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10/03/2009 | FRANCE | N°08-40033

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 10 mars 2009, 08-40033


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 8 novembre 2007), que M. X... , engagé par la Compagnie bretonne de cargos frigorifiques (COBRECAF) le 15 mai 1979, en qualité d'électricien sur les navires de commerce de la compagnie , a été en arrêt maladie à compter du 20 janvier 2003 puis déclaré inapte à la navigation par le médecin des gens de mer le 4 décembre 2003, décision confirmée le 5 décembre par la direction régionale des affaires maritimes de Bretagne ; que par courri

er du 14 avril 2004, l'employeur lui a confirmé la rupture de son contrat de t...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 8 novembre 2007), que M. X... , engagé par la Compagnie bretonne de cargos frigorifiques (COBRECAF) le 15 mai 1979, en qualité d'électricien sur les navires de commerce de la compagnie , a été en arrêt maladie à compter du 20 janvier 2003 puis déclaré inapte à la navigation par le médecin des gens de mer le 4 décembre 2003, décision confirmée le 5 décembre par la direction régionale des affaires maritimes de Bretagne ; que par courrier du 14 avril 2004, l'employeur lui a confirmé la rupture de son contrat de travail "depuis le 5 décembre 2003" ; que l'intéressé a saisi le tribunal d'instance pour voir prononcer la nullité de son licenciement en se prévalant de sa qualité de salarié protégé en tant que membre suppléant du comité d'entreprise et réclamer diverses sommes ; que le syndicat maritime Bretagne CFDT est intervenu aux débats ;

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt d'avoir prononcé la nullité du licenciement avec effet à la date du 5 décembre 2003, de l'avoir condamné à payer à M. X... diverses sommes dont une somme à titre de rappel de salaire en application de l'article L. 122-24-4 devenu L. 1226-2, L. 1226-3, L. 1226-4 du code du travail et de l'avoir condamné à verser en outre diverses sommes au syndicat maritime Bretagne CFDT, alors, selon le moyen :

1°/ que la rupture d'un contrat de travail se situe à la date où l'employeur a manifesté sa volonté d'y mettre fin, c'est-à-dire au jour de l'envoi de la lettre notifiant la rupture ; qu'en jugeant dès lors que la lettre adressée le 14 avril 2004 par la société COBRECAF à M. X... dans laquelle elle lui faisait part de la rupture de son contrat de travail, qualifiée par la cour d'appel de lettre de licenciement, avait pu prendre effet rétroactivement au 5 décembre 2003, soit antérieurement à la liquidation de la retraite par le salarié manifestant sa volonté de bénéficier d'un départ en retraite, la cour d'appel a violé l'article L. 122-14-1 du code du travail (devenu les articles L. 1234-3, L. 1232-6, L. 1233-15, L. 1233-39 et L. 1233-59) ;

2°/ que subsidiairement, les dispositions de l'ancien article L. 742-1 du code du travail font obstacle à l'application aux marins devenus inaptes des dispositions de l'article L. 122-24-4 du code du travail (devenu les articles L. 1226-2, L. 1226-3 et L. 1226-4) ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé les textes précités ;

3°/ que plus subsidiairement, la reprise du paiement des salaires à l'expiration du délai d'un mois prévue par l'article L. 122-24-4 du code du travail ne s'impose à l'employeur que jusqu'à la rupture du contrat de travail du salarié ; qu'ayant constaté que la rupture du contrat de travail avait pris effet le 5 décembre 2003, la cour d'appel ne pouvait condamner la COBRECAF à verser au salarié les salaires afférents à la période comprise entre le 5 janvier 2004 et le 14 avril 2004 ; qu'en statuant ainsi, elle n'a pas tiré les conséquences qui s'évinçaient de ses propres constatations en violation de l'article L. 122-24-4 du code du travail (devenu les articles L. 1226-2, L. 1226-3 et L. 1226-4) ;

Mais attendu, d'abord, que le moyen tiré de ce que la cour d'appel aurait dû retenir que le salarié avait manifesté sa volonté de rompre le contrat de travail en demandant la liquidation de ses droits à la retraite antérieurement au 14 avril 2004 est inopérant dès lors que, par des motifs non critiqués par le pourvoi, la cour d'appel a retenu que M. X... avait fait l'objet d'un licenciement nul notifié par l'employeur le 14 avril 2004 en violation des dispositions protectrices de l'article L. 436-1, alinéas 1 et 2 devenu L. 2421-3 et L. 2411-8 du code du travail ;

Attendu, ensuite, que les dispositions de l'article L. 742-1 du code du travail alors applicable ne font pas obstacle à ce que les dispositions de l'article L. 122-24-4 devenu L. 1226-2, L. 1226-3, L. 1226-4 dudit code soient appliquées à un marin devenu inapte à la navigation à la suite d'une maladie non professionnelle et dont la situation n'est régie par aucune loi particulière ; que la cour d'appel en a exactement déduit que l'employeur, étant tenu de reprendre le paiement des salaires un mois après l'avis médical d'inaptitude du 5 décembre 2003, était redevable des salaires échus entre le 5 janvier et le 14 avril 2004, date de la notification de la rupture ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la COBRECAF aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à M. X... et au syndicat maritime Bretagne CFDT la somme de 2 500 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix mars deux mille neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils pour la société Compagnie bretonne de cargos frigorifique (COBRECAF).

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR prononcé la nullité du licenciement de Monsieur X... avec effet à la date du 5 décembre 2003, et d'AVOIR en conséquence condamné la société COBRECAF à lui payer 19743 euros à titre de rappel de salaire en application de l'article L. 122-24-4 du code du travail avec intérêts au taux légal à compter du 13 février 2006, 118780 euros au titre de l'indemnité correspondant aux salaires qu'il aurait reçus pendant la période de protection avec intérêts au taux légal à compter du 27 juillet 2006, 6972, 21 euros au titre de l'indemnité de licenciement avec intérêts au taux légal à compter du 13 février 2006, 10000 euros à titre de dommages et intérêts avec intérêts au taux légal à compter du 27 juillet 2006, et 1200 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, ainsi que de l'AVOIR condamnée à verser au syndicat maritime Bretagne CFDT 1 euro à titre de dommages et intérêts avec intérêts au taux légal à compter du 27 juillet 2006 et 400 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

AUX MOTIFS PROPRES QUE « Considérant qu'il est constant :
- que Monsieur X... a été en arrêt maladie à compter du 20 janvier 2003,
- que par décision du 5 décembre 2003, l'Administrateur Général des Affaires Maritimes a déclaré que Monsieur X... ne remplissait plus les conditions médicales d'aptitude à la navigation,
- que la maladie dont était atteint Monsieur X... n'était pas d'origine professionnelle ni consécutive à un accident du travail,
- que le 14 avril 2004 la COBRECAF a adressé un courrier à Monsieur X... aux termes duquel elle lui confirmait que son contrat avait été rompu dès le 5 décembre 2003 et lui a remis un certificat de travail destiné à être produit auprès de l'ASSEDIC, de l'ANPE ou de tout autre organisme,
- que Monsieur X... a fait procéder parallèlement à la liquidation de sa retraite, celle-ci ayant été liquidée à effet du 1er janvier 2004,
- que Monsieur X... a été désigné en septembre 2003 comme candidat aux élections du Comité d'Entreprise et a été élu membre suppléant le 6 janvier 2004, Considérant en premier lieu que la lettre du 14 avril 2004 s'analyse en une lettre de licenciement et que la COBRECAF a elle-même fixé la date de la rupture du contrat au décembre 2003 ;
Que le fait que Monsieur X... ait entrepris des démarches pour faire liquider sa retraite est sans incidence en l'espèce puisque la rupture est intervenue antérieurement à la liquidation de celle-ci ;
Considérant en second lieu que les dispositions de l'article L 742-1 du Code du Travail ne font pas obstacle à ce que les dispositions de l'article L. 122-24-4 du Code du Travail soient appliquées à un marin devenu inapte à la navigation à la suite d'une maladie non professionnelle et dont la situation n'est réglée par aucune loi particulière, sauf à admettre l'existence d'un vide juridique ;
Considérant en troisième lieu que Monsieur X... bénéficiait à la date de la rupture de son contrat du statut protecteur résultant de sa candidature aux élections du Comité d'Entreprise au cours desquelles il a été d'ailleurs élu membre suppléant ;
Que la société COBRECAF s'est abstenue de consulter le Comité d'Entreprise et de solliciter une autorisation administrative de licenciement et que sur ce point il est admis que le salarié candidat aux élections, licencié sans autorisation administrative avant le scrutin est protégé au moment de son licenciement et que celui-ci étant irrégulier la protection s'est poursuivie pendant l'exercice du mandat dont il a été privé par la décision illégale de l'employeur, étant précisé qu'en l'espèce la société COBRECAF soulève l'irrégularité du scrutin au motif que le quorum n'aurait pas été atteint mais ne fait état et ne produit aucune décision de justice annulant ledit scrutin ;
Considérant qu'il s'ensuit ;
- d'une part que Monsieur X... est fondé à prétendre au paiement de son salaire du 5 janvier 2004 au 14 avril 2004 par application des dispositions de l'article L 122-24-4 du Code du Travail qui s'élève à 19.743 euros (montant du dernier salaire perçu x 3 mois et 10 jours),
- d'autre part que le licenciement est nul et qu'à ce titre Monsieur X... est en droit d'obtenir à titre d'indemnité résultant de la violation du statut protecteur le versement de la rémunération qu'il aurait perçu jusqu'à la fin de la période de protection, le départ en retraite du salarié après le licenciement étant sans incidence sur le principe et le montant de cette indemnisation, ainsi qu'une indemnité de licenciement et des dommages intérêts destinés à réparer le préjudice résultant de la nullité du licenciement dont le montant a fait l'objet d'une exacte appréciation par le Premier Juge ;
Que la décision sera en conséquence confirmée ;
Considérant par ailleurs que c'est à juste titre que le Tribunal a déclaré recevable l'intervention du Syndicat Maritime Bretagne CFDT en retenant que celui-ci invoquait une question de principe tendant à voir reconnaître applicables aux marins les dispositions du Code du Travail en matière d'inaptitude et relatives au statut protecteur et susceptible d'avoir des conséquences pour l'ensemble de ses adhérents, justifiait d'un intérêt à agir»

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « Sur la nullité du licenciement :
L'article D 742-11 du Code du travail prévoit que "les dispositions de l'article L. 436-1 ne peuvent, en aucun cas, faire obstacle à l'application du Code du travail maritime et du Code disciplinaire et pénal de la marine marchande."
Cet article L. 436-1 du Code du travail dispose que "Tout licenciement envisagé par l'employeur d'un membre titulaire ou suppléant du comité d'entreprise ou d'un représentant syndical prévu à l'article L. 433-1 est obligatoirement soumis au comité d'entreprise qui donne un avis sur le projet de licenciement. Le licenciement ne peut intervenir que sur autorisation de l'inspecteur du travail dont dépend l'établissement,.. Cette procédure s'applique également aux candidats aux fonctions de membres du comité, qui ont été présentés en vue du premier ou du deuxième tour, pendant les six mois qui suivent l'envoi des listes de candidatures à l'employeur...Cette procédure est également applicable aux membres des comités institués par voie conventionnelle... "
II résulte de ces dispositions que dès lors que la mise en oeuvre de l'article L. 436-1 du Code du travail ne se heurte pas à des règles spécifiques prévues par le Code du travail maritime ou le Code disciplinaire et pénal de la marine marchande, ce texte a vocation à s'appliquer.
En l'espèce aucune règle prévue par ces dispositions ne fait obstacle à ce que M. Serge X..., membre suppléant du comité d'entreprise de La SA COBRECAF Compagnie Bretonne de Cargos Frigorifiques, ne bénéficie de la protection instaurée par l'article L 436-1 du Code du travail précité.
Par ailleurs (Cour de Cass arrêt du 7 mars 1997 ass. plein.) «pour tout ce qui n'est pas renvoyé aux Lois Maritimes ou ne subit pas de modification, le Code du Travail ou toute autre Loi intervenant dans le domaine de la réglementation du travail, s'applique purement et simplement sans besoin d'expansion formelle, dans la mesure où ce droit du travail général n'est ni expressément exclu, ni incompatible compte tenu d'éventuelles adaptations».
Enfin l'inaptitude physique du salarié ne fait pas obstacle au formalisme prévu par l'article L 436-1 du Code du travail en matière de protection reconnue au membre du comité d'entreprise.
Ainsi La SA COBRECAF Compagnie Bretonne de Cargos Frigorifiques ne pouvait procéder au licenciement de M. Serge X... sans consulter le comité d'entreprise et seulement après avoir obtenu l'autorisation de l'Inspecteur du Travail Maritime, lequel conformément aux dispositions du décret du 7 juin 1990 intervient pour les compétences reconnues en droit commun du travail à l'Inspecteur du Travail.
Or le 14 avril 2004 la COBRECAF écrivait à Monsieur Serge X... «compte tenu de votre situation d'incapacité définitive à la navigation, non liée à une cause professionnelle, établie par le médecin en chef Monsieur Z... du service de santé des gens de mer, le 4 décembre 2003, et n'ayant de poste sédentaire à pourvoir correspondant à vos qualifications, nous avons le regret de vous confirmer la rupture de votre contrat de travail avec notre compagnie COBRECAF depuis le 5 décembre 2003....ce document pourra être produit à l'égard des tiers, notamment l'ASSEDIC, l'ANPE et tout organisme de formation, pour attester de votre situation ».
Une telle lettre s'analyse comme une lettre de licenciement avec effet au 5 décembre 2003.
Le fait que parallèlement M. Serge X... ait engagé des démarches aux fins de bénéficier d'une mise à la retraite est sans incidence dès lors que La SA COBRECAF Compagnie Bretonne de Cargos Frigorifiques a prononcé le licenciement avec effet au décembre 2003.
Il est par ailleurs constant que ce licenciement n'a été précédé d'aucune demande de consultation du comité d'entreprise et surtout d'une demande d'autorisation de licenciement auprès de l'Inspecteur du Travail Maritime.
Dès lors il convient de constater que le licenciement de M. Serge X... intervenu avec effet à la date du 5 décembre 2003 est entaché de nullité.
Il convient en conséquence de prononcer la nullité du licenciement de M. Serge X... avec effet à la date du 5 décembre 2003.
Sur la demande d'indemnité pour non respect de l'obligation de reclassement d'un salarié devenu inapte :
II y a lieu de déterminer le régime juridique applicable au marin devenu inapte à la navigation. Aux termes de l'article L.742-9 du Code du Travail Maritime, les articles L. 122-32-1 à L. 122-32-11 du Code du Travail, relatifs aux salariés victimes d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle, sont, sous réserve de quelques adaptations fixées par décret en Conseil d'Etat, applicables aux entreprises d'armement maritime.
Ces dispositions plus protectrices que celles applicables en matière de maladies non professionnelles prévoient toutefois en application des dispositions de l'article L. 122-32-10 du Code du travail que les règles particulières aux salariés victimes d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle - et donc, notamment, l'article L. 122-32-5 du Code du Travail - ne sont pas applicables aux rapports entre un employeur et son salarié victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle, survenu ou contractée auprès d'un autre employeur. Il est constant que M. Serge X... a été déclaré inapte à la navigation par l'autorité maritime et que le médecin des gens de mer avait prévu « à reclasser à terre dans un emploi compatible à l'infirmité présentée ». Compte tenu de l'absence de rattachement à un accident du travail ou à une maladie professionnelle, de l'inaptitude à la navigation de M. Serge X..., ce dernier ne peut utilement invoquer la loi du 18 novembre 1997 et le décret de 1999 ayant adapté et étendu aux marins les dispositions protectrices des salariés en matière d'inaptitude physique consécutive à un accident du travail ou à une maladie professionnelle.
En revanche (Cour de Cass arrêt du 7 mars 1997 ass. plein.) «pour tout ce qui n'est pas renvoyé aux Lois Maritimes ou ne subit pas de modification, le Code du Travail ou toute autre Loi intervenant dans le domaine de la réglementation du travail, s'applique purement et simplement sans besoin d'expansion formelle, dans la mesure où ce droit du travail général n'est ni expressément exclu, ni incompatible compte tenu d'éventuelles adaptations ». Le Code du travail maritime, au delà de la prise en charge limitée dans le temps du marin, est taisant sur les conséquences de l'inaptitude physique consécutive à une maladie non professionnelle.
Dès lors les dispositions de l'article L 122-24-4 du Code du travail, lesquelles prévoit que "A l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à une maladie ou un accident, si le salarié est déclaré par le médecin du travail inapte à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur est tenu de lui proposer un autre emploi approprié à ses capacités, compte tenu des conclusions écrites du médecin du travail et des indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise et aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail. Le contrat de travail du salarié peut être suspendu pour lui permettre de suivre un stage de reclassement professionnel.
Si le salarié n'est pas reclassé dans l'entreprise à l'issue d'un délai d'un mois à compter de la date de l'examen médical de reprise du travail ou s'il n'est pas licencié, l'employeur est tenu de verser à l'intéressé, dès l'expiration de ce délai, le salaire correspondant à l'emploi que celui-ci occupait avant la suspension de son contrat de travail. Les dispositions prévues à l'alinéa précédent s'appliquent également en cas d'inaptitude à tout emploi dans l'entreprise constatée par le médecin du travail." sont applicables si elles ne se heurtent pas au régime particulier qui découle du statut de marin. La mise en oeuvre de ses dispositions suppose en toutes hypothèses que le marin ait été déclaré médicalement inapte à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment. Cependant les règles applicables en matière de droit commun, prévues par l'article R 241-51 du Code du travail et relatives à la visite de reprise, ne peuvent trouver application en l'espèce puisque les textes dont relèvent les marins prévoient des dispositions spécifiques à la constatation notamment de l'inaptitude à la navigation, incompatibles avec celles des autres travailleurs salariés.
En effet c'est la direction des affaires maritimes qui prononce l'inaptitude à la navigation après avis du médecin des gens de mer.
Dès lors, c'est à la date de cette décision que s'imposait pour l'employeur l'obligation de respecter l'obligation de reclassement.
Aussi le licenciement de M. Serge X... ayant été déclaré nul pour non respect du statut protecteur de ce dernier, La SA COBRECAF Compagnie Bretonne de Cargos Frigorifiques ne peut utilement se prévaloir du respect de ses obligations en matière de reclassement.
Elle doit en conséquence être tenue de régler les salaires à compter du délai d'un mois ayant suivi l'avis médical imposant le reclassement.
Sur la demande de l'indemnité due au titre de la période de protection :
La nullité du licenciement ayant été prononcée pour non respect du statut de salarié protégé, M. Serge X... peut prétendre à une indemnité égale au salaire qu'il aurait reçu pendant la période de protection soit pendant une période de 20 mois.
Compte tenu des bulletins de paie présentés, la somme due à M. Serge X... est égale à 118780 euros.
Il convient en conséquence de condamner La SA COBRECAF Compagnie Bretonne de Cargos Frigorifiques à payer à M. Serge X... la somme de 118780 eus au titre de l'indemnité correspondant aux salaires qu'il aurait reçus pendant la période de protection, et ce avec intérêts au taux légal à compter du 27 juillet 2006.
Sur l'indemnité de licenciement :
Compte tenu de la nullité du contrat d'engagement maritime de M. Serge X... ce dernier peut prétendre, par application du Code du travail à une indemnité de licenciement calculé sur la base d'une ancienneté courant du 15 mai 1979 au 5 décembre 2003 soit 6972,21 euros.
Il convient en conséquence de condamner La SA COBRECAF Compagnie Bretonne de Cargos Frigorifiques à payer à M. Serge X... la somme de 6972,21 eus au titre de l'indemnité de licenciement, et ce avec intérêts au taux légal à compter du 13 février 2006.
Sur l'indemnité de départ en retraite :
M. Serge X... ayant été licencié, il ne saurait prétendre à l'indemnité de départ en retraite.
Il convient en conséquence de débouter M. Serge X... de sa demande présentée de ce chef.
Sur la demande de dommages et intérêts pour licenciement abusif :
Le prononcé du licenciement pour non respect du statut protecteur du marin lui ouvre les mêmes droits que ceux dont bénéficient les salariés dont la rupture du contrat de travail ne repose pas sur une cause réelle et sérieuse.
Toutefois compte tenu de la spécificité du statut de marin dont bénéficie M. Serge X..., l'octroi de dommages et intérêts est subordonné à l'existence d'un préjudice effectif.
Ainsi il y a lieu d'allouer à Monsieur Serge X..., dont l'ancienneté était de plus de 23 ans, la somme de 10000 euros à titre de dommages et intérêts.
Il convient en conséquence de condamner La SA COBRECAF Compagnie Bretonne de Cargos Frigorifiques à payer à M. Serge X... la somme de 10000,00 eus à titre de dommages et intérêts, et ce avec intérêts au taux légal à compter du 27 juillet 2006.
Sur la demande de dommages et intérêts présentée par Le Syndicat Maritime Bretagne CFDT:
En application des dispositions de l'article 1382 du Code civil "tout fait de l'homme qui cause à autrui un dommage oblige, celui par a qui la faute est arrivé à le réparer" et l'article 1383 du même code dispose que "chacun est responsable du dommage qu'il a causé non seulement par son fait, mais encore par sa négligence et par son imprudence ".
En l'espèce le non respect par La SA COBRECAF Compagnie Bretonne de Cargos Frigorifiques du statut de salarié protégé de M. Serge X..., membre élu comme suppléant au comité d'entreprise sur présentation du Syndicat Maritime Bretagne CFDT, constitue une faute laquelle a causé à ce dernier un préjudice qui doit être réparé par l'allocation sollicitée d'un euro.
Il convient en conséquence de condamner La SA COBRECAF Compagnie Bretonne de Cargos Frigorifiques à payer au Syndicat Maritime Bretagne CFDT la somme de 1,00 eus à titre de dommages et intérêts, et ce avec intérêts au taux légal à compter du 27 juillet 2006 »

1/ ALORS QUE la rupture d'un contrat de travail se situe à la date où l'employeur a manifesté sa volonté d'y mettre fin, c'est-à-dire au jour de l'envoi de la lettre notifiant la rupture ; qu'en jugeant dès lors que la lettre adressée le 14 avril 2004 par la société COBRECAF à Monsieur X... dans laquelle elle lui faisait part de la rupture de son contrat de travail, qualifiée par la Cour d'appel de lettre de licenciement, avait pu prendre effet rétroactivement au 5 décembre 2003, soit antérieurement à la liquidation de la retraite par le salarié manifestant sa volonté de bénéficier d'un départ en retraite, la Cour d'appel a violé l'article L 122-14-1 du code du travail (devenu les articles L 1234-3, L 1232-6, L 1233-15, L 1233-39 et L. 1233-59) ;

2/ ALORS SUBSIDIAIREMENT QUE les dispositions de l'ancien article L. 742-1 du code du travail font obstacle à l'application aux marins devenus inaptes des dispositions de l'article L 122-24-4 du code du travail (devenu les articles L 1226-2, L 1226-3 et L 1226-4) ; qu'en jugeant le contraire, la Cour d'appel a violé les textes précités ;

3/ ALORS ENCORE PLUS SUBSIDIAIREMENT QUE la reprise du paiement des salaires à l'expiration du délai d'un mois prévue par l'article L 122-24-4 du code du travail ne s'impose à l'employeur que jusqu'à la rupture du contrat de travail du salarié ; qu'ayant constaté que la rupture du contrat de travail avait pris effet le 5 décembre 2003, la Cour d'appel ne pouvait condamner la COBRECAF à verser au salarié les salaires afférents à la période comprise entre le 5 janvier 2004 et le 14 avril 2004 ; qu'en statuant ainsi, elle n'a pas tiré les conséquences qui s'évinçaient de ses propres constatations en violation de l'article L 122-24-4 du code du travail (devenu les articles L 1226-2, L 1226-3 et L 1226-4).


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 08-40033
Date de la décision : 10/03/2009
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Analyses

STATUTS PROFESSIONNELS PARTICULIERS - Marin - Maladie ou accident non professionnel - Inaptitude au travail - Inaptitude consécutive à la maladie - Droit commun - Application

Les dispositions de l'article L. 742-1 du code du travail alors applicable ne font pas obstacle à ce que les dispositions de l'article L. 122-24-4, devenu L. 1226-2, L. 1226-3 et L. 1226-4 dudit code, soient appliquées à un marin devenu inapte à la navigation à la suite d'une maladie non professionnelle et dont la situation n'est régie par aucune loi particulière. Doit être en conséquence approuvée la cour d'appel qui condamne l'employeur au paiement des salaires un mois après l'avis médical d'inaptitude à défaut de reclassement ou de licenciement


Références :

article L. 742-1 du code du travail ancien

articles L. 122-24-4, devenu L. 1226-2, L. 1226-3, et L. 1226-4 du code du travail

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 08 novembre 2007

Sur l'application des dispositions de droit commun à un marin devenu inapte à la navigation dans le cas d'un accident du travail lorsqu'aucun texte particulier ne le prévoit, à rapprocher : Ass. Plén., 7 mars 1997, pourvoi n° 95-40169, Bull. 1997, Ass. plén, n° 2 (2) (rejet)


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 10 mar. 2009, pourvoi n°08-40033, Bull. civ. 2009, V, n° 68
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2009, V, n° 68

Composition du Tribunal
Président : Mme Collomp
Avocat général : M. Aldigé
Rapporteur ?: M. Trédez
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Masse-Dessen et Thouvenin

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:08.40033
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