Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. D... C... a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler la décision du 30 août 2013 par laquelle le président de l'Office public d'habitat (OPH) de Vincennes a mis fin à sa période d'essai et d'enjoindre à l'Office de le réintégrer dans ses fonctions en rétablissant sa rémunération pendant la période où il est resté à la disposition de l'Office public d'habitat de Vincennes sans pouvoir exercer ses fonctions.
Par un jugement n° 1307638 du 18 février 2015, le Tribunal administratif de Melun a annulé la décision du 30 août 2013 par laquelle le président de l'Office public d'habitat (OPH) de Vincennes a mis fin aux fonctions de M. C..., a enjoint à l'OPH de procéder à la réintégration de M. C... à la date du 30 août 2013, dans un délai d'un mois à compter de la notification de son jugement et a rejeté le surplus des conclusions de M. C....
Par un arrêt n° 15PA01604 du 11 octobre 2017, la Cour a rejeté l'appel formé par l'OPH de Vincennes contre ce jugement ainsi que les conclusions de M. C... tendant à en assurer l'exécution en ce qui concerne la reconstitution de ses droits sociaux.
Par une décision n° 416543 du 3 juin 2019, le Conseil d'état, statuant au contentieux sur un pourvoi présenté par M. C..., a annulé cet arrêt du 11 octobre 2017 en tant seulement qu'il s'est prononcé sur les conclusions de M. C... relatives au versement des cotisations sociales lui étant dues par l'OPH, et a renvoyé l'affaire, dans la mesure de la cassation prononcée, devant la Cour.
Procédure devant la Cour :
Par des mémoires, enregistrés le 13 novembre 2019 et le 1er décembre 2020, M. C..., représenté par Me E..., demande à la Cour :
1°) d'appeler la société Immobilière 3F en intervention forcée ;
2°) d'enjoindre à l'Office public d'habitat (OPH) de Vincennes d'exécuter l'article 2 du jugement du 18 février 2015 en procédant à la régularisation et reconstitution des droits sociaux de Monsieur C..., notamment de ses cotisations de sécurité sociale, droits à pension et à indemnités de chômage et de produire les documents en justifiant, sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter d'un délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir jusqu'à la date d'exécution de cet arrêt ;
3°) de mettre à la charge de l'OPH le versement de la somme de 3 000 euros au profit de Me E... en application de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi qu'une somme de 13 euros au titre des droits de plaidoirie.
Il soutient que :
- il y a lieu d'appeler la société Immobilière 3F en intervention forcée afin que la procédure lui soit opposable dès lors qu'elle pourrait supporter solidairement les conséquences de l'éventuelle condamnation qui pourrait être prononcée à l'encontre de l'OPH ;
- l'annulation de son éviction devait nécessairement entraîner une réintégration avec reconstitution de ses droits sociaux à compter du jour de son éviction illégale et jusqu'à sa réintégration ;
- l'OPH ne justifie ni de la reconstitution de ses droits sociaux ni d'avoir versé les cotisations afférentes auprès des organismes sociaux auxquels il est affilié.
Par un mémoire en défense, enregistré le 18 septembre 2020, l'association Fédération des offices publics de l'habitat, agissant ès qualités de liquidateur de l'Office public de l'habitat de Vincennes, représentée par la SCP Foussard-Froger, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, conclut au rejet de la requête et à ce que le versement la somme de 1 500 euros soit mis à la charge de M. C... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- en exécution du jugement du 18 février 2015 annulant la décision du 30 août 2013 mettant fin au contrat de travail à durée indéterminée de M. C..., par une délibération du 16 mars 2015 qui est devenue définitive, le conseil d'administration de l'OPH a procédé à la réintégration juridique de M. C... ;
- il n'y avait pas lieu à une réintégration effective de l'intéressé puisque l'OPH a pris à son encontre une nouvelle mesure de licenciement par une délibération du 26 mai 2015 devenue définitive ;
- M. C... n'apporte aucun commencement de preuve que l'OPH n'aurait pas tiré toutes les conséquences de sa réintégration, s'agissant en l'occurrence du versement des cotisations correspondant à ses droits sociaux.
Par un mémoire, enregistré le 10 novembre 2020, la société Immobilière 3F, représentée par Me F..., demande à la Cour :
1°) de rejeter les conclusions de M. C... tendant à son intervention forcée ;
2°) de mettre à la charge de M. C... une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- elle n'a jamais été l'employeur de M. C..., qui demeure l'Office public de l'Habitat de Vincennes, représenté par son liquidateur ;
- elle n'a qu'acquis le patrimoine immobilier de l'Office et n'a pas repris ses droits et obligations.
M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris du 9 septembre 2019.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la construction et de l'habitation ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme B...,
- les conclusions de Mme Stoltz-Valette, rapporteur public,
- les observations de Me Froger, avocat de la Fédération des offices publics de l'habitat,
- et les observations de Me A..., avocate de la société Immobilière 3F.
Considérant ce qui suit :
1. Par une décision du 30 août 2013, le président du conseil d'administration de l'Office public d'habitat (OPH) de Vincennes a décidé que le contrat de travail à durée indéterminée du 4 mars 2013 par lequel M. C... avait été recruté pour exercer les fonctions de directeur de cet OPH ne serait pas poursuivi au-delà de la fin de la période d'essai. Sur demande de l'intéressé, le Tribunal administratif de Melun, par un jugement du 18 février 2015, a annulé cette décision et a enjoint à l'OPH de Vincennes de procéder à la réintégration de M. C.... Par un arrêt du 11 octobre 2017, la Cour a rejeté l'appel formé par l'OPH de Vincennes contre ce jugement ainsi que les conclusions de M. C... tendant à en assurer l'exécution, qu'elle a regardées comme ayant la nature d'un appel incident. Par une décision n° 416543 du 3 juin 2019, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a annulé cet arrêt à la demande de M. C... en tant seulement qu'il s'est prononcé sur ses conclusions relatives au versement des cotisations sociales lui étant dues par l'OPH, et a renvoyé l'affaire à la Cour dans cette mesure.
2. Aux termes de l'article L. 911-4 du code de justice administrative dans sa rédaction applicable au litige : " En cas d'inexécution d'un jugement ou d'un arrêt, la partie intéressée peut demander au tribunal administratif ou à la cour administrative d'appel qui a rendu la décision d'en assurer l'exécution. / Toutefois, en cas d'inexécution d'un jugement frappé d'appel, la demande d'exécution est adressée à la juridiction d'appel. / Si le jugement ou l'arrêt dont l'exécution est demandée n'a pas défini les mesures d'exécution, la juridiction saisie procède à cette définition. Elle peut fixer un délai d'exécution et prononcer une astreinte. (...) ".
3. La reconstitution de carrière d'un agent irrégulièrement évincé implique nécessairement la régularisation des droits en matière de protection sociale dont il aurait bénéficié en l'absence d'intervention de la décision d'éviction illégale et, par suite, le versement par l'employeur de l'ensemble des cotisations correspondantes. Cette obligation procède directement de l'annulation de la décision d'éviction illégale et n'a pas un caractère distinct de la reconstitution de carrière à laquelle l'employeur est tenu dans son ensemble.
4. Il résulte de ce qui précède qu'en exécution de l'injonction, prononcée par le jugement du Tribunal administratif de Melun du 18 février 2015 devenu définitif, de reconstituer la carrière de M. C... à compter du 30 août 2013 et jusqu'à sa réintégration, l'OPH de Vincennes était tenu de verser l'ensemble des cotisations sociales dues par l'employeur et par le salarié entre le 30 août 2013 et la date de la réintégration de M. C..., soit en l'espèce le 17 mars 2015. A cet égard, la circonstance que M. C... a fait l'objet d'une nouvelle décision de suspension dans l'intérêt du service prononcée par l'OPH le 17 mars 2015, puis d'un licenciement pour faute grave à effet immédiat prononcé le 26 mai 2015, est sans incidence sur l'obligation pesant sur l'OPH d'exécuter l'injonction prononcée par ce jugement définitif en conséquence de l'illégalité de l'éviction prononcée le 30 août 2013. Est également sans incidence sur l'obligation pesant sur l'OPH la circonstance que la société I3F a acquis le patrimoine immobilier de l'Office, dès lors qu'elle n'a repris ni ses droits ni ses obligations, notamment sociales.
5. A la date du présent arrêt l'OPH, qui seul peut en rapporter la preuve ainsi que l'a jugé le Conseil d'Etat dans la décision de renvoi du 3 juin 2019, n'établit pas qu'il a procédé au versement de ces cotisations dans le délai d'un mois imparti par le Tribunal administratif de Melun. Dans ces conditions il y a lieu de prononcer contre l'association Fédération des offices publics de l'habitat, agissant ès qualités de liquidateur de l'Office public de l'habitat de Vincennes, à défaut pour elle de produire les justificatifs du paiement de ces cotisations dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, une astreinte de 100 euros par jour jusqu'à la date à laquelle elle y aura procédé.
Sur les conclusions présentées au titre des frais de justice :
6. M. C... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Dans les circonstances de l'espèce il y a lieu, sous réserve que Me E..., avocat de M. C..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'association Fédération des offices publics de l'habitat, ès qualités de liquidateur de l'OPH de Vincennes, la somme de 1 500 euros, y compris les droits de plaidoirie, à verser à Me E.... En revanche, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que les sommes que demande l'association Fédération des offices publics de l'habitat soient mises, à ce titre, à la charge de M. C... qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a par ailleurs pas lieu de faire droit aux conclusions présentées sur ce même fondement par la société Immobilière 3F.
DÉCIDE :
Article 1er : Une astreinte est prononcée à l'encontre de l'association Fédération des offices publics de l'habitat si elle ne justifie pas, dans les deux mois suivant la notification du présent arrêt, qu'il a été a procédé au versement de l'ensemble des cotisations sociales dues par l'employeur et le salarié à raison du contrat de travail conclu entre l'OPH de Vincennes et M. C..., pour la période comprise entre le 30 août 2013 et le 16 mars 2015 inclus. Le taux de cette astreinte est fixé à 100 euros par jour, à compter de l'expiration du délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt.
Article 2 : L'association Fédération des offices publics de l'habitat versera à Me E..., avocat de M. C..., une somme de 1 500 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me E... renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.
Article 3 : Les conclusions de la société Immobilière 3F présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Les conclusions de l'association Fédération des offices publics de l'habitat présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... C..., à l'association Fédération des offices publics de l'habitat, à Me E... et à la société Immobilière 3F.
Délibéré après l'audience du 9 février 2021, à laquelle siégeaient :
- M. Jardin, président de chambre,
- Mme B..., président assesseur,
- M. Aggiouri, premier conseiller,
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 24 février 2021.
Le rapporteur,
P. B...Le président,
C. JARDIN
Le greffier,
C. MONGIS
La République mande et ordonne à la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 19PA01890