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29/04/2024 | FRANCE | N°23VE01192

France | France, Cour administrative d'appel de VERSAILLES, 2ème chambre, 29 avril 2024, 23VE01192


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



L'association d'aide aux maîtres d'ouvrage individuels (AAMOI) a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 24 avril 2018 par lequel la préfète de l'Essonne lui a retiré l'agrément, qui lui avait été délivré en tant qu'association de défense des consommateurs, sur le fondement des articles L. 811-1 et L. 811-2 du code de la consommation.



Par un jugement n° 1804495 du 2 décembre 2019, le tribunal administratif de Versailles

a rejeté cette demande.



Procédure devant la cour :



Par une requête, enregistrée ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association d'aide aux maîtres d'ouvrage individuels (AAMOI) a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 24 avril 2018 par lequel la préfète de l'Essonne lui a retiré l'agrément, qui lui avait été délivré en tant qu'association de défense des consommateurs, sur le fondement des articles L. 811-1 et L. 811-2 du code de la consommation.

Par un jugement n° 1804495 du 2 décembre 2019, le tribunal administratif de Versailles a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée sous le n° 19VE04112, le 16 décembre 2019, et un mémoire complémentaire, enregistré le 26 avril 2021, l'AAMOI, représentée par la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, a demandé à la cour :

1°) de ne pas admettre l'intervention de la société Maisons Pierre ;

2°) d'annuler ce jugement et cet arrêté ;

3°) et de mettre à la charge de l'Etat et de la société Maisons Pierre la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- la société Maisons Pierre ne justifie pas d'un intérêt suffisant à intervenir ;

- le jugement est irrégulier faute de comporter des visas suffisants et une analyse suffisante des écritures des parties ;

- il est irrégulier faute de comporter la signature manuscrite des magistrats l'ayant rendu ;

- le tribunal administratif de Versailles a dénaturé les pièces du dossier et entaché son jugement d'erreurs de droit ;

- l'arrêté est intervenu en méconnaissance des dispositions de l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration ;

- le retrait de l'agrément délivré tacitement est intervenu au-delà du délai de quatre mois

- en vertu des dispositions des articles L. 811-1, R. 811-1 et R. 811-2 du code de la consommation, l'appréciation du nombre suffisant d'adhérents ne pouvait se faire dans le seul cadre territorial de l'agrément mais dans le cadre territorial d'action de l'association, soit le territoire national ;

- la circonstance que M. Vennetier, président honorifique de l'association, aurait exercé une fonction décisionnaire en son sein, ne pouvait justifier le retrait de l'agrément délivré à l'association ;

- le lieu de l'activité réel de l'association n'étant pas une condition posée par le code de la consommation, le préfet ne pouvait s'y référer pour prendre la décision attaquée ;

- à supposer que l'appréciation du nombre suffisant d'adhérents doive être faite au niveau local, elle dispose de 157 adhérents, ce qui constitue un nombre suffisant ;

- en tout état de cause, c'est à tort qu'il a été estimé que le lieu de l'activité réel de l'association était l'Ille-et-Vilaine, alors que son activité se situe sur l'ensemble du territoire national et notamment, de manière significative, dans le département de l'Essonne ;

- elle remplit la condition d'indépendance à l'égard de toute forme d'activité professionnelle.

Par un mémoire en intervention, enregistré le 9 avril 2020, M. A... B..., la SAS Groupe Teber Avenir et la société SFMI, représentés par Me Plunian, avocat, ont demandé à la cour d'admettre leur intervention, de rejeter la requête d'appel ou, à titre subsidiaire, de réformer le jugement et d'annuler l'agrément tacite dont bénéficie l'association requérante, et de mettre à la charge de l'Etat et de l'AAMOI une somme de 6 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que leur intervention est recevable et que les moyens soulevés par l'AAMOI ne sont pas fondés.

Par un mémoire en intervention, enregistré le 3 décembre 2020, la société Maisons Pierre, représentée par Me Bluteau, avocat, a demandé à la cour de rejeter la requête.

Elle soutient que les moyens soulevés par l'AAMOI ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 28 avril 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance a conclu au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens ne sont pas fondés.

Par une lettre datée du 12 avril 2021 et un mémoire en intervention enregistré le 27 mai 2021, la caisse de garantie immobilière du bâtiment (CGI Bat), représentée par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, a demandé à la cour d'admettre son intervention et de rejeter la requête.

Elle soutient qu'elle justifie d'un intérêt à intervenir et que les moyens soulevés par l'AAMOI ne sont pas fondés.

Par un mémoire complémentaire enregistré le 27 mai 2021, M. A... B..., la SAS Groupe Teber Avenir et la société SFMI, représentés par Me Plunian, avocat, ont conclu aux mêmes fins par les mêmes moyens.

Par un mémoire complémentaire, enregistré le 4 juin 2021, qui a été communiqué le 11 septembre 2023, l'AAMOI a demandé en outre à la cour, sans invoquer de nouveaux moyens :

1°) de ne pas admettre les interventions de M. A... B..., la SAS Groupe Teber Avenir et la société SFMI et de la CGI Bat ;

2°) et de mettre à la charge de l'Etat, de la société Maisons Pierre, de M. A... B..., la SAS Groupe Teber et la société SFMI et de la CGI Bat une somme de 4 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un arrêt n° 19VE04112 du 29 juin 2021, la cour administrative d'appel de Versailles a admis les interventions de M. A... B..., de la SAS Groupe Teber Avenir, de la société SFMI, de la société Maisons Pierre et de la CGI Bat et rejeté la requête de l'AAMOI et le surplus des conclusions présentées par les autres parties au litige.

Procédure devant le Conseil d'Etat :

Par une décision n° 456015 du 2 juin 2023, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a, saisi d'un pourvoi présenté par l'AAMOI, annulé cet arrêt et a renvoyé l'affaire devant la cour administrative d'appel de Versailles.

Procédure devant la cour après renvoi du Conseil d'Etat :

Par trois mémoires, enregistrés le 17 juillet 2023 et les 5 janvier et 22 mars 2024, l'AAMOI, représentée par la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, conclut aux mêmes fins que dans le cadre de ses précédentes écritures, sans invoquer de nouveaux moyens.

Par un mémoire, enregistré le 22 août 2023, la CGI Bat, représentée par la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, a conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de l'AAMOI la somme de 3 000 euros à lui verser sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par l'AAMOI ne sont pas fondés.

Par un mémoire, enregistré le 13 septembre 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Il renvoie à ses écritures produites devant la cour administrative d'appel de Versailles sous le n° 19VE04112 ainsi que devant le Conseil d'Etat.

Par un mémoire, enregistré le 5 décembre 2023, la société Maisons Pierre, représentée par Me de Margerie, avocat, conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que les moyens soulevés par l'AAMOI ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 14 mars 2024, la clôture d'instruction a été fixée au 29 mars 2024, en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la consommation ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Even,

- les conclusions de M. Frémont, rapporteur public,

- les observations de Me Rottier, de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, pour l'association d'aide aux maitres d'ouvrage individuels, de Me André, de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, pour la Caisse de Garantie Immobilière du Bâtiment, et de Me de Margerie pour la société Maisons Pierre.

Considérant ce qui suit :

1. L'AAMOI, association à but non lucratif créée en 2001 et spécialisée dans les contrats de construction de maisons individuelles, a été agréée par arrêté préfectoral du 6 janvier 2006 en qualité d'association de défense des consommateurs. Par arrêté du préfet de l'Essonne du 7 décembre 2010, son agrément départemental a été renouvelé pour une période de cinq ans. Par une demande du 29 mai 2015, l'association a sollicité le renouvellement de cet agrément. En l'absence de réponse à cette demande, dont l'administration avait accusé réception le 8 juin 2015, un agrément tacite est intervenu le 8 décembre 2015, à l'expiration du délai de six mois prévu par l'article R. 811-5 du code de la consommation. Toutefois, par arrêté du 24 avril 2018, la préfète de l'Essonne a, après avis du 28 mars 2018 de la procureure générale près la cour d'appel de Paris, procédé au retrait de cet agrément tacite, sur le fondement de l'article R. 811-7 du code de la consommation. L'association a saisi le tribunal administratif de Versailles tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de cet arrêté. Par un jugement en date du 2 décembre 2019, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande. Par un arrêt n° 19VE04112 du 29 juin 2021, la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté sa requête tendant à l'annulation de ce jugement. Par une décision n° 456015 du 2 juin 2023, le Conseil d'Etat, saisi d'un pourvoi présenté par l'AAMOI et statuant au contentieux, a annulé l'arrêté de la cour administrative d'appel de Versailles du 29 juin 2021 et a renvoyé l'affaire devant la cour.

Sur les interventions de M. A... B..., la SAS Groupe Teber Avenir, la société SFMI, la société Maisons Pierre et la CGI Bat :

2. M. A... B... est adhérent de l'association requérante. La SAS Groupe Teber Avenir, la société SFMI et la société Maisons Pierre ont pour secteur d'activité la construction de maisons individuelles. La CGI Bat est une société qui a pour objet la délivrance de garanties de livraison aux constructeurs de maisons individuelles et de garanties financières d'achèvement aux promoteurs. Par suite ils justifient tous d'un intérêt pour intervenir au soutien du maintien de la décision litigieuse.

Sur la légalité de l'arrêté de la préfète de l'Essonne du 24 avril 2018 :

3. Aux termes de l'article L. 811-1 du code de la consommation : " Les associations de défense des consommateurs peuvent être agréées après avis du ministère public. / Les conditions dans lesquelles ces associations peuvent être agréées compte tenu de leur représentativité sur le plan national ou local ainsi que les conditions de retrait de cet agrément sont fixées par décret. ". Aux termes du premier alinéa de l'article L. 811-2 du même code : " L'agrément ne peut être accordé qu'aux associations indépendantes de toutes formes d'activités professionnelles. ". Aux termes du premier alinéa de l'article L. 621-1 du même code : " Les associations régulièrement déclarées ayant pour objet statutaire explicite la défense des intérêts des consommateurs peuvent, si elles ont été agréées à cette fin en application de l'article L. 811-1, exercer les droits reconnus à la partie civile relativement aux faits portant un préjudice direct ou indirect à l'intérêt collectif des consommateurs ". L'article R. 811-1 du même code dispose que : " L'agrément des associations de défense des consommateurs prévu à l'article L. 811-1 peut être accordé à toute association : / 1° Qui justifie à la date de la demande d'agrément d'une année d'existence à compter de sa déclaration ; / 2° Qui, pendant cette année d'existence, justifie d'une activité effective en vue de la défense des intérêts des consommateurs, appréciée notamment en fonction de la réalisation et de la diffusion de publications de la tenue de réunions d'information et de permanences ; / 3° Qui réunit, à la date de la demande d'agrément, un nombre de membres cotisant individuellement : / a) Au moins égal à 10 000 pour les associations nationales, cette condition pouvant ne pas être exigée pour les associations se livrant à des activités de recherche et d'analyse de caractère scientifique ; / b) Suffisant, eu égard au cadre territorial de leur activité, pour les associations locales, départementales ou régionales. / Lorsque l'association a une structure fédérale ou confédérale, il est tenu compte du nombre total de cotisants des associations la constituant. ". L'article R. 811-2 du même code dispose que : " L'agrément des associations nationales est accordé par arrêté conjoint du ministre chargé de la consommation et du ministre de la justice. Il est publié au Journal officiel de la République française. / L'agrément des associations locales, départementales ou régionales est accordé par arrêté du préfet du département dans lequel l'association a son siège social. Il est publié au Recueil des actes administratifs. / L'avis du ministère public prévu à l'article L. 811-1 est donné par le procureur général près la cour d'appel dans le ressort de laquelle l'association a son siège. / L'agrément est accordé pour cinq années. Il est renouvelable dans les mêmes conditions que l'agrément initial. ". L'article R. 811-7 du même code dispose que : " L'agrément peut être retiré après avis du procureur général, lorsque l'association n'a plus le nombre d'adhérents requis pour son agrément, lorsqu'elle ne peut plus justifier de l'activité définie à l'article R. 811-1 ou lorsqu'il est établi qu'elle n'est plus indépendante de toutes formes d'activités professionnelles, à l'exception des associations émanant de sociétés coopératives mentionnées à l'article L. 811-2. / L'association doit être au préalable mise à même de présenter ses observations. ".

4. Il ressort des termes mêmes de l'arrêté contesté que pour prononcer le retrait, au sens des dispositions précitées de l'article R. 811-7 du code de la consommation, de l'agrément délivré tacitement à l'AAMOI le 8 décembre 2015, la préfète de l'Essonne s'est fondée sur trois motifs tirés de ce que l'association ne justifierait pas réunir un nombre d'adhérents suffisants domiciliés en Essonne et à jour de cotisation, de ce que son activité réelle aurait lieu en Ille-et-Vilaine et non en Essonne, et de ce qu'elle ne respecterait plus la condition d'indépendance à l'égard de toutes formes d'activités professionnelles.

5. En premier lieu, la circonstance, à la supposer établie, que l'activité principale de l'AAMOI aurait lieu en Ille-et-Vilaine et non sur le territoire du département de l'Essonne, n'est pas au nombre des motifs énumérés par l'article R. 811-7 du code de la consommation, susceptibles de justifier le retrait au sens de ces dispositions de l'agrément local accordé à une association de défense des consommateurs.

6. En deuxième lieu, si l'AAMOI soutient que l'appréciation de son nombre d'adhérents devait être effectuée au regard du champ territorial de son action, soit l'ensemble du territoire national, il résulte de la combinaison des dispositions précitées des articles L. 811-1, R. 811-1 et R. 811-2 du code de la consommation que l'agrément est délivré soit par arrêté interministériel, pour le cas d'une association de défense des consommateurs de portée nationale de plus de 10 000 membres cotisant individuellement, soit par arrêté du préfet du département dans lequel l'association, dite locale, départementale ou régionale, a son siège social, et que dans ce cas, la condition tenant au nombre de cotisants de l'association doit s'analyser dans le champ territorial de l'agrément qu'elle sollicite.

7. En l'espèce, il est constant que l'AAMOI ne justifiait pas à la date de la décision attaquée du seuil de 10 000 adhérents exigé pour obtenir l'agrément réservé aux associations de portée nationale. Elle ne pouvait donc prétendre qu'à un agrément local, dont elle a d'ailleurs sollicité le renouvellement auprès de la préfète de l'Essonne. Cette dernière a donc pu légalement examiner, dans le cadre de la procédure précédant la décision contestée de retrait au sens des dispositions de l'article R. 811-7 du code de la consommation, le nombre de cotisants de cette association à jour de cotisations sur le territoire du département de l'Essonne, qui s'y était vue délivrer ses deux premiers agréments locaux en 2006 puis en 2010 alors qu'elle n'y comptait respectivement que 47 et 84 adhérents. Ni le préfet, ni la procureure générale près la cour d'appel de Paris, dans son avis rendu le 28 mars 2018 dans le cadre de cette procédure de retrait, n'ont contesté la véracité du chiffre de 120 adhérents à jour de cotisations sur le territoire du département de l'Essonne, allégué par l'association, qui est par nature la seule à disposer de cette information, et n'est au surplus remis en cause par aucun autre élément du dossier. Contrairement à ce qu'a estimé le préfet par sa décision de retrait, ce nombre est suffisant au regard des dispositions applicables.

8. En dernier lieu, il résulte des articles L. 811-1, L. 811-2, L. 621-1 et R. 811-7 du code de la consommation qu'une association de défense des consommateurs ne peut obtenir et conserver l'agrément prévu à l'article L. 811-1 du code de la consommation, lequel fonde sa capacité à se constituer partie civile en application de l'article L. 621-1 du même code, qu'à la condition de présenter des garanties d'indépendance à l'égard de toutes formes d'activités professionnelles. Il appartient à l'autorité compétente de s'assurer, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, que l'association qui sollicite la délivrance ou est titulaire d'un tel agrément justifie, eu égard à ses statuts, ses modalités d'organisation et ses conditions de fonctionnement, d'une indépendance à l'égard a) non seulement d'opérateurs économiques susceptibles de porter atteinte aux intérêts des consommateurs que l'association a pour objet de défendre, b) mais aussi, ainsi qu'il résulte de la lettre même des articles L. 811-2 et R. 811-7 de ce code et de leur objet, de toutes autres formes d'activités professionnelles.

9. S'il ressort des pièces du dossier que le président d'honneur de l'AAMOI est le père de l'associée-fondatrice d'un cabinet d'avocats qui figure dans une liste de professionnels recommandés par l'association, qui est très régulièrement mandaté par elle dans les litiges l'opposant à des constructeurs ou à la CGI Bat et auquel il est souvent fait appel pour donner des conférences ou des consultations au siège de l'association, ces circonstances, alors que l'AAMOI mène exclusivement une action désintéressée de soutien aux maîtres d'ouvrage individuels et que ce cabinet d'avocats, spécialisé en droit de la construction, n'est pas le seul dont les services étaient recommandés, ne justifient pas légalement le retrait, au sens des dispositions de l'article R. 811-7 du code de la consommation, de l'agrément de cette association au motif qu'elle ne respecterait plus la condition d'indépendance à l'égard de toutes formes d'activités professionnelles prévue aux articles L. 811-2 et R. 811-7 du code de la consommation.

10. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner la régularité du jugement attaqué ni les autres moyens dirigés contre l'arrêté contesté, l'AAMOI est fondée à soutenir qu'en prononçant par l'arrêté contesté du 24 avril 2018 le retrait de l'agrément dont elle bénéficiait comme association de défense des consommateurs, au sens des dispositions de l'article R. 811-7 du code de la consommation, la préfète de l'Essonne a méconnu les dispositions précitées de l'article R. 811-7 du code de la consommation. Par suite, elle est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à son annulation.

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mises à la charge de l'AAMOI, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, les sommes demandées par les intervenants au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens. Il y a lieu en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros à l'AAMOI au titre de ces mêmes dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : Les interventions de M. A... B..., la SAS Groupe Teber Avenir, la société SFMI, la société Maisons Pierre et la CGI Bat sont admises.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Versailles n° 1804495 du 2 décembre 2019 et l'arrêté du 24 avril 2018 par lequel la préfète de l'Essonne a retiré l'agrément de l'AAMOI sont annulés.

Article 3 : L'Etat versera à l'AAMOI une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions présentées par les intervenants sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à l'association d'aide aux maîtres d'ouvrage individuels, au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, à M. A... B..., à la société par actions simplifiées Groupe Teber Avenir, à la société SFMI, à la société Maisons Pierre et à la caisse de garantie immobilière du bâtiment.

Copie en sera adressée au préfet de l'Essonne.

Délibéré après l'audience du 11 avril 2024, à laquelle siégeaient :

M. Even, président de chambre,

Mme Aventino, première conseillère,

M. Cozic, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 avril 2024.

Le président-rapporteur,

B. EVEN

L'assesseure la plus ancienne,

B. AVENTINO

La greffière,

C. RICHARD

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

La greffière,

2

N° 23VE01192


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de VERSAILLES
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 23VE01192
Date de la décision : 29/04/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Associations et fondations - Régime juridique des différentes associations.

14 Commerce - industrie - intervention économique de la puissance publique.


Composition du Tribunal
Président : M. EVEN
Rapporteur ?: M. Bernard EVEN
Rapporteur public ?: M. FREMONT
Avocat(s) : DE MARGERIE STANISLAS

Origine de la décision
Date de l'import : 05/05/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-04-29;23ve01192 ?
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