Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Orléans, 10 décembre 2007), que les consorts X..., propriétaires de parcelles données à bail aux époux Y..., leur ont donné congé pour reprise au bénéfice de leur fille et petite-fille Mme Isabelle C..., pour le 1er octobre 2004 ; que les époux Y... ont contesté le congé, au motif que l'autorisation d'exploiter avait été donnée à l'entreprise à responsabilité limitée de Tesson (l'EARL) et non à la bénéficiaire de la reprise ;
Attendu que les consorts X... font grief à l'arrêt d'annuler le congé, alors, selon le moyen :
1° / que lorsque le bail est prorogé de plein droit jusqu'à la fin de l'année culturale pendant laquelle la décision relative à l'autorisation d'exploiter sera devenue définitive, les conditions de la reprise doivent être appréciées à cette dernière date et non à la date d'expiration du bail pour laquelle le congé avait été donné ; que dès lors, en retenant pour statuer comme elle l'a fait, que les juges devaient se placer à la date du 1er octobre 2004, date d'échéance des baux, pour vérifier si les conditions alors posées par l'article L. 411-58 du code rural étaient respectées, tout en constatant que les baux étaient prorogés dans l'attente de l'issue de la procédure administrative relative à l'autorisation d'exploiter, la cour d'appel a procédé d'une violation de ce dernier texte et de l'article L. 411-59 du code rural ;
2° / que le bénéficiaire de la reprise n'engage pas une nouvelle procédure lorsque, postérieurement à la date d'effet du congé, il réitère sa demande d'autorisation, après l'annulation par le juge administratif d'un arrêté préfectoral lui déniant ce droit ; que, en l'espèce, à la suite du jugement du 7 juin 2005 du tribunal administratif d'Orléans annulant l'arrêté préfectoral refusant à l'EARL de Tesson l'autorisation d'exploiter, Mme C... a présenté une nouvelle demande d'autorisation qui lui a été accordée le 15 février 2006 ; que, dès lors, en retenant pour statuer comme elle l'a fait que la demande d'autorisation d'exploiter formée par la bénéficiaire de la reprise postérieurement à la date d'effet des congés délivrés au preneur ne répondait pas aux conditions prévues par l'article L. 411-58 dans sa rédaction applicable en 2004, la cour d'appel a, de nouveau, procédé d'une violation de ce dernier texte ;
3° / qu'en toute hypothèse, en vertu de l'article L. 411-58 du code rural dans sa rédaction issue de l'article 8- IV de l'ordonnance du 13 juillet 2006, applicable aux baux en cours : « lorsque les terres sont destinées à être exploitées dès la reprise dans le cadre d'une société et si l'opération est soumise à autorisation, celle-ci doit être obtenue par la société », que ces dispositions sont ainsi applicables à l'occasion d'une affaire non encore définitivement jugée, ayant pour objet de préciser la portée d'une disposition législative susceptible de controverse ; que, dès lors, en retenant que les nouvelles dispositions de l'article L. 411-58 ne pouvaient s'appliquer qu'au congé prenant effet après la date de publication de l'ordonnance du 13 juillet 2006, bien qu'en raison de la prorogation des baux, les congés ne pouvaient prendre effet qu'à la fin de l'année culturale pendant laquelle l'autorisation d'exploiter était devenue définitive soit à la fin de l'année 2006 ou de l'année 2007 et qu'à la date de la publication de l'ordonnance, le sort des congés n'était donc pas jugé, la cour d'appel a procédé d'une méconnaissance de l'article 2 du code civil et de l'article L. 411-58 du code rural dans sa rédaction nouvelle alors applicable ;
Mais attendu, d'une part, qu'ayant exactement relevé que les conditions de la reprise d'un bail à ferme ne peuvent être appréciées qu'à la date pour laquelle le congé a été délivré, la cour d'appel a constaté que la demande d'autorisation d'exploiter avait été formée par la bénéficiaire de la reprise postérieurement à la date d'effet des congés délivrés aux preneurs et ne répondait pas aux conditions prévues par l'article L. 411-58 dans sa rédaction applicable au 1er octobre 2004 ;
Attendu, d'autre part, que la cour d'appel a exactement relevé que l'argumentation des parties sur l'application immédiate de l'ordonnance n° 2006-870 du 13 juillet 2006 modifiant l'article L. 411-58 du code rural était sans portée puisque si cette application immédiate devait être retenue, les nouvelles dispositions ne pouvaient s'appliquer qu'au congé prenant effet après la date de publication de cette ordonnance ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne les consorts A..., Raymonde X..., Mme Hélène X..., représentée par l'association tutelaire de la région centre, Mme C... et l'EARL de Tesson aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande des consorts A..., Raymonde X..., de Mme Hélène X..., représentée par l'association tutélaire de la région centre, de Mme C... et de l'EARL de Tesson ; les condamne, ensemble, à payer aux consorts Y... et au GAEC de Roux, ensemble, la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit mars deux mille neuf.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Peignot et Garreau, avocat aux Conseils pour les consorts X..., Mme
C...
et l'EARL de Tesson
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir déclaré nuls et de nul effet les congés délivrés le 21 mars 2003 à Monsieur et Madame Michel Y..., à la requête respectivement de Madame Veuve X... et de Monsieur et Madame Serge X..., et dit en conséquence que les baux à ferme conclus entre les parties se sont renouvelés pour une période de neuf ans à compter du 1er octobre 2004,
AUX MOTIFS QU'en application d'une jurisprudence constante, prise en application du droit des contrats, les conditions de la reprise d'un bail à ferme ne peuvent être appréciées qu'à la date pour laquelle le congé a été délivré ; que l'ensemble de l'argumentation des parties sur l'application immédiate de l'ordonnance du 13 juillet 2006 ayant modifié l'article L. 411-58 du Code rural, est sans intérêt pour la solution du présent litige puisque, si cette application immédiate devait être retenue par la Cour, les nouvelles dispositions de l'article L 411-58 susvisé ne pourraient s'appliquer qu'aux congés prenant effet après la date de publication de cette ordonnance ; qu'en l'espèce, il importe donc peu que le bail à ferme ait été prorogé après le 13 juillet 2006, puisque les congés contestés ont été délivrés par les consorts X... pour le premier octobre 2004 et que c'est à cette seule date que les premiers juges auraient dû se placer pour vérifier si les conditions alors posées par l'article L. 411-58 du Code rural étaient respectées ; que les consorts X... ont fait délivrer congés en indiquant que ceux-ci étaient donnés pour reprendre les biens loués au profit de l'un de leurs descendants majeurs ; que les congés précisaient « Le bénéficiaire de la reprise est Madame C... née X... Isabelle, née le premier septembre 1966, à Châtellerault, agricultrice, fille (ou petite fille) des bailleurs » ; que trois paragraphes plus loin, il était précisé « Elle possède le matériel nécessaire à l'exploitation d'autant plus qu'elle exploite déjà environ 118 hectares sous la dénomination EARL de Tesson qu'enfin, il était mentionné " Elle peux donc exploiter personnellement les biens repris pendant neuf années conformément aux dispositions légales » ; que le libellé de ces congés n'indique à aucun moment que Madame Isabelle C... va confier l'exploitation des terres reprises à I'EARL de Tesson ; que c'est en conséquence en son seul nom qu'elle devait déposer une autorisation 80160 BP d'exploiter ; cependant, que Madame C... n'a pas déposé de demande d'autorisation d'exploiter en son nom propre, mais que seule l'EARL de Tesson a présenté une telle requête ; que l'autorisation d'exploiter a été refusée à cette EARI. le 2 juin 2003 ; qu'une nouvelle demande d'exploiter a été déposée par la même EARL le 17 novembre 2003 et de nouveau refusée ; qu'à la suite d'un recours pour excès de pouvoir, le tribunal administratif a annulé la dernière décision de refus d'exploiter ; qu'une nouvelle demande d'autorisation d'exploiter a alors été déposée, au visa de la décision d'annulation, par Madame C... en son nom propre, le 23 août 2005 ; que les consorts X... font valoir que l'introduction d'une nouvelle demande, se référant à l'annulation par le juge administratif d'un refus d'autorisation, s'inscrit dans le prolongement de la procédure engagée, et qu'il importe peu que Madame C... n'ait déposé cette demande d'autorisation que postérieurement à la date d'effet des congés ; mais attendu que le refus d'autorisation annulé ne concernait que la demande formée par l'EARL de Tesson et non une requête présentée par Madame C... ; que la demande formée par Madame C... le 23 août 2005 en son nom propre n'aurait pu dès lors être considérée que comme une demande nouvelle ; que c'est donc très logiquement que l'autorisation d'exploiter a été de nouveau accordée, non à Madame C..., mais à I'EARL de TESSON, puisque la demande était présentée par la première au seul visa de la décision d'annulation du tribunal administratif qui ne concernait que cette EARL ; qu'il est ainsi établi que la demande d'autorisation d'exploiter, formée par la bénéficiaire de la reprise postérieurement à la date d'effet des congés délivrés aux preneurs ne répond pas aux conditions prévues par l'article L. 41 1-58 dans sa rédaction applicable au premier octobre 2004. "
ALORS, D'UNE PART, QUE lorsque le bail est prorogé de plein droit jusqu'à la fin de l'année culturale pendant laquelle la décision relative à l'autorisation d'exploiter sera devenue définitive, les conditions de la reprise doivent être appréciées à cette dernière date et non à la date d'expiration du bail pour laquelle le congé avait été donné ; que dès lors, en retenant pour statuer comme elle l'a fait, que les juges devaient se placer à la date du 1er octobre 2004, date d'échéance des baux, pour vérifier si les conditions alors posées par l'article L. 411-58 du Code rural étaient respectées, tout en constatant que les baux étaient prorogés dans l'attente de l'issue de la procédure administrative relative à l'autorisation d'exploiter, la Cour d'appel a procédé d'une violation de ce dernier texte et de l'article L. 411-59 du Code rural,
ALORS, D'AUTRE PART, QUE le bénéficiaire de la reprise n'engage pas une nouvelle procédure lorsque, postérieurement à la date d'effet du congé, il réitère sa demande d'autorisation, après l'annulation par le juge administratif d'un arrêté préfectoral lui déniant ce droit ; que, en l'espèce, à la suite du jugement du 7 juin 2005 du Tribunal administratif d'ORLEANS annulant l'arrêté préfectoral refusant à l'EARL de TESSON l'autorisation d'exploiter, Madame C... a présenté une nouvelle demande d'autorisation qui lui a été accordée le 15 février 2006 ; que, dès lors, en retenant pour statuer comme elle l'a fait que la demande d'autorisation d'exploiter formée par la bénéficiaire de la reprise postérieurement à la date d'effet des congés délivrés aux preneurs ne répondait pas aux conditions prévues par l'article L. 411-58 dans sa rédaction applicable en 2004, la Cour d'appel a, de nouveau, procédé d'une violation de ce dernier texte ;
ALORS, ENFIN, QU'en toute hypothèse, en vertu de l'article L. 411-58 du Code rural dans sa rédaction issue de l'article 8- IV de l'ordonnance du 13 juillet 2006, applicable aux baux en cours : « lorsque les terres sont destinés à être exploitées dès la reprise dans le cadre d'une société et si l'opération est soumise à autorisation, celle-ci doit être obtenue par la société », que ces dispositions sont ainsi applicables à l'occasion d'une affaire non encore définitivement jugée, ayant pour objet de préciser la portée d'une disposition législative susceptible de controverse ; que dès lors, en retenant que les nouvelles dispositions de l'article L. 411-58 ne pouvaient s'appliquer qu'aux congés prenant effet après la date de publication de l'ordonnance du 13 juillet 2006, bien qu'en raison de la prorogation des baux, les congés ne pouvaient prendre effet qu'à la fin de l'année culturale pendant laquelle l'autorisation d'exploiter était devenue définitive soit à la fin de l'année 2006 ou de l'année 2007 et qu'à la date de la publication de l'ordonnance, le sort des congés n'était donc pas jugé, la Cour d'appel a procédé d'une méconnaissance de l'article 2 du Code civil et de l'article L. 411-58 du Code rural dans sa rédaction nouvelle alors applicable.