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12/05/2011 | FRANCE | N°10-15667

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 12 mai 2011, 10-15667


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur les deux moyens réunis :

Attendu qu'Alfred X... et Mme Y... qui s'étaient mariés le 27 décembre 1955, ont divorcé le 20 octobre 1997 ; qu'après le décès d'Alfred X..., Mme Y... a assigné les héritières de celui-ci en ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de la communauté ayant existé entre eux ;

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué (Paris, 3 février 2010) d'avoir dit que seraient portés à l'actif de communauté les tableaux de Pin

chus A... qu'Alfred X... avait reçus en héritage alors, selon le premier moyen, que selo...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur les deux moyens réunis :

Attendu qu'Alfred X... et Mme Y... qui s'étaient mariés le 27 décembre 1955, ont divorcé le 20 octobre 1997 ; qu'après le décès d'Alfred X..., Mme Y... a assigné les héritières de celui-ci en ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de la communauté ayant existé entre eux ;

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué (Paris, 3 février 2010) d'avoir dit que seraient portés à l'actif de communauté les tableaux de Pinchus A... qu'Alfred X... avait reçus en héritage alors, selon le premier moyen, que selon les dispositions de l'article L. 121-9 du code de la propriété intellectuelle, « sous tous les régimes matrimoniaux et à peine de nullité de toutes clauses contraires portées au contrat de mariage, le droit de divulguer l'oeuvre, de fixer les conditions de son exploitation et d'en défendre l'intégrité reste propre à l'époux auteur ou à celui des époux à qui de tels droits ont été transmis » ; que ces dispositions sont immédiatement applicables aux oeuvres divulguées après le 11 mars 1958, date d'entrée en vigueur de la loi du 11 mars 1957, peu important que le titulaire des droits se soit marié avant cette date ; que les oeuvres des arts plastiques s'exploitant, pour l'essentiel, par la vente du support matériel de l'original, le caractère propre des droits d'auteur implique que ce support soit lui-même considéré comme un bien propre du titulaire de ces droits ; qu'en statuant au seul vu du régime matrimonial des ex-époux et en retenant que l'absence de divulgation des oeuvres de Pinchus A... serait indifférente, pour décider que le support matériel de ces oeuvres devrait être porté à l'actif de la communauté, cependant que de cette divulgation dépendait la titularité des droits d'auteur et, par voie de conséquence, la propriété des tableaux, la cour d'appel a violé l'article L. 121-9 du code de la propriété intellectuelle ;

Et alors, selon le second moyen, que la cassation à intervenir sur le fondement du premier moyen, qui soutient que les tableaux qu'Alfred X... a recueillis dans la succession de son père ne sont pas entrés en communauté et ne font donc pas partie de l'indivision post-communautaire, entrainera par voie de conséquence la cassation de l'arrêt en ce qu'il a infirmé le jugement qui avait déchargé l'administrateur judiciaire des chefs de mission concernant ces tableaux, et ce par application de l'article 624 du code de procédure civile ;

Mais attendu qu'après avoir exactement énoncé que dès lors que le régime matrimonial des époux X... était celui de la communauté de meubles et acquêts, régime légal en vigueur au moment de leur union, de sorte qu'avait vocation à s'appliquer l'article 1401 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi du 13 juillet 1965, selon lequel la communauté se compose de tout le mobilier qui échoit aux époux pendant le mariage à titre de succession ou même de donation, si le donateur n'a pas exprimé le contraire, la cour d'appel, constatant que, par son testament olographe daté du 17 avril 2000, Alfred X... avait légué à sa fille Jeannette le droit moral et le droit pécuniaire qui lui avaient été transmis par Pinchus A..., son père dont il était l'unique héritier, en a déduit à bon droit, conformément à la règle selon laquelle la propriété intellectuelle est indépendante de la propriété de l'objet matériel, que le support matériel des oeuvres de ce dernier, qui lui était échu pendant son mariage à titre de succession, était entré en communauté, de sorte que les tableaux litigieux devaient, en tant que biens corporels, être portés à l'actif de la communauté, peu important qu'ils n'aient pas été divulgués ; que le premier moyen n'est pas fondé ; que le rejet de celui-ci rend sans objet le second ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne les consorts X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne les consorts X... à payer la somme de 3 500 euros à Mme Y... ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze mai deux mille onze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par de la SCP Bénabent, avocat aux Conseils pour les consorts X....

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que les tableaux de Pichus A... seraient portés à l'actif de communauté ;

AUX MOTIFS QU': « à la suite du décès, le 5 avril 1981, du peintre Pinchus A..., Alfred X..., son fils, a reçu en héritage une collection de tableaux ; qu'ainsi que l'a jugé à bon droit le tribunal, les époux X... s'étant mariés sans contrat le 27 décembre 1955 en Suède et ayant fixé leur premier domicile matrimonial en France, leur régime matrimonial était celui de la communauté de meubles et acquêts, régime légal français en vigueur au moment de leur union ; que, selon l'article 1401 du Code civil dans sa rédaction antérieure à la loi du 13 juillet 1965 et applicable en l'espèce, la communauté se compose activement de tout le mobilier qui échoit aux époux pendant le mariage à titre de succession ou même de donation, si le donateur n'a pas exprimé le contraire ; que si, par son testament olographe daté du 17 avril 2000, Alfred X... a légué à sa fille Jeannette le droit moral et le droit pécuniaire qui lui avaient été transmis par Pinchus A..., son père dont il était l'unique héritier, le support matériel des oeuvres, qui lui est échu pendant son mariage à titre de succession, est entré en communauté, de sorte que les tableaux, en tant que biens corporels, doivent être portés à l'actif de communauté, peu important qu'ils n'aient pas été divulgués ; qu'il appartiendra à Madame Jeannette X..., légataire du droit moral, d'user, le cas échéant, de la faculté de prélèvement, à charge de compensation pécuniaire, pour se faire attribuer les tableaux lors du partage de la communauté ; qu'il y a donc lieu d'infirmer le jugement de ce chef » ;

ALORS QUE selon les dispositions de l'article L. 121-9 du Code de la propriété intellectuelle, « sous tous les régimes matrimoniaux et à peine de nullité de toutes clauses contraires portées au contrat de mariage, le droit de divulguer l'oeuvre, de fixer les conditions de son exploitation et d'en défendre l'intégrité reste propre à l'époux auteur ou à celui des époux à qui de tels droits ont été transmis » ; que ces dispositions sont immédiatement applicables aux oeuvres divulguées après le 11 mars 1958, date d'entrée en vigueur de la loi du 11 mars 1957, peu important que le titulaire des droits se soit marié avant cette date ; que les oeuvres des arts plastiques s'exploitant, pour l'essentiel, par la vente du support matériel de l'original, le caractère propre des droits d'auteur implique que ce support soit lui-même considéré comme un bien propre du titulaire de ces droits ; qu'en statuant au seul vu du régime matrimonial des ex-époux et en retenant que l'absence de divulgation des oeuvres de Pinchus A... serait indifférente, pour décider que le support matériel de ces oeuvres devrait être porté à l'actif de la communauté, cependant que de cette divulgation dépendait la titularité des droits d'auteur et, par voie de conséquence, la propriété des tableaux, la Cour d'appel a violé l'article L. 121-9 du Code de la propriété intellectuelle.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé les ordonnances du tribunal de grande instance de Meaux des 9 novembre 2006, 25 mai 2007 et 15 février 2008 et d'avoir infirmé le jugement en ce qu'il avait dit qu'« à compter du jour où le jugement sera passé en force de chose jugée, Maître B... sera déchargée des seuls chefs de mission relatifs à ces tableaux » ceux de Pinchus A... ;

AUX MOTIFS QU': « à la suite du décès, le 5 avril 1981, du peintre Pinchus A..., Alfred X..., son fils, a reçu en héritage une collection de tableaux ; qu'ainsi que l'a jugé à bon droit le tribunal, les époux X... s'étant mariés sans contrat le 27 décembre 1955 en Suède et ayant fixé leur premier domicile matrimonial en France, leur régime matrimonial était celui de la communauté de meubles et acquêts, régime légal français en vigueur au moment de leur union ; que, selon l'article 1401 du Code civil dans sa rédaction antérieure à la loi du 13 juillet 1965 et applicable en l'espèce, la communauté se compose activement de tout le mobilier qui échoit aux époux pendant le mariage à titre de succession ou même de donation, si le donateur n'a pas exprimé le contraire ; que si, par son testament olographe daté du 17 avril 2000, Alfred X... a légué à sa fille Jeannette le droit moral et le droit pécuniaire qui lui avaient été transmis par Pinchus A..., son père dont il était l'unique héritier, le support matériel des oeuvres, qui lui est échu pendant son mariage à titre de succession, est entré en communauté, de sorte que les tableaux, en tant que biens corporels, doivent être portés à l'actif de communauté, peu important qu'ils n'aient pas été divulgués ; qu'il appartiendra à Madame Jeannette X..., légataire du droit moral, d'user, le cas échéant, de la faculté de prélèvement, à charge de compensation pécuniaire, pour se faire attribuer les tableaux lors du partage de la communauté ; qu'il y a donc lieu d'infirmer le jugement de ce chef ; que par voie de conséquence il y a lieu de l'infirmer en ce qu'il a déchargé Me B... de sa mission en ce qu'elle porte sur ces tableaux à compter du jour où il sera passé en force de chose jugée » ;

ALORS QUE la cassation à intervenir sur le fondement du premier moyen, qui soutient que les tableaux qu'Alfred X... a recueillis dans la succession de son père ne sont pas entrés en communauté et ne font donc pas partie de l'indivision post-communautaire, entrainera par voie de conséquence la cassation de l'arrêt en ce qu'il a infirmé le jugement qui avait déchargé l'administrateur judiciaire des chefs de mission concernant ces tableaux, et ce par application de l'article 624 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 10-15667
Date de la décision : 12/05/2011
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

REGIMES MATRIMONIAUX - Communauté entre époux - Législation antérieure à la loi du 13 juillet 1965 - Actif - Composition - Support matériel des oeuvres picturales - Cas - Legs par un époux du droit moral et du droit pécuniaire sur des tableaux - Portée

Après avoir exactement énoncé que dès lors que le régime matrimonial des époux était celui de la communauté de meubles et acquêts, régime légal en vigueur au moment de leur union, de sorte qu'avait vocation à s'appliquer l'article 1401 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 65-570 du 13 juillet 1965, selon lequel la communauté se compose de tout le mobilier qui échoit aux époux pendant le mariage à titre de succession ou même de donation, si le donateur n'a pas exprimé le contraire, une cour d'appel, constatant que, par testament olographe l'époux prédécédé avait légué à sa fille le droit moral et le droit pécuniaire sur des tableaux qui lui avaient été transmis par son père dont il était l'unique héritier, en a déduit à bon droit, conformément à la règle selon laquelle la propriété intellectuelle est indépendante de la propriété de l'objet matériel, que le support matériel des oeuvres de ce dernier, qui lui était échu pendant son mariage à titre de succession, était entré en communauté, de sorte que lesdits tableaux devaient, en tant que biens corporels, être portés à l'actif de la communauté, peu important qu'ils n'aient pas été divulgués


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 03 février 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 12 mai. 2011, pourvoi n°10-15667, Bull. civ. 2011, I, n° 88
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2011, I, n° 88

Composition du Tribunal
Président : M. Charruault
Avocat général : M. Gauthier
Rapporteur ?: Mme Crédeville
Avocat(s) : SCP Bénabent, SCP Richard

Origine de la décision
Date de l'import : 25/10/2012
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.15667
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