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20/02/2008 | FRANCE | N°07-81247

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 20 février 2008, 07-81247


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : Statuant sur les pourvois formés par :
- X... Samir,- X... Boualem,- X... Fazia, - X... Ali,
contre l'arrêt de la cour d'appel de DOUAI, 4e chambre, en date du 20 décembre 2006, qui les a condamnés, le premier, pour infractions à lalégislation sur les stupéfiants et blanchiment à trois ans d'emprisonnement,le deuxième, pour infractions à la législation sur les stupéfiants, à cinq ans d'emprisonnement, les troisième et quatrième, pour non-justification de ressources correspondant à leur train de vie, éta

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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : Statuant sur les pourvois formés par :
- X... Samir,- X... Boualem,- X... Fazia, - X... Ali,
contre l'arrêt de la cour d'appel de DOUAI, 4e chambre, en date du 20 décembre 2006, qui les a condamnés, le premier, pour infractions à lalégislation sur les stupéfiants et blanchiment à trois ans d'emprisonnement,le deuxième, pour infractions à la législation sur les stupéfiants, à cinq ans d'emprisonnement, les troisième et quatrième, pour non-justification de ressources correspondant à leur train de vie, étant en relations habituelles avec des personnes se livrant au trafic de stupéfiants, respectivement, à trois ans d'emprisonnement, 20 000 euros d'amende, et à deux ans d'emprisonnement, 20 000 euros d'amende, et a prononcé des mesures de confiscation ;
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu le mémoire produit, commun aux demandeurs ;
Sur le troisième moyen de cassation, proposé pour Ali X... et Fazia X..., pris de la violation de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, des articles 131-19, 222-39-1 ancien et 321-6-1 du code pénal, 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale, violation de la présomption d'innocence ;
"en ce que l'arrêt attaqué a condamné Ali X... et Fazia X... du chef d'omission de justification des ressources correspondant à leur train de vie en étant en relation habituelle avec une ou plusieurs personnes se livrant au trafic de stupéfiants à des peines de trois et deux ans d'emprisonnement ferme ;
"aux motifs qu'Ali X... était titulaire d'une dizaine de comptes bancaires et de deux contrats d'assurance-vie pour un capital total de 140 592,98 euros ; qu'il était propriétaire de sept logements, pour une capitalisation immobilière représentant une valeur d'achat de l'ordre de 160 832,75 euros ; une seule automobile était à son nom, une BMW série 5 ; Fazia X... était titulaire de seize comptes bancaires, pour une situation au 23 mars 2004 de 81.800,26 euros ; qu'elle possédait en outre avec son conjoint les sept immeubles précités ; que le rôle de Fazia X... a été sous-évalué par le tribunal : les écoutes démontrent suffisamment qu'elle n'a pas occupé que le seul rôle de réceptacle de coquettes sommes qui garnissaient ses multiples comptes ; il suffit pour s'en convaincre de se reporter à la place qu'elle occupe pendant l'incarcération de son fils et aux conversations de ses filles à propos de l'ascendant qu'elle a sur sa famille de la connaissance qu'elle avait de l'activité délinquantielle de chacun de ses fils ; elle participe également aux achats de bijoux retrouvés dans son coffre, à la gestion de ses comptes et de ceux de ses filles au point de devenir parfois prêteuse de deniers, et au recouvrement des loyers ; nonobstant ce rôle décrit comme actif, le montant important des sommes transitant par ses comptes, sur lesquels Omar n'a aucune procuration, et suivant les transferts plus que douteux, justifierait à lui seul qu'elle soit sévèrement sanctionnée ;
"alors, d'une part, que le délit de non-justification de ressources suppose la constatation d'un train de vie et ne résulte pas du seul fait pour celui qui est en relation habituelle avec une personne se livrant au trafic de stupéfiants de détenir des fonds et des biens immobiliers dont il ne peut justifier l'origine ; qu'en conséquence, en se bornant à constater qu'Ali et Fazia X... ne pouvaient justifier de l'origine des fonds qu'ils détenaient sur différents comptes bancaires et des immeubles dont ils étaient propriétaires, sans caractériser le moindre élément relatif à leur train de vie à l'égard duquel ils auraient eu à justifier des ressources correspondantes, la cour d'appel a violé l'article 321-6-1 du code pénal (ancien article 222-39-1 dudit code) ;
"alors, d'autre part, qu'en prenant en considération, pour prononcer une peine d'emprisonnement ferme à l'égard de Fazia X..., une prétendue participation active de l'intéressée dans la gestion des fonds dont elle aurait connu l'origine frauduleuse, faits constitutifs d'infraction non visées par la prévention et n'ayant à ce titre pas fait l'objet d'une accusation formelle, ni d'un débat contradictoire ni d'une déclaration de culpabilité, la cour d'appel a violé l'article 132-19 du code pénal et l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, ensemble le principe de la présomption d'innocence" ;
Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, d'une part, sans insuffisance, ni contradiction, caractérisé en tous ses éléments, tant matériels qu'intentionnel, le délit de non justification de ressources, dont elle a déclaré les prévenus Ali X... et Fazia X... coupables, d'autre part, prononcé une peine d'emprisonnement sans sursis par des motifs qui satisfont aux exigences de l'article 132-19 du code pénal ;
D'où il suit que le moyen, qui se borne à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoire débattus, ne saurait être admis ;

Sur le premier moyen de cassation, proposé pour Boualem X..., pris de la violation des articles 132-19 du code pénal, 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
"en ce que la cour d'appel a condamné Boualem X... des chefs d'importation de stupéfiants et de transport, détention, offre, cession ou acquisition de stupéfiants à une peine de cinq ans d'emprisonnement ;
"aux motifs adoptés que, compte tenu de la gravité des faits commis et de l'implication prise par Boualem X..., il convient de le condamner à la peine de cinq années d'emprisonnement ;
"alors que la juridiction correctionnelle ne peut prononcer une peine d'emprisonnement sans sursis sans motiver expressément le choix de cette peine en fonction des circonstances de l'infraction et de la personnalité de son auteur ; qu'en se bornant à relever la gravité des faits et l'implication du prévenu, sans constater le moindre élément propre à sa personnalité, la cour d'appel a violé l'article 132-19, alinéa 2, du code de procédure pénale" ;
Sur le deuxième moyen de cassation, proposé pour Samir X..., pris de la violation de l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, des articles 132-19 et 132-24 du code pénal, 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale, violation du principe de l'individualisation des peines ;
"en ce que la cour d'appel a infirmé le jugement en ses dispositions relatives à la peine prononcée à l'encontre de Samir X... et a condamné l'intéressé des chefs d'importation de stupéfiants, de transport, détention, offre, cession ou acquisition de stupéfiants, de blanchiment de fonds provenant de l'infraction d'importation de stupéfiants et de transport, détention, offre, cession ou acquisition de stupéfiants à une peine de trois ans d'emprisonnement ;
"aux motifs que le premier juge a fait une application trop bienveillante de la loi en ce sens que Samir X... était au carrefour du trafic dont il a été clairement établi qu'il se centrait sur le café Cosmopolite, tenu par Samir ; certes Samir était un simple exécutant de ses frères aînés mais sûrement un rouage très utile et s'il fallait hors contexte ne prendre en considération que le seul trafic imputable à ce dernier au regard de la jurisprudence habituelle en la matière et au vu des quantités traitées la peine ne pourrait ni être mixte, car Samir n'a nul besoin d'être pris en charge ni aussi faible ;
"alors, d'une part, que la juridiction prononce les peines et fixe leur régime en fonction des circonstances de l'infraction et de la personnalité de son auteur et la nature, le quantum et le régime des peines prononcées sont fixés de manière à concilier la protection effective de la société, la sanction du condamné et les intérêts de la victime avec la nécessité de favoriser l'insertion ou la réinsertion du condamné et de prévenir la commission de nouvelles infractions ; qu'en se référant à la « jurisprudence habituelle », et s'abstenant ainsi de se prononcer au regard des éléments propres à l'espèce, la cour d'appel a violé les textes précités et le principe de l'individualisation de la peine ;
"alors, d'autre part, que la juridiction correctionnelle ne peut prononcer une peine d'emprisonnement sans sursis sans motiver expressément le choix de cette peine en fonction des circonstances de l'infraction et de la personnalité de son auteur ; qu'en se bornant à relever la gravité des faits et l'implication du prévenu, sans constater le moindre élément propre à sa personnalité, la cour d'appel a violé l'article 132-19, alinéa 2, du code de procédure pénale" ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a prononcé une peine d'emprisonnement sans sursis à l'égard des prévenus Samir X... et Boualem X... par des motifs qui satisfont aux exigences de l'article 132-19 du code pénal ;
D'où il suit que les moyens doivent être écartés ;
Sur le quatrième moyen de cassation, proposé pour Ali X... et Fazia X..., pris de la violation des articles 112-2, 222-49, 321-6, 321-6-1 et 321-10-1 du code pénal, 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt a ordonné la confiscation de biens immobiliers appartenant à Ali et Fazia X... et acquis à une date antérieure aux faits visés par la prévention ;
"aux motifs que sur l'alinéa 2 de l'article 222-49 du code pénal, la défense soulève le problème des immeubles qui n'ont pas été achetés au cours de la période de la prévention, et qui ont été parfois achetés dans une période très antérieure ; la possibilité offerte à la juridiction en matière de confiscation facultative trouve sa justification dans le second alinéa du même article et la particularité de cette disposition réside en ceci qu'elle permet la confiscation de biens qui ne sont pas le produit de l'infraction et qui peuvent avoir été acquis de manière licite, avant ou après la commission de celle-ci ; cette disposition concerne l'ensemble du patrimoine du délinquant ; l'appréhension du délit de non justification de ressources est délicate dans la mesure où ce délit a été abrogé dans sa version initiale, codifiée sous l'article 222-39-1 ; cela dit, il n'a pas été supprimé : il a été déplacé parce qu'étendu et donc aggravé sous l'article 312-6-1 du code pénal où l'on retrouve la peine complémentaire de confiscation facultative sous l'article 312-10-1, disposition équivalente sans aggravation ; la peine applicable étant toujours la plus douce, c'est bien l'article 222-39-1 qu'il faut conserver ; la cour confirme la confiscation des cinq immeubles appartenant aux parents X... sur la base du second aliéna de l'article 222-49 du code pénal ;
"alors, d'une part, qu'il résulte de l'article 321-10-1 du code pénal, issu de la loi du 23 janvier 2006, que la peine de confiscation ne peut être prononcée à l'égard d'une personne condamnée pour omission de justification de ressources alors qu'elle est en relation habituelle avec une ou plusieurs personnes se livrant au trafic de stupéfiants qu'à l'égard des biens dont l'intéressé n'a pu justifier l'origine ; que cette disposition, plus douce que celle de l'article 222-49 du code pénal, qui permettait la confiscation de tous les biens du condamné sans restriction, et de ce fait seule applicable aux faits de la prévention, suppose que les biens dont l'origine n'a pu être justifiée aient été acquis à l'aide de produits des infractions visées par la prévention ; que, dès lors, en ordonnant la confiscation de l'ensemble des immeubles appartenant à Ali et Fazia X..., y compris ceux acquis avant les faits visés par la prévention, la cour d'appel a violé les articles 321-10-1 et 112-2 du code pénal ;
"alors, d'autre part, que le délit de non justification de ressources étant incriminé, depuis l'entrée en vigueur de la loi du 23 janvier 2006, par l'article 321-6-1 du même code, seules les dispositions de l'article 321-10-1, qui renvoient expressément à l'article 321-6-1 précité, sont applicables pour le prononcé de la peine de confiscation, à l'exclusion des dispositions de l'article 222-49 du même code, lesquelles ne renvoient pas à l'article 321-6-1 mais à un article 222-39-1 inexistant depuis son abrogation par la loi du 23 janvier 2006 précitée ; qu'en retenant, sur le fondement de l'article 222-49 précité, que l'ensemble des biens du condamné pouvait être confisqué, là où l'article 321-10-1 ne vise que les biens dont l'origine n'a pu être justifiée, la cour d'appel a violé lesdites dispositions" ;
Attendu que l'arrêt, après avoir déclaré Ali et Fazia X... coupables de non-justification de ressources tout en étant en relations habituelles avec des personnes se livrant à un trafic de stupéfiants, infraction pour laquelle est encourue la peine complémentaire de la confiscation de tout ou partie des biens du condamné, prononce à l'encontre de ces prévenus, en application de l'article 222-49, alinéa 2 du code pénal, la confiscation de cinq immeubles leur appartenant ;
Attendu qu'en cet état, et dès lors que les dispositions de l'article précité sont de portée équivalente à celles, aujourd'hui applicables, de l'article 321-10-1, alinéa 2, du même code, qui permet le prononcé, à l'encontre des auteurs du délit de non-justification de ressources, des peines complémentaires encourues pour les crimes ou délits commis par les personnes avec lesquelles ils étaient en relations habituelles, la cour d'appel a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être admis ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE les pourvois ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Cotte président, M. Bayet conseiller rapporteur, M. Dulin conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Lambert ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 07-81247
Date de la décision : 20/02/2008
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

PEINES - Peines complémentaires - Confiscation - Confiscation spéciale - Confiscation de biens immobiliers - Trafic de stupéfiants - Non-justification de ressources d'une personne en relation avec le trafic - Dispositions applicables - Portée

CONFISCATION - Confiscation spéciale - Confiscation de biens immobiliers - Trafic de stupéfiants - Non-justification de ressources d'une personne en relation avec le trafic - Dispositions applicables - Portée

Les dispositions de l'article 222-49, alinéa 2, du code pénal, non abrogées, sont de portée équivalente à celles de l'article 321-10-1, alinéa 2, dudit code, en sa rédaction issue de la loi du 23 janvier 2006, en ce que ces dernières permettent le prononcé à l'encontre des auteurs du délit de non-justification de ressources des peines complémentaires encourues pour les crimes ou délits commis par les personnes avec lesquelles ils étaient en relation habituelle (notamment la confiscation de biens immobiliers appartenant à ces derniers)


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Douai, 20 décembre 2006


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 20 fév. 2008, pourvoi n°07-81247, Bull. crim. criminel 2008 N° 47 p. 216
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2008 N° 47 p. 216

Composition du Tribunal
Président : M. Cotte
Avocat général : M. Finielz
Rapporteur ?: M. Bayet
Avocat(s) : SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2008:07.81247
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