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30/09/2010 | FRANCE | N°09-11552

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 30 septembre 2010, 09-11552


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Met, sur leur demande, les époux X... hors de cause ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a commandé le 5 février 1998 à la société Socma une installation destinée à l'élevage de cailles dont une partie du matériel, des assiettes-mangeoires, a été fournie par la société Cavenco ; que, par jugement du tribunal de commerce de Romans du 25 avril 2001, la société Socma a été condamnée à en payer le prix à la société Cavenco ; que les époux X..., soutenant que le matériel d'alime

ntation était inadapté à l'élevage des cailles et que le matériel d'abreuvement était...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Met, sur leur demande, les époux X... hors de cause ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a commandé le 5 février 1998 à la société Socma une installation destinée à l'élevage de cailles dont une partie du matériel, des assiettes-mangeoires, a été fournie par la société Cavenco ; que, par jugement du tribunal de commerce de Romans du 25 avril 2001, la société Socma a été condamnée à en payer le prix à la société Cavenco ; que les époux X..., soutenant que le matériel d'alimentation était inadapté à l'élevage des cailles et que le matériel d'abreuvement était défectueux, ont fait assigner la société Socma en résolution judiciaire de la vente et réparation de leurs divers préjudices ; que la société Socma a appelé la société Cavenco en garantie de toute condamnation susceptible d'être prononcée à son encontre ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la société Socma fait grief à l'arrêt d'avoir prononcé la résolution de la vente du 5 février 1998 à ses torts et de l'avoir condamnée à payer diverses sommes à ce titre, alors, selon le moyen, que le défaut de la chose vendue qui la rend impropre à l'usage auquel elle est destinée constitue un vice caché et non un manquement à l'obligation de délivrance, de sorte qu'en fondant les condamnations prononcées à l'encontre de la société Socma sur le manquement de celle-ci à son obligation de délivrance, après avoir retenu que l'accumulation des dysfonctionnements ayant affecté différents équipements avait rendu l'installation impropre à sa destination, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et ainsi violé, par fausse application, l'article 1604 du code civil, et, par refus d'application, l'article 1641 du code civil ;
Mais attendu que la cour d'appel a constaté que la société Socma qui s'était engagée à fournir le matériel nécessaire à l'élevage de cailles avait mis en oeuvre des équipements inadaptés à la destination convenue avec le client ; que, par ces seules constatations faisant ressortir que les équipements fournis n'étaient pas conformes aux caractéristiques convenues lors de la vente, de sorte que le manquement du vendeur à son obligation de délivrance était établi, elle a légalement justifié sa décision ;
Mais sur le second moyen :
Vu les articles 1351 du code civil et 480 du code de procédure civile ;
Attendu que pour déclarer irrecevable l'appel en garantie, l'arrêt se fonde sur l'autorité de la chose jugée attachée à la décision du tribunal de commerce, après avoir relevé que ce jugement énonçait, dans ses motifs, que la preuve de la non-conformité des marchandises n'était pas rapportée et décidait, dans son dispositif, que la société Socma n'était pas fondée à s'opposer au règlement des sommes facturées par la société Cavenco en règlement de ces marchandises ;
Qu'en statuant ainsi alors que l'appel en garantie formé à l'encontre de la société Cavenco par la société Socma, en considération de la condamnation de celle-ci au profit des époux X..., n'avait pas le même objet que les prétentions dont ces deux sociétés avaient saisi le tribunal de commerce, de sorte qu'en le déclarant irrecevable, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a déclaré irrecevable l'appel en garantie formé par la société Socma à l'encontre de la société Cavenco, l'arrêt rendu le 1er décembre 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Grenoble ; remet, en conséquence, la cause et les parties concernées en l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Grenoble, autrement composée ;
Condamne la société Cavenco aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trente septembre deux mille dix.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Defrenois et Levis, avocat aux Conseils pour la société Socma.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR prononcé la résolution du contrat de vente du 5 février 1998 aux torts de la société SOCMA, d'AVOIR condamné celle-ci à rembourser aux époux X... la somme de 43.453,15 € et les intérêts de droit à compter du 20 septembre 2002 date de l'assignation, avec capitalisation des intérêts en cours à compter du 29 novembre 2006, et d'AVOIR condamné la SA SOCMA à payer aux époux X... la somme totale de 9.949 € à titre de dommages et intérêts, outre une indemnité au titre des frais irrépétibles ;
AUX MOTIFS QU'il est établi par les pièces produites aux débats, que le 5 février 1998 Jean Louis X... a passé commande à la SA SOCMA d'une installation destinée à la production de cailles, comprenant le chauffage, I'abreuvement par pipettes spéciales cailles, l'alimentation automatique avec fourniture d'assiettes spéciales cailles et la gestion d'ambiance ; que ce matériel a été livré le 30 mars 1998 et que Jean Louis X... ayant le 9 mars 1998 conclu un contrat d'intégration avec la SA BERANGER, un premier lot de cailles a été installé le 27 avril 1998 ; que le 2 mai 1998 Annie X... a avisé la SA SOCMA d'un certain nombre de dysfonctionnements parmi lesquels la déficience des nourrisseurs ; que le 22 mai suivant la SA BERANGER a écrit à Jean Louis X... pour attirer son attention sur un déficit de poids des cailles provenant des mangeoires qui ne distribuaient pas correctement les aliments et ne correspondaient pas aux mangeoires qu'elle préconisait ; que le 3 juin 1998 la SA SOCMA a donc commandé à ses frais un second modèle d'assiettes, qui n'a pas plus donné satisfaction comme en atteste un second courrier de la SA BERANGER du 3 juillet 1998, menaçant Jean Louis X... de rompre le contrat d'intégration après la prochaine bande si les mangeoires n'étaient pas à nouveau changées par des mangeoires de type BIG DUTCHMAN ; que le 3 juillet 1998 Jean Louis X... en a donc avisé par courrier la SA SOCMA, en lui rappelant outre les dysfonctionnements visés dans son précédent courrier, "les problèmes de fuites sur les pipettes", ce qui a amené cette société à faire procéder le 31 juillet 1998 au remplacement à ses frais (31 277,61 F) de toutes les assiettes par un modèle de marque BIG DUTCHMAN ; qu'entre temps Annie X... avait déclaré un incident d'élevage survenu le 1er juin 1998 dû à un dysfonctionnement du régulateur STA 06 Type 2 installé en mars 1998 par la société SOCMA et qui, à l'origine de l'asphyxie de 24 300 cailles, a été remplacé ; (…) que si la SA SOCMA a fait diligence pour procéder au remplacement desdites assiettes il reste que le tableau des résultats des 11 bandes dressé par l'expert judiciaire, révèle que malgré une amélioration du taux de mortalité puis du poids moyen des cailles (prêt à cuire) à partir de l'utilisation de l'assiette BIG DUTCHMAN dont l'adéquation n'est cette fois-ci pas remise en cause, l'ensemble des résultats de cet élevage restait insuffisant puisque le poids moyen des cailles prévu au contrat d'intégration (162 grammes) ne sera atteint qu'une seule fois à l'occasion de la septième bande les 9 et 16 mars 1999 ; qu'en effet le 7 septembre 1999, la SA BERANGER a écrit à Antoine X..., fils des appelants, que le poids des cailles abattues le 2 septembre 1999 était très faible (moins de 130 grammes) et que cela était dû "à un manque d'eau important" ; (…) que l'expert conclut, contrairement à la thèse soutenue par les époux X..., que les assiettes BIG DUTCHMAN convenaient parfaitement aux tubes livrés par SOCMA, ce qui explique l'absence de récriminations des éleveurs après leur installation ; qu'en revanche l'expert judiciaire met en cause le système d'abreuvage des cailles installé par la société SOCMA, lequel s'est avéré fuyard comme l'avait rappelé Jean Louis X... dans sa lettre du 3 juillet 1998 ; que l'expert souligne en outre que le fournisseur et fabricant de pipettes avait finalement admis la nécessité de les changer et de les remplacer par un autre modèle mieux adapté à l'installation ; que d'ailleurs par télécopie du 27 avril 2000 la SA SOCMA avait proposé à Jean Louis X... d'appuyer sa demande de remplacement des pipettes auprès du fournisseur à condition qu'il règle le solde de la facture de 113 443,41 F ce qu'il a refusé eu égard à cette condition et au fait que cette proposition arrivait trop tard, comme il l'a écrit à SOCMA le 14 juin 2000 ; que J.Chantepy technicien d'élevage atteste avoir dès son arrivée chez les Hilaire en juillet 2001, constaté un dysfonctionnement des pipettes qui gouttaient énormément sur les litières et lui avoir conseillé d'en changer en raison des conséquences néfastes de ces fuites sur les animaux ; que l'expert judiciaire précise que les fuites sur ces pipettes ne pouvaient qu'affecter la litière des cailles dont l'élevage est particulièrement délicat, favorisant les maladies respiratoires et les répercussions négatives sur le métabolisme de celles-ci, à l'origine de lots petits et hétérogènes ; qu'il résulte de ce qui précède que le système d'abreuvement dont la déficience a été dénoncée de juillet 1998 à avril 2000 par Jean Louis X..., était impropre à sa destination à savoir l'élevage de cailles ; qu'en définitive, et quand bien même la SOCMA a finalement installé en juillet 1998 des mangeoires adaptées à cet élevage puis changé courant juin 1998 le régulateur défectueux installé dans un des bâtiments à l'origine de l'asphyxie de 24.300 cailles, la mise en oeuvre d'un système d'abreuvement qui n'a jamais cessé d'être défectueux car inadapté, s'ajoutant à ces précédents désordres, a constitué avec ceux-ci une accumulation de dysfonctionnements qui ont handicapé durablement l'élevage de cailles entrepris par les époux X... à tel point qu'ils ont cessé cette activité en mai 2000 ; qu'il est ainsi établi que la SA SOCMA qui s'était engagée à fournir les équipements nécessaires à cet élevage de cailles à façon, a mis en oeuvre des équipements inadaptés à la destination convenue avec Jean Louis X... ; que le non respect de ces engagements par cette société justifie par application de l'article 1604 du code civil, de prononcer à ses torts la résolution du contrat de vente du 5 février 1998 ; que la SA SOCMA sera en conséquence condamnée à restituer le montant des sommes versées soit 43.453,15 € conformément au relevé de comptes clients de la SA SOCMA de novembre 1999 et les intérêts de droit à compter du 20 septembre 2002 date de l'assignation, avec capitalisation à compter du 29 novembre 2006 date de la demande ; que les époux X... seront condamnés à restituer à SOCMA les équipements qu'elle lui a livrés et qu'elle devra reprendre (arrêt, pp. 7, 8 et 9) ;
ALORS QUE le défaut de la chose vendue qui la rend impropre à l'usage auquel elle est destinée constitue un vice caché et non un manquement à l'obligation de délivrance, de sorte qu'en fondant les condamnations prononcées à l'encontre de la société SOCMA sur le manquement de celle-ci à son obligation de délivrance, après avoir retenu que l'accumulation des dysfonctionnements ayant affecté différents équipements avait rendu l'installation impropre à sa destination, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et ainsi violé, par fausse application, l'article 1604 du code civil, et, par refus d'application, l'article 1641 du code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR déclaré irrecevable l'appel en garantie de la société SOCMA à l'encontre de la société CAVENCO ;
AUX MOTIFS (sur l'appel en garantie de la SA SACMO à l'encontre de la société CAVENCO) QUE le tribunal de commerce de Romans dans son jugement du 25 avril 2001 a statué d'une part sur la demande en paiement de la société CAVENCO contre la SA SOCMA et d'autre part sur la défense à paiement développée par SOCMA devant cette juridiction, relative à l'inexécution de son obligation de délivrance par la société CAVENCO ; que la SOCMA soutenait en effet qu'elle n'était pas redevable du prix des mangeoires facturées par CAVENCO le 3 mars 1998 et le 18 juin 1998, car celles-ci s'étaient avérées inadaptées à l'élevage de Jean Louis X..., qu'elle avait dû commander des mangeoires de marque Dutchman en remplacement et que son client retenait une somme de 113.143,41 F sur le montant de ses propres factures ; que le tribunal de commerce a dans la décision dont s'agit, retenu que la non conformité des fournitures livrées par CAVENCO n'était pas démontrée et a dans son dispositif «Dit que la société SOCMA n'apparaît pas fondée à s'opposer au règlement des sommes facturées par CAVENCO en contrepartie des marchandises livrées » ; qu'il s'ensuit que la SA SOCMA n'est plus recevable à agir contre CAVENCO en l'état de ce jugement qui est aujourd'hui définitif et a autorité de la chose jugée (arrêt pp. 10 et 11) ;
ALORS QUE l'autorité de chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui fait l'objet d'un jugement et a été tranché dans son dispositif, dès lors que la chose demandée est la même, que la demande est fondée sur la même cause, et concerne les mêmes parties ; qu'en déclarant irrecevable l'appel en garantie de la société SOCMA à l'encontre de la société CAVENCO en se fondant sur l'autorité de la chose jugée du jugement du tribunal de commerce de Romans du 25 avril 2001, lequel s'était borné, dans son dispositif, à dire que « la société SOCMA n'apparaît pas fondée à s'opposer au règlement des sommes facturées par CAVENCO en contrepartie des marchandises livrées », la cour d'appel a violé l'article 1351 du code civil ;
ET ALORS, en toute hypothèse, QUE la demande d'appel en garantie formée par la société SOCMA à l'encontre de la société CAVENCO n'avait pas le même objet que les demandes présentées devant le tribunal de commerce de Romans, de sorte qu'en la déclarant irrecevable en l'état du jugement du tribunal de commerce de Romans du 25 avril 2001 définitif et passé en force de chose jugée, la cour d'appel a violé l'article 1351 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 09-11552
Date de la décision : 30/09/2010
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Analyses

CHOSE JUGEE - Identité d'objet - Exclusion - Applications diverses - Litige entre deux sociétés relatif au paiement de marchandises livrées à un tiers - Appel en garantie d'une condamnation au profit de ce tiers

L'appel en garantie formé à l'encontre d'une société par une autre, en considération de la condamnation de celle-ci au profit d'un tiers, n'a pas le même objet que les prétentions dont ces deux sociétés avaient saisi un tribunal de commerce quant aux marchandises livrées à ce tiers par l'une à la demande de l'autre. Le jugement de ce tribunal est donc dépourvu d'autorité de chose jugée à l'égard d'un tel appel en garantie


Références :

Cour d'appel de Grenoble, Chambre civile 1, 1er décembre 2008, 05/2100
article 1351 du code civil

article 480 du code de procédure civile

Décision attaquée : Cour d'appel de Grenoble, 01 décembre 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 30 sep. 2010, pourvoi n°09-11552, Bull. civ. 2010, I, n° 177
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2010, I, n° 177

Composition du Tribunal
Président : M. Charruault
Avocat général : M. Mellottée (premier avocat général)
Rapporteur ?: Mme Bodard-Hermant
Avocat(s) : SCP Defrenois et Levis, SCP Gadiou et Chevallier

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:09.11552
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