La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

29/09/2010 | FRANCE | N°09-69236

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 29 septembre 2010, 09-69236


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 411-35 du code rural, dans sa rédaction applicable en la cause ;
Attendu que toute cession de bail est interdite sauf si la cession est consentie, avec l'agrément du bailleur, au profit du conjoint du preneur participant à l'exploitation ou aux descendants du preneur ayant atteint l'âge de la majorité ou ayant été émancipés ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 18 juin 2009) que, par acte du 20 avril 1968, M. X... a consenti aux époux Y... un b

ail à ferme ; que, par un acte du 27 mai 1977, M. X... et M. Gilbert Z... ge...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 411-35 du code rural, dans sa rédaction applicable en la cause ;
Attendu que toute cession de bail est interdite sauf si la cession est consentie, avec l'agrément du bailleur, au profit du conjoint du preneur participant à l'exploitation ou aux descendants du preneur ayant atteint l'âge de la majorité ou ayant été émancipés ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 18 juin 2009) que, par acte du 20 avril 1968, M. X... a consenti aux époux Y... un bail à ferme ; que, par un acte du 27 mai 1977, M. X... et M. Gilbert Z... gendre de M. Y..., sont convenus de "renouveler" ce bail ; que par acte du 7 septembre 1978, M. X... a consenti à la cession du bail à compter du 1er juillet 1978, entre M. Y... fermier sortant et M. Gilbert Z..., nouveau fermier ; que M. X... étant décédé le 29 décembre 1983, M. A... et Mme A..., épouse B... (les consorts A...) devenus propriétaires indivis des terres, n'ont pas donné suite à la demande de cession du bail par M. Gilbert Z... à son fils M. Olivier Z... ; que M. Gilbert Z... a saisi le tribunal paritaire des baux ruraux pour y être autorisé ;
Attendu que pour accueillir cette demande, l'arrêt retient que M. Gilbert Z... ayant exploité du vivant de M. X... et, après sa mort, sans la moindre opposition des héritiers qui ont encaissé, sans réserves, les fermages régulièrement versés par le preneur, il apparaît qu'une relation directe valant nouveau bail s'est créée entre le cessionnaire, M. Gilbert Z... et les consorts A... ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté qu'il n'y avait pas eu de résiliation du bail initial, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 18 juin 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier, autrement composée ;
Condamne M. Z... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes de M. Z... et de M. et Mme A... ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf septembre deux mille dix.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

.
Moyen produit par la SCP Delaporte, Briard et Trichet, avocat aux Conseils, pour M. et Mme A....
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir autorisé M. Gilbert Z... à céder le bail rural à lui consenti par M. Marcel A... et Mme Alice A..., épouse B..., sur les parcelles en cause, au profit de son fils, M. Olivier Z... et d'avoir ainsi implicitement débouté M. et Mme A... de leurs demandes tendant à voir constater la nullité de la cession de bail intervenue entre M. Y... et M. Gilbert Z... et à voir prononcer en conséquence la résiliation du bail,
Aux motifs que « le terme « renouveler » employé dans l'acte du 27 mai 1977 ne permet pas de dire, contrairement à ce que soutient Monsieur Z..., que « Monsieur Paul X... a souhaité mettre fin au bail accordé jusqu'alors à Monsieur et Madame Y... et conclure un nouveau bail au profit de leur gendre, Monsieur Gilbert Z... », alors même que le terme « résiliation » aurait dû être utilisé si l'intention des parties avait été de mettre fin au bail rural existant entre Monsieur X... et Monsieur et Madame Y..., et de conclure un nouveau bail rural entre Monsieur X... et Monsieur Z..., et alors que par ailleurs l'acte de cession de bail du 7 septembre 1978 par Monsieur Y... au profit de Monsieur Z... démontre qu'il n'y a pas de résiliation antérieure, sinon cette cession de bail n'aurait pas eu lieu d'être, Monsieur Y... ayant d'ailleurs signé ledit acte en sa qualité de fermier sortant, et Monsieur Z... en sa qualité de nouveau fermier ; que tenant l'intention des parties, on se trouve en présence d'un bail initial du 20 avril 1968 dont la cession a été sollicitée par le preneur, Monsieur Y..., au profit de son gendre, Monsieur Gilbert Z..., et a obtenu l'agrément du bailleur, Monsieur X... ; qu'en application de l'article L. 411-35 du Code rural, la seule cession du bail permise est celle au profit du conjoint du preneur ou de ses descendants ; que la cession au profit d'un gendre comme c'est le cas en l'espèce de Monsieur Gilbert Z..., ne pouvait donc régulièrement intervenir ; que cependant Monsieur Gilbert Z..., pour échapper à la nullité de l'opération, invoque à son profit l'existence d'un bail direct ; qu'il fait valoir à cet effet que depuis le 1er juillet 1978, il exploite, du vivant de Monsieur Paul X..., le bien rural, puisqu'il a continué de même à la mort de celui-ci, le 29 décembre 2003, sans qu'il y ait eu la moindre opposition ou restriction de la part des héritiers du bailleur, les consorts A..., auxquels il payait les fermages, en cela confirmé non seulement par des reçus de solde de fermage pour les années 1988, 1989, 1993, 1994, ou par des cartes de voeux pour l'année 2004 et 2005 adressées par Madame Alice A... à Monsieur Gilbert Z..., par lesquelles elle remerciait celui-ci pour le chèque du fermage, mais encore par les relevés bancaires et les talons de chèques de Monsieur Gilbert Z... repris d'une façon détaillée dans un tableau depuis l'année 1987 jusqu'en 2008 avec le montant versé, tous ces éléments n'étant nullement contestés ou contredits par les consorts A... ; que Monsieur Gilbert Z... ayant exploité le bien rural depuis le 29 décembre 1983 sans que les héritiers aient émis la moindre réserve et ceux-ci ayant encaissé, également sans la moindre réserve, si ce n'est en 2007 et 2008 au moment où le litige est né, les fermages régulièrement versés par Monsieur Gilbert Z..., il apparaît qu'une relation directe valant nouveau bail s'est donc créée entre le cessionnaire, Monsieur Gilbert Z... et les héritiers du bailleur, les consorts A... ; que dès lors Monsieur Gilbert Z... a la faculté, par application de l'article L. 411-35 du Code rural, de solliciter la cession du bail rural, que lui ont consenti les consorts A..., au profit de son fils, Olivier,
Alors d'une part qu'est nulle de nullité absolue la cession de bail à ferme consentie au profit du gendre du preneur ; que cette nullité d'ordre public doit être constatée et la résiliation du bail prononcée quand bien même, postérieurement à la cession, le bailleur aurait perçu les fermages et n'aurait élevé aucune protestation, fût-ce durant une longue période ; qu'il résulte des constatations de l'arrêt que l'acte sous seing privé en date du 7 septembre 1978 portait cession de bail au profit de M. Gilbert Z..., gendre de M. Y..., preneur initial ; qu'en énonçant qu'en raison de l'acceptation des fermages par le bailleur et de l'absence de toute opposition ou restriction postérieurement à la cession, « une relation directe valant nouveau bail s'est créée entre le cessionnaire , M. Gilbert Z..., et les héritiers du bailleurs, les consorts A... », alors même que la cession de bail d'où M. Gilbert Z... tenait ses droits constituait une cession prohibée sanctionnée par une nullité d'ordre public, la Cour d'appel a violé l'article L. 411-35 du Code rural,
Alors d'autre part, et à titre subsidiaire, que la novation ne se présume point et doit résulter clairement des faits et actes intervenus entre les parties ; qu'il résulte des énonciations de l'arrêt que M. Gilbert Z... a acquis la qualité de preneur du bail à ferme initialement consenti par M. X... à M. et Mme Y..., en vertu de la cession de bail constatée par acte sous seing privé en date du 7 septembre 1978 ; qu'en énonçant ensuite que, postérieurement à cette cession, « une relation directe valant nouveau bail s'est créée entre le cessionnaire, M. Gilbert Z..., et les héritiers du bailleur, les consorts A... », sans constater que les parties auraient manifesté la volonté de nover la convention qui jusqu'alors liait les parties et qui demeurait affectée du vice tenant à l'irrégularité de la cession consentie le 7 septembre 1978, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1271 et 1273 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 09-69236
Date de la décision : 29/09/2010
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Analyses

BAIL RURAL - Bail à ferme - Cession - Interdiction - Non-respect - Effets - Détermination

BAIL RURAL - Bail à ferme - Résiliation - Causes - Cession - Cession irrégulièrement consentie - Constatations nécessaires

Une cour d'appel qui constate l'absence de résiliation du bail initial ne peut retenir l'existence d'une relation directe valant nouveau bail entre le bailleur et le bénéficiaire d'une cession irrégulièrement consentie


Références :

article L. 411-35 du code rural dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2006-11 du 5 janvier 2006

Décision attaquée : Cour d'appel de Montpellier, 18 juin 2009

Sur le caractère d'ordre public de l'interdiction, à rapprocher :3e Civ., 5 mars 1997, pourvoi n° 95-19062, Bull. 1997, III, n° 50 (rejet), et les arrêts cités. Sur l'office du juge et la nécessité de demander en justice la résiliation du bail, à rapprocher :3e Civ., 16 octobre 1970, pourvoi n° 68-10872, Bull. 1970, III, n° 524 (cassation)


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 29 sep. 2010, pourvoi n°09-69236, Bull. civ. 2010, III, n° 176
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2010, III, n° 176

Composition du Tribunal
Président : M. Lacabarats
Avocat général : M. Bailly
Rapporteur ?: Mme Fossaert
Avocat(s) : SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP Delaporte, Briard et Trichet

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:09.69236
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award