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27/06/2025 | FRANCE | N°24NT03331

France | France, Cour administrative d'appel de NANTES, 3ème chambre, 27 juin 2025, 24NT03331


Vu la procédure suivante :



Par un mémoire, enregistré le 4 avril 2024, Mme A..., représentée par Me Douard, demande à la cour d'enjoindre à la commune de Pleumeur-Bodou (Côtes d'Armor) de prendre les mesures qu'implique l'exécution de l'arrêt n° 22NT02203 du 15 décembre 2023 par lequel la cour a, d'une part, condamné cette commune à lui verser la somme de 11 958,09 euros et lui a, d'autre part, enjoint de faire réaliser l'étude hydrologique et hydraulique préconisée par l'expert, du ruisseau " Le Samson " traversant le terrain de Mme A..., et, selon le s

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Vu la procédure suivante :

Par un mémoire, enregistré le 4 avril 2024, Mme A..., représentée par Me Douard, demande à la cour d'enjoindre à la commune de Pleumeur-Bodou (Côtes d'Armor) de prendre les mesures qu'implique l'exécution de l'arrêt n° 22NT02203 du 15 décembre 2023 par lequel la cour a, d'une part, condamné cette commune à lui verser la somme de 11 958,09 euros et lui a, d'autre part, enjoint de faire réaliser l'étude hydrologique et hydraulique préconisée par l'expert, du ruisseau " Le Samson " traversant le terrain de Mme A..., et, selon le sens des conclusions de cette étude quant à l'impact de travaux de busage sur les terrains à l'aval du cours d'eau, soit de réaliser ces travaux, soit de constater l'impossibilité d'y procéder, le tout dans le délai de 15 mois courant à compter de la mise à disposition de l'arrêt.

Par un courrier du 12 avril 2024, le président de la cour a classé administrativement la demande de condamnation de la commune de Pleumeur-Bodou à verser à Mme A... la somme de 11 958,09 euros et informé cette dernière de l'engagement d'une procédure administrative relative à l'exécution de l'injonction prononcée par la cour de faire réaliser l'étude hydrologique et hydraulique préconisée par l'expert.

Par une ordonnance en date du 3 décembre 2024, le président de la cour, constatant que l'exécution de cet arrêt n'était pas intervenue dans le délai de six mois suivant la saisine de la cour, a ordonné l'ouverture d'une procédure juridictionnelle.

Par des mémoires, enregistrés les 30 décembre 2024, 26 février 2025 et 9 mai 2025, la commune de Pleumeur-Bodou, représentée par la selarl Le Roy, demande à la cour :

- de rejeter la demande d'exécution de l'arrêt de la cour n° 22NT02203 du 15 décembre 2023, présentée par Mme A... ;

- de mettre la somme de 1 000 euros à la charge de Mme A... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle a versé la somme de 11 958,09 euros à Mme A... le 12 avril 2024 et la demande d'exécution concernant cette condamnation présentée par Mme A... a été classée administrativement le même jour ;

- le moyen tiré de ce que Mme A... n'a pas été associée à la réalisation de l''étude hydraulique et hydrologique est inopérant alors que l'arrêt de la cour ne le prévoit pas ;

- Mme A... a introduit une demande d'exécution de l'arrêt de la cour prématurément, seulement quatre mois après la mise à disposition de l'arrêt, alors que la cour a fixé un délai de 15 mois pour réaliser l'étude et les travaux, soit jusqu'au 15 mars 2025 ;

- elle a fait diligence pour rechercher un bureau d'études en mesure de réaliser l'étude hydraulique et hydrologique dans le délai imparti par la cour mais a été confrontée à des difficultés pour trouver au moins deux candidats à la réalisation de cette étude afin de respecter la procédure de marchés publics ;

- elle a signé le devis du cabinet d'études Biotec, le 10 février 2025 et le sous-traitant Quarta est intervenu afin de réaliser la première étape de la mission c'est-à-dire les levés topographiques du site sur la base des cahiers des charges du marché ; les deux phases intitulées " état des lieux/diagnostic " et " solutions techniques et évaluation financière " devraient être achevées à la mi-septembre 2025.

Par un mémoire, enregistré le 17 janvier 2025, Mme A..., représentée par Me Douard, conclut au rejet des conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le volet financier de l'arrêt de la cour correspondant à la condamnation à la réparation de ses préjudices, aux frais d'expertise et aux frais de justice pour un montant total de 11 958,09 euros a effectivement été exécuté par la commune de Pleumeur-Bodou ;

- sa demande d'exécution de l'injonction décidée par la cour de faire faire une étude hydraulique et hydrologique n'est pas prématurée alors qu'elle n'a pas été associée par la commune de Pleumeur-Bodou à la réalisation de cette étude , que la commune a mis 7 mois pour rédiger une simple note de présentation à l'intention de la communauté d'agglomération de Lannion Trégor en vue de rechercher un bureau d'études, que le rapport de l'expertise du 1er avril 2019 ordonnée par le tribunal administratif de Rennes n'a pas été communiqué aux 6 bureaux d'étude ; que le choix du bureau d'études Biotec n'apparaît pas impartial alors que ce bureau d'études a déjà travaillé sur le dossier de la commune de Trébeurden, et enfin que la dégradation de son terrain et de son habitation s'est poursuivie.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Marion,

- les conclusions de M. Catroux, rapporteur public,

- les observations de Me Cassard pour la communauté urbaine de Pleumeur-Bodou.

Une note en délibéré présentée pour la commune de Pleumeur-Bodou a été enregistrée le 20 juin 2025.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A... est propriétaire des parcelles cadastrées ZD n° 95, 111 et 125 situées au lieu-dit Coatrehouézan sur le territoire de la commune de Pleumeur-Bodou (Côtes-d'Armor). Sa maison est implantée sur la parcelle ZD n° 95 et son jardin sur les parcelles nos 111 et 125. Son jardin est traversé par le ruisseau " Le Samson " qui débouche, en sortie de terrain, sous une voie communale au moyen d'une buse cylindrique et reprend ensuite son cours sur les terrains situés de l'autre côté de la voie publique. Par un arrêt n° 22NT02203 du 15 décembre 2023, la cour a jugé que la commune de Pleumeur-Bodou était responsable des inondations des parcelles nos 111 et 125 de Mme A... en en périodes de retour et que ces inondations avaient pour cause le sous-dimensionnement de la buse située sous la voie communale. La cour a enjoint à la commune de Pleumeur-Bodou de faire réaliser une étude hydrologique et hydraulique sur l'ensemble du ruisseau puis, sous réserve que les conclusions de cette étude ne s'y opposent pas, de procéder à la réalisation des travaux de renforcement de la buse existante et d'installation d'une deuxième buse de décharge, préconisés par l'expertise réalisée en première instance. Cette étude et les éventuels travaux de busage devaient être réalisés dans un délai de 15 mois courant à compter de la mise à disposition de l'arrêt, soit jusqu'au 15 mars 2025. Par un courrier du 4 avril 2024, Mme A... a demandé à la cour d'enjoindre à la commune de Pleumeur-Bodou de prendre les mesures qu'implique l'exécution de l'arrêt n° 22NT02203 du 15 décembre 2023. Par une ordonnance du 12 avril 2024, le président de la cour a classé administrativement la demande d'exécution concernant la condamnation de la commune à verser la somme totale de 11 958,09 euros à Mme A... et engagé la procédure administrative d'exécution de l'arrêt s'agissant de l'injonction de faire réaliser une étude hydrologique et hydraulique et de faire d'éventuels travaux correctifs de busage. Par une ordonnance du 3 décembre 2024, le président de la cour, constatant que l'exécution de cet arrêt n'était pas intervenue dans le délai de six mois suivant la saisine de la cour, a ordonné l'ouverture d'une procédure juridictionnelle.

2. Aux termes de l'article L. 911-4 du code de justice administrative : " En cas d'inexécution d'un jugement ou d'un arrêt, la partie intéressée peut demander à la juridiction, une fois la décision rendue, d'en assurer l'exécution. / (...) " et aux termes de l'article R. 921-6 de ce code : " Dans le cas où le président estime nécessaire de prescrire des mesures d'exécution par voie juridictionnelle, et notamment de prononcer une astreinte, (...) le président de la cour (...) ouvre par ordonnance une procédure juridictionnelle. (...) / L'affaire est instruite et jugée d'urgence. Lorsqu'elle prononce une astreinte, la formation de jugement en fixe la date d'effet. ". Ainsi, il est loisible au juge d'apprécier l'opportunité de compléter ou de modifier les mesures qu'il a prescrites notamment par la fixation d'un nouveau délai d'exécution et le cas échéant le prononcé d'une astreinte.

3. En premier lieu, il ne résulte pas des termes des motifs et du dispositif de l'arrêt de la cour n° 22NT02203 du 15 décembre 2023 que la commune de Pleumeur-Bodou était tenue d'informer Mme A... des démarches entreprises pour trouver un bureau d'études ni d'associer Mme A... à la réalisation de l'étude hydraulique et hydrologique ordonnée par la cour ni même de tenir informée Mme A... du stade d'avancement de la réalisation des études ordonnées par la cour. Par suite, le moyen tiré de ce que l'arrêt de la cour ne serait pas en cours d'exécution du fait de l'absence d'association de Mme A... à la réalisation de l'étude hydrologique et hydraulique doit être écarté.

4. En second lieu, s'il est vrai que la commune de Pleumeur-Bodou a mis plus de sept mois pour rédiger le cahier des charges nécessaire à la passation du marché public de réalisation d'une étude hydrologique et hydraulique du ruisseau " Le Samson ", il résulte de l'instruction que ce délai s'explique, au moins en partie, par la circonstance que la commune a été contrainte pour rédiger ce cahier des charges de se rapprocher de la communauté d'agglomération de Lannion Trégor, seule compétente en matière de gestion des milieux aquatiques et de la prévention des inondations et d'obtenir les éléments utiles d'information de cette collectivité dont elle est membre. Par ailleurs il résulte de l'instruction que ce cahier des charges finalisé en juillet 2024 a été adressé à six bureaux d'études et que seul le bureau Biotec s'est porté candidat au marché et a proposé une offre le 4 novembre 2024. Par suite, la commune de Pleumeur-Bodou doit être regardée comme ayant commencé à exécuter l'injonction ordonnée par la cour dans le délai de quinze mois de la mise à disposition de l'arrêt. Dans ces conditions, eu égard aux difficultés dans l'exécution de l'arrêt de la cour rencontrées par la commune de Pleumeur-Bodou et de la circonstance que l'injonction prononcée par la cour n'a pas été entièrement réalisée, il y a seulement lieu de prononcer une nouvelle injonction à son encontre en vue de lui ordonner de produire les conclusions de l'étude hydrologique et hydraulique et le justificatif de la réalisation des travaux de busage pour le cas où les conclusions de l'étude y seraient favorables dans le délai de 15 mois courant à compter de la mise à disposition du présent arrêt.

Sur les frais liés au litige :

5. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de Mme A..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement à la commune de Pleumeur-Bodou de la somme qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : Il est enjoint à la commune de Pleumeur-Bodou de produire les conclusions de l'étude hydraulique et hydrologique réalisée par le bureau d'études Biotec et, le cas échéant, la justification de la réalisation des travaux de busage du ruisseau " Le Samson " dans un délai de 15 mois courant à compter de la mise à disposition du présent arrêt.

Article 2 : Les conclusions de la commune de Pleumeur-Bodou tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et à la commune de Pleumeur-Bodou. .

Copie en sera adressée, pour information, au préfet des Côtes d'Armor.

Délibéré après l'audience du 12 juin 2025, à laquelle siégeaient :

- Mme Brisson, présidente de chambre,

- M. Vergne, président assesseur,

- Mme Marion, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 juin 2025.

La rapporteure,

I. MARION

La présidente,

C. BRISSON

Le greffier,

Y. MARQUIS

La République mande et ordonne au ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 24NT03331


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 24NT03331
Date de la décision : 27/06/2025
Type de recours : Exécution décision justice adm

Composition du Tribunal
Président : Mme la Pdte. BRISSON
Rapporteur ?: Mme Isabelle MARION
Rapporteur public ?: M. CATROUX
Avocat(s) : PENAUD & DOUARD AVOCATS ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 20/08/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-06-27;24nt03331 ?
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