LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- L'administration des douanes, partie poursuivante,
contre l'arrêt de la cour d'appel de COLMAR, chambre correctionnelle, en date du 2 février 2010, qui, dans les poursuites exercées contre M. Moussa X... et Mme Angélique Y... du chef d'importation en contrebande de marchandises prohibées, l'a déclarée irrecevable en son action ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation de l'article 7 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme, de l'article 343 et des articles 38, 369, 414, 417, 418, 419, 420, 421, 422, 432 bis et 438 du code des douanes et des articles 591 et 593 du code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt a déclaré irrecevable l'appel formé par l'administration des douanes ;
"aux motifs qu'il est constant que le tribunal correctionnel a été saisi par l'ordonnance de renvoi d'une infraction douanière. Toutefois, l'administration des douanes n'était pas présente à l'audience correctionnelle au cours de laquelle aucune réquisition n'a été prise au titre de l'action douanière ;
"1°) alors que, lorsque la juridiction correctionnelle est saisie par l'ordonnance de renvoi d'une infraction douanière, en l'absence de l'administration des douanes, l'action fiscale est nécessairement exercée par le ministère public ; que M. X... a été renvoyé devant le tribunal correctionnel par ordonnance du 11 août 2009 des chefs des délits d'importation, transport et détention non autorisés de stupéfiants et du chef du délit douanier de contrebande de marchandises prohibées ; qu'en déclarant l'appel formé par l'administration des douanes irrecevable au motif que l'administration des douanes n'était pas présente à l'audience correctionnelle au cours de laquelle aucune réquisition n'a été prise au titre de l'action fiscale, alors que le ministère public exerçait nécessairement l'action fiscale accessoirement à l'action publique dont le tribunal était saisi par l'ordonnance de renvoi, et ce, nonobstant l'absence de réquisitions sur l'action fiscale, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
"2°) alors que lorsqu'un prévenu a été renvoyé devant le tribunal correctionnel sous la double prévention de droit commun et d'infractions douanières, et que seules des peines de droit commun ont été prononcées par ce tribunal, l'appel de l'administration des douanes saisit la juridiction du second degré de l'action fiscale exercée accessoirement à l'action publique par le procureur de la République, la cour d'appel devant annuler le jugement en ce qu'il a omis de statuer sur l'action fiscale et évoquer conformément aux dispositions de l'article 520 du code de procédure pénale ; qu'en déclarant irrecevable l'appel formé par l'administration des douanes, alors que le tribunal saisi par l'ordonnance de renvoi d'une infraction douanière était entré en voie de condamnation du chef de cette infraction sans l'assortir d'une sanction, en sorte que l'administration des douanes était recevable à relever appel de ce jugement et qu'il appartenait à la cour, par la voie de l'évocation, de se prononcer sur les pénalités douanières, la cour d'appel a violé les textes susvisés" ;
Vu l'article 343 du code des douanes, ensemble les articles 509 et 520 du code de procédure pénale ;
Attendu, d'une part, que selon l'article 343, alinéa 2, du code des douanes, l'action pour l'application des sanctions fiscales est exercée à titre principal par l'administration des douanes et peut l'être par le ministère public accessoirement à l'action publique ;
Attendu, d'autre part, que, aux termes de l'article 509 du code de procédure pénale, l'affaire est dévolue à la cour d'appel dans les limites fixées par l'acte d'appel et la qualité de l'appelant ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure et que M. Moussa X... et Mme Angélique Y... ont été renvoyés par ordonnance du juge d'instruction devant la juridiction correctionnelle des chefs d'infractions à la législation sur les stupéfiants et délit douanier d'importation en contrebande de marchandises prohibées ; que l'administration des douanes n'est pas intervenue aux débats devant les premiers juges, lesquels ont cependant retenu la culpabilité des prévenus pour le délit douanier reproché, sans statuer sur les pénalités douanières encourues ; que l'administration des douanes a interjeté appel des dispositions fiscales dudit jugement ;
Attendu que, pour déclarer cet appel irrecevable, l'arrêt retient que l'administration des douanes n'était pas représentée à l'audience devant le tribunal au cours de laquelle aucune réquisition n'a été prise sur l'action douanière ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, alors que, saisie de l'appel de l'administration des douanes du jugement ayant retenu, sur l'action fiscale du ministère public exercée concurremment à l'action publique, la culpabilité des prévenus du chef du délit douanier reproché, la cour d'appel, qui avait l'obligation d'évoquer, après annulation du jugement, en ce qui qu'il avait omis de statuer sur les sanctions fiscales encourues, a méconnu l'étendue de sa saisine ainsi que le sens et la portée des textes susvisés ;
D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Colmar, en date du 2 février 2010, mais en ses seules dispositions ayant déclaré irrecevable l'appel de l'administration des douanes ;
Et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée,
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Nancy, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Colmar et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Louvel président, M. Bayet conseiller rapporteur, M. Dulin conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Daudé ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;