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28/04/2011 | FRANCE | N°10-17187

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 28 avril 2011, 10-17187


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 11 mars 2010), qu'à la suite d'un contrôle clos le 22 juillet 1997 portant sur la période du 1er août 1994 au 31 décembre 1996, l'URSSAF de Paris a redressé les bases de contribution au régime de sécurité sociale des artistes-auteurs de la société Tapisseries Robert Four (la société) qui manufacture et commercialise des tapisseries d'art réalisées à partir de cartons pour lesquels l'artiste perçoit un droit d'auteur ; qu'elle a co

ntesté ce redressement devant une juridiction de sécurité sociale ;
Attendu q...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 11 mars 2010), qu'à la suite d'un contrôle clos le 22 juillet 1997 portant sur la période du 1er août 1994 au 31 décembre 1996, l'URSSAF de Paris a redressé les bases de contribution au régime de sécurité sociale des artistes-auteurs de la société Tapisseries Robert Four (la société) qui manufacture et commercialise des tapisseries d'art réalisées à partir de cartons pour lesquels l'artiste perçoit un droit d'auteur ; qu'elle a contesté ce redressement devant une juridiction de sécurité sociale ;
Attendu que la société fait grief à l'arrêt de dire qu'elle doit être assujettie à la contribution de 3,30 % sur le chiffre d'affaires, dite de type A, et non à la contribution de 1% sur la rémunération de l'artiste-auteur, dite de type B, alors, selon le moyen :
1°/ que toute personne physique ou morale qui procède à la diffusion ou à l'exploitation commerciale des oeuvres originales relevant des arts est tenue de verser à l'organisme agréé compétent la contribution instituée à l'article L. 382-4 du code de la sécurité sociale ; que la contribution due à l'occasion de la diffusion ou de l'exploitation commerciale des oeuvres des artistes, vivants ou morts, auteurs d'oeuvres graphiques et plastiques, est calculée en pourcentage, soit du chiffre d'affaires, toutes taxes comprises, afférent à cette diffusion ou à cette exploitation, même lorsque les oeuvres sont tombées dans le domaine public, soit, lorsque l'oeuvre n'est pas vendue au public, du montant de la rémunération brute de l'artiste auteur (art. R. 382-17 du code de la sécurité sociale) ; qu'en l'espèce, l'oeuvre d'art originale de l'artiste est le carton qui demeure la propriété de ce dernier et est exploité par l'exposante par adaptation à la tapisserie contre versement d'un droit d'auteur à l'artiste ; qu'en décidant que la vente de tapisseries, qui ne sont pas l'oeuvre de l'auteur-artiste, qui demeure seul propriétaire de son oeuvre originale et perçoit un droit de reproduction, mais sont le fruit du travail des salariés de la société (dessinateurs, lissiers, couturiers restaurateurs…), relève de la contribution calculée en pourcentage du chiffre d'affaires TTC afférent à la diffusion ou à l'exploitation de l'oeuvre originale, et non de celle calculée en pourcentage de la rémunération brute de l'artiste-auteur, la cour d'appel a violé les articles L. 382-4 et R. 382-17 du code de la sécurité sociale ;
2°/ qu'en estimant que le fait que la société bénéficie de la TVA à taux réduit prévu par l'article 98-A du code général des impôts qui vise des oeuvres d'art originales justifie son assujettissement à la contribution calculée en pourcentage du chiffre d'affaires TTC afférent à la diffusion ou à l'exploitation de l'oeuvre originale, la cour d'appel a statué par des motifs radicalement inopérants, en violation des articles L. 382-4 et R. 382-17 du code de la sécurité sociale ;
3°/ que la société soutenait d'une part que l'application de l'article 98 A du code général des impôts résulte, non pas du statut d'oeuvre d'art original des tapisseries, mais d'une décision du ministre délégué au budget prise à titre exceptionnel pour tenir compte de l'intérêt attaché à la préservation de cette activité d'une valeur culturelle et artistique particulièrement remarquable et, d'autre part, que la Maison des artistes avait elle-même expressément reconnu que la société n'acquiert pas des oeuvres originales dans le but de les revendre (ce que font les diffuseurs assujettis à la contribution sur le chiffres d'affaires TTC) et ne vend donc pas de tapisserie originale mais est seulement exploitant d'oeuvres originales par le fait de fabriquer et de vendre des tapisseries ; qu'en ne s'expliquant pas sur ce moyen déterminant, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
4°/ que l'arrêt attaqué ayant à bon droit infirmé le jugement en ce qu'il a validé les mises en demeure et contraintes délivrées sur le fondement de l'article L. 244-2 du code de la sécurité sociale, et prononcé en conséquence la nullité des mises en demeure notifiées pour la période du 3e trimestre 1998 au 1er trimestre 2004, la cassation qui sera prononcée en ce qu'il a dit que la société doit être assujettie à la contribution de 3,30 % dite de type A emportera nécessairement par voie de conséquence l'annulation de toutes les mises en demeure et la cassation du chef du dispositif disant que les parties devront en conséquence reprendre sur la base de cette seule contribution tous les calculs des sommes dues par la société ;
Mais attendu qu'il résulte, d'une part, des articles L. 382-4 et R. 382-17 du code de la sécurité sociale que la contribution est assise sur le chiffre d'affaires réalisé à raison de la diffusion ou de l'exploitation commerciale des oeuvres des artistes-auteurs ou, lorsque l'oeuvre n'est pas vendue au public, sur leur rémunération brute, d'autre part, de l'article R. 382-2 du même code, qui procède par référence à l'article 71 devenu 98 A de l'annexe III du code général des impôts, que sont rattachés au régime général de sécurité sociale les artistes-auteurs de tapisseries et textiles muraux faits à la main, sur la base de cartons originaux fournis par ceux-ci, à condition qu'il n'existe pas plus de huit exemplaires ;
Et attendu que l'arrêt retient que le processus d'exploitation commerciale se traduit bien par une cession, fruit d'un travail spécifique à partir d'un original, dont la valeur particulière est attestée par l'assurance donnée à l'acquéreur par la société dans ses opuscules publicitaires que la tapisserie vendue "tissée à la main d'après une oeuvre contemporaine (...) bénéficie du statut d'oeuvre originale reconnue par l'État" et qu'"elle est authentifiée par la signature de l'artiste ou de ses ayants-droit et sa production est limitée à huit exemplaires numérotés" ;
Que de ces constatations et énonciations dont il résulte que la société vend au public des tapisseries d'art qu'elle réalise selon l'oeuvre originale d'un artiste-auteur de sorte qu'elle exploite et diffuse cette oeuvre, la cour d'appel a exactement déduit que sa contribution au régime social des artistes-auteurs devait être assise sur le chiffre d'affaires procuré par ces ventes ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Tapisseries Robert Four aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Tapisseries Robert Four ; la condamne à payer à l'URSSAF de Paris la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit avril deux mille onze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par Me Ricard, avocat aux Conseils pour la société Tapisseries Robert Four.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit que la société Tapisserie Robert Four doit être assujettie à la contribution de 3,30 % dite de type A et ne doit pas être assujettie à la contribution de 1% dite de type B, dit que les parties devront en conséquence reprendre sur cette base tous les calculs des sommes dues par la société Tapisserie Robert Four et rejeté la demande de la société Robert Four en remboursement des cotisations indûment versées pour la période du 1er trimestre 1995 au 4ème trimestre 1996 au titre de la contribution type A pour un montant de 40.525,21 € ;
AUX MOTIFS QUE « les intimées opposent ensuite qu'il est patent que la société Tapisserie Robert Four commercialise des oeuvres originales au sens de l'article 98-A du Code Général des Impôts, comme en témoigne la publicité faite par l'entreprise ;Considérant que la Maison des Artistes et l'Urssaf arguent ainsi de ce que la société Tapisserie Robert Four procédant à la diffusion et l'exploitation commerciale d'oeuvres originales, est tenue de la contribution due par l'article L 382-4 du Code de la Sécurité Sociale, sans que soit en cause la provenance des oeuvres vendues ou qu'il y ait à distinguer entre le fait que leurs auteurs soient vivants ou décédés, le principe soutenant cette contribution étant celui de la solidarité ; qu'au regard de cette exigence la société Tapisserie Robert Four n'est pas fondée à se prévaloir de la charge de la main d'oeuvre dans ses productions, ce qui conduirait à violer le principe d'égalité au détriment des petits commerçants d'art ;Considérant qu'il importe de revenir à l'analyse des textes concernés :que les dispositions tant de l'article R 382-17 du Code de la Sécurité Sociale que de l'article L 382-4 du même Code reposent sur la prise en compte de deux facteurs :d'une part ceux afférents aux notions de diffusion et d'exploitation commerciale d'oeuvres originales, soit le critère de base, et d'autre part celui de la vente de l'oeuvre, sur lequel repose l'argumentaire de la société Tapisserie Robert Four pour souligner qu'elle ne vend pas l'oeuvre originale à partir de laquelle elle propose sa tapisserie, d'où l'invocation du courrier du 7 août 1998 déjà cité ;Mais, considérant que l'appelante ne discute pas de ce que son activité relève de l'application des textes précités, dont les termes, en vérité, n'en cernent pas précisément la nature, s'agissant de la vente d'une oeuvre elle même issue d'une oeuvre originale non cédée ; qu'ainsi faire bénéficier la société Tapisserie Robert Four de l'assujettissement à la contribution de type B, conduirait à assimiler l'activité de cette entreprise à celle d'un simple diffuseur, au seul motif que les termes "lorsque l'oeuvre n'est pas vendue au public " ne pourrait viser que l'oeuvre original, lors même que dans les faits, le processus d'exploitation commerciale se traduit bien par une cession, fruit d'un travail spécifique à partir d'un original, et dont la valeur particulière est attestée par l'assurance donnée à l'acquéreur par la société Tapisserie Robert Four dans ses opuscules publicitaires que la tapisserie vendue "tissée à la main d'après une oeuvre contemporaine...bénéficie du statut d'oeuvre originale reconnue par l'état. Elle est authentifiée par la signature de l'artiste ou de ses ayants droits et sa production est limitée à huit exemplaires numérotés " ce qui, dès lors, ne permet pas à l'appelante de réfuter ensuite toute référence aux dispositions de l'article 98-A du Code Général des Impôts-celles-là mêmes qui figurent dans cette publicité » ;
1°) ALORS QUE toute personne physique ou morale qui procède à la diffusion ou à l'exploitation commerciale des oeuvres originales relevant des arts est tenue de verser à l'organisme agréé compétent la contribution instituée à l'article L. 382-4 du CSS ; que la contribution due à l'occasion de la diffusion ou de l'exploitation commerciale des oeuvres des artistes, vivants ou morts, auteurs d'oeuvres graphiques et plastiques, est calculée en pourcentage, soit du chiffre d'affaires, toutes taxes comprises, afférent à cette diffusion ou à cette exploitation, même lorsque les oeuvres sont tombées dans le domaine public, soit, lorsque l'oeuvre n'est pas vendue au public, du montant de la rémunération brute de l'artiste auteur (art. R 382-17 du CSS) ; qu'en l'espèce, l'oeuvre d'art originale de l'artiste est le carton qui demeure la propriété de ce dernier et est exploité par l'exposante par adaptation à la tapisserie contre versement d'un droit d'auteur à l'artiste ; qu'en décidant que la vente de tapisseries, qui ne sont pas l'oeuvre de l'auteur-artiste, qui demeure seul propriétaire de son oeuvre originale et perçoit un droit de reproduction, mais sont le fruit du travail des salariés de la société Tapisserie Robert Four (dessinateurs, lissiers, couturiers restaurateurs…), relève de la contribution calculée en pourcentage du chiffre d'affaires TTC afférent à la diffusion ou à l'exploitation de l'oeuvre originale, et non de celle calculée en pourcentage de la rémunération brute de l'artiste-auteur, la Cour d'appel a violé les articles L 382-4 et R 382-17 du Code de la sécurité sociale ;
2°) ALORS QU' en estimant que le fait que la société Tapisserie Robert Four bénéficie de la TVA à taux réduit prévu par l'article 98-A du Code général des impôts qui vise des oeuvres d'art originales justifie son assujettissement à la contribution calculée en pourcentage du chiffre d'affaires TTC afférent à la diffusion ou à l'exploitation de l'oeuvre originale, la Cour d'appel a statué par des motifs radicalement inopérants, en violation des articles L 382-4 et R 382-17 du Code de la sécurité sociale ;
3°) ALORS QUE la société Tapisserie Robert Four soutenait d'une part que l'application de l'article 98 A du Code général des impôts résulte, non pas du statut d'oeuvre d'art original des tapisseries, mais d'une décision du ministre délégué au budget prise à titre exceptionnel pour tenir compte de l'intérêt attaché à la préservation de cette activité d'une valeur culturelle et artistique particulièrement remarquable et, d'autre part, que la Maison des Artistes avait elle-même expressément reconnu que la société Robert Four n'acquiert pas des oeuvres originales dans le but de les revendre (ce que font les diffuseurs assujettis à la contribution sur le chiffres d'affaires TTC) et ne vend donc pas de tapisserie originale mais est seulement exploitant d'oeuvres originales par le fait de fabriquer et de vendre des tapisseries ; qu'en ne s'expliquant pas sur ce moyen déterminant, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;
4°) ALORS QUE l'arrêt attaqué ayant à bon droit infirmé le jugement en ce qu'il a validé les mises en demeure et contraintes délivrées sur le fondement de l'article L 244-2 du Code de la Sécurité Sociale, et prononcé en conséquence la nullité des mises en demeure notifiées pour la période 3ème trimestre 1998 au 1° trimestre 2004, la cassation qui sera prononcée en ce qu'il a dit que la société Tapisserie Robert Four doit être assujettie à la contribution de 3,30 % dite de type A emportera nécessairement par voie de conséquence l'annulation de toutes les mises en demeure et la cassation du chef du dispositif disant que les parties devront en conséquence reprendre sur la base de cette seule contribution tous les calculs des sommes dues par la société Tapisserie Robert Four.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 10-17187
Date de la décision : 28/04/2011
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

SECURITE SOCIALE - Cotisations - Assiette - Artistes-auteurs - Chiffre d'affaire réalisé à raison de la diffusion ou de l'exploitation commerciale des oeuvres

SECURITE SOCIALE - Assujettissement - Personnes assujetties - Artistes auteurs (loi du 31 décembre 1975) - Cotisations - Assiette - Chiffre d'affaire réalisé à raison de la diffusion ou de l'exploitation commerciale des oeuvres

Il résulte, d'une part, des articles L. 382-4 et R. 382-17 du code de la sécurité sociale que la contribution au régime de sécurité sociale des artistes-auteurs est assise sur le chiffre d'affaires réalisé à raison de la diffusion ou de l'exploitation commerciale des oeuvres des artistes-auteurs, d'autre part, de l'article R. 382-2 du même code, qui procède par référence à l'article 71 devenu 98 A de l'annexe III du code général des impôts, que sont rattachés au régime général de sécurité sociale les artistes-auteurs de tapisseries et textiles muraux faits à la main, sur la base de cartons originaux fournis par ceux-ci, à condition qu'il n'existe pas plus de huit exemplaires. Ainsi la contribution d'une société qui vend au public des tapisseries d'art qu'elle réalise selon l'oeuvre original d'un artiste-auteur sans excéder huit exemplaires est assise sur le chiffre d'affaires procuré par ces ventes et non sur la rémunération de l'artiste-auteur


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 11 mars 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 28 avr. 2011, pourvoi n°10-17187, Bull. civ. 2011, II, n° 98
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2011, II, n° 98

Composition du Tribunal
Président : M. Loriferne
Avocat général : Mme de Beaupuis
Rapporteur ?: M. Cadiot
Avocat(s) : Me Ricard, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 19/10/2012
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.17187
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