LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique des pourvois principal et incident, qui sont identiques, pris en ses deux branches :
Attendu que le 7 avril 1999 est née Eglantine Charlotte X... de Brigitte X... qui l'a reconnue le 14 avril 1999 ; que le 30 octobre 1999, M. Y..., concubin de la mère, a reconnu l'enfant ; que par déclaration conjointe de Brigitte X... et de M. Y... du 2 mars 2000, Eglantine a pris le nom de Y... ; que le 14 juin 2002, M. Z... a déclaré, devant l'officier d'état civil, reconnaître pour sa fille Eglantine Y... et a, le 11 juillet 2003, fait assigner Brigitte X... et M. Y... en contestation de la reconnaissance de ce dernier ; qu'à la suite du décès de Brigitte X... survenu le 7 octobre 2004, Mme Liliane X..., épouse A..., tante de l'enfant, a été désignée en qualité d'administrateur ad hoc d' Eglantine par le juge des tutelles ; que, statuant après dépôt d'un rapport d'expertise ayant exclu de façon certaine la paternité de M. Y... et dit que M. Z... avait 99,999 chances sur cent d'être le père de l'enfant, le tribunal de grande instance de Nanterre a, par jugement du 8 septembre 2006, annulé la première reconnaissance paternelle, donné son plein effet à la seconde et dit que l'enfant porterait désormais le nom de X... ;
Attendu que M. Y... et Mme A..., ès qualités, font grief à l'arrêt attaqué (Versailles, 28 février 2008) de les débouter de leur demande tendant à ce qu'Eglantine conserve le nom de Y... et ce, malgré son changement de filiation paternelle, alors, selon le moyen :
1°/ que conformément aux dispositions de la Convention internationale relative aux droits de l'enfant du 26 novembre 1989, ayant une autorité supérieure à la loi, les décisions concernant l'enfant doivent être impérativement rendues en considération de l'intérêt supérieur de celui-ci, fût-ce au prix d'une mise à l'écart des dispositions internes contraires ; qu'en l'espèce, M. Y... faisait régulièrement valoir qu'il était de l'intérêt supérieur de l'enfant Eglantine, aujourd'hui âgée de 9 ans, de conserver le nom de Y... et non pas de prendre le nom de sa mère, aujourd'hui décédée qu'en jugeant pourtant que l'intérêt supérieur de l'enfant ne peut justifier une contrariété directe avec la loi, la cour d'appel a violé, par refus d'application, les articles 3.1 et 8.1 de la Convention internationale des droits de l'enfant du 20 novembre 1989 ;
2°/ que le principe de l'immutabilité du nom ne fait pas obstacle à ce que la possession prolongée d'un nom puisse en permettre l'acquisition, dès lors que cette possession n'est pas déloyale ; qu'en l'espèce en jugeant que la possession d'état ne pouvait constituer un mode autonome d'acquisition du nom patronymique, la cour d'appel a violé l'article 1er de la loi du 6 fructidor an II ;
Mais attendu qu'après avoir justement rappelé que l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale dans toutes les décisions concernant les enfants conformément à l'article 3 de la Convention internationale des droits de l'enfant du 20 novembre 1989 et que cette disposition était directement applicable devant les tribunaux français, la cour d'appel a constaté que les premiers juges avaient à bon droit annulé la reconnaissance effectuée par M. Y... et donné plein effet à celle souscrite par M. Z... le 14 juin 2002 et en a déduit que l'annulation de la première reconnaissance entraînait le changement de patronyme de l'enfant dès lors que le seul fait d'avoir porté ce nom depuis l'âge de un an ne pouvait permettre à l'enfant d'acquérir ce nom et qu'en outre, l'enfant allait reprendre le nom de sa mère qui demeurait dans sa mémoire et à laquelle elle était très attachée et non celui de son père qu'elle ne connaissait pas encore ; que par ces motifs, la cour d'appel, qui a pris en compte l'intérêt supérieur de l'enfant et n'a pas refusé de le faire prévaloir, a souverainement estimé qu'en l'espèce, cet intérêt ne justifiait pas le maintien du nom de l'auteur de la reconnaissance annulée ; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois ;
Condamne M. Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les deux demandes formées à ce titre par M. Y... et Mme A..., ès qualités, et la demande du conseil de M. Z... en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept mars deux mille dix.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyen produit par Me Spinosi, avocat aux Conseils pour M. Y..., demandeur au pourvoi principal
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. Y... de sa demande tendant à ce que Eglantine conserve le nom de Y... et ce, malgré son changement de filiation paternelle ;
Aux motifs que « Il résulte du rapport de l'expert que l'étude des groupes sanguins érythrocytaires, des groupes tissulaires HLA et du polymorphisme de l'ADN permet de conclure à la paternité de AliZ... qui a plus de 99,99 chances sur 100 d'être le père de l'enfant Eglantine Charlotte et d'exclure la paternité de Guy Y....
Ali Z... rapporte ainsi la preuve du caractère mensonger de la reconnaissance effectuée le 30 octobre 1999 par Guy Y... qui n'ignorait pas que la mère de l'enfant avait entretenu des relations intimes avec l'intimé pendant la période légale de conception, ce dont Brigitte X... ne se cachait pas puisqu'elle avait pris soin d'informer Ali Z... et ses proches parents de la naissance attendue de l'enfant et les rencontrait plus ou moins régulièrement jusque début 1999. Guy Y... n'a d'ailleurs reconnu l'enfant que plusieurs mois après sa naissance.
La communication à la cour de céans du dossier d'assistance éducative ouvert au tribunal pour enfants de Nanterre n'est pas nécessaire à la solution du présent litige qui porte sur la filiation de l'enfant et non sur les conditions d'exercice de l'autorité parentale.
Si l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale dans toutes les décisions concernant les enfants conformément à l'article 3 de la Convention internationale des droits de l'enfant du 20 novembre 1989 applicable directement devant les tribunaux français, cet intérêt supérieur ne commande pas que soitmaintenue une filiation mensongère alors que l'article 7 de la même convention reconnaît à l'enfant dans la mesure du possible le droit de connaître ses parents et d'être élevé par eux.
Eglantine Charlotte née le 7 avril 1999 à Epinay sur Seine n'est pas la fille de Guy Y... mais la fille de Ali Z.... Les premiers juges ont à bon droit annulé la reconnaissance effectuée le 30 octobre 1999 par Guy Y... et donné plein effet à la reconnaissance effectuée par Ali Z... le 14 juin 2002.
L'annulation de la reconnaissance entraîne le changement de patronyme de l'enfant, la possession d'état ne pouvant constituer un mode autonome d'acquisition du nom patronymique.
Certes l'enfant porte depuis l'âge d'un an le nom de Y.... Toutefois, l'intérêt supérieur de l'enfant ne peut justifier une contrariété directe avec la loi, étant observé qu'il s'agit pour elle de reprendre le nom de sa mère qui demeure dans sa mémoire et à laquelle elle est comme tout enfant très attachée et non celui de son père qu'elle ne connaît pas encore.
Eglantine Charlotte portera désormais le nom de sa mère soit X... ;
1/ Alors que, d'une part, conformément aux dispositions de la Convention internationale relative aux droits de l'enfant du 26 novembre 1989, ayant une autorité supérieure à la loi, les décisions concernant l'enfant doivent être impérativement rendues en considération de l'intérêt supérieur de celui-ci, fût-ce au prix d'une mise à l'écart des dispositions internes contraires ; qu'en l'espèce, Monsieur Y... faisait régulièrement valoir qu'il était de l'intérêt supérieur de l'enfant Eglantine, aujourd'hui âgée de 9 ans, de conserver le nom de Y... et non pas de prendre le nom de sa mère aujourd'hui décédée ; qu'en jugeant pourtant que l'intérêt supérieur de l'enfant ne peut justifier une contrariété directe avec la loi, la Cour d'appel a violé, par refus d'application, les articles 3.1 et 8.1 de la Convention internationale des droits de l'enfant du 20 novembre 1989 ;
2/ Alors que, d'autre part, le principe de l'immutabilité du nom ne fait pas obstacle à ce que la possession prolongée d'un nom puisse en permettre l'acquisition, dès lors que cette possession n'est pas déloyale ; qu'en l'espèce en jugeant que la possession d'état ne pouvait constituer un mode autonome d'acquisition du nom patronymique, la Cour d'appel a violé l'article 1er de la loi du 6 fructidor an II.
Moyen produit par Me Spinosi, avocat aux Conseils pour Mme A..., ès qualités, demanderesse au pourvoi incident
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Madame Liliane X... épouse A... ès qualités d'administrateur ad hoc de l'enfant Eglantine Y... de sa demande tendant à ce que Eglantine conserve le nom de Y... et ce, malgré son changement de filiation paternelle ;
Aux motifs que « Il résulte du rapport de l'expert que l'étude des groupes sanguins érythrocytaires, des groupes tissulaires HLA et du polymorphisme de l'ADN permet de conclure à la paternité de Ali Z... qui a plus de 99,99 chances sur 100 d'être le père de l'enfant Eglantine Charlotte et d'exclure la paternité de Guy Y....
Ali Z... rapporte ainsi la preuve du caractère mensonger de la reconnaissance effectuée le 30 octobre 1999 par Guy Y... qui n 'ignorait pas que la mère de l'enfant avait entretenu des relations intimes avec l'intimé pendant la période légale de conception, ce dont Brigitte X... ne se cachait pas puisqu 'elle avait pris soin d'informer Ali Z... et ses proches parents de la naissance attendue de l'enfant et les rencontrait plus ou moins régulièrement jusque début 1999. Guy Y... n'a d 'ailleurs reconnu l'enfant que plusieurs mois après sa naissance.
La communication à la cour de céans du dossier d 'assistance éducative ouvert au tribunal pour enfants de Nanterre n 'est pas nécessaire à la solution du présent litige qui porte sur la filiation de l'enfant et non sur les conditions d'exercice de l'autorité parentale.
Si l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale dans toutes les décisions concernant les enfants conformément à l'article 3 de la Convention internationale des droits de l'enfant du 20 novembre 1989 applicable directement devant les tribunaux français, cet intérêt supérieur ne commande pas que soit maintenue une filiation mensongère alors que l'article 7 de la même convention reconnaît à l'enfant dans la mesure du possible le droit de connaître ses parents et d 'être élevé par eux.
Eglantine Charlotte née le 7 avril 1999 à Epinay sur Seine n 'est pas la fille de Guy Y... mais la fille de Ali Z.... Les premiers juges ont à bon droit annulé la reconnaissance effectuée le 30 octobre 1999 par Guy Y... et donné plein effet à la reconnaissance effectuée par Ali Z... le 14juin 2002.
L'annulation de la reconnaissance entraîne le changement de patronyme de l'enfant, la possession d'état ne pouvant constituer un mode autonome d'acquisition du nom patronymique.
Certes l'enfant porte depuis l'âge d'un an le nom de Y.... Toutefois, l'intérêt supérieur de l'enfant ne peut justifier une contrariété directe avec la loi, étant observé qu'il s'agit pour elle de reprendre le nom de sa mère qui demeure dans sa mémoire et à laquelle elle est comme tout enfant très attachée et non celui de son père qu 'elle ne connaît pas encore.
Eglantine Charlotte portera désormais le nom de sa mère soit X... » ;
1/ Alors que, d'une part, conformément aux dispositions de la Convention internationale relative aux droits de l'enfant du 26 novembre 1989, ayant une autorité supérieure à la loi, les décisions concernant l'enfant doivent être impérativement rendues en considération de l'intérêt supérieur de celui-ci, fût-ce au prix d'une mise à l'écart des dispositions internes contraires ; qu'en l'espèce, l'administratrice ad hoc de l'enfant Eglantine Y... faisait régulièrement valoir qu'il était de l'intérêt supérieur de l'enfant Eglantine, aujourd'hui âgée de 9 ans, de conserver le nom de Y... et non pas de prendre le nom de sa mère aujourd'hui décédée ; qu'en jugeant pourtant que l'intérêt supérieur de l'enfant ne peut justifier une contrariété directe avec la loi, la Cour d'appel a violé, par refus d'application, les articles 3.1 et 8.1 de la Convention internationale des droits de l'enfant du 20 novembre 1989 ;
2/ Alors que, d'autre part, le principe de l'immutabilité du nom ne fait pas obstacle à ce que la possession prolongée d'un nom puisse en permettre l'acquisition, dès lors que cette possession n'est pas déloyale ; qu'en l'espèce en jugeant que la possession d'état ne pouvait constituer un mode autonome d'acquisition du nom patronymique, la Cour d'appel a violé l'article 1er de la loi du 6 fructidor an II.