Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme C...a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise de condamner, sur le fondement de la solidarité nationale, l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) à lui verser les sommes de 301 306,95 euros au titre des préjudices patrimoniaux et de 126 719,33 euros au titre des préjudices personnels subis du fait de l'accident médical non fautif intervenu au cours d'une intervention chirurgicale réalisée le 19 décembre 2007 au centre hospitalier d'Argenteuil.
Par jugement n° 1005723 du 6 août 2012, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a condamné l'ONIAM à lui verser la somme de 286 829,34 euros.
Par un arrêt n° 12VE03465 du 18 mars 2014, la Cour a, sur appel de MmeC..., réformé ce jugement et porté la somme mise à la charge de l'ONIAM à 294 968,07 euros, avant déduction de la prestation de compensation de handicap versée au fur et à mesure de ses besoins.
Par une décision n° 380856 du 4 mars 2016, le Conseil d'Etat a, sur pourvoi de MmeC..., annulé cet arrêt en tant qu'il statue sur le chef de préjudice relatif à l'assistance d'une tierce personne et renvoyé, dans cette mesure, l'affaire à la cour administrative d'appel de Versailles.
Procédure devant la Cour :
Par un mémoire et un mémoire récapitulatif enregistrés, après cassation et renvoi, sous le n° 16VE00715, les 3 juin et 25 août 2016, Mme B...C..., représentée par MeA..., demande à la Cour :
1° de condamner l'ONIAM à lui verser la somme de 434 144,67 euros au titre du préjudice relatif à l'assistance d'une tierce personne, majorée des intérêts dus à compter du 19 juillet 2010 et capitalisés ;
2° à titre subsidiaire, en cas d'indemnisation sous forme de rente, de dire qu'il s'agira d'une rente annuelle viagère payable trimestriellement, indexée selon les dispositions de l'article L 434 -17 du code de la sécurité sociale ;
3° de mettre à la charge de l'ONIAM le versement à Mme C...de la somme de
2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- dans la mesure où l'arrêt a été annulé dans son intégralité s'agissant de la liquidation du poste de préjudice relatif à l'aide d'une tierce personne, il y a lieu de réévaluer ce préjudice et, notamment, de tenir compte de l'actualisation qui devra être opérée ;
- elle ne perçoit plus la prestation de compensation de handicap depuis le 1er avril 2016, sa fille pouvant l'aider au quotidien ; il n'est donc pas nécessaire, contrairement à ce qu'indique l'ONIAM et à ce qu'avait envisagé le Conseil d'Etat, de capitaliser cette prestation pour l'avenir puisqu'elle a cessé d'être versée ;
- l'indemnisation du préjudice n'a pas vocation à être réévaluée en raison d'une modification de sa situation, hors aggravation du handicap ; il ne peut donc être exigé d'elle de justifier tous les trois mois du non versement de la prestation de compensation de handicap ;
- c'est à tort que le tribunal administratif a considéré que les besoins postérieurs à la consolidation étaient de 2 heures par jour cinq jours sur sept et non pas sept jours sur sept, cette restriction issue du rapport d'expert n'étant pas logique et ne liant pas le juge ;
- le montant de l'indemnité allouée au titre de l'assistance d'une tierce personne ne peut être réduit en cas d'assistance familiale et doit inclure les charges sociales et patronales et les congés payés légaux ; le coût horaire doit être fixé ainsi à la somme de 14 euros et de 16 euros pour l'avenir ;
- la demande de l'ONIAM tendant à ce que l'indemnité soit versée sous forme de rente sera rejetée comme nouvelle après cassation et, à titre subsidiaire, elle sera payable trimestriellement et indexée selon les dispositions de l'article L. 434 -17 du code de la sécurité sociale.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de santé publique ;
- le code de justice administrative.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Le Gars, président-assesseur,
- les conclusions de Mme Mégret, rapporteur public,
- et les observations de MeD..., substituant MeA..., pour MmeC....
1. Considérant que Mme B...C...qui souffrait d'une lombosciatique, a été admise au centre hospitalier d'Argenteuil pour y subir le 19 décembre 2007 une discectomie et que cette intervention a entraîné des douleurs dans le pied droit et un déficit moteur ; qu'en raison d'une suspicion d'un hématome postopératoire ou d'une décompensation de la hernie, puis de l'apparition de signes d'ischémie, Mme C...a été opérée à nouveau le 20 décembre 2007 et le 22 décembre 2007 ; que ces interventions ont mis en évidence que les complications survenues avaient pour origine une plaie de la paroi artérielle de l'artère iliaque primitive causée lors de l'ablation d'un fragment discal à l'aide de la pince à disque ; que le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise, estimant que ces complications revêtaient le caractère d'un accident médical non fautif et que la réparation des dommages subis incombait à la solidarité nationale sur le fondement de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique, a, par un jugement du 6 août 2012, condamné l'ONIAM à verser à Mme C...la somme de 286 829,34 euros ; que, par un arrêt du 18 mars 2014, la Cour de céans a, sur appel de MmeC..., réformé ce jugement et porté la somme mise à la charge de l'ONIAM à 294 968,07 euros, avant déduction de la prestation de compensation de handicap versée au fur et à mesure de ses besoins ; que, par une décision du 4 mars 2016, le Conseil d'Etat a, sur pourvoi de MmeC..., annulé cet arrêt en tant qu'il statue sur le chef de préjudice relatif à l'assistance d'une tierce personne et renvoyé, dans cette mesure, l'affaire à la Cour ;
Sur la réparation du préjudice relatif à l'assistance d'une tierce personne :
2. Considérant, d'une part, qu'il ressort de la décision du juge de cassation qu'il appartient à la Cour de statuer à nouveau sur le chef de préjudice relatif à l'assistance d'une tierce personne et de redéfinir les bases et les montants de ce dernier et non pas seulement, ainsi que le soutient l'ONIAM, de déterminer les sommes à déduire, après capitalisation du montant à prendre en compte au titre des versements à venir de la prestation de compensation du handicap ;
3. Considérant, d'autre part, qu'il résulte de l'instruction et, notamment, du rapport de l'expertise en date du 4 novembre 2009 diligentée par la commission régionale de conciliation et d'indemnisation d'Ile-de-France, que l'aide d'une tierce personne, avant la consolidation de l'état de santé de la requérante intervenue le 6 octobre 2009, était indispensable à raison de 6 heures par jour à compter du 25 juillet 2008, date de sa sortie du centre de rééducation de Villiers-sur-Marne et qu'après le 6 octobre 2009, en raison de ses difficultés de déplacement, une telle assistance restait nécessaire mais devait être réduite à deux heures par jour, cinq jours par semaine ainsi que le relève le rapport d'expertise ; qu'à cet égard, Mme C...n'établit pas que, s'agissant de la période postérieure à la consolidation de son état de santé, l'assistance d'une tierce personne serait nécessaire sept jours sur sept ;
En ce qui concerne les frais d'assistance déjà exposés :
4. Considérant que le principe de réparation intégrale du préjudice impose que les frais liés à l'assistance à domicile de la victime par une tierce personne, alors même qu'elle serait assurée par un membre de sa famille, soient évalués à une somme qui ne saurait être inférieure au montant du salaire minimum interprofessionnel de croissance (SMIC) horaire brut augmenté des charges sociales appliqué à une durée journalière, dans le respect des règles du droit du travail ; qu'en se fondant sur un taux horaire brut du SMIC, augmenté des cotisations sociales, de 12 euros avant la date de consolidation de l'état de santé de la requérante et de 13 euros après cette date, et en retenant une base annuelle de 400 jours, incluant les congés payés, il sera fait une juste appréciation de la réparation due à Mme C...au titre de l'assistance d'une tierce personne en l'évaluant à la somme de 34 682 euros pour la période courant jusqu'à la date de consolidation, à raison, ainsi qu'il a été dit, de 6 heures par jour, sept jours sur sept, soit 481 jours, et à la somme de 57 278 euros pour la période du 6 octobre 2009 au 20 juillet 2017, à raison de 2 heures par jour, cinq jours sur sept, soit 2 203 jours ; qu'il convient de déduire les sommes perçues par la requérante au titre de la prestation de compensation du handicap pour un montant total de 31 832,52 euros dès lors que cette prestation doit être regardée comme ayant couvert partiellement les frais correspondant à l'assistance d'une tierce personne ; qu'il en résulte que l'indemnité à la charge de l'ONIAM s'élève à la somme de 60 127,48 euros ;
En ce qui concerne les frais futurs :
5. Considérant que, s'agissant des préjudices futurs d'une victime d'un accident corporel non couverts par des prestations des caisses de sécurité sociale, il appartient au juge de décider si leur réparation doit prendre la forme du versement d'un capital ou d'une rente selon que l'un ou l'autre de ces modes d'indemnisation assure à la victime, dans les circonstances de l'espèce, la réparation la plus équitable ; que, par suite, le moyen de Mme C...selon lequel la demande de l'ONIAM tendant à ce que l'indemnité qui lui est due soit versée sous forme de rente relèverait de conclusions nouvelles et, par suite, irrecevables, ne peut qu'être écarté ;
6. Considérant que, pour la période postérieure à la date du présent arrêt, en retenant un taux horaire de 13 euros et une base annuelle de 400 jours, incluant les congés payés, et à raison d'un besoin d'assistance de 2 heures par jour, cinq jours sur sept, les frais futurs d'assistance d'une tierce personne de Mme C...doivent être évalués, annuellement, à la somme de 7 430 euros ; que, dans les circonstances de l'espèce, compte tenu de la possibilité pour la requérante de bénéficier de la prestation de compensation du handicap, il y a lieu de décider que la réparation doit prendre la forme d'une rente ; qu'il suit de là que l'ONIAM devra verser à MmeC..., à compter du 21 juillet 2017, une rente annuelle de 7 430 euros, sous déduction, le cas échéant, des sommes que l'intéressée pourra percevoir du département au titre de la prestation de compensation du handicap, correspondant à un besoin d'aides humaines, qu'il appartiendra, dans ce cas, à Mme C...de porter à la connaissance de l'ONIAM ; que le versement de cette rente interviendra par trimestre échu, avec revalorisation par application des coefficients prévus à l'article L. 434-17 du code de la sécurité sociale ;
7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, après prise en compte des préjudices indemnisables fixés de manière définitive à la somme de 115 910,07 euros par l'arrêt de la Cour de céans avant cassation et renvoi, l'ensemble des préjudices subis par Mme C...doit être réparé par, d'une part, une indemnité de 180 037,55 euros majorée des intérêts à compter du 19 juillet 2010, date d'enregistrement de sa demande devant le tribunal administratif, et de leur capitalisation à compter du 23 février 2012 sur le fondement de l'article 1154 du code civil et, d'autre part, à compter du 21 juillet 2017, une rente annuelle de 7 430 euros dont le versement interviendra par trimestre échu, avec revalorisation par application des coefficients prévus à l'article L. 434-17 du code de la sécurité sociale, sous déduction, le cas échéant, des sommes que l'intéressée pourra percevoir du département au titre de la prestation de compensation du handicap, correspondant à un besoin d'aides humaines, qu'il appartiendra, dans ce cas, à Mme C...de porter à la connaissance de l'ONIAM ; que le jugement attaqué doit être réformé en ce sens ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
8. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'ONIAM le versement d'une somme de 1 500 euros à Mme C...au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DECIDE :
Article 1er : La somme que l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) est condamné à verser à Mme C... est fixée à 180 037,55 euros. Cette indemnité doit être majorée des intérêts à compter du 19 juillet 2010 et les intérêts échus le 23 février 2012 seront capitalisés à cette date ainsi qu'à chaque échéance annuelle à compter de celle-ci.
Article 2 : L'ONIAM est condamné à verser à Mme C..., à compter du 21 juillet 2017, au titre des frais d'assistance d'une tierce personne, une rente d'un montant annuel de 7 430 euros, sous déduction, le cas échéant, des sommes que Mme C... pourra percevoir du département au titre de la prestation de compensation du handicap, correspondant à un besoin d'aides humaines, qu'il appartiendra, dans ce cas, à l'intéressée de porter à la connaissance de l'ONIAM. Le versement de la rente interviendra par trimestre échu, avec revalorisation par application des coefficients prévus à l'article L. 434-17 du code de la sécurité sociale.
Article 3 : L'article 1er du jugement n° 1005723 du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 6 août 2012 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 4 : L'ONIAM versera la somme de 1 500 euros à Mme C...au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le surplus des conclusions de Mme C...est rejeté.
N° 16VE00715 2