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12/05/2021 | FRANCE | N°19VE00545

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 6ème chambre, 12 mai 2021, 19VE00545


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par deux demandes, enregistrées sous les nos 1503636 et 1703251, Mme H... et M. C... E... ont demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler les arrêtés du 9 avril 2015 et du 11 novembre 2013 par lesquels le maire de la commune des Mesnuls a accordé à M. G... deux permis de construire modificatifs relatifs à la construction d'une maison individuelle sur un terrain situé 49 bis, rue des Essarts.

Par un jugement n° 1503636, 1703251 du 18 décembre 2018, le tribunal administratif de Versaill

es a rejeté leurs demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête et de...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par deux demandes, enregistrées sous les nos 1503636 et 1703251, Mme H... et M. C... E... ont demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler les arrêtés du 9 avril 2015 et du 11 novembre 2013 par lesquels le maire de la commune des Mesnuls a accordé à M. G... deux permis de construire modificatifs relatifs à la construction d'une maison individuelle sur un terrain situé 49 bis, rue des Essarts.

Par un jugement n° 1503636, 1703251 du 18 décembre 2018, le tribunal administratif de Versailles a rejeté leurs demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires complémentaires, enregistrés les 15 février, 28 mars et 17 décembre 2019 et 29 septembre et 27 novembre 2020, M. et Mme E..., représentés par Me Azoulay, avocat, demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Versailles.

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les arrêtés des 9 avril 2015 et 11 novembre 2013.

3°) de mettre à la charge solidairement de M. G... et de la commune des Mesnuls le versement de la somme de 4 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

S'agissant de l'arrêté du 11 novembre 2013 :

- le permis de construire modificatif n'a pas été régulièrement affiché ;

- la continuité de l'affichage pendant deux mois n'est pas démontrée ;

- la visibilité de l'affichage n'est pas établie ;

- le panneau d'affichage est lacunaire et ne comporte pas la mention des voies et des délais de recours ;

- M. G... n'a pas produit la copie du premier permis modificatif, à l'appui de la requête dirigée contre le second et ils ne peuvent donc être regardés comme ayant eu connaissance acquise de cette première décision ;

- le projet méconnaît l'article N 10 du plan local d'urbanisme ;

- il méconnaît l'article N 4 du plan local d'urbanisme ;

- il méconnaît aussi l'article N 11 du plan local d'urbanisme ;

- le projet méconnaît également les articles N 1 et N2 du plan local d'urbanisme.

S'agissant de l'arrêté du 9 avril 2015 :

- ils justifient d'un intérêt pour agir en leur qualité de voisin immédiat du projet litigieux ;

- le permis de construire modificatif constitue un bouleversement de l'économie du projet ;

- ce projet se situe en zone naturelle ;

- les modifications opérées par le second permis de construire sont importantes et ont eu pour effet de générer l'écoulement de boues sur leur terrain, de créer des vues et d'augmenter son impact ;

- le pétitionnaire aurait dû solliciter un nouveau permis ;

- le projet méconnaît l'article N 10 du plan local d'urbanisme ;

- le projet méconnaît l'article N 4 du plan local d'urbanisme ;

- il méconnaît aussi l'article N 11 du plan local d'urbanisme ;

- il méconnaît également les articles N 1 et N2 du plan local d'urbanisme.

......................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. F...,

- les conclusions de Mme Margerit, rapporteur public,

- et les observations de Me D... pour M. et Mme E..., de Me A... pour M. G... et de Me B... pour la commune des Mesnuls.

Considérant ce qui suit :

1. Par arrêté du 23 août 2013, le maire de la commune de la commune des Mesnuls a accordé à M. G... un permis de construire tendant à la réalisation d'une maison individuelle en R+comble, sur un terrain situé 49 bis, rue des Essarts. Ce projet a fait l'objet de deux permis modificatifs délivrés par le maire des Mesnuls, par arrêtés des 11 octobre 2013 et 9 avril 2015. Par une première demande, enregistrée sous le n° 1503636, les époux E... ont demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler le second permis de construire modificatif, du 9 avril 2015, puis par une seconde demande, enregistrée sous le n° 1703251,les époux E... ont demandé au même tribunal d'annuler le premier permis modificatif, du 11 octobre 2013. Les époux E... relèvent appel du jugement n° 1503636, 1703251 du 18 décembre 2018, par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté leurs demandes.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué et sans qu'il soit besoin d'examiner la recevabilité de la requête d'appel :

En ce qui concerne l'arrêté du 11 novembre 2013 :

2. D'une part, le principe de sécurité juridique, qui implique que ne puissent être remises en cause sans condition de délai des situations consolidées par l'effet du temps, fait obstacle à ce que puisse être contesté indéfiniment par les tiers un permis de construire, une décision de non-opposition à une déclaration préalable, un permis d'aménager ou un permis de démolir. Dans le cas où l'affichage du permis ou de la déclaration, par ailleurs conforme aux prescriptions de l'article R. 424-15 du code de l'urbanisme, n'a pas fait courir le délai de recours de deux mois prévu à l'article R. 600-2, faute de mentionner ce délai conformément à l'article A. 424-17, un recours contentieux doit néanmoins, pour être recevable, être présenté dans un délai raisonnable à compter du premier jour de la période continue de deux mois d'affichage sur le terrain. En règle générale et sauf circonstance particulière dont se prévaudrait le requérant, un délai excédant un an ne peut être regardé comme raisonnable. Il résulte en outre de l'article R. 600-3 du code de l'urbanisme qu'un recours présenté postérieurement à l'expiration du délai qu'il prévoit n'est pas recevable, alors même que le délai raisonnable mentionné ci-dessus n'aurait pas encore expiré.

3. D'autre part, dans le cas où la preuve de l'affichage régulier du permis faisant courir le délai de recours prévu à l'article R. 600-2 n'est pas rapportée, mais où il est démontré que le tiers a reçu une copie intégrale du permis de construire attaqué et ainsi eu connaissance de ses caractéristiques principales, le recours contentieux doit néanmoins, pour être recevable, être présenté dans le délai raisonnable à compter de la date à laquelle cette notification a été effectuée.

4. Les époux E... soutiennent que leur requête ne serait pas tardive, dès lors que le pétitionnaire ne démontrerait pas la régularité, la continuité et la visibilité de l'affichage du permis de construire modificatif et que le panneau comportait des mentions lacunaires, en n'indiquant pas, notamment, les voies et les délais de recours. Toutefois, M. G... a produit un procès verbal d'huissier en date du 18 février 2013 qui atteste de l'affichage sur le portail de la propriété du pétitionnaire du panneau relatif au permis modificatif, à côté de celui du panneau d'affichage du permis initial, de manière visible depuis la voie publique à compter du 18 octobre 2013. Le panneau du permis modificatif mentionnait la nature précise des travaux, le rappel de la surface et de la hauteur autorisée, le numéro de permis et le lieu où il pouvait être consulté, ainsi que le nom du bénéficiaire. En outre, ces mentions contenues dans le panneau d'affichage du permis de construire modificatif complètent celles contenues dans le panneau d'affichage du permis initial. M. et Mme E... ne versent aucun élément de nature à contredire ce procès verbal et s'il ressort des pièces du dossier que le panneau d'affichage du permis modificatif ne comportait pas la mention des voies et des délais de recours, cette circonstance ne s'opposait pas à ce que les appelants forment leur recours dans le délai raisonnable qui est en principe d'un an. Au surplus, il ressort tant des termes des courriers adressés par les époux E... le 7 mai 2014 au maire des Mesnuls et le 11 juillet 2014 au préfet des Yvelines, des termes de la plainte pénale avec constitution de partie civile en date du 17 novembre 2014, que de la requête n° 1503636 enregistrée au greffe du tribunal administratif de Versailles le 6 juin 2015 dirigée contre le second permis modificatif, du 9 avril 2015, qui décrivait les caractéristiques du premier permis de construire et qui comportait une partie du dossier de demande de ce permis de construire modificatif en pièce jointe, que les époux E... avaient connaissance acquise du premier permis de construire au plus tard au 6 juin 2015. Par suite, dans tous les cas, la requête enregistrée le 11 mai 2017 a été présentée au-delà du délai raisonnable durant lequel un recours pouvait être exercé. Par suite, les époux E... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté leur demande n° 1703251 en raison de sa tardiveté.

En ce qui concerne l'arrêté du 9 avril 2015 :

5. Aux termes de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme : " Une personne autre que l'Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager que si la construction, l'aménagement ou les travaux sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement ou pour lequel elle bénéficie d'une promesse de vente, de bail, ou d'un contrat préliminaire mentionné à l'article L. 261-15 du code de la construction et de l'habitation. ".

6. Il résulte de ces dispositions qu'il appartient, en particulier, à tout requérant qui saisit le juge administratif d'un recours pour excès de pouvoir tendant à l'annulation d'un permis de construire, de démolir ou d'aménager, de préciser l'atteinte qu'il invoque pour justifier d'un intérêt lui donnant qualité pour agir, en faisant état de tous éléments suffisamment précis et étayés de nature à établir que cette atteinte est susceptible d'affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de son bien. Il appartient dans tous les cas au défendeur, s'il entend contester l'intérêt à agir du requérant, d'apporter tous éléments de nature à établir que les atteintes alléguées sont dépourvues de réalité. Le juge de l'excès de pouvoir apprécie la recevabilité de la requête au vu des éléments ainsi versés au dossier par les parties, en écartant le cas échéant les allégations qu'il jugerait insuffisamment étayées mais sans pour autant exiger de l'auteur du recours qu'il apporte la preuve du caractère certain des atteintes qu'il invoque au soutien de la recevabilité de celui-ci.

7. Eu égard à sa situation particulière, le voisin immédiat justifie, en principe, d'un intérêt à agir lorsqu'il fait état devant le juge, qui statue au vu de l'ensemble des pièces du dossier, d'éléments relatifs à la nature, à l'importance ou à la localisation du projet de construction. Lorsque le requérant, sans avoir contesté le permis initial, forme un recours contre un permis de construire modificatif, son intérêt pour agir doit être apprécié au regard de la portée des modifications apportées par le permis modificatif au projet de construction initialement autorisé. Il en va de même lorsque le requérant a contesté le permis initial, mais que son recours contentieux a été rejeté.

8. En l'espèce, il est constant que M. et Mme E..., voisins immédiats du terrain d'assiette du projet, n'ont pas contesté le permis de construire initial délivré à M. G... le 23 août 2013. Par ailleurs, ainsi qu'il a été indiqué au point 4 ci-dessus, le recours intenté par M. et Mme E... contre le permis de construire modificatif délivré le 11 octobre 2013 doit être rejeté comme tardif.

9. Par ailleurs, il ressort des pièces du dossier que le permis initial délivré par le maire du Mesnuls fixait les principes architecturaux et la structure du projet, à savoir la construction d'une maison individuelle en R+combles, sur sous-sol partiel, en forme de L et implantée en partie basse du terrain, pour 295 m² de surface. Le premier permis modificatif se bornait à prévoir l'extension de la construction sur sa façade est pour 59 m² de surface, la modification de l'accès au sous-sol, des changements mineurs dans le nombre et la dimension des ouvertures et la modification de l'accès au garage et de l'emplacement des places de stationnement. Pour sa part, le second permis modificatif litigieux, apporte une modification mineure d'implantation de la construction par rotation de 3 degrés vers l'ouest, en éloignant d'un mètre supplémentaire environ la construction de la limite séparative de la propriété de M. et de Mme E... située au nord. Par ailleurs ce second permis modificatif modifie les ouvertures sur la façade est du projet, qui ne se situe pas en vis-à-vis de la propriété des appelants, tout en prévoyant des changements mineurs de la façade nord, par le remplacement d'une baie par une porte et un agrandissement peu important d'un escalier d'accès. Enfin, le permis modificatif réduit légèrement l'exhaussement du terrain, pour un mètre environ, ce qui augmente très faiblement la hauteur du projet après travaux.

10. Il résulte de ce qui précède que les modifications apportées par les permis modificatifs n'affectent pas la conception générale de la construction telle qu'elle a été initialement autorisée et ne bouleversent donc pas l'économie générale du projet initial. En outre, le second permis modificatif litigieux n'a pas pour effet de créer des vues directes, alors que la distance séparant la construction de la limite séparative nord est portée de 13,57 mètres à 15 mètres, que la distance séparant la construction litigieuse au bâtiment des époux E... est de plus de 30 mètres et qu'il existe une barrière végétale au niveau de cette limite. En outre, si M. et Mme E... font valoir que leurs troubles résulteraient des écoulements de boues sur leur terrain en raison des travaux, d'une part, ces désagréments résultent des conditions d'exécution des travaux et, d'autre part, il ne ressort pas du procès verbal d'huissier en date du 15 février 2016 qu'ils versent à l'appui de leurs allégations, que la présence de boues qui s'écoulent au niveau de la limite séparative résulterait des modifications autorisées par le second permis de construire modificatif attaqué. Par suite, il ressort de l'ensemble des pièces du dossier et, notamment, des éléments avancés par les défendeurs qui contredisent les atteintes allégués par M. et Mme E..., que les modifications autorisées par le permis modificatif du 9 avril 2015 ne sont pas susceptibles d'affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de la propriété des appelants. Par suite, bien qu'étant voisins immédiats, M. et Mme E... ne justifient d'aucun intérêt pour agir au regard de la portée des modifications apportées par le permis modificatif au projet de construction initialement autorisé. Dans ces conditions, M. et Mme E... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté leur demande enregistrée sous le n° 1503636 en raison d'un défaut d'intérêt pour agir.

11. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme E... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort, que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a rejeté leurs conclusions à fin d'annulation en raison de leurs irrecevabilités.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

12. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ".

13. La commune des Mesnuls et M. G... n'étant pas les parties perdantes, les conclusions présentées par M. et Mme E... tendant à mettre à leur charge une somme en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. et Mme E... une somme à verser aux défendeurs, en application de ces dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme E... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la commune des Mesnuls et par M. G... sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

N° 19VE00545


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 19VE00545
Date de la décision : 12/05/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Procédure - Introduction de l'instance - Intérêt pour agir.

Urbanisme et aménagement du territoire - Permis de construire.


Composition du Tribunal
Président : M. ALBERTINI
Rapporteur ?: M. Marc FREMONT
Rapporteur public ?: Mme MARGERIT
Avocat(s) : SCP FEDARC AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 25/05/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2021-05-12;19ve00545 ?
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