis plus de trois ans sans exiger d'autre condition de ce dernier, et notamment le fait qu'il soit également titulaire d'un droit de préemption. La référence faite par l'article L. 143-6 à l'article L. 412-5 concerne les conditions que doit remplir le conjoint, le partenaire ou le descendant pour être subrogé dans les droits du preneur en place. Par ailleurs, l'article R 143-7 du code rural évoque expressément l'existence d'un droit préférentiel pouvant primer le droit de préemption de la Safer en application de l'article L 143-6 et il ne peut pas en être déduit que ce droit est celui des cohéritiers bénéficiaires de l'attribution préférentielle ; qu'en effet, le premier alinéa de l'article L 143-6 vise le droit de préemption de ces derniers ; qu'en l'occurrence les preneurs régulièrement en place depuis plus de trois ans n'ont pas exercé un droit de préemption à l'occasion d'une vente envisagée au profit d'un tiers mais dans le cadre d'une vente de gré à gré directement consentie par leur bailleur, le droit de priorité que leur confère l'article L 143-6 susvisé ; que le notaire a régulièrement informé la SAFALT de l'exercice de ce droit ; que la SAFALT ne pourrait retrouver son droit préemption que dans l'hypothèse où ce droit préférentiel ne serait pas exercé par les consorts X... ce qui n'est pas le cas ; que les décisions de préemption prises par la SAFALT sont donc nulles, et le jugement doit être confirmé sur ce point ; que la nullité des actes de préemption entraîne celle de tous les actes subséquents à l'exercice de ce droit (…) ;
1) ALORS QUE l'article L 143-6 du code rural restreignant le droit de préemption de la Safer en présence d'un preneur sortant titulaire d'un bail depuis au moins trois ans renvoie expressément aux dispositions de l'article L 412-5 du même code interdisant notamment au preneur sortant d'exercer son droit de préemption si, au jour où il fait connaître sa décision d'exercer ce droit, il est déjà propriétaire de parcelles représentant une superficie supérieure à trois SMI ; qu'il s'ensuit que le preneur en place ne peut faire échec au droit de préemption de la Safer, qu'à la double condition cumulative d'être titulaire d'un bail rural sur les terres vendues depuis au moins trois ans, et d'exploiter une surface inférieure à 3 SMI ; que, dès lors, en décidant d'exclure le droit de préemption de la Safalt, après avoir expressément constaté que les consorts X... « sont propriétaires de plus de trois SMI et ne peuvent donc exercer un droit de préemption », la Cour d'appel a violé les articles L 143-6 et L 412-5 du code rural dans leur rédaction applicable en la cause ;
2) ALORS QUE selon l'article L 143-6 ancien du code rural, le droit de préemption de la Safer ne peut primer les droits de préemption établis par les textes en vigueur au profit de l'Etat, des collectivités publiques, des établissements publics et des cohéritiers bénéficiaires de l'attribution préférentielle prévue à l'article 832-2 du code civil ; que la référence expresse faite aux dispositions de l'article 832-2 ancien du code civil renvoie au seul droit préférentiel d'attribution consenti aux indivisaires ; qu'en affirmant que les consorts X..., preneurs en place exploitant, depuis plus de trois ans, un bien d'une superficie supérieure à 3 SMI, bénéficiaient d'un droit de préférence primant le droit de préemption de la Safalt, la cour d'appel a violé les articles L 143-6 ancien, R 143-7 du code rural et 832-2 ancien du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 10-19734
Date de la décision : 13/07/2011
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Analyses

SOCIETE D'AMENAGEMENT FONCIER ET D'ETABLISSEMENT RURAL - Préemption - Exercice - Primauté du preneur en place - Conditions - Détermination

Viole les articles L. 143-6 et L. 412-5 du code rural une cour d'appel qui, à la demande du preneur en place, annule les décisions de préemption et de rétrocession d'une société d'aménagement foncier et d'établissement rural alors que l'article L. 143-6 du code rural ne peut s'appliquer qu'au profit d'un preneur en place remplissant les conditions prévues par l'article L. 412-5 du même code


Références :

articles L. 143-6 et L. 412-5 du code rural

Décision attaquée : Cour d'appel de Toulouse, 26 avril 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 13 jui. 2011, pourvoi n°10-19734, Bull. civ. 2011, III, n° 137
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2011, III, n° 137

Composition du Tribunal
Président : Mme Bellamy (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat général : M. Bailly
Rapporteur ?: Mme Pic
Avocat(s) : SCP Peignot et Garreau, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, SCP Vincent et Ohl

Origine de la décision
Date de l'import : 17/11/2012
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.19734
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