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24/06/2025 | FRANCE | N°22NT00903

France | France, Cour administrative d'appel de NANTES, 5ème chambre, 24 juin 2025, 22NT00903


Vu la procédure suivante :



Par un arrêt n° 22NT00903 du 2 juillet 2024, la cour administrative d'appel de Nantes, sur le fondement de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, a sursis à statuer sur la requête présentée par M. et Mme B... et F... E..., gérants de la SCI E..., tendant à l'annulation du jugement nos 1801568 et 1801989 du 28 janvier 2022, par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande tendant à l'annulation des arrêtés du maire de Binic-Etables-sur-Mer (Côtes-d'Armor) du 27 septembre 2017, du 14 juin 2021 et du 22 juin

2023 délivrant des permis de construire, initial et modificatifs, aux con...

Vu la procédure suivante :

Par un arrêt n° 22NT00903 du 2 juillet 2024, la cour administrative d'appel de Nantes, sur le fondement de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, a sursis à statuer sur la requête présentée par M. et Mme B... et F... E..., gérants de la SCI E..., tendant à l'annulation du jugement nos 1801568 et 1801989 du 28 janvier 2022, par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande tendant à l'annulation des arrêtés du maire de Binic-Etables-sur-Mer (Côtes-d'Armor) du 27 septembre 2017, du 14 juin 2021 et du 22 juin 2023 délivrant des permis de construire, initial et modificatifs, aux consorts C... pour la construction d'une maison d'habitation, jusqu'à l'expiration d'un délai de quatre mois à compter de la notification de l'arrêt imparti aux consorts C... et à la commune de Binic-Etables-sur-Mer, pour produire une mesure de régularisation du vice tiré des insuffisances de la demande de permis de construire s'agissant des surfaces de plancher et de la représentation du terrain de l'opération.

Le 9 décembre 2024, la commune de Binic-Etables-sur-Mer a communiqué à la cour un arrêté du 3 décembre 2024 portant permis de construire modificatif n° 3, de régularisation.

Par des mémoires enregistrés les 8 janvier et 24 février 2025, M. et Mme B... et F... E..., gérants de la SCI E..., représentés par Me Vic, concluent aux mêmes fins que leurs précédentes écritures et demandent en outre l'annulation de l'arrêté du 3 décembre 2024 du maire de Binic-Etables-sur-Mer accordant le permis modificatif n° 3 sollicité.

M. et Mme E... soutiennent que :

- le permis de construire modificatif n° 3, qui est entaché de vices propres, n'a pas eu pour effet de régulariser le vice retenu par la cour ; la demande de permis de construire modificatif n°3 est insuffisante s'agissant du calcul des surfaces de plancher ; les surfaces aménagées en vue du stationnement des véhicules sont déduites du calcul des surfaces de plancher ; le terrain d'assiette ayant été divisé, il ne peut représenter la totalité de la parcelle anciennement cadastrée section AB n° 617 ;

- la demande de permis de construire modificatif n° 3 est entachée de fraude ; les consorts C... ont fourni des informations erronées quant à la consistance et aux caractéristiques du terrain d'assiette du projet dès lors que le terrain d'assiette du projet a été divisé en deux lots ; la division de la parcelle cadastrée section AB n° 617 n'a pas été autorisée ; la demande ne mentionne pas la destination de garage de la construction existante et destinée à être démolie ; la demande ne mentionne pas la décision de non opposition du 6 avril 2018 autorisant l'agrandissement de la terrasse, la création d'un sous-sol et la transformation d'une ouverture de la maison existante ; la demande a pour but de tromper l'autorité administrative quant aux règles d'urbanisme applicables ; la division autorisée prive la parcelle cadastrée section AB n° 1501 de tout accès automobile et de places de stationnements ;

- les demandes de permis de construire sont entachées de fraude ; les consorts C... devaient obtenir une autorisation de lotir ; la parcelle cadastrée section AB n° 617 a fait l'objet d'une division qui n'a pas été autorisée ;

- le projet contesté méconnait les dispositions de l'article UB 12 du règlement du plan local d'urbanisme ; la construction projetée doit comporter quatre places de stationnement ; la surface des places de stationnement est inférieure à la surface requise par le règlement du plan local d'urbanisme ; la construction existante et maintenue ne dispose plus de places de stationnement ;

- le projet contesté méconnait l'article UB 3 du règlement du plan local d'urbanisme dès lors qu'il conduit à priver la construction existante et maintenue de tout accès automobile et de places de stationnements ;

- les vices entachant la demande de permis de construire ne sont pas régularisables dès lors que cette dernière est entachée de fraude ; un plan local d'urbanisme intercommunal est en cours d'approbation.

Par des mémoires en défense enregistrés les 23 décembre 2024 et 28 janvier 2025, M. A... C... et Mme D... C..., représentés par Me Poilvet, concluent aux mêmes fins que leurs précédentes écritures.

Ils soutiennent que les moyens soulevés par M. et Mme E... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Dubost,

- les conclusions de M. Frank, rapporteur public,

- et les observations de Me Vic représentant M. et Mme E..., celles de Me Le Guennec, substituant Me Donias, représentant la commune de Binic-Etables-sur-Mer et celles de Me Poilvet, représentant les consorts C....

Une note en délibéré, présentée pour M. et Mme E..., a été enregistrée le 6 juin 2025.

Une note en délibéré, présentée par les consorts C..., a été enregistrée le 10 juin 2025.

Considérant ce qui suit :

1. Les consorts C... ont déposé, le 28 août 2017, une demande de permis de construire une maison d'habitation d'une surface de plancher de 117,68 m² sur un terrain situé rue de la Corniche, cadastré section AB n° 617, à Binic-Etables-sur-Mer (Côtes-d'Armor). Par un arrêté du 27 novembre 2017, le maire de Binic-Etables-sur-Mer a délivré le permis de construire sollicité. Par des arrêtés des 14 juin 2021 et 22 juin 2023, le maire de Binic-Etables-sur-Mer a délivré aux consorts C... des permis de construire modificatif n° 1 et 2. A la demande de M. et Mme E..., par un arrêt avant-dire droit du 2 juillet 2024, la cour administrative d'appel de Nantes a jugé que les arrêtés contestés étaient illégaux en tant que les dossiers de demande étaient incomplets. Le même arrêt expose qu'eu égard aux insuffisances des demandes de permis de construire, la cour n'est pas en mesure de se prononcer sur le moyen tiré de ce que le projet litigieux méconnaîtrait les dispositions de l'article UB 12 du règlement du plan local d'urbanisme. En application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme la cour a ainsi sursis à statuer sur la requête de M. et Mme E... jusqu'à l'expiration d'un délai de quatre mois, à compter de la notification de l'arrêt, imparti aux consorts C... et à la commune de Binic-Etables-sur-Mer pour produire une mesure de régularisation du vice tiré des insuffisances de la demande de permis de construire. Par un arrêté du 3 décembre 2024, le maire de Binic-Etables-sur-Mer a accordé aux consorts C... un permis de construire modificatif n° 3 de régularisation, dont M. et Mme E... demandent également l'annulation.

2. Aux termes de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme : " Sans préjudice de la mise en œuvre de l'article L. 600-5, le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager ou contre une décision de non-opposition à déclaration préalable estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé, sursoit à statuer, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation, même après l'achèvement des travaux. Si une mesure de régularisation est notifiée dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations. Le refus par le juge de faire droit à une demande de sursis à statuer est motivé. ".

3. A compter de la décision par laquelle le juge recourt à l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, seuls des moyens dirigés contre la mesure de régularisation notifiée, le cas échéant, au juge peuvent être invoqués devant ce dernier. A ce titre, les parties peuvent, à l'appui de la contestation de l'acte de régularisation, invoquer des vices qui lui sont propres et soutenir qu'il n'a pas pour effet de régulariser le vice que le juge a constaté dans sa décision avant dire droit. Elles ne peuvent en revanche soulever aucun autre moyen, qu'il s'agisse d'un moyen déjà écarté par la décision avant dire droit ou de moyens nouveaux, à l'exception de ceux qui seraient fondés sur des éléments révélés par la procédure de régularisation.

Sur la régularisation du permis de construire par l'arrêté du 3 décembre 2024 :

4. La circonstance que le dossier de demande de permis de construire ne comporterait pas l'ensemble des documents exigés par les dispositions du code de l'urbanisme, ou que les documents produits seraient insuffisants, imprécis ou comporteraient des inexactitudes, n'est susceptible d'entacher d'illégalité le permis de construire qui a été accordé que dans le cas où les omissions, inexactitudes ou insuffisances entachant le dossier ont été de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable.

5. Aux termes de l'article R. 431-6 du code de l'urbanisme : " Lorsque le terrain d'assiette comporte des constructions, la demande précise leur destination, par référence aux différentes destinations et sous-destinations définies aux articles R. 151-27 et R. 151-28, leur surface de plancher et indique si ces constructions sont destinées à être maintenues et si leur destination ou sous-destination est modifiée par le projet. ". Aux termes de l'article R. 431-9 du même code : " Le projet architectural comprend également un plan de masse des constructions à édifier ou à modifier coté dans les trois dimensions. Ce plan de masse fait apparaître les travaux extérieurs aux constructions, les plantations maintenues, supprimées ou créées et, le cas échéant, les constructions existantes dont le maintien est prévu. (...) ".

6. Le sursis à statuer décidé par l'arrêt du 2 juillet 2024 est motivé par l'insuffisance des demandes de permis de construire qui comportent des incohérences quant à la surface de plancher de la construction existante et qui ne représentent pas le terrain de l'opération dans son intégralité, notamment pas la construction existante conservée dans sa totalité.

7. D'une part, il ressort de la demande de permis de construire modificatif n° 3 visant à régulariser le vice retenu par la cour que le projet en cause s'implante sur une parcelle sur laquelle sont " actuellement implantés une habitation et un bâtiment " et qu'il vise à la " construction d'une maison individuelle en lieu et place du bâtiment existant ", la maison existante ainsi que ses trois accès étant maintenus. En outre, les plans de masse joints à la demande représentent le terrain de l'opération projetée, dans son ensemble ainsi que toutes les constructions à l'état initial et à l'état futur. Par ailleurs, il ressort des demandes de permis de construire initial et modificatifs que l'opération projetée s'implantera sur la parcelle cadastrée section AB n°617 d'une superficie de 2 664 m². Les requérants font valoir que le décès, le 19 février 2022, de Mme C..., pétitionnaire de l'autorisation de construire, a conduit dans le cadre du partage successoral à la division de la parcelle cadastrée section AB n° 617, en deux parcelles désormais cadastrées section AB n° 1501 et 1502. Toutefois, si le permis de construire modificatif n° 3 ne mentionne pas que le terrain de l'opération contestée est composé de ces deux parcelles, cette seule circonstance n'a pas été de nature à fausser l'appréciation de l'autorité administrative quant à la conformité du projet à la règlementation applicable, dès lors que le terrain de l'opération litigieuse conserve sous une numérotation cadastrale différente les mêmes caractéristiques. Dans ces conditions, la demande de permis de construire modificatif n° 3 n'a ni pour objet, ni pour effet de modifier la consistance du terrain de l'opération projetée, et les requérants ne sont pas fondés à soutenir que cette demande ne devait pas porter sur l'intégralité de la parcelle anciennement cadastrée section AB n°617.

8. D'autre part, il ressort du formulaire Cerfa joint à la demande de permis de construire modificatif n° 3 que celui-ci fait figurer les surfaces de plancher existantes, créées, supprimées ainsi que les surfaces de plancher à l'issue de l'opération projetée. Si les requérants font valoir à cet égard que cette demande ne comporte pas la mention de la destination de la construction démolie, il ressort des demandes de permis de construire modificatifs n° 1 et 2 que cette construction est à usage de garage, de sorte que l'appréciation de l'autorité administrative portée sur la conformité du projet à la réglementation applicable n'a pas été faussée.

9. Par suite, la demande de permis de construire modificatif n° 3 présente avec suffisamment de précisions le terrain d'assiette du projet et les surfaces de plancher de la construction existante maintenue. Dans ces conditions, l'arrêté du 3 décembre 2024 a régularisé le vice tiré de l'insuffisance des demandes de permis de construire relevé par l'arrêt du 2 juillet 2024.

Sur les vices propres dont serait entaché l'arrêté du 3 décembre 2024 :

En ce qui concerne le moyen tiré de la fraude :

10. En premier lieu, d'une part, la division de propriété de la parcelle cadastrée section AB n° 617 dans le cadre du partage successoral réalisé postérieurement au décès de Mme C..., le 19 février 2022, n'a pas été révélée par la procédure de régularisation. D'autre part, la circonstance que cette division n'ait pas été préalablement autorisée par l'autorité administrative compétente, à la supposer avérée, est sans incidence sur la légalité du permis de construire modificatif n° 3 qui n'a ni pour objet ni pour effet d'autoriser une telle division.

11. En deuxième lieu, comme il a été dit au point 7, le terrain de l'opération conserve, sous une numérotation cadastrale différente, les mêmes caractéristiques, de sorte que M. et Mme E... ne sont pas fondés à soutenir que des informations erronées auraient été fournies par les consorts C... quant à la consistance et aux caractéristiques du terrain d'assiette du projet, de nature à fausser l'appréciation de l'autorité administrative quant à la conformité du projet à la règlementation applicable.

12. En troisième lieu, d'une part, comme il a été dit au point 8, si le permis de construire modificatif n° 3 ne mentionne pas que le bâtiment démoli est à usage de garage, les demandes de permis de construire modificatifs n° 1 et 2 indiquent que cette construction est à cet usage. Par ailleurs, il ressort de la demande de permis de construire modificatif n° 3 qu'aucun stationnement n'est affecté, par le permis de construire délivré le 24 novembre 1970, à la construction existante et maintenue. Par suite, la circonstance que le permis de construire modificatif n° 3 ne mentionne pas la destination du bâtiment démoli n'a pas été de nature à fausser l'appréciation de l'autorité administrative quant à la règlementation applicable.

13. En quatrième lieu, aucune disposition législative ni règlementaire ne faisait obligation aux consorts C... de mentionner l'ensemble des autorisations de construire ayant été accordées sur le terrain de l'opération en cause. Ainsi, la circonstance que la demande de permis de construire modificatif n° 3 ne mentionne pas l'arrêté du maire de Binic-Etables-sur-Mer du 6 avril 2018 autorisant notamment la réalisation d'une terrasse sur la construction existante et maintenue est sans incidence sur la légalité de la décision contestée et n'est pas de nature à démontrer une fraude de la part des consorts C....

14. En cinquième lieu, lorsqu'une construction existante n'est pas conforme à une ou plusieurs dispositions d'un plan local d'urbanisme régulièrement approuvé, un permis de construire ne peut être légalement délivré pour la modification de cette construction, sous réserve de dispositions de ce plan spécialement applicables à la modification des immeubles existants, que si les travaux envisagés rendent l'immeuble plus conforme aux dispositions réglementaires méconnues ou s'ils sont étrangers à ces dispositions. Les travaux entrepris sur un immeuble existant qui n'impliquent pas la création de nouveaux logements mais seulement l'extension de logements existants doivent être regardés comme étrangers aux dispositions d'un plan local d'urbanisme imposant un nombre minimal de places de stationnement par logement.

15. Si l'unité foncière sur laquelle est réalisée l'opération projetée comporte déjà une maison d'habitation, il ressort toutefois des pièces du dossier, notamment du permis de construire délivré le 24 novembre 1970 pour la construction de cette maison existante et maintenue, que le garage, dont la démolition a été autorisée par les arrêtés contestés, n'est pas affecté à cette construction. Par ailleurs, il ressort du permis de construire modificatif n° 3 que tous les accès existants du terrain de l'opération seront maintenus. Dans ces conditions, l'arrêté en litige n'a pas pour effet de priver la construction existante et maintenue de places de stationnements ni de tout accès à la voie publique.

16. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que le permis de construire modificatif n° 3 serait entaché de fraude doit être écarté.

En ce qui concerne le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article UB 3 du règlement du plan local d'urbanisme :

17. Aux termes de l'article UB 3 du règlement du plan local d'urbanisme (PLU) : " 3.1 - Conditions d'accès aux voies ouvertes au public : Pour être constructible un terrain doit avoir accès à une voie publique ou privée. (...) 3.2 - Conditions de desserte par les voies publiques ou privées : La réalisation d'un projet est subordonnée à la desserte du terrain dont les caractéristiques répondent à sa destination et à l'importance du trafic généré par le projet (...) ".

18. Il ressort des pièces du dossier que l'ensemble des accès existants au terrain de l'opération projetée seront maintenus, de sorte que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article UB 3 du règlement du PLU doit être écarté.

Sur les vices révélés par la procédure de régularisation :

En ce qui concerne le moyen tiré de ce qu'il a été procédé à une division en propriété de la parcelle cadastrée section AB n° 617 :

19. Les requérants font valoir que la parcelle cadastrée section AB n° 617 a été divisée en deux lots en vertu d'un acte de partage du 7 novembre 2022. Toutefois, d'une part, comme il a été dit, cette circonstance n'a pas été révélée par la procédure de régularisation. D'autre part, la circonstance que cette division, postérieure à l'arrêté du 27 novembre 2017 portant permis de construire, n'ait pas été préalablement autorisée par l'autorité administrative compétente, à la supposer avérée, est sans incidence sur la légalité du permis de construire délivré. Le moyen doit par suite être écarté.

En ce qui concerne le moyen tiré de la fraude :

20. Les requérants font valoir que la procédure de régularisation a permis de révéler l'intention frauduleuse des consorts C... afin d'obtenir un permis de construire. Ils se prévalent ainsi de ce que l'intention de tromper l'autorité administrative serait établie par le permis de construire modificatif n° 2 et de ce qu'à la suite du décès de Mme C..., le 19 février 2022, la parcelle cadastrée section AB n° 617 a fait l'objet d'une division en propriété dans le cadre du partage successoral. Toutefois, ces éléments n'ont pas été révélés par la procédure de régularisation de sorte que les requérants ne peuvent utilement s'en prévaloir. Le moyen tiré de ce que les arrêtés contestés seraient entachés de fraude doit donc être écarté.

Sur le moyen réservé par l'arrêt de sursis à statuer du 2 juillet 2024 :

21. Aux termes de l'article UB 12 du règlement du PLU : " Réalisation des aires de stationnement. Il sera exigé : - construction à usage d'habitat individuel : au moins une place de stationnement par tranche de 60 m² de surface de plancher, avec au moins 2 places par logement (...) ". Aux termes des dispositions générales du règlement du PLU " Stationnement : pour la transformation d'une aire de stationnement en un nombre de places, il sera considéré d'une place de stationnement et les surfaces de circulation afférentes représentent 25 mètres carrés. ".

22. En premier lieu, l'opération projetée qui conduit à la création d'une surface de plancher de 112,29 m² doit comporter, en application des dispositions citées au point précédent, deux places de stationnement. Il ressort des pièces du dossier, que le permis de construire contesté prévoit la réalisation de celles-ci.

23. En deuxième lieu, comme il a été dit au point 15, la parcelle cadastrée section AB n° 617 sur laquelle est réalisée l'opération projetée comporte déjà une maison d'habitation. Il ressort des pièces du dossier, notamment du permis de construire délivré le 24 novembre 1970 pour la construction de la maison existante et maintenue, que le garage, dont la démolition a été autorisée par les arrêtés contestés, n'est pas affecté à cette construction. Par suite, l'autorisation de construire délivrée n'avait pas à prévoir quatre places de stationnements et elle n'a pas pour effet de rendre la construction existante et maintenue moins conforme aux dispositions du PLU relatives aux stationnements.

24. En troisième lieu, les requérants soutiennent que les places de stationnement prévues ne sont pas d'une superficie de 25 m² comme l'exigent les dispositions du règlement du PLU citées au point 21. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que ces places de stationnements seront réalisées dans l'espace libre situé entre l'accès existant à la parcelle et la construction projetée dont il n'est pas démontré, notamment compte tenu de l'emplacement des arbres conservés, qu'il serait insuffisant pour réaliser les deux places envisagées.

25. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article UB 12 du règlement du PLU doit être écarté.

26. Il résulte de tout ce qui précède que le vice né de l'insuffisance des dossiers de demande de permis de construire des consorts C... au regard des articles R. 431-6 et R. 431-9 du code de l'urbanisme, entachant les arrêtés des 27 septembre 2017, 14 juin 2021 et 22 juin 2023 du maire de Binic-Etables-sur-Mer, a été régularisé par son arrêté du 3 décembre 2024. Par suite M. et Mme E... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande. Ils ne sont par ailleurs pas fondés à demander l'annulation des arrêtés du maire de Binic-Etables-sur-Mer des 22 juin 2023 et 3 décembre 2024 portant permis de construire modificatifs n° 2 et 3.

Sur les frais d'instance :

27. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens (...) ".

28. Il résulte de ces dispositions que le paiement des sommes exposées et non comprises dans les dépens ne peut être mis à la charge que de la partie qui perd pour l'essentiel. La circonstance qu'au vu de la régularisation intervenue en cours d'instance, le juge rejette finalement les conclusions dirigées contre la décision initiale, dont le requérant était fondé à soutenir qu'elle était illégale et dont il est, par son recours, à l'origine de la régularisation, ne doit pas à elle seule, pour l'application de ces dispositions, conduire le juge à mettre les frais à sa charge ou à rejeter les conclusions qu'il présente à ce titre. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de rejeter l'ensemble des conclusions des parties présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme E... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Binic-Etables-sur-Mer et les consorts C... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme B... et F... E..., à Mme D... C..., à M. A... C... et à la commune de Binic-Etables-sur-Mer.

Délibéré après l'audience du 5 juin 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Degommier, président de chambre,

- M. Rivas, président-assesseur,

- Mme Dubost, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 24 juin 2024.

La rapporteure,

A.-M. DUBOST

Le président,

S. DEGOMMIER

La greffière,

S. PIERODÉ

La République mande et ordonne au préfet des Côtes-d'Armor en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 22NT00903


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 22NT00903
Date de la décision : 24/06/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. DEGOMMIER
Rapporteur ?: Mme Anne-Maude DUBOST
Rapporteur public ?: M. FRANK
Avocat(s) : SCP GUILLOTIN POILVET AUFFRET

Origine de la décision
Date de l'import : 26/06/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-06-24;22nt00903 ?
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