LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu que M. X..., brancardier, qui avait subi, entre mars 1992 et mai 1993, la vaccination contre l'hépatite B, obligatoire pour tous les employés de la clinique où il exerçait, a ressenti, peu après, d'importants troubles qui ont conduit au diagnostic de la sclérose en plaques ; qu'imputant l'apparition de cette maladie à la vaccination reçue, il a, après avoir obtenu une indemnisation de la part de l'Etat au titre de la réparation du dommage imputable à une vaccination obligatoire sur le fondement de l'article L. 3111-9 du code de la santé publique ainsi que sa prise en charge par la CPAM de la Sarthe au titre de la législation sur les accidents du travail, recherché la responsabilité civile de la société Pasteur vaccins, fabricant et fournisseur du vaccin, aux droits de laquelle se trouve la société Sanofi Pasteur MSD, et l'organisme de sécurité sociale en réparation de son préjudice ; que l'arrêt a rejeté ses demandes ;
Sur le pourvoi principal de M. X..., pris en ses deux dernières branches :
Vu l'article 1353 du code civil, ensemble l'article 1382 du même code interprété à la lumière de la directive n° 85-374 du 25 juillet 1985 ;
Attendu que pour débouter M. X... de ses demandes dirigées contre la société Aventis Pasteur MSD devenue Sanofi Pasteur MSD, l'arrêt retient que la preuve scientifique absolue est impossible puisque l'étiologie de la sclérose en plaques n'est pas connue, que personne ne peut actuellement expliquer comment cette vaccination pourrait provoquer l'apparition de cette maladie, que cette constatation interdit de considérer qu'il puisse y avoir une quelconque présomption en l'absence d'autre facteur connu de contamination, qu'à défaut de lien scientifique, aucun lien statistique n'a été démontré et qu'il n'y a pas de probabilité suffisante du lien de causalité entre la maladie dont souffre M. X... et la vaccination contre l'hépatite B ;
Attendu, cependant, que si l'action en responsabilité du fait d'un produit défectueux exige la preuve du dommage, du défaut et du lien de causalité entre le défaut et le dommage, une telle preuve peut résulter de présomptions, pourvu qu'elles soient graves, précises et concordantes ;
D'où il suit qu'en se déterminant ainsi, en référence à une approche probabiliste déduite exclusivement de l'absence de lien scientifique et statistique entre vaccination et développement de la maladie, sans rechercher si les éléments de preuve qui lui étaient soumis constituaient, ou non, des présomptions graves, précises et concordantes du caractère défectueux du vaccin litigieux, comme du lien de causalité entre un éventuel défaut et le dommage subi par M. X..., la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
Et attendu que le moyen unique du pourvoi incident éventuel formé par la société Sanofi Pasteur MSD n'est pas de nature à permettre l'admission de ce pourvoi ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la première branche du moyen unique du pourvoi principal :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 30 mars 2005, entre les parties, par la cour d'appel d'Angers ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris ;
Condamne la société Sanofi Pasteur MSD aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Sanofi Pasteur MSD à payer à M. X... et à la CPAM de la Sarthe la somme de 2 000 euros chacun ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux mai deux mille huit.