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29/09/2010 | FRANCE | N°09-13922

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 29 septembre 2010, 09-13922


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 145-41 du code de commerce ;
Attendu que toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu'un mois après un commandement demeuré infructueux ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 18 mars 2009), que, par acte du 23 décembre 1991, Mme X..., aux droits de laquelle se trouvent les époux Y..., a donné à bail à Mme Z..., aux droits de laquelle se trouve la société Miramar devenue la société Nemrot, des

locaux à usage commercial ; que les bailleurs ayant fait délivrer à celle-ci, le ...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 145-41 du code de commerce ;
Attendu que toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu'un mois après un commandement demeuré infructueux ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 18 mars 2009), que, par acte du 23 décembre 1991, Mme X..., aux droits de laquelle se trouvent les époux Y..., a donné à bail à Mme Z..., aux droits de laquelle se trouve la société Miramar devenue la société Nemrot, des locaux à usage commercial ; que les bailleurs ayant fait délivrer à celle-ci, le 28 avril 2006, un commandement de payer des loyers échus et obtenu en référé que la clause résolutoire visée au commandement soit déclarée acquise, ont fait procéder à l'expulsion de la locataire le 17 avril 2007 ; qu'après infirmation de l'ordonnance de référé, et délivrance, le 23 juillet 2007, d'un nouveau commandement de payer des loyers, les bailleurs ont saisi la juridiction au fond pour voir constater la résiliation du bail ;
Attendu que pour accueillir cette demande, l'arrêt constate l'acquisition de la clause résolutoire insérée au bail liant les parties respectivement à la date du 28 mai 2006 et à la date du 23 août 2007, et condamne la société Nemrot à payer aux époux Y... la somme de 5 827,90 euros au titre des loyers dus jusqu'au 16 avril 2007 et à supporter le coût des commandements de payer des 28 avril 2006 et 23 juillet 2007 ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'un bail dont la résiliation est acquise ne peut être à nouveau résilié et que le preneur dont le bail est résilié n'est plus tenu au paiement de loyers postérieurement à la résiliation, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il a débouté M. et Mme Y... de leurs demandes de remboursement de frais de constat et la société Nemrot de ses demandes de dommages-intérêts, l'arrêt rendu le 18 mars 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, pour le surplus, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée ;
Condamne M. et Mme Y..., ensemble, aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne M. et Mme Y..., ensemble, à payer à la société Nemrot la somme de 2 500 euros ; rejette la demande de M. et Mme Y... ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf septembre deux mille dix.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par Me Blanc, avocat aux Conseils pour la société Nemrot (ex Miramar).
Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir constaté l'acquisition de la clause résolutoire insérée au bail liant la société Nemrot et les époux Y... à la date du 28 mai 2006 et du 23 août 2007, d'avoir dit n'y avoir lieu à réintégrer la société Nemrot dans les lieux loués, et d'avoir condamné la société Nemrot à payer à Monsieur et Madame Y... la somme de 5 827,90 euros, au titre du solde des loyers dus au 16 avril 2007, ainsi qu'à supporter le coût des commandements de payer des 28 avril 2006 et 23 juillet 2007 ;
Aux motifs que « par acte du 28 avril 2006, Monsieur et Madame Y... ont fait délivrer à (…) la société Nemrot un commandement de payer la somme de 9 452,13 euros correspondant aux loyers des troisième et quatrième trimestres 2005 et au loyer du 1er trimestre 2006 (…) ; que le paiement des loyers n'a pas été effectué dans les délais, la société Nemrot ayant remis deux chèques de 5 802,84 euros et de 6 800 euros à l'ordre de la CARPA à l'audience du 24 novembre 2006, soit plusieurs mois après l'expiration du délai visé au commandement signifié le 28 avril 2006 ; qu'il n'est pas démontré que les correspondances adressées les 12 décembre 2005 et 28 avril 2006 par la société Nemrot aux bailleurs aient été effectivement accompagnées d'un chèque de règlement des échéances des troisième et quatrième trimestres 2005 et du premier trimestre 2006 dont il est fait état dans ces courriers ; que rien n'autorise non plus à conclure que les bailleurs auraient refusé de réceptionner lesdites correspondances (…) ; qu'en l'absence de preuve que la société Nemrot se serait trouvée confrontée à un refus de la part des bailleurs ou à une impossibilité de payer lesdites échéances de loyer, il convient, en infirmant de ce chef le jugement entrepris, de dire acquise la clause résolutoire insérée au bail et de constater la résiliation de plein droit de ce bail au 28 mai 2006 ; qu'à titre surabondant, il est acquis aux débats que Monsieur et Madame Y... ont, par acte du 23 juillet 2007, fait signifier à la société Nemrot un nouveau commandement, rappelant également la clause résolutoire, de payer la somme de 11 841,17 euros au titre du solde des loyers afférents aux échéances des troisième et quatrième trimestres 2006, et du premier trimestre 2007 jusqu'au 16 avril 2007 (…) ; qu'il résulte du courrier officiel de Maître B... en date du 21 juin 2005 que le total des règlements effectués par la société Nemrot au 30 juin 2005 n'a pas excédé la somme globale de 32 319,20 euros, ce que cette dernière ne dément pas utilement (…) ; que dès lors il apparaît, au vu du décompte communiqué par les intimés et non sérieusement combattu par la société appelante, que celle-ci restait devoir au 16 avril 2007 la somme de 10 006,10 euros, dont doit être déduit le règlement effectué à hauteur de 4 178,22 euros, de telle sorte qu'elle reste débitrice d'un solde égal à 5 827,88 euros, qu'elle ne justifie pas avoir acquitté ; que dans la mesure où ce solde n'a pas été réglé à l'expiration du délai d'un mois ayant suivi la délivrance du commandement de payer du 23 juillet 2007, il y a lieu de constater l'acquisition de la clause résolutoire du bail à compter du 24 août 2007 et d'accueillir la demande des époux Y... tendant à voir condamner la société Nemrot à leur régler la somme de 5 827,88 euros et à prendre en charge le coût des commandements de payer des 28 avril 2006 et 23 juillet 2007 (…) ; qu'au demeurant, la société appelante n'est pas fondée à opposer l'exception d'inexécution tirée de l'inobservation par les bailleurs de leur obligation d'effectuer les travaux leur incombant, alors qu'ils n'ont pas pris l'initiative d'une procédure visant à être autorisés à consigner les loyers (…) ; qu'en toute hypothèse, dans son arrêt du 17 septembre 2008, la cour d'appel de Paris a relevé : "concernant les conséquences des infiltrations sur l'exploitation, il ne résulte pas du rapport d'expertise une impossibilité totale d'exploitation de la partie commerciale des locaux du fait des désordres dus à ces infiltrations, seule une impossibilité de jouissance de la partie habitation étant relevée par l'expert" ; que la société Nemrot (…) ne justifie pas avoir fait opposition aux commandements en cause dans la présente instance, se contentant de produire aux débats l'opposition signifiée par elle le 21 mars 2002 à un commandement précédemment délivré le 8 mars 2002 (…) ; que par voie de conséquence, il convient, en confirmant par substitution de motifs le jugement entrepris, de dire n'y avoir lieu à réintégrer la société Nemrot dans les lieux loués sis ... à Villiers-le-Bel (…) » ;
Alors que 1°) l'acquisition de la clause résolutoire emporte l'anéantissement du contrat, en sorte que le juge ne peut fixer qu'une seule date de résiliation du contrat ; que la cour d'appel ne pouvait retenir que la clause résolutoire insérée au bail liant les parties était acquise à la fois à la date du 28 mai 2006 et à la date du 23 août 2007 sans violer l'article L. 145-41 du Code de commerce ;
Alors que 2°) en s'étant fondée, pour constater l'acquisition de la clause résolutoire à la date du 28 mai 2006, sur la circonstance qu'il n'était pas démontré que les correspondances adressées par le preneur les 12 décembre 2005 et 28 avril 2006 étaient accompagnées de chèques de règlement des échéances des 3ème et 4ème trimestres 2005 et du premier trimestre 2006, quand cette circonstance n'était pas contestée par les parties, la cour d'appel a méconnu les termes du litige et a ainsi violé l'article 4 du Code de procédure civile ;
Alors que 3°) en ayant retenu que la société Nemrot ne justifiait pas avoir fait opposition au commandement du 28 avril 2006, se contentant de produire aux débats l'opposition signifiée par elle le 21 mars 2002 à un commandement précédemment délivré le 8 mars 2002, sans avoir invité les parties à s'expliquer sur l'absence au dossier de l'opposition au commandement de payer du 28 avril 2006 délivrée le 26 mai 2006, qui figurait au bordereau récapitulatif des pièces produites (pièce n° 32), la cour d'appel a violé l'article 16 du Code de procédure civile ;
Alors que 4°) la clause résolutoire n'est acquise qu'à défaut de paiement des loyers qui sont réclamés au commandement de payer ; qu'après avoir constaté que le commandement de payer la somme de 11 841,17 euros du 23 juillet 2007 visait le règlement des loyers des 3ème et 4ème trimestres 2006 et du premier trimestre 2007, la cour d'appel ne pouvait prendre en compte les arriérés de loyers antérieurs aux échéances visées au commandement litigieux et notamment les sommes restant dues au 30 juin 2005 pour juger acquise la clause résolutoire, sans violer l'article L. 145-41 du Code de commerce ;
Alors que 5°) l'exception d'inexécution peut être opposée par le preneur d'un bail commercial à un commandement de payer des loyers visant la clause résolutoire ; qu'en ayant refusé à la société Nemrot la faculté d'invoquer l'exception d'inexécution tirée de l'inobservation par les bailleurs de leur obligation d'effectuer les travaux leur incombant, au motif inopérant qu'ils n'avaient pas pris l'initiative d'une procédure visant à être autorisés à consigner les loyers, la cour d'appel a violé l'article L. 145-41 du Code de commerce ;
Alors que 6°) l'acquisition de la clause résolutoire est exclue lorsque le bailleur a empêché, par son fait, l'exploitation normale des locaux loués ; qu'après avoir relevé que l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 17 septembre 2008 avait constaté l'impossibilité totale de jouissance de la partie habitation, la cour d'appel qui a jugé que la société Nemrot ne pouvait opposer l'exception d'inexécution aux bailleurs, n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations dont il résultait que la locataire n'avait pu jouir normalement de la chose louée du fait des bailleurs, et a ainsi violé l'article L. 145-41 du Code de commerce ;
Alors que 7°) l'acquisition de la clause résolutoire est exclue lorsque le bailleur a empêché, par son fait, l'exploitation normale des locaux loués ; qu'en n'ayant pas recherché, comme elle y était invitée, si les manquements des bailleurs à leur obligation de mise en conformité des locaux loués aux normes de sécurité, constatés par l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 17 septembre 2008, n'avaient pas empêché l'exploitation normale desdits locaux en provoquant leur fermeture administrative, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 145-41 du Code de commerce ;
Alors que 8°) et subsidiairement après avoir constaté que la clause résolutoire était acquise à la date du 28 mai 2006, la cour d'appel ne pouvait condamner la société Nemrot à payer les loyers commerciaux postérieurement à cette date sans violer l'article L. 145-41 du Code de commerce.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 09-13922
Date de la décision : 29/09/2010
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Analyses

BAIL COMMERCIAL - Résiliation - Clause résolutoire - Application - Effets - Maintien dans les lieux - Portée

Un bail dont la résiliation est acquise ne peut être à nouveau résilié. Le preneur dont le bail a été résilié n'est plus tenu au paiement des loyers postérieurement à la résiliation


Références :

article L. 145-41 du code de commerce

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 18 mars 2009

Sur l'obligation de payer non plus un loyer mais une indemnité d'occupation dès l'expiration du bail, à rapprocher :3e Civ., 24 février 1999, pourvoi n° 97-11554, Bull. 1999, III, n° 47 (rejet)


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 29 sep. 2010, pourvoi n°09-13922, Bull. civ. 2010, III, n° 175
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2010, III, n° 175

Composition du Tribunal
Président : M. Lacabarats
Avocat général : M. Bailly
Rapporteur ?: Mme Fossaert
Avocat(s) : Me Blanc, Me Le Prado

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:09.13922
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