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03/06/2009 | FRANCE | N°07-44212

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 03 juin 2009, 07-44212


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen :
Vu les articles R. 518-1, R. 518-2 devenus R. 1457-1 et R. 1457-2 du code du travail et 346 du code de procédure civile ensemble l'article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ;
Attendu qu'il résulte de la combinaison de ces textes que le conseil de prud'homme doit, dès qu'il a connaissance de la demande de récusation, suspendre l'instance jusqu'à ce qu'elle ait été définitivement tranchée et ne peut statuer sur cette dem

ande ni examiner l'affaire au fond, en présence du conseiller prud'homm...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen :
Vu les articles R. 518-1, R. 518-2 devenus R. 1457-1 et R. 1457-2 du code du travail et 346 du code de procédure civile ensemble l'article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ;
Attendu qu'il résulte de la combinaison de ces textes que le conseil de prud'homme doit, dès qu'il a connaissance de la demande de récusation, suspendre l'instance jusqu'à ce qu'elle ait été définitivement tranchée et ne peut statuer sur cette demande ni examiner l'affaire au fond, en présence du conseiller prud'homme dont la récusation a été sollicitée ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué que M. X..., engagé par l'association La Caserne aux droits de laquelle vient l'association La Caserne Ephémère a saisi la juridiction prud'homale pour contester la rupture anticipée de son contrat de travail et solliciter l'allocation de dommages-intérêts ; qu'à l'audience du 10 juin 2005, devant le bureau de jugement, l'association La Caserne Ephémère a demandé la récusation de l'un des conseillers prud'hommes ; que par jugement du 9 décembre 2005, le conseil de prud'hommes a statué au fond ; que l'association La Caserne Ephémère a interjeté appel de cette décision en faisant notamment valoir qu'elle avait été rendue en violation des dispositions des articles R. 518-1 du code du travail et 341 à 355 du code de procédure civile ;
Attendu que pour rejeter ce moyen, la cour d'appel a retenu que l'association La Caserne Ephémère avait sollicité la récusation d'un conseiller prud'homme au motif qu'il avait dirigé une association du Réseau Pass devenue "les amis du Réseau Pass" implanté sur le site de Bossut qui avait eu un différend d'ordre financier avec elle mais que ce conseiller prud'homme n'était pas le dirigeant de l'association "les amis du Réseau Pass" en litige avec l'association La Caserne Ephémère, mais de la seule association Pass ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la demande de récusation devait, si le conseiller prud'homal s'y opposait ou ne répondait pas, être jugée sans délai par la cour d'appel et qu'il ressortait de ses propres constatations que le conseil de prud'hommes avait excédé ses pouvoirs en examinant l'affaire au fond en présence du conseiller dont la récusation avait été sollicitée, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 14 juin 2007, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trois juin deux mille neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

.
Moyens produits par la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, avocat aux Conseils pour l'association La Caserne Ephémère.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR condamné l'association La CASERNE EPHEMERE au paiement d'une somme de 5 327,40 à titre de dommages-intérêts pour rupture abusive ;
AUX MOTIFS QUE LA CASERNE EPHEMERE soutient que le jugement du conseil de prud'hommes a été rendu en violation des dispositions des articles R. 518-1 du Code du travail et 341 à 355 du Code de procédure civile dans la mesure où l'un des conseillers a dirigé une association RESEAU PASS devenue LES AMIS DU RESEAU PASS implantée sur le site de Bossut qui a eu un différend d'ordre financier avec elle ; que le droit d'obtenir la récusation du juge « si celui-ci ou son conjoint est créancier, débiteur, héritier présomptif ou donataire de l'une des parties » est prévue à l'article 341 du Code de procédure civile ; qu'elle a sollicité la récusation de ce conseiller et le renvoi devant une autre formation, demande à laquelle le conseil de prud'hommes n'a pas fait droit ; que le conseiller dont la récusation a été sollicitée n'était pas le dirigeant de l'association LES AMIS DU RESEAU PASS en litige avec LA CASERNE EPHEMERE, mais de la seule association PASS ; que dès lors les dispositions de l'article R. 518-1 du Code du travail et 341 et suivants du Code de procédure civile n'ont pas été violées ;
ALORS, D'UNE PART, QU'il résulte de la combinaison des articles R. 518-1, R. 518-2 du Code du travail et 346 du Code de procédure civile que la demande de récusation d'un conseiller prud'homme implique, dès lors qu'elle est régulièrement formée, la suspension de l'instance aux fins de communiquer la demande au conseiller dont la récusation est sollicitée, lequel dispose alors d'un délai de huit jours pour éventuellement y acquiescer et se retirer ou au contraire s'y opposer, auquel cas il appartient à la chambre sociale de la cour d'appel de trancher la question et d'ordonner, si nécessaire, son remplacement ; qu'en décidant que le conseil de prud'hommes avait valablement rejeté la demande de récusation formée par l'association LA CASERNE EPHEMERE quand il résulte pourtant de son arrêt que cette demande, dont il était constant et non contesté qu'elle avait été régulièrement formée, avait été rejetée sur le champ par la formation de jugement du conseil de prud'hommes, laquelle s'était en outre autorisée à statuer immédiatement sur le fond du litige en présence du conseiller dont la récusation avait été sollicitée et cela, sans que la procédure ci-dessus décrite ait été aucunement respectée, la Cour d'appel a violé les articles R. 518-1, R. 518-2 du Code du travail et 346 du Code de procédure civile, ensemble l'article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE doit être récusé, en ce que sa présence méconnaît le droit à un tribunal impartial tel qu'il est garanti par l'article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales, le conseiller prud'homme qui, bien que n'étant pas le Président officiel d'une association avec laquelle l'une des parties a un important différend financier, dirige en réalité cette association ; qu'en décidant l'inverse, la Cour d'appel a violé l'article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ;
ALORS, ENFIN, QUE l'association exposante faisait valoir dans ses conclusions (p. 3 in fine), que la situation litigieuse relevait non seulement du 2°) de l'article 341 du Code de procédure civile, lequel prévoit la récusation du juge lorsque lui-même ou son conjoint est créancier, débiteur, héritier présomptif ou donataire de l'une des parties, mais également du 8°) du même article, lequel prévoit la récusation en cas d'amitié ou d'inimitié notoire entre le juge et l'une des parties ; qu'en se bornant à examiner si la situation invoquée par LA CASERNE EPHEMERE relevait du 2°) de l'article 341 du Code de procédure civile, la Cour d'appel, qui n'a pas répondu à l'un des moyens des conclusions d'appel de l'exposante, a méconnu les exigences de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné l'association La CASERNE EPHEMERE au paiement d'une somme de 5 327,40 à titre de dommages-intérêts pour rupture abusive ;
AUX MOTIFS QUE le dernier contrat emploi solidarité conclu avec le salarié l'a été pour la période du 8 juin 2003 au 7 juin 2004 mais a été rompu par l'association avant l'échéance du terme au motif de la cessation de son activité, celle-ci ayant dû, en application de la convention qu'elle avait signée avec l'Etablissement public d'aménagement de Pontoise restituer le site de la Caserne Bossut ; que la force majeure permettant à l'employeur de s'exonérer de tout ou partie des obligations nées de la rupture d'un contrat de travail s'entend de la survenance d'un événement extérieur irrésistible, ayant pour effet de rendre impossible la poursuite dudit contrat ; que la condition d'extériorité n'est pas remplie en l'espèce puisque la date de fermeture du site était connue de l'association LA CASERNE EPHEMERE dès la conclusion du contrat conclu avec l'EPA de Cergy Pontoise en 1999 ; qu'elle ne résulte pas du fait du prince, en l'occurrence d'une décision qui lui aurait été imposée par l'EPA, mais de la stricte application d'une clause contractuelle acceptée par l'employeur ; que par ailleurs, l'association LA CASERNE EPHEMERE connaissait les dispositions régissant les emplois consolidés résultant d'une loi du 19 juillet 1998 lors de l'embauche du salarié ; qu'il lui appartenait de prendre toutes dispositions pour concilier les exigences de la loi en ce qui concerne la durée du contrat de travail avec celles du marché public de mise à disposition ;
ALORS, D'UNE PART, QUE la force majeure, qui autorise la rupture anticipée d'un contrat à durée déterminée s'entend de la survenance d'un événement extérieur irrésistible ayant pour effet de rendre impossible la poursuite dudit contrat ; qu'en l'espèce, était tout à la fois irrésistible et extérieur à LA CASERNE EPHEMERE, la décision de l'Etablissement public d'aménagement de Pontoise de ne pas reconduire la convention d'occupation du site de la caserne Bossut au-delà du 31 décembre 2003 ; qu'en affirmant que le contrat emploi consolidé de Monsieur X... n'avait pu être valablement rompu, la Cour d'appel a violé l'article L. 122-3-8 du Code du travail, ensemble l'article 1148 du Code civil ;
ALORS, D'AUTRE PART, QU'en affirmant que le départ de la CASERNE EPHEMERE du site de la Caserne Bossut ne constituait pas un cas de force majeure en ce qu'il ne remplissait pas le critère d'extériorité dès lors que la date de fermeture du site était connue par la CASERNE EPHEMERE quand cette connaissance avait seulement pour effet de rendre l'événement prévisible, ce qui n'excluait pas la force majeure puisqu'en droit du travail, la condition tenant à l'imprévisibilité de l'événement ne s'applique pas, la Cour d'appel a derechef violé l'article L. 122-3-8 du Code du travail, ensemble l'article 1148 du Code civil ;
ALORS ENFIN QU'aux termes de l'article L. 322-4-8-1 du Code du travail dans sa rédaction issue de la loi n° 98-657 du 29 juillet 1998, tout renouvellement d'un contrat emploi consolidé à durée déterminée doit impérativement être de 12 mois ; qu'en affirmant qu'il appartenait à l'association de prendre toutes les dispositions utiles pour concilier les dispositions régissant les contrats emploi consolidé avec le terme de la convention d'occupation conclue avec l'établissement public d'aménagement de Pontoise quand il résultait des dispositions précitées que, sauf à se séparer définitivement du salarié dès le 7 juin 2003, date d'échéance de son avant dernier contrat, l'association LA CASERNE EPHEMERE n'avait pas eu d'autre choix que de renouveler son contrat pour une nouvelle période de 12 mois, la Cour d'appel a violé les articles L. 122-3-8 du Code du travail et 1148 du Code civil, ensemble l'article L. 322-4-8-1 du Code du travail dans sa rédaction issue de la loi n° 98-657 du 29 juillet 1998.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 07-44212
Date de la décision : 03/06/2009
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Analyses

RECUSATION - Demande - Effets - Abstention du juge - Nécessité - Portée

PRUD'HOMMES - Conseil de prud'hommes - Conseiller - Récusation - Demande de récusation - Compétence pour statuer - Compétence de la cour d'appel - Compétence exclusive - Portée

Il résulte de la combinaison des articles R. 518-1, R. 518-2, devenus R. 1457-1 et R. 1457-2 du code du travail, et 346 du code de procédure civile, ensemble l'article 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, que le conseil de prud'homme doit, dès qu'il a connaissance de la demande de récusation, suspendre l'instance jusqu'à ce qu'elle ait été définitivement tranchée et ne peut statuer sur cette demande ni examiner l'affaire au fond, en présence du conseiller prud'homme dont la récusation a été sollicitée. Encourt dès lors la cassation, l'arrêt qui rejette le moyen tiré de la violation par le conseil de prud'hommes des dispositions relatives à la procédure de récusation, alors qu'il ressortait de ses propres constatations que le conseil de prud'hommes avait excédé ses pouvoirs en examinant l'affaire au fond en présence du conseiller dont la récusation avait été sollicitée


Références :

articles R. 518-1 et R. 518-2, devenus R. 1457-1 et R. 1457-2 du code du travail

article 346 du code de procédure civile

article 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales
articles R. 518-1 et R. 518-2, devenus R. 1457-1 et R. 1457-2 du code du travail

article 346 du code de procédure civile

article 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 14 juin 2007

Sur l'impossibilité absolue pour une juridiction dont un membre est récusé de statuer et sur l'obligation de transmettre sans délai la demande de récusation à la cour d'appel, à rapprocher :1re Civ., 10 mai 1989, pourvoi n° 87-05069, Bull. 1989, I, n° 192 (1) (rejet) ;

Soc., 21 janvier 2009, pourvoi n° 08-60400, Bull. 2009, V, n° 20 (cassation sans renvoi)

arrêt cité


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 03 jui. 2009, pourvoi n°07-44212, Bull. civ. 2009, V, n° 143
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2009, V, n° 143

Composition du Tribunal
Président : Mme Mazars (conseiller doyen faisant fonction de président)
Rapporteur ?: Mme Mariette
Avocat(s) : SCP Ancel et Couturier-Heller, SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:07.44212
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