LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu les articles L. 2122-1 et L. 2314-21 à L. 2314-24 du code du travail ;
Attendu qu'à moins qu'elles soient directement contraires aux principes généraux du droit électoral, les irrégularités commises dans l'organisation et le déroulement du scrutin ne peuvent constituer une cause d'annulation que si elles ont exercé une influence sur le résultat des élections ou, depuis l'entrée en vigueur de la loi n 2008-789 du 20 août 2008 si, s'agissant du premier tour, elles ont été déterminantes de la qualité représentative des organisations syndicales dans l'entreprise, ou du droit pour un candidat d'être désigné délégué syndical ;
Attendu, selon le jugement attaqué, que les élections des représentants du personnel au comité d'établissement régional de la région SNCF Lorraine se sont déroulées le 26 mars 2009 ; que le syndicat régional des cheminots de Metz-Nancy CFDT (le syndicat) a recueilli 475 voix sur un total de 4935 voix, soit 9,63 % des suffrages exprimés ; que trente-quatre bulletins de votes par correspondance sont parvenus à l'entreprise plusieurs jours après la clôture du scrutin ; que le syndicat a saisi le tribunal d'instance d'une demande d'annulation des élections ;
Attendu que pour débouter le syndicat de cette demande, le tribunal, après avoir relevé, d'une part, que le matériel de vote par correspondance avait été envoyé dans le délai prévu par le protocole préélectoral et dans un délai suffisant pour permettre aux salariés d'exprimer leur vote de manière régulière, d'autre part, que l'employeur s'était assuré, auprès de la Poste, que l'ensemble des enveloppes lui avait bien été remis avant la clôture du scrutin, retient qu'aucune défaillance de l'employeur dans l'organisation des élections n'est à déplorer ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'irrégularité qu'il constatait dans le déroulement des opérations de vote, peu important que l'employeur ait été ou non défaillant dans l'organisation du scrutin, avait été déterminante de la représentativité du syndicat CFDT, le tribunal a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, le jugement rendu le 14 mai 2009, entre les parties, par le tribunal d'instance de Metz ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le tribunal d'instance de Nancy ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la SNCF à payer au syndicat régional CFDT des cheminots de Metz-Nancy, la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix mars deux mille dix.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat aux Conseils pour le syndicat régional CFDT des cheminots de Metz-Nancy.
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté la demande du syndicat tendant à l'annulation de l'élection des représentants du personnel au comité d'établissement de la Région SNCF METZ NANCY
AUX MOTIFS QUE II est constant que !e 3 avril 2009 la poste d' EPINAL a remis à une employée de l'Établissement d'exploitation d'EPINAL 58 enveloppes, dont 34 enveloppes complémentaires destinées aux élections des représentants au Comité d'Etablissement de la Région SNCF Lorraine. Ainsi qu'il a déjà été observé, il résulte du protocole préélectoral national que seules les enveloppes parvenues avant te clôture du scrutin, et donc avant le début du dépouillement, pouvaient être valablement prises en compte dans te résultat du scrutin (article 20-2), Les 34 enveloppes parvenues plusieurs jours après ia clôture du scrutin n'avaient donc pas à être prises en compte et aucune irrégularité n'exista à ce titre. L'acheminement tardif de votes par correspondance faisant obstacle à leur prise en compte ne serait susceptible de constituer une irrégularité entachant l'organisation du scrutin que si elle résultait d'une défaillance de l'employeur, ce qui serait notamment le cas si l'envoi du matériel de vote n'avait pas été fait dans un délai suffisant pour permettre aux salariés d'exprimer leur vote de manière régulière et conforme au protocole électoral. II résulte de l'ANNEXE 1 du Protocole National, intitulée "CALENDRIER TYPE DE DEROULEMENT DES OPÉRATIONS ÉLECTORALES" que l'envoi du matériel de vote aux agents votant par correspondance devait avoir lieu au plus tard le « J - 6" (en l'occurrence le 26 mars - 8 jours = 18 mars), et il résulte expressément d'une autre annexe de ce protocole, intitulée "CALENDRIER DE DEROULEMENT DES OPÉRATIONS ELECTORALES" que cet envoi devait avoir lieu au plus tard le 18 mars 2009 (cf p. 28 du référentiel Ressources Humaines versé aux débats par ta S.N C,R). Il n'est ni prétendu ni démontré par le Syndicat Régional CFDT des Cheminots de METZ-NANCY que l'envoi du matériel de vote aurait eu lieu après le 18 mars 2009. La SNCF démontre au contraire que cet envoi a eu lieu le 13 mars 2009 (extrait du Journal de l'Etablissement d'Exploitation d'Epinal en date du 13 mars 2009).
L'envoi du matériel de vote a donc été fait dans le délai prévu par l'annexe du protocole national, et en tout état de cause dans un délai suffisant pour permettre aux salariés d'exprimer leur vote de manière régulière et conforme au protocole électoral. Enfin l'employeur n'est pas responsable de la gestion du courrier et des boites postales par la Poste ; il a satisfait à son obligation en recherchant les votes par correspondance le jour du scrutin à 15 h 30, et en s'assurant auprès de la préposée qu'aucune autre enveloppe ne se trouvait encore dans le bureau de poste.. En définitive en l'état du dossier, aucune défaillance de l'employeur dans l'organisation des élections n'est constatée, et aucune violation du principe du vote à bulletin secret, du protocole d'accord préélectoral et des principes généraux du droit électoral n'est démontrée. Aucune cause d'annulation des élections n'est donc caractérisée. A« regard de l'ensemble de ce qui précède la demande tendant à l'annulation des élections des représentants du personnel au comité d'établissement de la Région SNCF Lorraine est rejetée.
ALORS QUE, les irrégularités entachant le scrutin sont susceptibles d'entraîner son annulation, si elles sont de nature à en modifier le résultat, peu important que l'employeur n'ait commis aucune faute ; que le tribunal qui a constaté que 34 enveloppes étaient parvenues après la clôture du scrutin, mais a refusé de le prendre en compte à défaut de faute de l'employeur a violé les principes du droit électoral et les articles L 2324-3 et suivants du code du travail
ALORS surtout QUE le syndicat exposant soutenait que lesdites enveloppes avaient été reçues les 17, 18 et 19mars soit 7 jours avant le scrutin soit en temps utile pour être acheminées et prises en compte ; que dès lors, et alors que la différence de 34 voix était de nature à modifier le résultat, le tribunal qui n'a pas recherché la date d'émission et de réception de ces votes n'a pas légalement justifié sa décision au regard desdites dispositions.