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09/12/2008 | FRANCE | N°08-86590

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 09 décembre 2008, 08-86590


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Ahmed,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de PARIS, 8e section, en date du 21 juillet 2008, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs d'escroqueries en bande organisée, recels de vols en bande organisée, association de malfaiteurs et trafic de stupéfiants, a confirmé l'ordonnance du juge des libertés et de la détention, en date du 2 juillet 2008, rejetant une demande de mise en liberté ;

Vu le mémoire personne

l produit ;
Sur sa recevabilité :
Attendu que ce mémoire, produit au nom d'Ahme...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Ahmed,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de PARIS, 8e section, en date du 21 juillet 2008, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs d'escroqueries en bande organisée, recels de vols en bande organisée, association de malfaiteurs et trafic de stupéfiants, a confirmé l'ordonnance du juge des libertés et de la détention, en date du 2 juillet 2008, rejetant une demande de mise en liberté ;

Vu le mémoire personnel produit ;
Sur sa recevabilité :
Attendu que ce mémoire, produit au nom d'Ahmed X... par un avocat au barreau de Meaux, ne porte pas la signature du demandeur ; que, dès lors, en application de l'article 584 du code de procédure pénale, il n'est pas recevable et ne saisit pas la Cour de cassation des moyens qu'il pourrait contenir ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 5, 6 et 13 de la Convention européenne des droits de l'homme, 148 et suivants, 194, 197, 206, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
"en ce que la chambre de l'instruction ne s'est pas déclarée saisie par l'appel formé par le demandeur, le 26 juin 2008, à l'encontre d'une ordonnance du juge des libertés du 23 juin précédent, ayant rejeté sa demande de mise en liberté ;
"aux motifs que la chambre de l'instruction est aujourd'hui régulièrement saisie de l'unique appel formé contre l'ordonnance rendue par le juge des libertés et de la détention le 2 juillet 2008, ainsi que cela résulte de l'acte d'appel en date du 4 juillet 2008, enregistré au greffe de la juridiction de Meaux le même jour ; que, si la chambre de l'instruction doit, en matière de détention provisoire, statuer dans les quinze ou vingt jours de l'appel, ce délai se calcule non à compter de la date de l'acte d'appel, mais du lendemain du jour où cette déclaration a été transcrite sur le registre du greffe de la juridiction ; que cette formalité n'ayant pas été accomplie, le délai de l'article 194 n'a pas commencé à courir ; que, dès lors, la cour ne saurait ce jour se considérer comme saisie de l'appel du 26 juin 2008 (arrêt p. 5) ;
"1°) alors qu'aux termes du dernier alinéa de l'article 194 du code de procédure pénale, la chambre de l'instruction doit, en matière de détention provisoire, se prononcer dans les plus brefs délais et au plus tard dans les vingt jours à compter de l'appel, faute de quoi la personne concernée doit être mise d'office en liberté ; que n'est pas une circonstance imprévisible et insurmontable au sens de l'article 194 du code de procédure pénale l'erreur du juge d'instruction sur la qualification d'un acte de procédure, lequel a confondu un acte d'appel d'une ordonnance de refus de mise en liberté avec une demande de mise en liberté pure et simple ; que la chambre de l'instruction n'ayant pu statuer dans les vingt jours au plus tard de l'appel, à raison précisément de l'erreur du juge d'instruction, la cour n'a pu légalement déclarer n'être pas saisie de cet appel et refuser en conséquence de remettre le demandeur en liberté ;
"2°) alors que, d'autre part, quand la déclaration d'appel n'a pas été transcrite sur le registre du greffe de la juridiction à la suite d'une erreur du juge d'instruction, le délai dans lequel la chambre de l'instruction doit statuer se calcule alors à compter de la date de l'acte d'appel, sinon à compter de la date de réception de cet appel par le juge de l'instruction ; qu'en affirmant au contraire que ce délai n'avait pas couru à raison du défaut de transcription de l'acte d'appel imputable au seul juge d'instruction, la cour a derechef violé les textes susvisés" ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 5, 6 et 13 de la Convention européenne des droits de l'homme, 148 et suivants, 194, 197, 206, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
"en ce que, la chambre de l'instruction, qui s'est déclarée saisie du seul appel formé contre l'ordonnance du juge des libertés du 2 juillet 2008, a refusé d'annuler ladite ordonnance et a rejeté en conséquence la demande de mise en liberté du demandeur ;
"aux motifs que la chambre de l'instruction est aujourd'hui régulièrement saisie de l'unique appel formé contre l'ordonnance rendue par le juge des libertés et de la détention, le 2 juillet 2008, ainsi que cela résulte de l'acte d'appel en date du 4 juillet 2008, enregistré au greffe de la juridiction de Meaux le même jour (…) ; qu'il convient de confirmer l'ordonnance entreprise (arrêt p. 5 et 6) ;
"1°) alors que, d'une part, l'ordonnance entreprise du 2 juillet 2008 était nulle comme émanant d'un juge des libertés qui avait auparavant déjà épuisé sa saisine en prononçant l'ordonnance du 23 juin 2008 et qui, entre-temps, n'avait été saisi d'aucune demande de la part du demandeur ; que la chambre de l'instruction devait en conséquence annuler l'ordonnance ainsi rendue par une autorité incompétente ;
"2°) alors que, d'autre part, le fait pour le juge des libertés de statuer à nouveau le 2 juillet 2008 sur une demande qu'il avait préalablement tranchée le 23 juin précédent est constitutif d'un abus manifeste de procédure ayant pour but et pour effet de contourner les dispositions impératives de l'article 194 en donnant apparence à une prorogation illégale d'un délai de rigueur" ;
Les moyens étant réunis ;
Vu l'article 194 du code de procédure pénale ;
Attendu que, selon le dernier alinéa de ce texte, la chambre de l'instruction doit, en matière de détention provisoire, se prononcer dans les plus brefs délais et, au plus tard, dans les quinze jours de l'appel prévu par l'article 186 du code de procédure pénale, ce délai étant prolongé de cinq jours, suivant l'article 199, dernier alinéa, dudit code, en cas de comparution personnelle de la personne concernée, faute de quoi celle-ci est remise d'office en liberté, sauf si des vérifications concernant sa demande ont été ordonnées ou si des circonstances imprévisibles et insurmontables mettent obstacle au jugement de l'affaire dans le délai prévu ;
Attendu qu'il ressort de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que, par déclaration du 26 juin 2008 auprès du chef de l'établissement pénitentiaire, Ahmed X... a interjeté appel de l'ordonnance du 23 juin 2008 rejetant sa demande de mise en liberté ; que la déclaration d'appel, accompagnée d'un bordereau présentant l'acte de manière erronée comme une demande de mise en liberté, a été transmise au juge des libertés et de la détention qui a rendu, le 2 juillet 2008, une nouvelle ordonnance de rejet de demande de mise en liberté ; qu'Ahmed X... a interjeté appel de cette dernière décision, le 4 juillet 2008 ;
Attendu que, pour écarter l'argumentation d'Ahmed X..., qui soutenait qu'il était détenu arbitrairement dès lors qu'il n'avait pas été statué sur son appel de la précédente ordonnance dans le délai de vingt jours, l'arrêt énonce que la chambre de l'instruction est régulièrement saisie de l'unique appel formé contre l'ordonnance rendue par le juge des libertés et de la détention, le 2 juillet 2008 ; que les juges ajoutent que, le délai d'appel se calculant non à compter de la date de cet acte, mais du lendemain de sa transcription sur le registre du greffe de la juridiction, le délai de l'article 194 n'a pas commencé à courir et que, dès lors, la chambre de l'instruction ne saurait se considérer comme saisie de l'appel du 26 juin 2008 ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, sans caractériser une circonstance imprévisible et insurmontable, extérieure au service de la justice, la chambre de l'instruction a méconnu le sens et la portée du texte susvisé ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, en date du 21 juillet 2008 ;
CONSTATE qu'Ahmed X... est détenu sans titre, depuis le 16 juillet 2008, à minuit, s'il ne l'est pour autre cause ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Pelletier président, M. Straehli conseiller rapporteur, M. Joly, Mmes Anzani, Palisse, MM. Beauvais, Guérin, Finidori conseillers de la chambre, Mmes Leprieur, Degorce conseillers référendaires ;
Avocat général : M. Salvat ;
Greffier de chambre : M. Souchon ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 08-86590
Date de la décision : 09/12/2008
Sens de l'arrêt : Cassation sans renvoi
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

CHAMBRE DE L'INSTRUCTION - Détention provisoire - Demande de mise en liberté - Appel d'une ordonnance de rejet - Délai imparti pour statuer - Circonstance imprévisible et insurmontable - Défaut - Effet

DETENTION PROVISOIRE - Chambre de l'instruction - Ordonnance de refus de mise en liberté - Appel - Délai imparti pour statuer - Circonstance imprévisible et insurmontable - Défaut - Effet

La chambre de l'instruction doit, en matière de détention provisoire, se prononcer dans les plus brefs délais et, au plus tard, dans les quinze jours de l'appel prévu par l'article 186 du code de procédure pénale, ce délai étant prolongé de cinq jours, suivant l'article 199, dernier alinéa dudit code, en cas de comparution personnelle de la personne concernée, faute de quoi celle-ci est remise d'office en liberté, sauf si des vérifications concernant sa demande ont été ordonnées ou si des circonstances imprévisibles et insurmontables, extérieures au service de la justice, mettent obstacle au jugement de l'affaire dans le délai prévu. Ne caractérise pas une telle circonstance la confusion opérée par un juge des libertés et de la détention entre l'acte d'appel d'une ordonnance de rejet de demande de mise en liberté et une nouvelle demande aux mêmes fins. Dès lors, la chambre de l'instruction, saisie de l'appel de la seconde ordonnance, rendue à tort par ce magistrat doit statuer sur le précédent appel dans le délai susvisé. En cas de dépassement de celui-ci, elle a l'obligation de constater que la personne concernée est détenue sans titre


Références :

article 194, dernier alinéa, du code de procédure pénale

Décision attaquée : Chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, 21 juillet 2008

Sur la confusion entre une déclaration d'appel et une demande de mise en liberté ne constituant pas une circonstance imprévisible et insurmontable au sens de l'article 194, dernier alinéa, du code de procédure pénale, à rapprocher :Crim., 23 février 2000, pourvoi n° 99-87815, Bull. crim. 2000, n° 79 (cassation sans renvoi)


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 09 déc. 2008, pourvoi n°08-86590, Bull. crim. criminel 2008, n° 247
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2008, n° 247

Composition du Tribunal
Président : M. Pelletier
Avocat général : M. Salvat
Rapporteur ?: M. Straehli
Avocat(s) : Me Bouthors

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2008:08.86590
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