LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu les articles 26-4, alinéa 3, et 47, alinéa 1er, du code civil, dans leur rédaction issue de la loi n° 2003-1119 du 26 novembre 2003 ;
Attendu qu'il résulte du premier de ces textes que l'enregistrement d'une déclaration acquisitive de nationalité peut être contesté par le ministère public en cas de mensonge ou de fraude, dans les deux ans de leur découverte ; qu'aux termes du second, tout acte de l'état civil des français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité ;
Attendu que Mme X..., née le 27 décembre 1967 à Mtsamdou Oichili (Comores) a contracté mariage le 13 avril 1991 avec M. Y..., de nationalité française ; que le 13 novembre 2000, elle a souscrit une déclaration de nationalité française sur le fondement de l'article 21-2 du code civil qui a été enregistrée le 22 novembre 2001 ; que le 5 avril 2004, le procureur de la République a fait assigner Mme X... devant le tribunal de grande instance en contestation de l'enregistrement de sa déclaration sur le fondement de l'article 26-4, alinéa 3, du code civil au motif qu'il résultait d'un rapport de l'ambassade de France aux Comores du 7 mars 2002 que l'acte de naissance produit par Mme X... était apocryphe ;
Attendu que pour débouter le ministère public de son action, l'arrêt attaqué retient qu'il n'était pas établi du seul fait des irrégularités de forme entachant l'extrait d'acte que les mentions relatives au lieu de naissance, à la date de naissance et à la filiation qui y étaient portées étaient erronées, ni que Mme X... ait eu conscience de son caractère irrégulier ou qu'elle ait cherché à commettre une fraude ou à mentir sur des éléments de son identité ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la production d'un acte de naissance apocryphe constitue un mensonge, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 3 juin 2008, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois juin deux mille dix.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par le procureur général près la cour d'appel d'Aix-en-Provence
Aux termes d'un moyen unique de cassation, il est fait grief à l'arrêt de la Cour d'Appel d'avoir confirmé le jugement de première instance et d'avoir violé l'article 47 du code civil ;
Aux motifs que le fait que des irrégularités de forme entachent l'extrait d'acte de naissance produit par Mme Zalhata X... épouse Y...ne saurait suffire à faire présumer, alors que l'on ignore dans quelles conditions ce document a été établi, que celle-ci avait conscience de son caractère irrégulier, qu'elle a cherché à commettre une fraude, et qu'elle a menti sur des éléments de son identité ; que c'est dans ces conditions à bon droit, et par des motifs pertinents que le tribunal a débouté le Ministère public de sa demande ;
Alors que, au terme de l'article 47 du code civil dans sa rédaction issue de la loi du 26 novembre 2003, " tout acte de l'état-civil des français et des étrangers faits en pays étrangers et rédigés dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenues, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité " ; qu'il résulte du rapport de l'Ambassade de France aux Comores en date du 7 mars 2002 que l'acte de naissance de Mme Zalhata X... épouse Y...est apocryphe ; qu'à défaut pour la Cour d'en déduire l'absence de force probante et de fiabilité de l'acte de naissance de la déclarante entraînant l'annulation de l'enregistrement de la déclaration souscrite au titre du mariage, la Cour a violé l'article 47 du code civil.