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27/09/2018 | FRANCE | N°18VE01330

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 5ème chambre, 27 septembre 2018, 18VE01330


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...B...a demandé au Tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 22 novembre 2017 par lequel le préfet de l'Essonne a ordonné son transfert vers l'Espagne, Etat désigné comme responsable de l'examen de sa demande d'asile.

Par un jugement n° 1708206 du 30 novembre 2017, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Versailles a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 17 avril 2018, MmeB..., représent

ée par Me Diawara, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° d'annuler, pour e...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...B...a demandé au Tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 22 novembre 2017 par lequel le préfet de l'Essonne a ordonné son transfert vers l'Espagne, Etat désigné comme responsable de l'examen de sa demande d'asile.

Par un jugement n° 1708206 du 30 novembre 2017, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Versailles a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 17 avril 2018, MmeB..., représentée par Me Diawara, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3° d'enjoindre au préfet de l'Essonne de lui délivrer un récépissé ;

4° de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil, Me Diawara, de la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- compte tenu de son état de santé, l'arrêté attaqué est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- eu égard à sa situation familiale, cet arrêté a été pris en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- cet arrêté, qui l'expose à être reconduite dans son pays d'origine, a été pris en méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. d'Haëm a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que MmeB..., ressortissante ivoirienne née le 2 mars 1989, relève appel du jugement du 30 novembre 2017 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 22 novembre 2017 par lequel le préfet de l'Essonne a ordonné son transfert vers l'Espagne, Etat désigné comme responsable de l'examen de sa demande d'asile ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant, d'une part, que le paragraphe 1 de l'article 29 du règlement n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 prévoit que le transfert du demandeur d'asile vers l'Etat membre responsable de l'examen de sa demande doit s'effectuer " dès qu'il est matériellement possible et, au plus tard, dans un délai de six mois à compter de l'acceptation par un autre État membre de la requête aux fins de prise en charge ou de reprise en charge de la personne concernée ou de la décision définitive sur le recours ou la révision lorsque l'effet suspensif est accordé conformément à l'article 27, paragraphe 3 " ; que, parmi les hypothèses visées au paragraphe 3 de cet article 27, figure au a) " le recours ou la révision [qui] confère à la personne concernée le droit de rester dans l'Etat membre concerné en attendant l'issue de son recours ou de sa demande de révision " ; que le paragraphe 2 de l'article 29 dispose, en outre, que : " Si le transfert n'est pas exécuté dans le délai de six mois, l'État membre responsable est libéré de son obligation de prendre en charge ou de reprendre en charge la personne concernée et la responsabilité est alors transférée à l'État membre requérant. Ce délai peut être porté à un an au maximum s'il n'a pas pu être procédé au transfert en raison d'un emprisonnement de la personne concernée ou à dix-huit mois au maximum si la personne concernée prend la fuite. " ;

3. Considérant, d'autre part, qu'aux termes du II de l'article L. 742-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable au présent litige : " Lorsqu'une décision de placement en rétention prise en application de l'article L. 551-1 ou d'assignation à résidence prise en application de l'article L. 561-2 est notifiée avec la décision de transfert, l'étranger peut, dans les quarante-huit heures suivant leur notification, demander au président du tribunal administratif l'annulation de la décision de transfert et de la décision d'assignation à résidence. / Il est statué sur ce recours selon la procédure et dans le délai prévus au III de l'article L. 512-1 (...). " ; qu'aux termes du second alinéa de l'article L. 742-5 du même code, dans sa rédaction applicable au présent litige : " La décision de transfert ne peut faire l'objet d'une exécution d'office (...), si une décision de placement en rétention prise en application de l'article L. 551-1 ou d'assignation à résidence prise en application de l'article L. 561-2 a été notifiée avec la décision de transfert, avant l'expiration d'un délai de quarante-huit heures, ni avant que le tribunal administratif ait statué, s'il a été saisi. " ;

4. Considérant qu'il résulte de la combinaison des dispositions précitées que l'introduction d'un recours devant le tribunal administratif contre la décision de transfert a pour effet d'interrompre le délai de six mois fixé à l'article 29 du règlement (UE) n° 604/2013, qui courait à compter de l'acceptation du transfert par l'Etat requis, délai qui recommence à courir intégralement à compter de la date à laquelle le tribunal administratif statue au principal sur cette demande, quel que soit le sens de sa décision ; que ni un appel ni le sursis à exécution du jugement accordé par le juge d'appel sur une demande présentée en application de l'article R. 811-15 du code de justice administrative n'ont pour effet d'interrompre ce nouveau délai ; que son expiration a pour conséquence qu'en application des dispositions du paragraphe 2 de l'article 29 du règlement précité, l'Etat requérant devient responsable de l'examen de la demande de protection internationale ;

5. Considérant qu'en l'espèce, Mme B...a présenté, le 3 août 2017, une demande d'asile auprès des services de la préfecture de l'Essonne ; que la comparaison du relevé décadactylaire de ses empreintes, effectué le même jour, avec le fichier Eurodac a établi qu'elles avaient déjà été relevées le 14 décembre 2016 par les autorités espagnoles ; que l'autorité préfectorale a saisi, le 9 août 2017, ces autorités d'une demande de prise en charge qui a été acceptée le 16 août suivant ; que, par l'arrêté en litige du 22 novembre 2017, le préfet de l'Essonne a ordonné le transfert de l'intéressée vers l'Espagne ; qu'il résulte de ce qui a été dit au point 4 que le délai de six mois imparti à l'administration pour procéder à ce transfert à compter de l'acceptation, le 16 août 2017, par les autorités espagnoles de la demande de prise en charge a été interrompu par la présentation devant le Tribunal administratif de Versailles, le 24 novembre 2017, de la demande de Mme B...tendant à l'annulation de l'arrêté ordonnant son transfert ; que ce délai de six mois a recommencé à courir à compter du jugement du 30 novembre 2017 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif a rejeté la demande de l'intéressée ; que, par ailleurs, il ne ressort d'aucune des pièces versées au dossier que ce délai aurait été prolongé, en application des dispositions précitées du paragraphe 2 de l'article 29 du règlement n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013, au motif d'un emprisonnement de l'intéressée ou au motif que celle-ci aurait pris la fuite ; qu'il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que la décision de transfert aurait été exécutée au cours de ce délai ; que, par suite, le délai de six mois ayant expiré le 30 mai 2018, l'Espagne a été libérée, en application des dispositions du paragraphe 2 de l'article 29 du règlement n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013, de son obligation de prendre en charge Mme B... et la responsabilité de l'examen de sa demande d'asile a été transférée, à cette date, à la France ; que, dès lors, les conclusions de la requête de Mme B...tendant à l'annulation du jugement du 30 novembre 2017 rejetant sa demande dirigée contre l'arrêté du 22 novembre 2017 ordonnant son transfert vers l'Espagne ainsi qu'à l'annulation de cette décision de transfert sont devenues sans objet ; qu'il n'y a pas lieu d'y statuer ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne une décision dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. " ;

7. Considérant qu'eu égard au motif ayant conduit la Cour à constater qu'il n'y a pas lieu à statuer sur les conclusions à fin d'annulation présentées par MmeB..., à savoir la circonstance que la France est désormais l'Etat membre responsable de l'examen de sa demande d'asile, le présent arrêt implique nécessairement que l'autorité préfectorale lui délivre l'attestation de demande d'asile prévue à l'article L. 741-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile afin de lui permettre d'introduire sa demande d'asile auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ; que, par suite, il y a lieu d'enjoindre au préfet de l'Essonne de délivrer à Mme B...cette attestation dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt ;

Sur les frais liés au litige :

8. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme au conseil de MmeB..., Me Diawara, sur le fondement des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

DÉCIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de Mme B...tendant à l'annulation du jugement du magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Versailles n° 1708206 du 30 novembre 2017 rejetant sa demande dirigée contre l'arrêté du préfet de l'Essonne du 22 novembre 2017 ordonnant son transfert vers l'Espagne, ainsi qu'à l'annulation de cette décision de transfert.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de l'Essonne de délivrer à Mme B...l'attestation de demande d'asile prévue à l'article L. 741-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, afin de lui permettre d'introduire sa demande d'asile auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme B...est rejeté.

3

N° 18VE01330


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 18VE01330
Date de la décision : 27/09/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

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Procédure - Incidents - Non-lieu - Existence.

Procédure - Jugements - Exécution des jugements - Prescription d'une mesure d'exécution.


Composition du Tribunal
Président : Mme SIGNERIN-ICRE
Rapporteur ?: M. Rudolph D'HAËM
Rapporteur public ?: Mme BONFILS
Avocat(s) : DIAWARA

Origine de la décision
Date de l'import : 09/10/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2018-09-27;18ve01330 ?
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