La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

02/04/2009 | FRANCE | N°08-10656

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 02 avril 2009, 08-10656


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu que la société SCOOTER revendiquant un droit d'auteur sur un modèle de boucles d'oreilles commercialisé sous la dénomination "Boop Tobago" depuis le début de l'année 2003, a, par acte du 26 avril 2005, assigné la société HetM en contrefaçon et en concurrence déloyale ; que l'arrêt attaqué, validant le procès-verbal de saisie-contrefaçon dressé le 29 mars 2005 à cette occasion, a retenu les actes de contrefaçon et condamné de ce chef la société HetM en paiement de dommages-intérêt

s, prononçant par ailleurs les mesures d'interdiction et de publication habitue...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu que la société SCOOTER revendiquant un droit d'auteur sur un modèle de boucles d'oreilles commercialisé sous la dénomination "Boop Tobago" depuis le début de l'année 2003, a, par acte du 26 avril 2005, assigné la société HetM en contrefaçon et en concurrence déloyale ; que l'arrêt attaqué, validant le procès-verbal de saisie-contrefaçon dressé le 29 mars 2005 à cette occasion, a retenu les actes de contrefaçon et condamné de ce chef la société HetM en paiement de dommages-intérêts, prononçant par ailleurs les mesures d'interdiction et de publication habituelles ;

Sur le deuxième moyen, tel qu'il figure dans le mémoire en demande et est reproduit en annexe :

Attendu qu'il résulte des énonciations de l'arrêt et des productions, notamment de l'extrait K bis du registre du commerce et des sociétés, que la société Scooter, immatriculée le 11 septembre 2003, n'a fait que reprendre les activités antérieurement exercées par une personne physique qui lui a fait apport de son fonds de commerce ; que la présomption de titularité des droits sur le modèle "Boop Tobago" liée à l'exploitation de celui-ci dès le début de l'année 2003 bénéficie à la société qui poursuit, sous le même nom, les activités antérieurement exercées à titre individuel ; que le moyen est inopérant ;

Mais sur le premier moyen, pris en sa seconde branche :

Vu l'article L. 332-1 du code de la propriété intellectuelle ;

Attendu que pour écarter l'exception de nullité des opérations de saisie-contrefaçon et du procès-verbal dressé à leur occasion, le 29 mars 2005, l'arrêt relève qu'il ressort de l'ordonnance de saisie-contrefaçon que l'huissier instrumentaire était expressément habilité à effectuer "toutes recherches et constatations utiles afin de découvrir l'origine et l'étendue de la contrefaçon invoquée" ; qu'il était donc compétent pour exercer toute investigation utile pour connaître le nombre d'exemplaires contrefaisants commercialisés par la société HetM, notamment en interrogeant les employés de la société afin de se voir remettre des documents comptables permettant d'apprécier la masse contrefaisante ; que si l'huissier n'est pas autorisé à apporter sur les lieux de la saisie des objets étrangers à celle-ci, c'est-à-dire dépourvus de lien avec la mission tel n'est pas le cas en l'espèce puisque l'huissier instrumentaire a introduit dans les locaux de la société HetM la paire de boucle d'oreilles prétendument contrefaisante ainsi que le modèle original ; que ces objets visés dans l'ordonnance de saisie-contrefaçon ne constituent pas des objets étrangers à la mission de l'huissier ; que ce dernier était donc parfaitement autorisé à s'en munir ; qu'en mentionnant dans son procès verbal les trois points contestés par M. X..., directeur juridique de la société HetM, l'huissier instrumentaire s'est borné à retranscrire les déclarations de ce dernier dont il n'est pas démontré qu'ils aient été dénaturés ;

Qu'en statuant ainsi, quand en l'absence de découverte préalable sur les lieux de la saisie d'objets argués de contrefaçon, l'huissier instrumentaire ne pouvait, sans y avoir été expressément et précisément autorisé, produire aux personnes présentes ceux des objets visés par l'ordonnance afin de recueillir leurs déclarations spontanées quant aux actes argués de contrefaçon, de sorte qu'en procédant comme il a fait, l'huissier instrumentaire a excédé les limites de sa mission, la cour d'appel en validant les opérations a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'elle a reconnu la titularité des droits de la société Scooter sur le modèle de bijou dénommé Boop Tobago, l'arrêt rendu le 7 novembre 2007, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Condamne la société Scooter aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Scooter ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du deux avril deux mille neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

.

Moyens produits par Me Bertrand, avocat aux Conseils pour la société Hennes et Mauritz.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué, confirmatif de ce chef, d'AVOIR, rejeté les exceptions de nullité du procès-verbal de saisie-contrefaçon du 29 mars 2005 et accueilli l'action exercée par la société SCOOTER contre la société HetM en contrefaçon du modèle de boucles d'oreilles dénommé BOOP TOBAGO,

AUX MOTIFS QUE "la société HetM prétend, en premier lieu, que les investigations seraient subordonnées, à peine de nullité, à la découverte préalable d'objets argués de contrefaçon ; mais qu'il ressort de l'ordonnance de saisie-contrefaçon que l'huissier instrumentaire était expressément habilité à effectuer "toutes recherches et constatations utiles afin de découvrir l'origine et l'étendue de la contrefaçon invoquée" ; qu'il était donc compétent pour exercer toute investigation utile pour connaître le nombre d'exemplaires contrefaisants commercialisés par la société HetM, notamment en interrogeant les employés de la société afin de se voir remettre des documents comptables permettant d'apprécier la masse contrefaisante ; qu'en deuxième lieu, la société HetM soutient à tort que l'huissier instrumentaire n'était pas habilité à apporter avec lui un objet extérieur sur les lieux de la saisie ; qu'en effet, si l'huissier instrumentaire n'est pas autorisé à apporter, sur les lieux de la saisie, des objets étrangers à celle-ci, c'est-à-dire dépourvus de liens avec sa mission, tel n'est pas le cas en l'espèce puisque l'huissier instrumentaire a introduit dans les locaux de la société HetM la paire de boucles d'oreilles prétendument contrefaisante ainsi que le modèle original ; que ces objets, visés dans l'ordonnance de saisie-contrefaçon, ne constituent pas des objets étrangers à la mission de l'huissier ; que ce dernier était donc parfaitement autorisé à s'en munir" (arrêt attaqué p. 4 al. 2, 3, 4 et 5) ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QU' "il résulte de l'analyse des pièces versées aux débats que l'huissier instrumentaire était autorisé à apporter avec lui les objets contrefaisants et ce notamment afin de pouvoir les identifier et compte tenu de la nature des lieux où s'est effectuée la saisie ; qu'en outre, les boucles d'oreilles apportées par l'huissier étaient accompagnées d'un ticket de caisse HetM ; qu'il n'est pas contesté que le modèle contrefaisant ait été acheté dans un des établissements de la société HetM ; que l'objet a été reconnu comme un bijou vendu par la société HetM ; que la saisie-contrefaçon n'a pas fait l'objet d'une contestation selon les dispositions de l'article L.332-2 du Code de la Propriété intellectuelle ; que le tribunal dira que l'huissier instrumentaire ayant procédé aux opérations de saisie-contrefaçon le 29 mars 2005 a parfaitement respecté les termes de l'ordonnance du 23 mars 2005 et n'a pas outrepassé les limites de l'ordonnance et dira les opérations de saisie-contrefaçon valables et déboutera la société HetM de ses demandes de nullité" (jugement. p. 4, al. 1 et 2) ;

ALORS, d'une part, QUE l'huissier qui, n'ayant pas trouvé l'objet critiqué sur les lieux de la saisie, n'a procédé à aucune description, n'a pas la possibilité de recueillir les déclarations des personnes présentes, même lorsqu'il y est autorisé par l'ordonnance autorisant la saisie ; que la cour d'appel, qui a constaté que l'huissier avait introduit dans les locaux de la société HetM la paire de boucles d'oreilles dont la contrefaçon était invoquée, d'où il résultait qu'il n'avait procédé à aucune description ni saisie réelle, ne pouvait refuser de prononcer l'annulation du procès-verbal de saisie-contrefaçon, dans lequel l'huissier s'était borné à enregistrer des déclarations des personnes présentes sur les lieux de la saisie, au motif que l'huissier était habilité à effectuer "toutes recherches et constatations utiles afin de découvrir l'origine et l'étendue de la contrefaçon invoquée" par l'ordonnance ayant autorisé la saisie-contrefaçon, laquelle autorisait l'huissier à effectuer les investigations complémentaires après avoir procédé à la saisie réelle de l'objet critiqué ; qu'en statuant de la sorte, la cour d'appel a violé l'article L.332-1 du Code de la Propriété Intellectuelle ;

ALORS, d'autre part, QUE l'huissier chargé de procéder à la saisie réelle d'un objet argué de contrefaçon n'a pas la possibilité d'apporter sur les lieux de la saisie l'objet même argué de contrefaçon ni aucun autre objet ; qu'en décidant au contraire que l'huissier était autorisé à apporter sur les lieux de la saisie une paire de boucles d'oreilles dont la société HetM soutenait que, d'origine inconnue, elle ne correspondait pas à l'objet prétendument contrefaisant et le modèle original de boucles d'oreilles qui, contrairement à ce qu'énonce l'arrêt attaqué, n'était pas visé dans l'ordonnance autorisant la saisie, la cour d'appel a violé l'article L.332-1 du Code de la Propriété Intellectuelle.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué, confirmatif de ce chef, d'AVOIR jugé que la société SCOOTER avait qualité à agir contre la société HetM en contrefaçon du modèle de boucles d'oreilles BOOP TOBAGO et accueilli cette action en contrefaçon ;

AUX MOTIFS QUE " la société HetM prétend que la société SCOOTER ne rapporterait pas la preuve de sa qualité d'auteur sur le modèle de boucles d'oreilles dénommées BOOP TOBAGO ; mais que l'exploitation par une personne morale, sous son nom, fait présumer, en l'absence de revendication judiciaire du ou des auteurs contre elle, à l'égard des tiers recherchés pour contrefaçon, que cette personne est titulaire des droits de propriété intellectuelle sur l'oeuvre ; que, toutefois, il appartient à la personne morale qui entend revendiquer le bénéfice de cette présomption de justifier de manière certaine de l'exploitation du modèle prétendument contrefait ; qu'en l'espèce les factures produites par la société SCOOTER, sous son nom et mentionnant sous la référence "SI 30176483" pour le modèle "multi vert" et SI 30176082 pour le modèle "multi rouge", les boucles d'oreilles sur lesquelles elle invoque la qualité d'auteur, démontrent que cette société a commercialisé ce modèle dès le début de l'année 2003 ; qu'au surplus, il ressort des fiches techniques de création que le modèle litigieux a été créé par les bureaux de stylisme de la société SCOOTER ; qu'il convient en outre de relever que, contrairement à ce que soutient la société appelante, des copies de ces pièces ont été communiquées de manière à respecter le principe du contradictoire ; qu'en conséquence, la production des originaux postérieurement à la clôture des débats ne saurait constituer une violation de ce principe ; que la société HetM n'est pas davantage fondée à prétendre que la société SCOOTER n'existait pas avant le 11 septembre 2003, date de son immatriculation au registre du commerce et des sociétés, dès lors qu'il ressort des pièces produites aux débats que cette société exerçait son activité depuis l'année 2000" (arrêt attaqué p. 5, al. 3 à 7) ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE "la qualité d'auteur appartient sauf preuve contraire à celui ou à ceux sous le nom de qui l'oeuvre est divulguée ; qu'il ressort de l'analyse des pièces versées aux débats que le modèle de boucles d'oreilles BOOP TOBAGO SI 3017 a été créé par les bureaux de stylisme de la société SCOOTER ; que la société SCOOTER apporte la preuve, notamment par plusieurs factures de vente qu'elle a commercialisé ce modèle dès le début de l'année 2003" (jugt p. 4, al. 3 à 5) ;

ALORS, d'une part, QUE seule la preuve d'une exploitation certaine de l'oeuvre par la personne morale sous son nom peut faire présumer que cette personne est, en l'absence de revendication de l'auteur, titulaire sur l'oeuvre des droits d'auteur ; que la société SCOOTER n'ayant été immatriculée au registre du commerce et des sociétés que le 11 septembre 2003 et n'ayant acquis la personnalité morale qu'à compter de cette immatriculation, il en résultait que l'exploitation du modèle, démontrée selon la cour d'appel par des factures émises "au début de l'année 2003" et par des fiches techniques de création du modèle, nécessairement antérieures à ces factures, était le fait d'une entité différente de la société SCOOTER, personne morale présente dans la cause ; qu'en décidant néanmoins que la société SCOOTER justifiait de manière certaine de l'exploitation du modèle invoqué et bénéficiait de la présomption de titularité des droits d'auteur, la cour d'appel a violé l'article L.113-5 du Code de la Propriété Intellectuelle ;

ALORS, d'autre part, QU'en se bornant à énoncer qu'il ressortait "des pièces produites aux débats" que la société SCOOTER, dont l'immatriculation ne remontait qu'au 11 septembre 2003, date à laquelle elle avait acquis la personnalité morale, exerçait son activité depuis l'année 2000, dès avant l'émission des factures et l'élaboration des fiches techniques de création démontrant, selon la cour d'appel, une commercialisation du modèle, sans préciser la nature et le contenu de ces pièces, la cour d'appel a privé sa décision de motifs, en violation de l'article 455 du Code de Procédure Civile ;

ALORS, enfin, QU'en se bornant à énoncer que la société SCOOTER, dépourvue de la personnalité morale avant son immatriculation au registre du commerce et des sociétés le 11 septembre 2003, exerçait son activité depuis l'année 2000, sans faire connaître les raisons qui permettaient de rapporter un tel exercice d'activité à la société SCOOTER, personne morale présente dans la cause, cette décision ne pouvant se justifier ni par le fait que, avant son immatriculation, la société SCOOTER aurait constitué une société créée de fait, une telle société n'ayant pas la personnalité morale, ni par le fait que cette même société aurait été en cours de formation, les faits matériels d'exploitation du modèle ne constituant pas des engagements souscrits au cours de la période de formation qui pourraient être repris par la personne morale après son immatriculation, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard des articles 1842, 1843, 1871 du Code civil et L.113-5 du Code de la Propriété Intellectuelle.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué, confirmatif de ce chef, d'AVOIR décidé que la société HetM avait contrefait le modèle de boucles d'oreilles BOOP TOBAGO de la société SCOOTER ;

AUX MOTIFS QUE "la société appelante conteste le caractère contrefaisant de son modèle dès lors qu'il existerait des différences entre les modèles opposés ; mais qu'il résulte de l'examen de ces modèles, auquel la cour a procédé, que le modèle de boucles d'oreilles commercialisé par la société appelante reproduit en leur combinaison les caractéristiques originales du modèle BOOP TOBAGO en reprenant la partie centrale en forme de coquillage à laquelle sont suspendues par le biais d'anneaux, trois breloques dont deux identiques qui sont suspendues à la partie centrale par des anneaux entrelacés maintenant quatre pièces colorées en forme de petites boules et une pièce en forme de corail, la troisième breloque étant composée de deux pièces également maintenues entre elles par des anneaux entrelacés qui sont caractérisés, pour la première, par une forme de coquillage, et, pour la seconde, par une forme rappelant les deux breloques identiques suspendues à la première partie ; que les différences invoquées par la société" HetM, tenant à la présence d'un système d'anneaux sur lequel sont enfilés les différents éléments composant le bijou à la place d'une coquille Saint-Jacques, sont sans effet sur la contrefaçon à défaut d'affecter la même impression d'ensemble visuelle qui se dégage des modèles opposés et qui est de nature à engendrer un risque de confusion dans l'esprit du consommateur d'attention moyenne ; qu'en outre, la contrefaçon étant constituée indépendamment de tout changement de matière ou de couleur, il importe peu que les boucles d'oreilles arguées de contrefaçon soient réalisées dans une couleur de métal différente, à savoir dorée au lieu de "vieilli", dès lors que ce changement de couleur n'affecte pas plus la même impression d'ensemble " (arrêt attaqué p. 6, al. 6, 7 et 8) ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QU'il "ressort d'un simple examen comparatif des produits litigieux que les ressemblances entre les modèles sont telles que la confusion est indéniable pour le consommateur d'attention moyenne ; que la société HetM a notamment repris la combinaison des parties en forme de coquillage avec le système d'anneaux entrelacés pour joindre les différents composants du bijou" (jugt. p. 5 al. 2 et 3) ;

ALORS, d'une part, QUE la partie centrale des deux modèles de boucles d'oreilles en présence, à laquelle sont suspendues les trois breloques, deux étant identiques et la troisième étant composée par une forme de coquillage maintenu par des anneaux entrelacés à une forme rappelant les deux autres breloques identiques entre elles, diffère en ce que, dans le modèle BOOP TOBAGO revendiqué, la partie centrale est en forme de coquillage au lieu que, dans le modèle critiqué, elle est en forme d'anneau ; qu'en énonçant que le modèle critiqué reproduisait en leur combinaison les caractéristiques du modèle BOOP TOBAGO dont il reprenait la partie centrale en forme de coquillage à laquelle sont suspendues trois breloques, cette reproduction étant à l'origine d'une même impression d'ensemble visuelle de nature à engendrer un risque de confusion dans l'esprit d'un consommateur d'attention moyenne, la cour d'appel a dénaturé le contenu clair et précis des modèles qui lui étaient soumis, en violation de l'article 1134 du Code civil ;

ALORS, d'autre part, qu'après avoir énoncé que le modèle critiqué reprenait la partie centrale en forme de coquillage du modèle BOOP TOBAGO (arrêt p. 6, al. 7), la cour d'appel ne pouvait, sans contradiction, énoncer que la différence tenant à ce que, dans le modèle critiqué, les différents éléments composant le bijou étaient enfilés sur "un système d'anneaux" "à la place d'une coquille Saint-Jacques", était sans effet sur la contrefaçon (arrêt p. 6, al. 8), reconnaissant ainsi que la partie centrale des modèles en présence n'avait pas la même forme ; que cette contradiction prive l'arrêt attaqué de motifs en violation de l'article 455 du Code de Procédure civile.

QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué, confirmatif de ce chef, d'avoir condamné la société HetM à payer à la société SCOOTER une somme de 60.000 en réparation du préjudice résultant de la contrefaçon ;

AUX MOTIFS QUE "d'une part la diffusion du modèle contrefaisant a, en banalisant la création originale, porté atteinte à la valeur patrimoniale du modèle en cause et que, d'autre part, le caractère quasi servile des copies réalisées contribue indéniablement à avilir et à déprécier le modèle aux yeux de la clientèle ; qu'en outre il convient de prendre en considération la circonstance selon laquelle la société appelante s'est, ainsi qu'il est de pratique courante en la matière, abstenue d'apporter la moindre justification quant au nombre de modèles contrefaits vendus ou proposés à la vente, alors qu'elle dispose de près de 40 points de vente sur le territoire national ; qu'eu égard à ces éléments, le tribunal, en allouant à la société intimée une indemnité de 60.000 au titre du préjudice subi du fait des actes de contrefaçon, a fait une juste appréciation de son préjudice" (arrêt attaqué p. 7, al. 5 et 6) ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE "la société SCOOTER ne dispose pas des informations relatives à la masse contrefaisante ; qu'elle explique son préjudice par les gains qu'elle a manqués et qu'elle les calcule en multipliant la masse contrefaisante avec le prix de vente de la société SCOOTER ; qu'elle n'a qu'une connaissance très incomplète des quantités de pièces commercialisées par la société HetM ; mais que compte tenu du nombre d'établissements de la société HetM elle l'estime à un nombre supérieur de pièces commercialisées" (jugt. p. 5, dernier al. et p. 6 al. 1er) ;

ALORS, d'une part, QUE la preuve du préjudice commercial résultant de la contrefaçon incombe à celui qui agit en réparation, auquel il incombe notamment de prouver l'importance de la masse contrefaisante ; que la cour d'appel qui, pour fixer à la somme de 60.000 la somme destinée à réparer le préjudice résultant de la contrefaçon imputée à la société HetM, énonce que cette société s'est abstenue "d'apporter la moindre justification quant au nombre de modèles contrefaits vendus ou proposés à la vente", a inversé la charge de la preuve, en violation des articles 1315, 1382 du Code civil et L.335-7 du Code de la Propriété Intellectuelle ;

ALORS, d'autre part, QUE, dans ses conclusions signifiées le 20 février 2007 (p. 17, 18), la société HetM, bien que cette preuve ne lui incombât pas, avait fourni les précisions propres à déterminer le nombre de ventes de son propre modèle et produit les documents propres à étayer ces indications (factures de son fournisseur coréen, attestation de son commissaire aux comptes certifiant les relevés des ventes et l'état des stocks du produit critiqué) ; qu'en énonçant que la société HetM s'était abstenue "d'apporter la moindre justification quant au nombre de modèles contrefaits ou proposés à la vente", la cour d'appel a méconnu les termes du litige tels qu'ils étaient fixés par ces conclusions, en violation de l'article 4 du Code de Procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 08-10656
Date de la décision : 02/04/2009
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Analyses

PROPRIETE LITTERAIRE ET ARTISTIQUE - Droit d'auteur - Saisie-contrefaçon - Recueil des déclarations spontanées par l'huissier instrumentaire - Conditions - Détermination

En l'absence de découverte préalable sur les lieux de la saisie d'objets argués de contrefaçon, l'huissier instrumentaire ne peut, sans y avoir été expressément et précisément autorisé, produire aux personnes présentes ceux des objets visés par l'ordonnance de saisie-contrefaçon afin de recueillir les déclarations spontanées quant aux actes argués de contrefaçon


Références :

article L. 332-1 du code de la propriété intellectuelle

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 07 novembre 2007


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 02 avr. 2009, pourvoi n°08-10656, Bull. civ. 2009, I, n° 73
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2009, I, n° 73

Composition du Tribunal
Président : M. Bargue
Avocat général : M. Pagès
Rapporteur ?: Mme Marais
Avocat(s) : Me Bertrand, SCP Choucroy, Gadiou et Chevallier

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:08.10656
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award