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01/07/2008 | FRANCE | N°06-44437

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 01 juillet 2008, 06-44437


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu que, selon l'arrêt attaqué (Paris, 1er juin 2006), la Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance (CNCEP), a dénoncé le 20 juillet 2001 divers accords collectifs nationaux applicables au sein des entreprises du réseau des caisses d'épargne ; que les accords de substitution qu'elle a conclus n'ont pu entrer en vigueur en raison de l'exercice de leur droit d'opposition par la majorité des organisations syndicales représentées au sein de la commission paritaire n

ationale ; qu'à l'expiration des délais prévus par le troisième alinéa ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu que, selon l'arrêt attaqué (Paris, 1er juin 2006), la Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance (CNCEP), a dénoncé le 20 juillet 2001 divers accords collectifs nationaux applicables au sein des entreprises du réseau des caisses d'épargne ; que les accords de substitution qu'elle a conclus n'ont pu entrer en vigueur en raison de l'exercice de leur droit d'opposition par la majorité des organisations syndicales représentées au sein de la commission paritaire nationale ; qu'à l'expiration des délais prévus par le troisième alinéa de l'article L. 132-8 du code du travail, la CNCEP a décidé d'intégrer au salaire de base des salariés des entreprises du réseau, une prime de durée d'expérience, une prime de vacances et une prime familiale, éléments de rémunération prévus par un accord du 19 décembre 1985 qui figurait au nombre des accords dénoncés ; que le Syndicat SUD Caisses d'épargne a saisi la juridiction civile ;

Attendu que la CNCEP fait grief à l'arrêt de lui avoir ordonné de diffuser une recommandation enjoignant aux caisses et entreprises du groupe de rectifier les bulletins de paie établis pour chacun de leurs salariés depuis le mois de novembre 2002 en établissant une distinction entre le salaire mensuel de base et la prime de durée d'expérience, la prime familiale et la prime de vacances, alors, selon le moyen :

1°/ que si, en cas de dénonciation d'un accord collectif non suivi de la conclusion d'un accord de substitution, le salarié a droit au titre des avantages individuels acquis au maintien du niveau de la rémunération globale, salaire de base et primes, atteint au jour où l'accord collectif a été dénoncé, il ne peut plus prétendre pour l'avenir au maintien de la structure de cette rémunération prévue par cet accord, celle-ci ne constituant pas un avantage individuel acquis au sens de l'article L. 132-8 du code du travail ; qu'en outre le seul changement de cette structure ne constitue pas une modification du contrat de travail des salariés ; qu'en l'espèce, les salarié des caisses et entreprises du groupe Caisse d'épargne percevaient, en vertu d'un accord collectif du 19 décembre 1985, diverses primes en sus de leur salaire de base ; que cet accord ayant été dénoncé et les accords de substitution conclus n'ayant pu entrer en vigueur, il a été décidé d'intégrer au salaire de base le montant atteint par ces primes au 22 octobre 2002 ; qu'en jugeant que les caisses et entreprises du groupe Caisse d'épargne ne pouvaient intégrer ces primes dans le salaire de base, ce d'autant que cette intégration affectait la structure de la rémunération, la cour d'appel a violé l'article L. 132-8 du code du travail ;

2°/ que la contradiction de motifs équivaut à une absence de motifs ; qu'en affirmant d'une part que l'incorporation des primes dans le salaire de base ne permettait pas le maintien du niveau de rémunération des salariés pour l'avenir et d'autre part que le système retenu permettait de ne pas entraîner de baisse de la rémunération globale et que le niveau brut de rémunération perçu par les salariés après intégration des primes était maintenu à son niveau antérieur, la cour d'appel a statué par des motifs contradictoires en violation de l'article 455 du nouveau code de procédure civile ;

3°/ qu'en cas de dénonciation d'un accord collectif non suivi de la conclusion d'un accord de substitution, le salarié a seulement droit au titre des avantages individuels acquis au maintien du niveau de la rémunération globale, salaire de base et primes, atteint au jour où l'accord collectif a été dénoncé ; qu'en retenant à l'appui de sa décision que le montant brut de rémunération effectivement perçu par les salariés, primes incluses, apparaissait pour certains d'entre eux comme étant supérieur aux rémunérations minimales correspondant aux niveaux de classification définis par les accords collectifs des 30 septembre et 11 décembre 2003 et aboutissait à les priver de toute augmentation de rémunération lorsqu'ils bénéficient d'une promotion, la cour d'appel a statué par un motif inopérant et violé l'article L. 132-8 du code du travail ;

4°/ qu'elle soulignait que les partenaires sociaux avaient conclu le 25 juin 2004 un accord relatif à la carrière des salariés prévoyant en son article 6 que "tout salarié promu au sein de son entreprise à un autre emploi, de niveau de classification supérieur, bénéficie d'une évolution salariale individuelle minimale visant à reconnaître ce changement individuel d'emploi : le montant de cette évolution salariale individuelle minimale, exprimée en pourcentage, correspond à 35 % du différentiel entre la rémunération annuelle minimale du niveau de classification de l'emploi initial et celle du niveau de classification du nouvel emploi (...) Le versement intervient aussi au bénéfice du salarié qui perçoit d'ores et déjà un salaire de base annuel supérieur à la rémunération annuelle minimale du niveau de classification du nouvel emploi" ; qu'en affirmant que le montant brut de rémunération effectivement perçu par les salariés, primes incluses, apparaissait pour certains d'entre eux comme étant supérieur au rémunérations minimales correspondant aux niveaux de classification définis par les accords collectifs des 30 septembre et 11 décembre 2003 et aboutissait à les priver de toute augmentation de rémunération lorsqu'ils bénéficiaient d'une promotion, sans s'expliquer sur l'accord collectif invoqué, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil ;

5°/ qu'aux termes de l'accord collectif national sur la rémunération annuelle minimale du 11 décembre 2003, pour déterminer si le salarié perçoit la rémunération brute annuelle minimale correspondant à son niveau de classification, c'est la rémunération brute annuelle perçue qui est prise en compte, à la seule exception des sommes versées au titre de la participation, de l'intéressement ou de la part variable ; qu'il en résulte que même si les primes prévues par l'accord collectif dénoncé n'avaient pas été incorporées au salaire de base, leur montant aurait néanmoins été pris en considération dans la comparaison avec la rémunération annuelle minimale ; que la cour d'appel, qui a considéré qu'en l'absence d'incorporation au salaire de base, ces primes n'auraient pas été prises en compte dans la comparaison avec la rémunération annuelle minimale, a violé l'accord susvisé ;

Mais attendu que la structure de la rémunération résultant d'un accord collectif dénoncé constitue à l'expiration des délais prévus par le troisième alinéa de l'article L. 132-8 du code du travail alors en vigueur un avantage individuel acquis qui est incorporé au contrat de travail des salariés employés par l'entreprise à la date de la dénonciation ; qu'il s'en déduit que l'employeur ne peut la modifier sans l'accord de chacun de ces salariés, quand bien même estimerait-il les nouvelles modalités de rémunération plus favorables aux intéressés ;

Et attendu que la cour d'appel qui a constaté qu'après avoir dénoncé l'accord collectif du 19 décembre 1985, la CNCEP avait unilatéralement décidé, à la date à laquelle celui-ci avait cessé de produire effet, d'intégrer dans le salaire de base des salariés des entreprises du réseau des caisses d'épargne des primes prévues par cet accord, a jugé à bon droit que les éléments de rémunération antérieurs qui s'étaient intégrés au contrat de travail de chacun des intéressés devaient être rétablis ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la CNCEP aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la CNCEP à payer la somme de 1 000 euros au Syndicat SUD Caisses d'épargne et de 1 000 euros au Syndicat unifié du groupe Caisse d'épargne ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du premier juillet deux mille huit.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 06-44437
Date de la décision : 01/07/2008
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Analyses

STATUT COLLECTIF DU TRAVAIL - Conventions et accords collectifs - Dispositions générales - Dénonciation - Effets - Conclusion d'un nouvel accord - Défaut - Maintien des avantages individuels acquis - Domaine d'application - Structure de la rémunération

La structure de la rémunération résultant d'un accord collectif dénoncé constitue à l'expiration des délais prévus par le troisième alinéa de l'article L. 132-8 du code du travail, devenu le premier alinéa de l'article L. 2261-10 de ce code, un avantage individuel acquis qui est incorporé au contrat de travail des salariés employés par l'entreprise à la date de la dénonciation. Il s'en déduit que l'employeur ne peut la modifier sans l'accord de chacun de ces salariés (arrêt n° 1, pourvoi n° 06-44.437) quand bien même il estimerait les nouvelles modalités de rémunération plus favorables aux intéressés (arrêt n° 2, pourvoi n° 07-40.799). Par suite, c'est à bon droit qu'une cour d'appel qui a constaté qu'après avoir dénoncé un accord collectif, un employeur avait unilatéralement décidé, à la date à laquelle il avait cessé de produire effet, d'intégrer dans le salaire de base des salariés qui avaient bénéficié de l'accord des primes prévues par celui-ci le montant des dites primes, a jugé que les éléments de rémunération antérieurs qui s'étaient intégrés au contrat de travail de chacun des intéressés devaient être rétablis (arrêt n° 1). De même, il s'ensuit qu'une cour d'appel décide exactement que l'employeur doit rectifier les bulletins de salaire afin qu'apparaissent la prime liée à l'ancienneté et la prime de durée d'expérience, telles qu'antérieurement à la dénonciation de l'accord (arrêt n° 2)


Références :

article L. 132-8, alinéa 3, du code du travail, devenu article L. 2261-10, alinéa 1er, du code du travail

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 01 juin 2006

Evolution par rapport à : Soc., 28 avril 2006, pourvoi n° 04-41863, Bull. 2006, V, n° 155 (cassation partielle)

arrêt cité


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 01 jui. 2008, pourvoi n°06-44437, Bull. civ. 2008, V, n° 147
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2008, V, n° 147

Composition du Tribunal
Président : Mme Collomp
Avocat général : M. Cavarroc
Rapporteur ?: M. Chauviré
Avocat(s) : SCP Gatineau, SCP Masse-Dessen et Thouvenin, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2008:06.44437
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