La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

14/12/2017 | FRANCE | N°13VE02671

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 6ème chambre, 14 décembre 2017, 13VE02671


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B...D...ont demandé au Tribunal administratif de Versailles de condamner la commune d'Achères à leur verser une indemnité totale de 275 315,62 euros, à parfaire, en réparation des préjudices matériels qu'ils estiment avoir subis à raison des agissements de ladite commune et correspondant, d'une part, aux pertes de loyers subies depuis le 1er avril 2008 en l'absence de location du bâtiment à usage commercial dont ils sont propriétaires et, d'autre part, à la perte des droits d'entrée correspo

ndants.

Par un jugement n° 1004411 du 28 mai 2013, le Tribunal administrati...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B...D...ont demandé au Tribunal administratif de Versailles de condamner la commune d'Achères à leur verser une indemnité totale de 275 315,62 euros, à parfaire, en réparation des préjudices matériels qu'ils estiment avoir subis à raison des agissements de ladite commune et correspondant, d'une part, aux pertes de loyers subies depuis le 1er avril 2008 en l'absence de location du bâtiment à usage commercial dont ils sont propriétaires et, d'autre part, à la perte des droits d'entrée correspondants.

Par un jugement n° 1004411 du 28 mai 2013, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et de nouveaux mémoires, enregistrés les 5 août 2013, 10 juin 2014, 27 mars 2015 et 30 mai 2016, M. et MmeD..., représentés par Me Ohana, avocat, demandent à la Cour, dans le dernier état de leurs écritures :

1° d'annuler ce jugement ;

2° de condamner la commune d'Achères à leur verser une indemnité totale de 447 166,39 euros, à parfaire, en réparation des préjudices matériels qu'ils estiment avoir subis à raison des agissements de ladite commune et correspondant, d'une part, aux pertes de loyers subies depuis le 1er avril 2008 en l'absence de location du bâtiment à usage commercial dont ils sont propriétaires et, d'autre part, à la perte des droits d'entrée correspondants ;

3° de mettre à la charge de la commune d'Achères le versement d'une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

M. et Mme D...soutiennent que :

- en incluant le local commercial dont ils sont propriétaires dans le périmètre de la ZAC " Coeur de ville ", alors que l'arrêté préfectoral du 5 mai 2008 déclarant ce projet d'utilité publique a été, dans cette mesure, annulé par l'arrêt n° 11VE02562 du 11 juin 2013, la commune d'Achères a commis une faute de nature à engager sa responsabilité ;

- en exerçant des pressions sur la Banque populaire pour qu'elle résilie, à compter du 31 mars 2008, le bail en vertu duquel elle occupait ce local commercial depuis le 1er avril 2005, puis sur le CIC afin qu'il renonce à louer celui-ci, la commune d'Achères a commis des fautes de nature à engager sa responsabilité ;

- de même, en rompant les négociations engagées afin qu'elle reprenne elle-même l'occupation de ce local commercial, la commune d'Achères a commis une faute de nature à engager sa responsabilité ;

- les fautes ainsi commises par la commune leur ont directement causé des préjudices matériels correspondant, d'une part, aux pertes de loyers qu'ils auraient dû percevoir, postérieurement au 1er avril 2008, et, d'autre part, à la perte du droit d'entrée que le CIC aurait dû leur verser, préjudices chiffrés à un total de 447 166,39 euros à parfaire.

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Toutain,

- les conclusions de M. Errera, rapporteur public,

- et les observations de Me Ohana, pour M. et MmeD..., et de MeC..., substituant MeA..., pour la commune d'Achères.

1. Considérant que M. et Mme D... sont notamment propriétaires, au

34-36 avenue de Stalingrad, à Achères, d'un local commercial situé sur la parcelle cadastrée BD n° 531, local dans lequel les intéressés avaient exploité une bijouterie, avant de le donner à bail, à compter du 1er avril 2005, à la Banque populaire Val de France, moyennant le versement par cette dernière d'un droit d'entrée de 110 000 euros et un loyer annuel de 36 000 euros hors taxe ; que la Banque populaire Val de France n'ayant pas obtenu de la commune d'Achères l'autorisation de réaliser les travaux nécessaires à l'installation de l'agence projetée dans ce local, qui avait entre temps été inclus dans le périmètre du projet de ZAC " Coeur de Ville " engagé par la commune, a résilié son bail à l'échéance triennale du 1er avril 2008 ; que, dans ce contexte, les époux D...et la commune d'Achères avaient engagé, dès le mois

d'octobre 2007, des négociations en vue que cette collectivité reprenne, aux mêmes conditions financières et pour une durée de six ans, la location de cet immeuble, afin de le sous-louer à l'exploitant d'un commerce alimentaire de proximité ; que, toutefois, les projets de bail et de protocole d'accord notifiés par M. et Mme D... à la commune d'Achères, le

7 mars 2008, n'ont pas été ratifiés par cette dernière ; que, par arrêté du 5 mai 2008, le préfet des Yvelines a déclaré d'utilité publique le projet de ZAC " Coeur de ville " et autorisé la société d'aménagement de la région de Rambouillet et du département des Yvelines (la SARRY 78), aménageur, à acquérir par voie d'expropriation les immeubles compris dans le périmètre de cette zone, lequel incluait notamment la parcelle BD n° 531 appartenant aux épouxD... ; qu'enfin, alors que ces derniers avaient conclu, le 10 mars 2009, une nouvelle promesse de bail commercial, pour le même local, avec le Crédit industriel et commercial, moyennant le versement d'un droit d'entrée de 80 000 euros et d'un loyer annuel de 36 000 euros hors taxe, sous condition suspensive que soit délivrée l'autorisation de réaliser les travaux alors envisagés, cet établissement bancaire, informé par la commune d'Achères de l'opération d'expropriation susmentionnée, a renoncé à son projet d'installation ; que M. et Mme D... ont alors demandé au Tribunal administratif de Versailles de condamner la commune d'Achères à les indemniser des préjudices financiers qu'ils estimaient avoir subis à raison de fautes qu'aurait commises cette dernière et correspondant, d'une part, aux pertes de loyers constatées depuis le 1er avril 2008, en l'absence de location de leur local commercial, et, d'autre part, à la perte des droits d'entrée correspondants ; que, par jugement n° 1004411 du 28 mai 2013, dont M. et Mme D... relèvent appel, ledit Tribunal a rejeté leur demande ;

Sur les conclusions indemnitaires :

2. Considérant, en premier lieu, que M. et Mme D... soutiennent que le maire d'Achères aurait exercé des pressions à l'égard de la Banque populaire Val de France, afin d'obtenir qu'elle renonce à implanter une agence dans le local commercial leur appartenant et résilie finalement son bail dans les conditions rappelées au point 1, en ayant illégalement opposé à la déclaration de travaux qu'elle avait souscrite, le 4 février 2005, une décision de sursis à statuer, par arrêté du 21 mai 2005, puis une décision d'opposition aux travaux ainsi déclarés, le 13 juillet 2006, au motif que ceux-ci méconnaissaient les prescriptions du plan d'occupation des sols régissant respectivement les aires de stationnement des véhicules et l'implantation des conteneurs à ordures ; que, toutefois, les explications et pièces fournies par les requérants, à l'occasion de la présente instance, ne permettent pas d'établir, comme ils le soutiennent, que les deux motifs ainsi opposés par le maire seraient erronés et, par suite, que les deux décisions des 21 mai 2005 et 13 juillet 2006 auraient été entachées d'illégalité ; qu'au demeurant, il résulte de l'instruction que la Banque populaire Val de France n'a pas introduit de recours à l'encontre de la première et s'est désistée de celui qu'elle avait formé à l'encontre de la seconde, ce dont le Tribunal administratif de Versailles a donné acte par un jugement n° 0608459 du 16 juin 2009 ; que, par ailleurs, M. et Mme D... ne démontrent pas davantage que la résiliation du bail susmentionné, intervenue par décision non motivée à l'échéance triennale du 1er avril 2008, aurait eu en réalité pour cause, non pas l'impossibilité pour la Banque populaire Val de France de réaliser légalement les travaux que nécessitait son installation dans leur local commercial, mais un comportement fautif de la part de la commune d'Achères, lequel ne saurait être déduit du seul fait que celle-ci avait alors proposé à cet établissement bancaire un autre choix d'implantation sur la commune, au sein d'une galerie marchande ; que, dans ces conditions, la faute ainsi alléguée par les requérants ne peut être tenue pour avérée ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aucune disposition ni aucun principe n'imposait à la commune d'Achères de reprendre elle-même en location le local commercial appartenant aux épouxD..., après que la Banque populaire Val de France a résilié son bail au

1er avril 2008 dans les conditions rappelées au point 2 ; que si des négociations avaient été ouvertes, en ce sens, à compter du mois d'octobre 2007, et donné lieu à la rédaction par les requérants de propositions de contrat, en mars 2008, la commune d'Achères n'avait pris aucun engagement ferme à leur égard avant qu'elle ne renonce au projet ainsi envisagé ; que la seule circonstance que ces pourparlers n'ont pas abouti, du fait de cette renonciation, ne saurait, dès lors, traduire l'existence d'une faute de nature à engager la responsabilité de la commune ;

4. Considérant, en troisième lieu, que M. et Mme D... font également valoir que l'arrêté du 5 mai 2008 par lequel le préfet des Yvelines a déclaré d'utilité publique le projet de ZAC " Coeur de Ville " a, sur leur demande, été annulé, en tant qu'il incluait leur parcelle cadastrée BD n° 531 dans le périmètre des immeubles susceptibles d'expropriation, par arrêt de la Cour de céans rendu le 25 avril 2013 sous le n° 11VE02562 ; que, toutefois, cet arrêt a, depuis lors, été annulé par décision du Conseil d'Etat n° 371034-371056 du 6 juillet 2016, qui a renvoyé l'affaire à la Cour ; que, statuant sur ce renvoi, par arrêt n° 16VE02272 du 14 décembre 2017, la Cour a rejeté la demande des époux D...tendant à l'annulation de l'arrêté contesté du

5 mai 2008, en écartant les moyens invoqués par les intéressés et tirés de ce que l'inclusion de leur parcelle dans le périmètre de l'opération susmentionnée serait dépourvue d'utilité publique et constitutive d'un détournement de procédure ou de pouvoir commis par la commune d'Achères ; que les requérants ne sont, dès lors, pas fondés à soutenir, à l'occasion de la présente instance, que l'arrêté du 5 mai 2008 portant déclaration d'utilité publique serait, pour les mêmes motifs que ceux ainsi écartés, entaché d'une illégalité fautive de nature à engager la responsabilité de ladite commune ;

5. Considérant, en dernier lieu, qu'ainsi qu'il a été rappelé au point 1, M. et Mme D..., postérieurement à l'arrêté du 5 mai 2008 portant déclaration d'utilité publique, ont conclu, le 10 mars 2009, une nouvelle promesse de bail commercial, pour le même local, avec le Crédit industriel et commercial, moyennant le versement d'un droit d'entrée de 80 000 euros et d'un loyer annuel de 36 000 euros hors taxe, sous condition suspensive que cet établissement bancaire puisse réaliser les aménagements à ce requis, pour lesquels il avait souscrit une déclaration de travaux auprès de la commune d'Achères le 20 avril 2009 ; que si les requérants font grief à la commune d'Achères d'avoir informé le Crédit industriel et commercial, par lettre du 28 avril 2009, de l'opération d'expropriation ainsi engagée, indication à la suite de laquelle cette banque a retiré sa déclaration de travaux et renoncé à son projet de location, la commune n'a, ce faisant, délivré aucune information erronée susceptible d'engager sa responsabilité ;

6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède qu'en l'absence de toute faute commise par la commune d'Achères, les conclusions indemnitaires présentées par les époux D...ne peuvent qu'être rejetées ; que M. et Mme D...ne sont donc pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté leur demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant, d'une part, que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de la commune d'Achères, qui n'est pas, dans la présente instance, partie perdante, le versement à M. et Mme D...d'une somme en remboursement des frais qu'ils ont exposés et non compris dans les dépens ;

8. Considérant, d'autre part, qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par la commune d'Achères sur le fondement des mêmes dispositions ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme D...est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la commune d'Achères sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

2

N° 13VE02671


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 13VE02671
Date de la décision : 14/12/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-01-02-02 Responsabilité de la puissance publique. Faits susceptibles ou non d'ouvrir une action en responsabilité. Fondement de la responsabilité. Responsabilité pour faute.


Composition du Tribunal
Président : Mme AGIER-CABANES
Rapporteur ?: M. Eric TOUTAIN
Rapporteur public ?: M. ERRERA
Avocat(s) : SELARL GAIA

Origine de la décision
Date de l'import : 26/12/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2017-12-14;13ve02671 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award