LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- Z... Agnès, partie civile,
contre l'arrêt de la cour d'appel de PARIS, 12e chambre, en date du 12 décembre 2007, qui, dans la procédure suivie contre Sophie X... des chefs de faux, usage, établissement d'une fausse attestation et escroquerie, a prononcé la nullité de la citation de la partie civile ;
Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 441-1, 441-7, 313-1 du code pénal, 6 de la convention européenne des droits de l'homme, 551, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a prononcé la nullité de la citation délivrée à Sophie X..., le 3 octobre 2005 ;
" aux motifs que l'objet de la citation était de fixer les limites du débat ; qu'elle devait énoncer clairement le fait poursuivi et viser le texte de loi qui le réprime ; que, sur le faux et usage de faux, à la lecture du dispositif de la citation, il semblait que soient incriminés le faux et usages de fausses attestations, ce qui supposait que plusieurs fausses attestations soient reprochées, sans savoir s'il s'agissait d'une cession de parts sociales, d'une attestation établie par Sophie X... ou d'un procès-verbal d'assemblée générale de société ; que seule l'attestation établie par Sophie X... constituait une attestation, les autres documents étant qualifiés de faux en écritures de commerce ; que les contradictions existant dans le corps du dispositif ne permettaient pas à Sophie X... de savoir précisément quels faits étaient reprochés, ni sous quelle qualification ; que, sur l'escroquerie, Josette Y... incriminait au titre de l'escroquerie, la rédaction de documents argués de faux ; que Sophie X... n'était pas en mesure de savoir ce qui lui était reproché ; que manquait l'indication précise de la date des faits et du lieu de leur commission ;
" alors que, selon l'article 551 du code de procédure pénale, il suffit que la citation énonce le fait poursuivi et le texte qui le réprime ; que dans les motifs de la citation du 3 octobre 2005, totalement oubliés par la cour d'appel dans son analyse de ce document, Josette Y... énonçait, de la manière la plus claire, que l'acte de cession de parts daté du 28 octobre 2002 constituait un faux en écritures de commerce, réprimé par l'article 441-1 du code pénal (citation, page 7), de même que le procès-verbal de l'assemblée générale de la même date (citation, pages 9 et 10), tandis que l'attestation du 28 novembre 2003 constituait une fausse attestation, au sens de l'article 441-7 du code pénal (citation, pages 8 et 9) ; que la citation énonçait donc les faits reprochés, leur date et le texte les réprimant ; que la cour d'appel ne pouvait légalement décider de l'annuler ;
" et alors que, de même, la citation (pages 11 et 12) énonçait expressément que Sophie X... avait commis une escroquerie en orchestrant des manoeuvres frauduleuses, constituées par l'usage de faux documents dont les dates étaient précisées, pour s'approprier et retenir une partie de l'actif successoral de son père ; que la citation énonçait également que ces faits étaient réprimés par l'article 313-1 du code pénal ; que, une nouvelle fois, la citation énonçait des faits précis, avec leur date et le texte les réprimant ; que la cour d'appel ne pouvait donc légalement décider de l'annuler " ;
Vu l'article 551, alinéa 2, du code de procédure pénale ;
Attendu que, selon ce texte, la citation est régulière lorsqu'elle énonce les faits poursuivis et vise les textes de loi qui les répriment ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que Josette Y..., veuve de Jean-Pierre X..., décédée en cours d'instance, dont l'action a été reprise par sa seule héritière, Agnès Z..., a fait citer directement devant le tribunal Sophie X..., fille née d'un précédent mariage de Jean-Pierre X..., pour répondre des délits de faux, usage, établissement d'une fausse attestation et escroquerie au jugement, en visant les articles 441-1, 441-7 et 313-1 du code pénal ;
Qu'aux termes de cette citation, il est reproché à Sophie X..., en premier lieu, d'avoir produit à la succession de son père le procès-verbal de l'assemblée générale des associés de la société Neurolab et l'acte portant cession à son profit des 12 000 parts que Jean-Pierre X... détenait dans cette société, documents datés du 28 octobre 2002, revêtus d'une mention manuscrite et de signatures faussement attribuées à ce dernier, en second lieu, d'avoir rédigé le 28 novembre 2003 puis produit devant le juge des référés une attestation selon laquelle, sur ces documents, elle aurait été dans l'obligation de guider la main de son père ; qu'il est précisé que l'expert en écritures commis par ce magistrat a conclu, le 26 mai 2004, que Jean-Pierre X... n'était pas l'auteur des mentions et signatures figurant sur les documents du 28 octobre 2002 et que sa main n'avait pas été guidée ;
Attendu que, pour confirmer la décision des premiers juges ayant prononcé la nullité de la citation, l'arrêt, après avoir notamment relevé que celle-ci comportait des " contradictions, insuffisances, imprécisions " et que l'usage de l'attestation était poursuivi sous une double qualification, " sans que soit visé le texte prévoyant et réprimant la tentative ", énonce que Sophie X... n'a pas été mise " en mesure de comprendre, de manière non équivoque, quels étaient les faits précis qui lui étaient reprochés et sous quelle qualification " ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, alors que la citation, qui comportait la description détaillée des faits poursuivis et la référence aux principaux textes de loi qui les répriment, mettait la prévenue en mesure de préparer sa défense, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée du texte susvisé et du principe ci-dessus énoncé ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Paris, en date du 12 décembre 2007, et pour qu'il soit jugé à nouveau conformément à la loi,
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel d'Orléans, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Paris, sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Dulin conseiller le plus ancien faisant fonction de président en remplacement du président empêché, Mme Nocquet conseiller rapporteur, Mme Thin conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : M. Souchon ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;