Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. I...J...et Mme B...J...ont demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 8 novembre 2012 par lequel le préfet de la région d'Ile-de-France, préfet de Paris, a déclaré insalubre le logement dont ils sont propriétaires 13, rue Lacroix, à Paris et leur a ordonné de prendre toutes mesures nécessaires pour remédier à cet état dans un délai de deux mois, d'annuler la décision du 17 janvier 2013 par laquelle l'agence régionale de santé d'Ile-de-France a rejeté leurs recours gracieux des 28 décembre 2012 et 7 janvier 2013 et d'annuler l'arrêté du 9 avril 2013 par lequel le maire de Paris les a mis en demeure d'exécuter les mesures prescrites par l'arrêté d'insalubrité du 8 novembre 2012 dans le délai d'un mois.
Par un jugement n° 1303797/6-3 du 6 novembre 2014, le Tribunal administratif de Paris a prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions présentées par les consorts J...tendant à l'annulation de l'arrêté du 8 novembre 2012 du préfet de la région d'Ile-de-France, préfet de Paris, de la décision du 17 janvier 2013 rejetant leur recours gracieux et de l'arrêté du 9 avril 2013 du maire de Paris et a rejeté le surplus des conclusions de leur requête.
Par un arrêt n° 15PA00680 du 30 décembre 2016, la cour administrative d'appel de Paris a annulé le jugement du Tribunal administratif de Paris du 6 novembre 2014, a prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions de la requête des consorts J...tendant à l'annulation de l'arrêté du 8 novembre 2012 du préfet de la région d'Ile-de-France, préfet de Paris, de la décision du 17 janvier 2013 du directeur de l'Agence régionale de santé d'Ile-de-France rejetant leur recours gracieux et de l'arrêté du 9 avril 2013 du maire de la ville de Paris et a rejeté le surplus des conclusions de leur requête.
Par une décision n° 408511 du 18 mai 2018, le Conseil d'Etat, saisi par les consortsJ..., a annulé cet arrêt et renvoyé l'affaire devant la cour administrative d'appel de Paris.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 6 janvier 2015 et régularisée le 25 mars 2015, et des mémoires enregistrés les 12 novembre 2015, 13 janvier 2016, 15 février 2016 et 21 décembre 2016, les consortsJ..., représentés par MeH..., demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1303797/6-3 du Tribunal administratif de Paris du 6 novembre 2014 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 8 novembre 2012 par lequel le préfet de la région d'Ile-de-France, préfet de Paris, a déclaré insalubre à titre remédiable le logement dont ils sont propriétaires 13, rue Lacroix, à Paris ;
3°) d'annuler l'arrêté du 9 avril 2013 par lequel le maire de Paris les a mis en demeure d'exécuter les mesures prescrites par l'arrêté d'insalubrité du 8 novembre 2012 dans le délai d'un mois ;
4°) de condamner l'Etat à les indemniser du préjudice correspondant à la perte de loyer d'un montant mensuel de 700 euros pendant 21 mois ;
5°) à titre subsidiaire, de renvoyer l'affaire devant une autre juridiction de première instance ;
6°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- le non-lieu ne pouvait être prononcé par le tribunal dès lors que l'exécution de l'arrêté du 8 novembre 2012 leur faisait grief en les privant du paiement par leur locataire du loyer du logement en cause pendant la période comprise entre le 1er décembre 2012 et le 19 septembre 2014 correspondant à la somme totale de 14 700 euros ; en outre, le non-lieu fait obstacle à ce qu'ils puissent exercer des recours contre leur locataire et contre l'entreprise responsable des désordres à l'origine de la situation d'insalubrité du logement ;
- le tribunal a omis de statuer sur leurs demandes subsidiaires ; le tribunal a refusé de compléter ultérieurement son jugement alors qu'ils lui avaient signalé les graves irrégularités procédurales entachant ce jugement, les obligeant à saisir la Cour et en les privant du double degré de juridiction ; il aurait dû fixer le montant d'une indemnité d'occupation du logement en fonction de l'habitabilité des lieux mise à la charge de leur locataire ;
- le tribunal a méconnu le principe du contradictoire en se fondant sur l'arrêté du 5 septembre 2014 qui ne leur avait pas été communiqué ; cette pièce était, de surcroît, irrecevable, ayant été enregistrée après la clôture de l'instruction ; les principes du procès équitable n'ont pas été respectés, et notamment les principes de loyauté et d'égalité des armes ;
- le principe d'impartialité a été méconnu en raison des relations directes et personnelles que la partie adverse entretenait avec le magistrat ; en effet, le tribunal a pris en considération la pièce qui lui a été directement communiquée par un agent de l'agence régionale de santé ;
- le recours au ministère d'avocat qui leur a été imposé par le tribunal est abusif dès lors qu'il n'était pas obligatoire en première instance ;
- l'arrêté du 8 novembre 2012 est entaché de plusieurs vices de procédure en raison de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 1331-26 du code de la santé publique dès lors que le directeur de l'agence régionale de santé ne pouvait établir son rapport d'insalubrité sur saisine, non prévue par ces dispositions, du syndic de copropriété, qu'il n'y a pas de preuve d'un signalement effectué auprès du directeur de l'agence régionale de santé, que le rapport de l'agent du service technique de l'habitat de la ville de Paris ne mentionne pas la cause de l'insalubrité qui n'a pas été recherchée ; en outre, il n'est pas établi que cet agent avait les qualifications requises pour établir ce rapport ;
- le préfet de la région d'Ile-de-France, préfet de Paris, n'a pas été saisi par un rapport motivé du directeur général de l'agence régionale de santé comme l'exigent les dispositions de l'article L. 1331-26 du code de la santé publique ;
- le préfet de la région d'Ile-de-France, préfet de Paris n'a pas saisi le conseil départemental de l'environnement et des risques sanitaires et technologiques de Paris (CODERST) alors que c'était la seule autorité compétente à pouvoir le faire ;
- l'arrêté contesté a été pris en méconnaissance de l'article L. 1331-27 du code de la santé publique dès lors que le principe du contradictoire n'a pas été respecté et qu'ils n'ont pas été informés de la visite effectuée par l'agent du service technique de l'habitat de la ville de Paris le 17 avril 2012 ;
- les comptes-rendus des réunions des 2 juillet 2012 et 24 septembre 2012 ne comportent pas les mentions des formalités que le président devait obligatoirement accomplir ;
- il n'est pas établi que les dispositions du décret n° 2006-672 du 8 juin 2006 relatif à la création, à la composition et au fonctionnement de commissions administratives à caractère consultatif aient été respectées, en particulier ses articles 5 et 9 ;
- la composition du CODERST lors de ses séances des 2 juillet 2012 et 24 septembre 2012 était irrégulière et le quorum n'était pas atteint ; la fonction et " l'appartenance " des membres du CODERST sont indéterminées ; les personnalités qualifiées ne peuvent pas se faire remplacer ; aucun des membres qualifiés n'était présent ou régulièrement représenté, ni représenté par une personne de qualification correspondante le 24 septembre 2012 et M. D...détenait en outre deux mandats ;
-le caractère unanime du vote doit conduire à s'interroger sur l'impartialité des membres de la commission ou sur leur degré de connaissance du dossier ;
- les requérants n'ont pas été avisés des réunions des 24 septembre 2012 et 4 avril 2013 et ils n'ont ainsi pas pu présenter leurs observations ;
- l'arrêté contesté est insuffisamment motivé, le préfet n'ayant pas précisé quel était le danger en cause ;
- il a été pris en méconnaissance des dispositions de l'article L. 1331-26-1 du code de la santé publique dès lors que les constatations qui ont été effectuées sont erronées et ne peuvent justifier l'état d'insalubrité ; il ne mentionne pas que les travaux qui ont été réalisés le 27 juin 2012 ont permis de mettre fin au danger ;
- les arrêtés des 8 novembre 2012 et 9 avril 2013 sont entachés d'illégalité dès lors que les travaux effectués dès le 27 juin 2012 ont permis de mettre fin à la cause de l'insalubrité ; ces arrêtés n'ont pas constaté l'effectivité et l'efficacité de ces travaux ; ils avaient ainsi perdu leur objet ;
- l'arrêté du 8 novembre 2012 est entaché de nullité dès lors que sa levée était liée à une condition potestative, la réalisation de certains travaux, et que l'administration a empêché cette réalisation ;
- il a été pris en méconnaissance de l'article L. 1334-4 du code de la santé publique dès lors que l'administration a négligé d'assigner en justice les locataires s'opposant aux travaux ;
- la nature des améliorations exigées allait au-delà des obligations incombant au bailleur pour faire cesser le danger, en visant des améliorations qui dépassent les caractéristiques du logement décent ;
- ils ne se sont pas opposés à la réalisation du recouvrement des murs compte tenu de la présence de plomb constatée pour autant que les locataires récalcitrants permettaient l'accès au chantier et qu'une entreprise acceptait de réaliser ces travaux de peu d'importance ;
- la réalisation d'office des travaux par l'Etat avec les entreprises de son choix, alors qu'ils disposaient de devis concernant les travaux en cause et que les difficultés d'accéder au logement étaient organisées par le locataire soucieux de prolonger le plus longtemps possible la période de suspension des loyers, caractérise l'infraction de favoritisme ; l'arrêté du 9 avril 2013 est ainsi entaché d'illégalité ;
- l'administration ne pouvait s'immiscer dans le contrat de bail en suspendant le versement des loyers alors que le logement est resté habitable et habité ;
- le relogement ou l'hébergement des occupants durant les travaux n'étaient pas nécessaires ;
- le loyer ou l'indemnité d'occupation doit leur être versé pendant la période en cause dès lors que ce sont les locataires qui se sont opposés aux travaux.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 30 octobre 2015, 21 décembre 2015 et 9 février 2016, le ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
A titre principal, c'est à bon droit que les juges de première instance ont jugé qu'il n'y avait plus lieu de statuer sur la demande des consorts J...dès lors qu'elle était devenue sans intérêt à la suite de l'intervention de l'arrêté du 5 septembre 2014 ayant levé celui contesté du 8 novembre 2012 ; les consorts J...ne faisaient valoir aucun intérêt financier dans leur demande initiale ;
A titre subsidiaire, aucun des moyens soulevés par les requérants n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la construction et de l'habitation,
- le code de la santé publique,
- le décret n° 2006-672 du 8 juin 2006,
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Larsonnier,
- et les conclusions de Mme Bernard, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté du 8 novembre 2012, le préfet de la région d'Ile-de-France, préfet de Paris, a déclaré insalubre, à titre remédiable, le logement dont les consorts J...sont propriétaires au rez-de-chaussée porte gauche de l'immeuble situé 13, rue Lacroix, à Paris dans le 17ème arrondissement et a prescrit la réalisation, dans un délai de deux mois à compter de sa notification, des travaux nécessaires pour remédier à l'insalubrité constatée. Les consorts J...ont formé les 28 décembre 2012 et 7 janvier 2013 un recours gracieux contre cet arrêté que l'Agence régionale de santé de l'Ile-de-France a rejeté le 17 janvier 2013. Les intéressés ont été mis en demeure d'exécuter les travaux par un arrêté du 9 avril 2013. Par un arrêté du 5 septembre 2014, le préfet de la région d'Ile-de-France, préfet de Paris, a prononcé la levée de l'arrêté du 8 novembre 2012. Par un jugement du 6 novembre 2014 dont les consorts J...relèvent appel, le Tribunal administratif de Paris a jugé qu'il n'y avait plus lieu de statuer sur leur demande tendant à l'annulation des arrêtés des 8 novembre 2012 et 9 avril 2013 et a rejeté le surplus de leurs conclusions.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Aux termes de l'article R. 611-1 du code de justice administrative : " (...) La requête, le mémoire complémentaire annoncé dans la requête et le premier mémoire de chaque défendeur sont communiqués aux parties avec les pièces jointes (...). / Les répliques, autres mémoires et pièces sont communiqués s'ils contiennent des éléments nouveaux ".
3. Il résulte de l'instruction que l'arrêté du 5 septembre 2014 du préfet de la région d'Ile-de-France, préfet de Paris, prononçant la mainlevée de l'arrêté du 8 novembre 2012, outre qu'il a été adressé au tribunal par l'agence régionale de santé après la clôture de l'instruction intervenue le 28 février 2014 et n'a pas donné lieu à réouverture de cette dernière, n'a pas été communiqué aux consorts J...par la juridiction de première instance alors qu'il lui appartenait de le faire. En s'abstenant de procéder de la sorte, alors que le motif de non-lieu à statuer sur les conclusions à fin d'annulation présentées par les requérants reposait sur l'intervention de cet arrêté de mainlevée, les premiers juges ont méconnu les exigences qui découlent des dispositions de l'article R. 611-1 du code justice administrative et qui sont destinées à garantir le caractère contradictoire de l'instruction. Il suit de là que les consorts J...sont fondés à soutenir que le jugement attaqué est intervenu à la suite d'une procédure irrégulière et à en demander, pour ce motif, l'annulation.
4. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par les consorts J...devant le Tribunal administratif de Paris.
Sur la légalité de l'arrêté du 8 novembre 2012 :
5. L'article L. 1331-26 du code de la santé publique dispose que : " Lorsqu'un immeuble, bâti ou non, vacant ou non, attenant ou non à la voie publique, un groupe d'immeubles, un îlot ou un groupe d'îlots constitue, soit par lui-même, soit par les conditions dans lesquelles il est occupé ou exploité, un danger pour la santé des occupants ou des voisins, le représentant de l'Etat dans le département, saisi d'un rapport motivé du directeur général de l'agence régionale de santé ou, par application du troisième alinéa de l'article L. 1422-1, du directeur du service communal d'hygiène et de santé concluant à l'insalubrité de l'immeuble concerné, invite la commission départementale compétente en matière d'environnement, de risques sanitaires et technologiques à donner son avis dans le délai de deux mois : 1° Sur la réalité et les causes de l'insalubrité ; 2° Sur les mesures propres à y remédier. (...) ". L'article L. 1331-27 de ce code dispose que : " Le représentant de l'Etat dans le département avise les propriétaires, tels qu'ils figurent au fichier immobilier de la conservation des hypothèques, au moins trente jours à l'avance de la tenue de la réunion de la commission départementale compétente en matière d'environnement, de risques sanitaires et technologiques et de la faculté qu'ils ont de produire dans ce délai leurs observations. (...) Le rapport motivé prévu à l'article L. 1331-26 est tenu à la disposition des intéressés dans les bureaux de la préfecture. Une copie est déposée à la mairie de la commune ou, à Paris, Marseille et Lyon, de l'arrondissement où est situé l'immeuble. Toute personne justifiant de l'une des qualités mentionnées au premier alinéa est, sur sa demande, entendue par la commission départementale compétente en matière d'environnement, de risques sanitaires et technologiques et appelée aux visites et constatations des lieux. Elle peut se faire représenter par un mandataire. (...) " et l'article L. 1331-28 du même code dispose que : " (...) II.-Lorsque la commission ou le haut conseil conclut à la possibilité de remédier à l'insalubrité, le représentant de l'Etat dans le département prescrit par arrêté les mesures adéquates ainsi que le délai imparti pour leur réalisation sur avis de la commission ou du haut conseil et prononce, s'il y a lieu, l'interdiction temporaire d'habiter et, le cas échéant, d'utiliser les lieux. Ces mesures peuvent comprendre, le cas échéant, les travaux nécessaires pour supprimer le risque d'intoxication par le plomb prévus par l'article L. 1334-2 ainsi que l'installation des éléments d'équipement nécessaires à un local à usage d'habitation, définis par référence aux caractéristiques du logement décent. ".
6. Il résulte de ces dispositions que si, lorsque la commission départementale compétente en matière d'environnement, de risques sanitaires et technologiques conclut à l'insalubrité d'un logement avec possibilité d'y remédier, le préfet est tenu de le déclarer insalubre à titre remédiable, cette obligation ne rend pas inopérants les moyens relatifs au bien-fondé ou à la régularité de la procédure d'adoption de l'avis de la commission dès lors que celle-ci doit, préalablement à cet avis, porter une appréciation sur les faits de l'espèce. Il en va ainsi des moyens concernant la procédure suivie devant la commission susmentionnée. Les moyens relatifs à la régularité formelle de l'arrêté d'insalubrité sont en revanche inopérants.
7. Il résulte de l'instruction que le préfet de la région d'Ile-de-France, préfet de Paris, a été saisi, en application du troisième alinéa de l'article L. 1422-1 du code de la santé publique, par un rapport du responsable de la subdivision du 17ème arrondissement de Paris du service technique de l'habitat de la ville de Paris et non pas par un rapport du directeur général de l'agence régionale de santé d'Ile-de-France. Par suite, le moyen tiré de ce que ce dernier aurait été irrégulièrement saisi par le syndic de l'immeuble est inopérant. En tout état de cause, aucune disposition n'interdit à un syndic d'alerter le service technique de l'habitat de la ville de Paris sur l'état d'insalubrité d'un logement afin qu'il saisisse le préfet de la région d'Ile-de-France, préfet de Paris.
8. Les requérants n'apportent aucun élément de nature à démontrer que l'inspecteur de salubrité du service technique de l'habitat de la ville de Paris n'aurait pas la qualification et les compétences requises pour constater les désordres affectant un logement et prescrire les mesures adéquates afin d'y remédier. En outre, il ressort du rapport du 10 mai 2012 que l'inspecteur de salubrité a décrit précisément les désordres affectant le logement en cause ainsi que leurs causes et les mesures proposées pour y remédier. Ce rapport est ainsi suffisamment motivé. Il ne peut être reproché à l'inspecteur de salubrité de ne pas s'être aperçu du déboîtement du tube de vidange des eaux usées et de la pose d'un récipient récupérant ces eaux usées situés sous le bac de la douche alors qu'il a été procédé au changement de ce tube par des professionnels intervenus à la suite des mesures qui avaient été justement proposées par l'inspecteur de salubrité.
9. Il résulte de l'instruction que, contrairement à ce que les requérants soutiennent, le conseil départemental de l'environnement et des risques sanitaires et technologiques (CODERST) de Paris a été saisi par le préfet de région d'Ile-de-France, préfet de Paris. Il s'ensuit que le moyen tiré de ce que ce conseil aurait été saisi par une autorité incompétente manque en fait.
10. Aucune disposition ne prévoit, et aucun principe n'impose, que la visite du logement en cause par l'inspecteur de salubrité du service technique de l'habitat de la ville de Paris en vue de l'établissement du rapport prévu par les dispositions de l'article L. 1331-26 du code de la santé publique soit réalisée de manière contradictoire avec le propriétaire ou qu'il en soit informé. Il résulte de l'instruction que par un courrier en date du 30 mai 2012, l'agence régionale de santé d'Ile-de-France a informé Mme J...que le rapport établi par le service technique de l'habitat de la ville de Paris pouvait être consulté à la mairie du 17ème arrondissement de Paris ou à la délégation territoriale de Paris de l'agence régionale de santé, que le dossier serait soumis à la formation spécialisée du CODERST en sa séance du 2 juillet 2012, que des observations écrites ou orales pouvaient être présentées, que dans ce dernier cas, une demande écrite de comparution devait être formulée et que l'intéressée pouvait être représentée par un mandataire. Il ressort du compte-rendu de la séance de la formation spécialisée du CODERST du 2 juillet 2012 que les consorts J...ont été entendus. A l'issu de cette séance, le conseil a décidé de sursoir à statuer dans l'attente de la réalisation d'une nouvelle visite de contrôle du service technique de l'habitat le 11 septembre 2012 à laquelle M. J...était présent. Il ressort du compte-rendu de la séance de la formation spécialisée du CODERST du 24 septembre 2012 que le courriel du 11 septembre 2012 de M. J...a été porté à la connaissance des membres du conseil. Aucune disposition du code de la santé publique n'impose la notification de l'avis du conseil aux propriétaires du logement en cause. Dans ces conditions, les requérants ne sont pas fondés à soutenir qu'en leur qualité de bailleurs, ils auraient été " exclus " de la procédure. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du caractère contradictoire de la procédure doit être écarté.
11. Aux termes de l'article R. 1416-5 du code de la santé publique : " Lorsqu'il est consulté sur les déclarations d'insalubrité, le conseil peut se réunir en formation spécialisée, présidée par le préfet et comprenant : 1° Deux représentants des services de l'Etat et le directeur général de l'agence régionale de santé ou son représentant ; 2° Deux représentants des collectivités territoriales ; 3° Trois représentants d'associations et d'organismes, dont un représentant d'associations d'usagers et un représentant de la profession du bâtiment ; 4° Deux personnalités qualifiées dont un médecin. ". Aux termes de l'article 11 du décret du 8 juin 2006 relatif à la composition et au fonctionnement de commissions administratives à caractère consultatif alors applicable : " Le quorum est atteint lorsque la moitié au moins des membres composant la commission sont présents, y compris les membres prenant part aux débats au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle, ou ont donné mandat. Lorsque le quorum n'est pas atteint, la commission délibère valablement sans condition de quorum après une nouvelle convocation portant sur le même ordre du jour et spécifiant qu'aucun quorum ne sera exigé. ".
12. Il ressort du compte-rendu de la séance de la formation spécialisée du CODERST du 2 juillet 2012 que cinq membres étaient présents et que deux autres membres avaient donné mandat pour se faire représenter. Le quorum de la formation spécialisée de ce conseil était donc atteint, autorisant le conseil à siéger. Il ressort également du compte-rendu de la réunion du 2 juillet 2012 et de son annexe que le conseil, présidé par MmeO..., représentante du préfet de la région d'Ile-de-France, préfet de Paris, était composé de Mme A...L..., représentante du préfet, secrétaire général de la préfecture de Paris, M. D..., représentant du délégué territorial de Paris de l'agence régionale de santé, Mme E..., représentante du directeur des transports et de la protection du public de la préfecture de police de Paris, et de Mme N...représentante de l'agence départementale d'information sur le logement. MmeM..., médecin, et M.F..., architecte, avaient respectivement donné mandat à M. D...et à Mme E...pour les représenter. Etaient également présents M.G..., de la direction régionale et interdépartementale de l'hébergement et du logement en Ile-de-France et Mme C...du service technique de l'habitat de la ville de Paris. Il s'ensuit que le moyen tiré de la composition irrégulière de la formation spécialisée du CODERST doit être écarté. En tout état de cause, à supposer même que le CODERST ait été irrégulièrement composé lors de sa séance du 2 juillet 2012, une telle irrégularité, dès lors que le conseil a décidé à l'unanimité de ses membres de surseoir à statuer dans l'attente de la réalisation d'une seconde visite du logement en cause, n'est pas susceptible d'avoir privé les consorts J...d'une garantie ou d'avoir exercé une influence sur le sens de la décision attaquée.
13. Il ressort du compte-rendu de la réunion du CODERST du 24 septembre 2012 et de son annexe versée au dossier, que la réunion a été présidée par M.K..., représentant du préfet de la région d'Ile-de-France, préfet de Paris. En outre, ont siégé au sein du conseil, Mme A...L..., représentante du préfet, secrétaire général de la préfecture de Paris, M. D..., représentant du délégué territorial de Paris de l'agence régionale de santé, Mme E..., représentante du directeur des transports et de la protection du public de la préfecture de police de Paris, Mme N...représentante de l'agence départementale d'information sur le logement et M.F..., architecte, en qualité de personnalité qualifiée. M.P..., membre suppléant représentant l'Union fédérale des consommateurs " Que choisir IDF " avait donné mandat à M.D..., qui pouvait en sa qualité de représentant du délégué territorial de Paris de l'agence régionale de santé exercer régulièrement ce mandat. Nonobstant l'absence de représentants des collectivités territoriales, le quorum de la formation spécialisée de ce conseil était atteint, autorisant le conseil à siéger. En outre, l'annexe susmentionnée comprenait les noms des membres présents lors de cette séance, les membres excusés, le membre absent et ayant donné un mandat ainsi que le nom du mandataire, les qualités de chacun des membres du conseil et les catégories de membres auxquelles ils appartenaient. Il s'ensuit que le moyen tiré de la composition irrégulière de la formation spécialisée du CODERST, qui a rendu son avis à l'unanimité de ses membres le 24 septembre 2012, doit être écarté.
14. Les moyens tirés de l'absence d'impartialité des membres de la formation spécialisée du CODERST réunie le 24 septembre 2012 et de ce que le compte-rendu de séance ne comporterait pas les mentions des formalités que le président du conseil devait obligatoirement accomplir ne sont pas assortis des précisions suffisantes permettant d'en apprécier leur bien-fondé.
15. Il résulte de l'instruction, et en particulier du compte-rendu de la séance de la formation spécialisée du CODERST du 24 septembre 2012 que les membres du conseil ont pris connaissance du rapport initial du service technique de l'habitat de la ville de Paris et de celui établi à la suite de la visite de contrôle du 11 septembre 2012 ainsi que des observations de M. J...adressées par un courriel du même jour. Les requérants n'indiquent pas quels autres documents nécessaires à l'examen de leur affaire n'auraient pas été communiqués aux membres du conseil. Ils n'apportent non plus aucune autre précision à l'appui de leur moyen tiré de ce qu'il n'est pas établi que les dispositions des articles 5 et 9 du décret du 8 juin 2006 susvisé auraient été respectées, lequel n'est ainsi pas assorti des précisions permettant au juge d'en apprécier le bien fondé.
16. Par suite, les consorts J...ne sont pas fondés à soutenir que la procédure à l'issue de laquelle le préfet de la région d'Ile-de-France, préfet de Paris a pris, sur le fondement de l'article L. 1331-26 du code de la santé publique, l'arrêté du 8 novembre 2012, serait entachée d'irrégularité.
17. Le CODERST ayant conclu, dans son avis du 24 septembre 2012, à l'insalubrité du logement avec possibilité d'y remédier, le préfet de la région d'Ile-de-France, préfet de Paris était en situation de compétence liée pour déclarer l'immeuble insalubre à titre remédiable et prescrire les mesures adéquates dans un délai imparti pour leur réalisation. Ainsi, les requérants ne peuvent utilement soutenir que cet arrêté serait insuffisamment motivé. En tout état de cause, cet arrêté comporte les considérations de droit et de fait sur lesquelles il se fonde. Il est, par suite, suffisamment motivé.
18. Il résulte de l'instruction que si à la suite du rapport de l'inspecteur de salubrité du service technique de l'habitat de la ville de Paris du 10 mai 2012, les consorts J...ont procédé, le 27 juin 2012, à des travaux dans le logement dont ils sont propriétaires consistant en la réparation du siphon sous la douche et au remplacement de l'évier de la kitchenette par un évier posé sur un meuble, il ressort des termes de l'avis du CODERST du 24 septembre 2012 que ce logement présentait toujours des problèmes d'humidité par infiltrations récurrentes d'eaux potables et usées dues au mauvais fonctionnement et à la mauvaise étanchéité des canalisations d'alimentation en eau et de vidange des appareils sanitaires et à un défaut d'étanchéité aux pourtours des installations. Le CODERST a également retenu l'absence d'une installation permettant un chauffage normal du logement et une situation d'insécurité pour les personnes en raison de la dangerosité des installations électriques notamment en raison d'un déficit en prises de courant entraînant des branchements dangereux et un risque de contamination des personnes dus à la présence de plomb accessible dans les revêtements. Si l'inspecteur de salubrité et le CODERST n'ont pas identifié précisément une des causes des infiltrations tenant à la rupture accidentelle de la canalisation de vidange sous le receveur de douche, cette circonstance n'est pas de nature à entacher l'avis du CODERST et l'arrêté du 8 novembre 2012 d'erreur de fait. Les requérants n'apportent pas d'éléments de nature à remettre en cause le constat effectué lors de la seconde visite de l'inspecteur de salubrité de l'état d'insalubrité remédiable du logement dont ils sont propriétaires.
19. Le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 1331-26-1 du code de la santé publique est inopérant, l'arrêté du 8 novembre 2012 n'ayant pas été pris sur ce fondement.
20. Sont également sans incidence sur la régularité de la déclaration d'insalubrité du logement en cause et la prescription de mesures tendant à y remédier les circonstances que l'insalubrité résulterait du comportement des locataires et que ces derniers s'opposeraient à la réalisation des travaux. Il appartenait aux requérants, comme ils l'ont d'ailleurs fait en saisissant par la voie du référé le tribunal d'instance, d'utiliser les voies de droit permettant au propriétaire de contraindre son locataire à permettre la réalisation des travaux et d'engager sa responsabilité dans l'hypothèse où il serait à l'origine de dégradations. Au surplus, et en tout état de cause, il ne résulte pas de l'instruction qu'ils aient demandé au préfet de saisir le président du tribunal de grande instance en application des dispositions de l'article L. 1334-4 du code de la santé publique.
21. Enfin, la circonstance que l'administration ne pouvait s'immiscer dans les relations contractuelles entre le bailleur et le locataire en suspendant le versement des loyers alors que le logement restait habitable et habité est, en tout état de cause, sans incidence sur l'appréciation de l'état d'insalubrité.
22. Il résulte de ce qui précède que les consorts J...ne sont pas fondés à soutenir que l'arrêté du 8 novembre 2012 du préfet de la région d'Ile-de-France, préfet de Paris, ensemble la décision du 17 janvier 2013 rejetant leur recours gracieux, seraient entachés d'illégalité. Par suite, leurs conclusions à fin d'annulation de ces décisions doivent être rejetées.
Sur la légalité de l'arrêté du 9 avril 2013 du maire de Paris :
23. Il résulte de l'instruction que par un arrêté en date du 9 avril 2013, le maire de Paris, agissant au nom de l'Etat, a mis en demeure les consorts J...d'exécuter les mesures prescrites par l'arrêté du 8 novembre 2012. Il résulte de l'instruction qu'à la date de l'arrêté du 9 avril 2013, la plupart des travaux destinés à remédier à l'état d'insalubrité du logement en cause n'avaient pas été effectués. Les requérants soutiennent que la réalisation d'office des travaux par l'administration avec des entreprises de son choix, alors qu'eux-mêmes avaient fait appel à des entreprises pour obtenir des devis et que le locataire interdisait l'accès du logement aux entreprises de travaux afin de prolonger la période de suspension des loyers, caractérise " l'infraction de favoritisme ". Toutefois, les pièces versées au dossier ne permettent pas, en tout état de cause, d'étayer ces affirmations. Il ne résulte pas non plus de l'instruction que les travaux prescrits dépassaient par leur ampleur et leur importance ceux rendus nécessaires pour remédier à l'état d'insalubrité du logement en cause.
24. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur leur recevabilité, que les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 9 avril 2013 doivent être rejetées.
Sur la demande indemnitaire :
25. Les consorts J...n'établissent pas, comme il a déjà été dit, que les arrêtés du 8 novembre 2012 et du 9 avril 2013 seraient entachés d'une illégalité fautive de nature à engager la responsabilité de l'Etat. Par suite, leurs conclusions indemnitaires tendant à la réparation du préjudice subi par la perte des loyers non perçus à la suite de la procédure d'insalubrité, qui au surplus n'ont pas été précédées d'une demande préalable, ne peuvent qu'être rejetées.
Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
26. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que les consorts J...demandent au titre des frais liés à l'instance.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1303797/6-3 du Tribunal administratif de Paris du 6 novembre 2014 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par les consorts J...devant le Tribunal administratif de Paris et leurs conclusions présentées en appel sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. I...J..., à Mme B...J...et au ministre des solidarités et de la santé.
Copie en sera adressée au préfet de la région d'Ile-de-France, préfet de Paris.
Délibéré après l'audience du 6 décembre 2018, à laquelle siégeaient :
- M. Lapouzade, président de chambre,
- M. Luben, président assesseur,
- Mme Larsonnier, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 20 décembre 2018.
Le rapporteur,
V. LARSONNIERLe président,
J. LAPOUZADE
Le greffier,
C. POVSELa République mande et ordonne à la ministre des solidarités et de la santé en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 18PA01829