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14/01/2009 | FRANCE | N°08-10205

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 14 janvier 2009, 08-10205


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article 16 de la Convention franco-marocaine du 5 octobre 1957 et l'article 11 de la Convention franco marocaine du 10 août 1981 ;

Attendu que M. X..., de nationalité marocaine et Mme Y... de nationalité française, mariés en 1977, ont eu deux enfants ; qu'appelant d'une ordonnance de non conciliation rendue sur la requête de Mme Y... par un juge aux affaires familiales français, M. X... a invoqué une fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée

d'une décision marocaine ayant prononcé un divorce "définitif pour discorde" ;...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article 16 de la Convention franco-marocaine du 5 octobre 1957 et l'article 11 de la Convention franco marocaine du 10 août 1981 ;

Attendu que M. X..., de nationalité marocaine et Mme Y... de nationalité française, mariés en 1977, ont eu deux enfants ; qu'appelant d'une ordonnance de non conciliation rendue sur la requête de Mme Y... par un juge aux affaires familiales français, M. X... a invoqué une fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée d'une décision marocaine ayant prononcé un divorce "définitif pour discorde" ;

Attendu que, pour annuler l'ordonnance de non conciliation et rejeter les demandes de Mme Y..., l'arrêt constate d'abord que le divorce a été prononcé par une juridiction marocaine puis dit d'une part que les règles de compétence de la Convention franco-marocaine du 10 août 1981 sont des règles de compétence directe et d'autre part que le juge français, saisi postérieurement au juge marocain, ne pouvait que surseoir à statuer et décide enfin que la juridiction française est incompétente pour apprécier une fraude à la loi marocaine commise devant la juridiction marocaine ;

Qu'en statuant ainsi alors qu'il lui appartenait de contrôler la régularité internationale de la décision étrangère dès lors qu'une fin de non recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée de la décision de divorce et partant de la dissolution du mariage était invoquée, la cour d'appel a violé les dispositions susvisées ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 19 février 2007, entre les parties, par la cour d'appel de Pau ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Pau, autrement composée ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Vu les articles 700 du code de procédure civile, 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991, rejette la demande ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze janvier deux mille neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, avocat aux Conseils pour Mme Y....

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir prononcé la nullité de l'ordonnance de non conciliation du 27 janvier 2006 rendue par le juge aux Affaires Familiales du Tribunal de Grande Instance de PAU ;

AUX MOTIFS QUE, il est constant que M. Abdelhay X..., de nationalité marocaine, et Mme Nicole Y...; de nationalité française, se sont mariés en France à AUBUSSON, ont vécu par la suite au Maroc, que l'épouse a quitté le Maroc avec son fils adoptif, Mourad, pour s'installer chez sa fille LeiIa en France à LONS (64) ; et qu'elle a engagé une procédure de divorce par devant le Juge aux affaires familiales de PAU par requête en date du 6 octobre 2005 ; que, de son coté, M X... a engagé une procédure de divorce par devant le Tribunal de première Instance de CASABLANCA qui a abouti à un jugement en date du 2 juin 2006 qui a prononcé le « divorce définitif pour discorde », jugement transcrit sur les registres d'état civil français, comme en fait foi l'extrait d'acte de mariage dressé par la mairie d'AUBUSSON le 4 octobre 2006 ; qu'en premier lieu, le défaut d'information du Juge aux Affaires Familiales sur l'existence d'une procédure de .divorce engagée au Maroc est inopérant dès lors que les dispositions de la Convention franco-marocaine du 10 août 1981, qui établissent des règles directes de compétence applicables à l'espèce sont d'ordre public et·peuvent être :soulevées en tout état de cause ; qu'en second lieu, par application des dispositions de l'article 11 alinéa 3 de cette Convention, le juge français ayant été saisi postérieurement au juge marocain d'une action aux mêmes fins ne pouvait que surseoir à statuer ; qu'en conséquence, l'ordonnance doit être annulée; que, par ailleurs, la présente juridiction n'est pas compétente pour examiner l'éventuelle fraude à la loi marocaine alléguée par l'épouse et qui aurait été réalisée devant la juridiction marocaine ;

ALORS QUE Madame X... soutenait qu'elle n'avait reçu aucune convocation à comparaître devant le Juge marocain dans la procédure initiée par le mari en juin 2005 pendant qu'elle s'était réfugiée chez leur fille commune à la suite des difficultés du couple, alors que son époux connaissait son adresse en France, au moins depuis sa propre convocation en justice en France par assignation en février 2006, et en déduisait que le jugement marocain ainsi obtenu au mépris et en fraude des droits de la défense, devait être déclaré inopposable aux juridictions françaises ; qu'en s'abstenant de rechercher, comme elle y était invitée, si le jugement marocain n'avait pas été obtenu en fraude des droits de la défense, et en retenant qu'elle n'était pas compétente pour examiner l'éventuelle fraude à la loi marocaine alléguée par l'épouse et qui aurait été réalisée devant la juridiction marocaine, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié son arrêt au regard de l'article 3 du code civil, ensemble l'article 11 alinéa 3 de la Convention franco-marocaine du 10 août 1981.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 08-10205
Date de la décision : 14/01/2009
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Analyses

CONFLIT DE JURIDICTIONS - Effets internationaux des jugements - Reconnaissance ou exequatur - Conditions - Condition de régularité internationale - Applications diverses - Fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée d'une décision de divorce étrangère

DIVORCE, SEPARATION DE CORPS - Procédure - Moyens de défense - Fin de non-recevoir - Fin de non-recevoir tirée d'un jugement étranger de divorce - Contrôle de la régularité internationale du jugement invoqué - Office du juge

Il appartient au juge devant lequel est invoquée une fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée d'une décision de divorce étrangère de contrôler la régularité internationale de cette décision. Viole les articles 16 de la Convention franco-marocaine du 5 octobre 1957 et 11 de la Convention franco-marocaine du 10 août 1981 la cour d'appel qui, pour annuler une ordonnance de non-conciliation, constate que le divorce a été prononcé par une juridiction marocaine, dit que le juge aux affaires familiales français, saisi postérieurement au juge marocain, ne pouvait que surseoir à statuer et décide que la juridiction française est incompétente pour apprécier une fraude à la loi marocaine commise devant la juridiction marocaine


Références :

article 16 de la Convention franco-marocaine du 5 octobre 1957

article 11 de la Convention franco-marocaine du 10 août 1981

Décision attaquée : Cour d'appel de Pau, 19 février 2007

A rapprocher :1re Civ., 10 mai 2007, pourvoi n° 06-11323, Bull. 2007, I, n° 170 (cassation partielle), et les arrêts cités ;1re Civ., 10 mai 2007, pourvoi n° 06-12476, Bull. 2007, I, n° 171 (cassation), et les arrêts cités


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 14 jan. 2009, pourvoi n°08-10205, Bull. civ. 2009, I, N° 4
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2009, I, N° 4

Composition du Tribunal
Président : M. Bargue
Avocat général : M. Sarcelet
Rapporteur ?: Mme Pascal
Avocat(s) : Me Spinosi, SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:08.10205
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