Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. et Mme B...D...ont demandé au Tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 5 mai 2008 par lequel le préfet des Yvelines a déclaré d'utilité publique le projet de réalisation et d'aménagement de la zone d'aménagement concerté multi-sites dénommée " Coeur de ville " et autorisé la société d'aménagement de la région de Rambouillet et du département des Yvelines (la SARRY 78) à acquérir les immeubles compris dans le périmètre de cette zone.
Par un jugement n° 0806506 du 16 mai 2011, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté leur demande.
Première procédure devant la Cour :
Par une requête et de nouveaux mémoires, enregistrés les 12 juillet 2011 et 27 novembre 2012, M. et MmeD..., représentés par Me Ohana, avocat, ont demandé à la Cour :
1° d'annuler ce jugement, ensemble l'arrêté contesté du 5 mai 2008 ;
2° de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
M. et Mme D...soutiennent que :
- l'inclusion de leur propriété dans le périmètre des immeubles susceptibles d'expropriation ne présente aucune nécessité pour la réalisation de la ZAC ;
- cette inclusion est dépourvue d'utilité publique, compte tenu tant de l'intérêt architectural et historique de la maison et du jardin dont ils sont propriétaires que du coût excessif de leur expropriation ;
- en exerçant des pressions sur les candidats successifs à la location de leur local commercial, pour les faire renoncer à un tel projet, la commune a adopté un comportement fautif de nature à engager sa responsabilité, à raison duquel ils ont, par ailleurs, introduit une demande indemnitaire ;
- l'inclusion de leur propriété dans le périmètre des immeubles susceptibles d'expropriation a uniquement pour but de permettre à la commune de choisir librement le commerce à y implanter.
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Par un arrêt n° 11VE02562 du 25 avril 2013, la Cour a annulé le jugement attaqué, ainsi que l'article 2 de l'arrêté contesté du 5 mai 2008, en tant que celui-ci a inclus l'immeuble commercial appartenant à M. et Mme D...dans le périmètre délimitant les immeubles susceptibles d'expropriation, et a mis à la charge de la commune d'Achères, de la SARRY 78 et du préfet des Yvelines le versement, par chacun d'eux, au profit des intéressés d'une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Procédure devant le Conseil d'Etat :
Par une décision n° 371034-371056 du 6 juillet 2016, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a, sur demandes de la commune d'Achères, de la SARRY 78, et du ministre de l'intérieur, annulé l'arrêt n° 11VE02562 du 25 avril 2013 susvisé et renvoyé l'affaire à la Cour.
Seconde procédure devant la Cour :
Par un nouveau mémoire, enregistré le 3 octobre 2016 sous le n° 16VE02272, M. et Mme D... persistent dans les conclusions de leur requête, par les mêmes moyens, en portant à 10 000 euros la somme qu'ils demandent au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
M. et Mme D... soutiennent, en outre, que :
- l'inclusion de leur propriété dans le périmètre des immeubles susceptibles d'expropriation est sans rapport avec l'opération déclarée d'utilité publique dès lors que la commune avait, ce faisant, uniquement pour buts de faire obstacle à l'implantation d'une banque dans leur local commercial et de reconstituer un alignement continu des immeubles donnant sur l'avenue de Stalingrad ;
- cette inclusion est constitutive d'un détournement de procédure.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'expropriation ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Toutain,
- les conclusions de M. Errera, rapporteur public,
- et les observations de Me Ohana, pour M. et MmeD..., et de MeC..., substituant MeA..., pour la commune d'Achères.
1. Considérant que, par délibérations des 15 décembre 2004 et 30 juin 2005, le conseil municipal d'Achères a décidé de créer une zone d'aménagement concerté (ZAC) dénommée " Coeur de ville " et d'en confier la réalisation, par convention publique d'aménagement, à la SARRY 78 ; que, par délibérations des 7 septembre et 26 octobre 2006, le conseil municipal d'Achères a approuvé le dossier de réalisation de la ZAC et sollicité l'ouverture des enquêtes publiques préalables à la déclaration d'utilité publique et à l'acquisition des emprises foncières nécessaires à la réalisation de ce projet ; qu'après enquêtes publiques, lesquelles se sont déroulées du 29 septembre au 27 octobre 2007 et ont donné lieu, le 30 novembre 2007, a un avis favorable avec réserve du commissaire-enquêteur, le conseil municipal, par délibération du 31 janvier 2008, a levé cette réserve et déclaré ce projet de ZAC, d'intérêt général ; que, par arrêté du 5 mai 2008, le préfet des Yvelines a déclaré d'utilité publique ledit projet et autorisé la SARRY 78 à acquérir par voie d'expropriation les immeubles compris dans le périmètre de cette zone ; que M. et Mme D...sont propriétaires d'immeubles situés au 34-36, boulevard de Stalingrad, à Achères, comprenant, d'une part, un local commercial dans lequel ils avaient exploité une bijouterie et situé sur la parcelle cadastrée BD n° 531, d'autre part, une maison d'habitation constituant leur résidence principale et implantée sur la parcelle cadastrée BD
n° 532, seul le premier de ces deux immeubles étant inclus dans le périmètre de la ZAC
" Coeur de ville " ; que les intéressés ont demandé au Tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté susmentionné du 5 mai 2008 ; que, par jugement n° 0806506 du 16 mai 2011, dont M. et Mme D...relèvent appel, ledit Tribunal a rejeté leur demande ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Considérant, en premier lieu, qu'il appartient au juge, lorsqu'il se prononce sur le caractère d'utilité publique d'une opération nécessitant l'expropriation d'immeubles ou de droits réels immobiliers, de contrôler successivement qu'elle répond à une finalité d'intérêt général, que l'expropriant n'était pas en mesure de réaliser l'opération dans des conditions équivalentes sans recourir à l'expropriation et, enfin, que les atteintes à la propriété privée, le coût financier et, le cas échéant, les inconvénients d'ordre social ou économique que comporte l'opération ne sont pas excessifs au regard de l'intérêt qu'elle présente ; qu'il lui appartient également, s'il est saisi d'un moyen en ce sens, de s'assurer, au titre du contrôle sur la nécessité de l'expropriation, que l'inclusion d'une parcelle déterminée dans le périmètre d'expropriation n'est pas sans rapport avec l'opération déclarée d'utilité publique ;
3. Considérant, d'une part, qu'il ressort des pièces du dossier que le projet de ZAC " Coeur de ville ", qui porte sur deux sites distincts pour une surface totale d'environ 90 000 m², a pour objectif de réaménager le centre-ville d'Achères en vue de sa densification, par la création d'équipements publics, notamment une médiathèque et un centre de loisirs, l'augmentation de l'offre de logements sous des formes diversifiées, comme l'accès à la propriété ou les logements sociaux, l'implantation de nouveaux commerces de proximité et d'activités de services, en particulier en restructurant l'artère commerciale de l'avenue de Stalingrad, l'amélioration des espaces publics et la rénovation des voies de déplacement urbaines et du stationnement ; que, même à exclure de son périmètre le local commercial appartenant aux épouxD..., situé sur la parcelle cadastrée BD n° 531, cette opération répond ainsi à une finalité d'intérêt général, ce que ne contestent d'ailleurs pas les intéressés ;
4. Considérant, d'autre part, que M. et MmeD..., qui n'établissent, ni même n'allèguent, que l'expropriant serait en mesure de réaliser l'opération précédemment décrite dans des conditions équivalentes sans recourir à l'expropriation, soutiennent, en revanche, que l'inclusion de la parcelle cadastrée BD n° 531 dont ils sont propriétaires ne serait pas nécessaire à la réalisation de l'opération d'aménagement déclarée d'utilité publique ; que, toutefois, il ressort des pièces du dossier que le projet de ZAC " Coeur de ville " comporte pour objectif, ainsi qu'il a été rappelé au point 3, d'augmenter l'offre de logements et de redynamiser le commerce de proximité, en particulier sur l'artère centrale que constitue l'avenue de Stalingrad ; qu'à ce titre, il est constant que l'acquisition de la parcelle cadastrée BD n° 531 a vocation à permettre l'implantation d'un immeuble collectif à usage d'habitation de deux étages comprenant, en rez-de-chaussée, un commerce alimentaire de proximité ; que l'inclusion de cette parcelle dans le périmètre d'expropriation ne peut, dès lors, être regardée comme étant sans rapport avec l'opération déclarée d'utilité publique ;
5. Considérant, enfin, que M. et MmeD..., en cause d'appel, ne soutiennent pas que l'opération d'aménagement poursuivie en l'espèce, appréciée dans son ensemble, présenterait des inconvénients excessifs au regard de l'intérêt qu'elle présente, de nature à lui faire perdre son caractère d'utilité publique ; qu'en tout état de cause, les requérants ne contestent pas utilement ce caractère en se bornant à invoquer les inconvénients, pris isolément du reste de l'opération et d'ailleurs non établis par les pièces du dossier, tenant au coût d'acquisition de la parcelle cadastrée BD n° 531, ainsi qu'à l'intérêt historique et architectural attaché à la préservation de leur maison, laquelle est distinctement implantée sur la parcelle BD n° 532 et n'est pas incluse, ainsi qu'il a été rappelé au point 1, dans le périmètre des immeubles susceptibles d'expropriation ;
6. Considérant, en second lieu, que l'opération d'aménagement " Coeur de ville ", dont le périmètre inclus la parcelle cadastrée BD n° 531, présente, pour les motifs exposés aux points 2 à 5, un caractère d'utilité publique ; que cette inclusion, contrairement à ce que soutiennent les requérants, ne peut donc être regardée comme ayant eu pour but exclusif de permettre à la commune d'Achères, en dehors de toute considération d'intérêt général, d'implanter sur ladite parcelle le commerce de son choix ; que les moyens tirés de ce que l'arrêté contesté du
5 mai 2008 serait entaché, pour ce motif, d'un détournement de procédure ou de pouvoir ne peuvent, dès lors, qu'être écartés ;
7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme D...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté leur demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
8. Considérant, d'une part, que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, partie perdante, le versement à M. et Mme D...d'une somme en remboursement des frais qu'ils ont exposés et non compris dans les dépens ;
9. Considérant, d'autre part, qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par la commune d'Achères et la SARRY 78 sur le fondement des mêmes dispositions ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. et Mme D...est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par la commune d'Achères et la SARRY 78 sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
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N° 16VE02272