LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 1er octobre 2009), que, selon une lettre contrat du 25 octobre 2004, M. X... a été engagé par la société PK développement en qualité de pilote automobile, et intégré au programme Fiat France dans le cadre du Trophée Andros pour les trois saisons 2004/2005, 2005/2006 et 2006/2007 ; qu'un contrat de partenariat a en outre été signé en 2005, 2006, et 2007, prévoyant la mise à disposition de véhicules devant être pilotés par M. X... ; que ce dernier a saisi la juridiction prud'homale d'une demande tendant à obtenir la reconnaissance de ce qu'il était lié à la société PK développement par un contrat de travail, la requalification de ce contrat de travail en contrat à durée indéterminée et la condamnation de l'employeur au paiement de diverses sommes ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la société fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande en nullité de la procédure et de le condamner à payer diverses sommes à titre d'indemnité de requalification, d'arriéré de rémunération et de dommages-intérêts, alors, selon le moyen :
1°/ que seules les demandes qui résultent de la requalification, de l'exécution ou de la rupture du contrat de travail objet de la requalification, ou celles qui sont en lien direct avec celui-ci, peuvent faire l'objet d'une saisine directe du bureau de jugement sans préalable de conciliation ; que tel n'est pas le cas d'une demande qui a pour objet principal la reconnaissance d'un contrat de travail, qui est préalable à toute action en requalification ; qu'en jugeant cependant qu'une telle demande n'avait pas à faire l'objet du préalable de conciliation, la cour d'appel a violé les articles L. 1411-1, L. 1245-2, R. 1454-10 du code du travail et 21 du code de procédure civile ;
2°/ que le préliminaire de conciliation constitue une formalité substantielle qui ne peut être couverte en cause d'appel que lorsqu'elle n'est pas imputable aux parties ; qu'ayant constaté en l'espèce que la demande de reconnaissance d'un contrat de travail n'avait pas été soumise au préalable de conciliation, la cour d'appel devant qui cette irrégularité de fond affectant la régularité de l'instance était soulevée, devait renvoyer le salarié à se pourvoir devant le juge du premier degré ; qu'en statuant néanmoins sur cette demande, la cour d'appel a excédé ses pouvoirs et violé les articles L. 1411-1 et R. 1454-10 du code du travail ;
Mais attendu que la juridiction prud'homale était saisie d'une demande de requalification des contrats à durée déterminée en un contrat à durée indéterminée ; qu'en application de l'article L. 1245-2 du code du travail, cette demande a été, à juste titre, portée, sans préliminaire de conciliation, directement devant le bureau de jugement ;
Sur le second moyen :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ce moyen qui ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société PK développement aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société PK développement à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit avril deux mille onze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat aux Conseils pour les sociétés PK développement et Grave Wallyn Randoux
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Le pourvoi fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR débouté la Société PK DEVELOPPEMENT de sa demande en nullité de la procédure, et de l'AVOIR condamnée à payer à Monsieur X... les sommes de 5.844,16€ à titre d'indemnité de requalification, 91.040€ à titre d'arriéré de rémunération ; 47.000€ à titre de dommages et intérêts toutes causes confondues et 3.000€ sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;
AUX MOTIFS QUE « la SARL PK DEVELOPPEMENT demande à la Cour de prononcer la nullité de la procédure prud'homale engagée par Monsieur Franck X..., au motif que ce dernier a saisi directement le bureau de jugement du conseil de prud'hommes, alors que la procédure de conciliation s'imposait en raison de l'objet principal de la demande qui portait sur la reconnaissance d'un contrat de travail ; qu'il ressort du jugement prud'homal, en date du 26 mai 2008, que Monsieur Franck X... a saisi, le 30 janvier 2008, le conseil de prud'hommes de Longjumeau afin d'obtenir, outre la reconnaissance de l'existence d'un contrat de travail, la requalification de ses contrats à durée déterminée en un contrat à durée indéterminée et la condamnation de la société PK DEVELOPPEMENT au paiement d'une indemnité de requalification, de rappels de rémunération et enfin de dommages et intérêts pour défaut de déclaration préalable à l'embauche ainsi que pour préjudices matériel et moral ; que lorsque le conseil de prud'hommes est saisi d'une demande de requalification d'un contrat à durée déterminée en un contrat à durée indéterminée l'affaire est portée directement devant le bureau de jugement, conformément aux dispositions de l'article L.1245-2 du code du travail ; qu'en conséquence, les différentes demandes de Monsieur Franck X... étaient toutes directement recevables devant le bureau de jugement ; que la SARL PK DEVELOPPEMENT doit être déboutée de sa demande » ;
ALORS, D'UNE PART, QUE seules les demandes qui résultent de la requalification, de l'exécution ou de la rupture du contrat de travail objet de la requalification, ou celles qui sont en lien direct avec celui-ci, peuvent faire l'objet d'une saisine directe du bureau de jugement sans préalable de conciliation ; que tel n'est pas le cas d'une demande qui a pour objet principal la reconnaissance d'un contrat de travail, qui est préalable à toute action en requalification ; qu'en jugeant cependant qu'une telle demande n'avait pas à faire l'objet du préalable de conciliation, la cour d'appel a violé les articles L.1411-1, L.1245-2, R.1454-10 du code du travail et 21 du code de procédure civile ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE le préliminaire de conciliation constitue une formalité substantielle qui ne peut être couverte en cause d'appel que lorsqu'elle n'est pas imputable aux parties ; qu'ayant constaté en l'espèce que la demande de reconnaissance d'un contrat de travail n'avait pas été soumise au préalable de conciliation, la cour d'appel devant qui cette irrégularité de fond affectant la régularité de l'instance était soulevée, devait renvoyer le salarié à se pourvoir devant le juge du premier degré ; qu'en statuant néanmoins sur cette demande, la cour d'appel a excédé ses pouvoirs et violé les articles L.1411-1 et R1454-10 du code du travail.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Le pourvoi fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR requalifié le contrat de travail à durée déterminée en date du 10 novembre 2005 conclu pour les saisons 2006 et 2007 en un contrat de travail à durée indéterminée, et d'AVOIR en conséquence, condamné la société PK DEVELOPPEMENT à payer à M. X... les sommes de 5.844,16€ à titre d'indemnité de requalification, 91.040€ à titre d'arriéré de rémunération ; 47.000€ à titre de dommages et intérêts toutes causes confondues et 3.000€ sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;
AUX MOTIFS QUE « Monsieur Franck X... demande la requalification de son contrat à durée déterminée, en date du 10 novembre 2005, en un contrat à durée indéterminée, au motif que celui-ci a été conclu pour l'année 2006 avec une clause de reconduction tacite pour 2007 et 2008, sans qu'une rémunération ne soit prévue pour ces deux années ; Qu'il verse aux débats ledit contrat « conclu pour une durée déterminée et établie pour l'année 2006, et reconductible tacitement pour les années 2007 et 2008» qui mentionne qu'en 2006 : - il participerait à trois événements sportifs, le «Trophée Andros», moyennant une rémunération de 30.000 euros HT, la «Fun Cup saison officielle», comprenant les courses des 25 heures de SPA et des 7 heures du Castelet, moyennant une rémunération forfaitaire de 20 000 euros HT, et la «Fun Cup journées inventives», pendant au minimum 12 journées, moyennant une rémunération de 610 euros HT par fournée ; - il animerait les stages de l'école de pilotage sur glace de Val Thorens, pendant au minimum 21 journées dans l'année, moyennant une rémunération de 610 euros HT par journée ; que la SARL PK DEVELOPPEMENT répond que ce contrat a fait l'objet d'une plainte pénale avec constitution de partie civile pour faux et usage de faux qui est actuellement en cours d'instruction et soutient que, même dans l'hypothèse d'une relation de travail salarié, les prestations sportives accomplies par Monsieur Franck X..., en qualité de pilote professionnel, relèvent des articles L1242-2 3° et D 1242-1 du code du travail, relatifs aux contrats de travail à durée déterminée d'usage et s'inscrivent dans le cadre de trois contrats à durée déterminée d'usage pour trois saisons ; que, par l'arrêt susvisé en date du 26 février 2009, la Cour d'appel de Paris a jugé que les parties ont été liées par un contrat de travail à compter du 25 octobre 2004 et jusqu'à la fin de leurs relations en 2007, quelque ait pu être le contrat conclu ; que les articles L1242-2 3° et D 1242-1 du code du travail prévoient qu'un contrat à durée déterminée peut être conclu pour les emplois pour lesquels dans certains secteurs d'activités, comme le sport professionnel, il est d'usage constant de ne pas recourir au contrat de travail à durée indéterminée en raison de la nature de l'activité exercée et du caractère par nature temporaire des emplois ; que, cependant; cette faculté n'exonère pas l'employeur de son obligation de soumettre au salarié un contrat écrit comportant, notamment, la définition précise de son motif, ainsi que le montant de la rémunération et de ses différentes composantes, y compris, s'il en existe, des primes et accessoires de salaire, conformément aux dispositions de l'article L1242-12 du code du travail ; qu'en l'espèce, alors qu'il n'est pas contesté que les parties ont été liées par des relations contractuelles pendant les saisons 2006 et 2007, qu'aucun des éléments produits ne démontre, pour l'ensemble de la période concernée, l'existence de contrats écrits à durée déterminée d'usage, invoqués par l'employeur dans ses dernières conclusions, et précisant, notamment, les diverses prestations à exécuter, le nombre de jours de travail et le montant de la rémunération ; qu'en conséquence, il y a lieu de requalifier le contrat à durée déterminée en date du 10 novembre 2005 en un contrat à durée indéterminée et d'allouer au salarié la somme de 5.844,16 euros à titre d'indemnité de requalification (arrêt, p.3 et 4) ; que Monsieur Franck X... demande des rappels de rémunération au titre des deux contrats de travail qu'il a signés ; qu'au titre de la lettre contrat du 25 octobre 2004, il demande le versement de la somme de 28.000 euros, pour le « Trophée Andros » 2004/2005 ; qu'au titre du contrat du 10 novembre 2005, il demande : - 15.000 euros pour le « Trophée Andros » 2005/2006, en complément de la somme de 15.000 euros déjà perçue, - 30.000 euros pour le « Trophée Andros » 2006/2007, jamais rémunéré, - 12.500 euros pour la «Fun Cup saison officielle » 2006, en complément de la somme de 7.500 euros déjà perçue,- 4.320 euros pour la « Fun Cup saison officielle » 2007, en complément de la somme de 3.000 euros déjà perçue, - 1.220 euros pour les deux journées de 2006 passées à l'école de pilotage sur glace de Val Thorens ; que la SARL PK DEVELOPPEMENT ne conteste pas l'exécution des prestations par le salarié dans le cadre du « Trophée Andros » mais affirme qu'il a perçu, par saison, la somme de 28.000 euros HT ; que, pour les autres demandes relatives à la « Fun Cup » et à l'école de pilotage sur glace, elle ne conteste également pas leur exécution, mais elle soutient qu'il y a lieu de les carter au motif qu'elles ont été facturées par les sociétés FRANCK X... CONSULTING et 100% RACING ; que la participation annuelle aux « Trophées Andros » était mentionnée tant dans la lettre contrat du 25 octobre 2004 que dans le contrat du 10 novembre 2005, qui constituaient les contrats de travail qui liaient les parties ; que la participation à la « Fun Cup » et à l'école de pilotage sur glace était également prévue dans le contrat de travail du 10 novembre 2005 ; qu'il ne résulte d'aucune des pièces versées aux débats par les deux parties que Monsieur Franck X... aurait effectivement déjà perçu les sommes qu'il sollicite de quelque manière que ce soit, les bons de commande de la SARL PK DEVELOPPEMENT et les factures envoyées après la réalisation des diverses prestations ne pouvant, en aucun cas, constituer des justificatifs de paiement ; qu'ainsi, il y a lieu de faire droit aux diverses demandes de rappels d'arriérés de salaires, faites par Monsieur Franck X... et de condamner la SARL PK DEVELOPPEMENT à lui verser la somme globale de 91.040 euros à titre d'arriéré de rémunération » ; (…) ; que la relation contractuelle a été rompue par l'employeur sans procédure de licenciement et que cette rupture a nécessairement causé un préjudice à Monsieur Franck X... ; que, compte tenu de l'ancienneté et du salaire de Monsieur Franck X..., il y a lieu de lui allouer la somme de 47.000 euros à titre de dommages et intérêts toutes causes de préjudices confondues (arrêt, p.5)» ;
ALORS, D'UNE PART, QUE dans son arrêt du 26 février 2009, la cour d'appel de PARIS a retenu l'existence d'une relation de travail en se fondant sur la présomption tirée de l'article L.7121-3 du Code du travail, indiquant que le contrat du 10 novembre 2005 produit par Monsieur X..., lequel fait l'objet d'une plainte pénale pour faux, n'était « pas nécessaire » à la solution du litige ; qu'en se fondant sur l'existence de ce contrat du 10 novembre 2005 pour déterminer l'étendue des droits de Monsieur X... à l'égard de la Société PK DEVELOPPEMENT, alors même que cette dernière faisait valoir que la plainte pénale concernant ce document était toujours en cours d'instruction, la cour d'appel a violé l'article 1351 du Code civil, ensemble l'article 4 du Code de procédure pénale ;
ALORS, D'AUTRE PART, QU' en s'abstenant de répondre aux conclusions de la Société PK DEVELOPPEMENT qui faisaient valoir que le contrat du 10 novembre 2005 ne pouvait être pris en compte en l'état de la procédure pénale pour faux qui était en cours, la cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile, ensemble les articles 287 et 299 du même Code ;
ALORS, DE TROISIEME PART ET SUBSIDIAIREMENT, QU' en admettant même que les contrats conclus les 25 octobre 2004 et 10 novembre 2005 s'analysent en des contrats de travail à durée déterminée en vertu de la présomption instituée par l'article L.7121-3 du Code du travail, ceux-ci intervenaient dans un secteur d'activité dans lequel il est d'usage constant de ne pas recourir aux contrats à durée indéterminée ; qu'au cas particulier, ces contrats comportaient la définition précise du motif (participer au Trophée Andros pour une saison : « nous avons le plaisir de vous confirmer votre engagement et votre intégration au programme FIAT France dans le cadre du Trophée Andros pour les trois saisons à venir (2004/2005, 2005/2006 et 2006/2007) »), répondant ainsi aux conditions prévues par les articles L.1242-2 3° et D.1242-1 du Code du travail ; qu'en exigeant ces contrats comportent au surplus le montant de la rémunération et de ses différentes composantes, y compris, de primes et accessoires de salaire, la cour d'appel a ajouté à la loi et a violé les articles L.1242-2 3° et D.1242- 1 susvisés, ensemble l'article L.1242-12 du Code du travail, par fausse application.