Vu le recours, enregistré au greffe de la Cour le 31 mars 2000, présenté par le garde des sceaux, ministre de la justice ;
Le garde des sceaux, ministre de la justice demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 98-3227 du 20 janvier 2000 par lequel le Tribunal administratif de Nantes a annulé sa décision du 3 juin 1998 portant rétrogradation de M. X... ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. devant le Tribunal administratif de Nantes ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de procédure pénale, notamment son article D.220 ;
C
Vu l'arrêté du garde des sceaux, ministre de la justice du 6 juin 1997 portant délégation de signature ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 26 février 2004 :
- le rapport de M. GEFFRAY, premier conseiller,
- les observations de Me CHOUCQ, avocat de M. X... ,
- et les conclusions de M. MILLET, commissaire du gouvernement ;
Considérant que, par arrêté du 3 juin 1998, le garde des sceaux, ministre de la justice a rétrogradé M. , premier surveillant à la maison d'arrêt de La Roche-sur-Yon, pour avoir, d'une part, manqué aux obligations que lui impose l'article D.220 du code de procédure pénale en laissant entrer de l'alcool dans la maison d'arrêt, et en consommant, d'autre part, fait preuve de négligence en oubliant de remettre en lieu sûr les clés de l'armoire à clefs ; que, par jugement du 20 janvier 2000, le Tribunal administratif de Nantes a annulé la rétrogradation de M. ; que le garde des sceaux, ministre de la justice fait appel de ce jugement ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment de déclarations concordantes des agents concernés et du rapport de l'inspection des services pénitentiaires établi après enquête, que, d'une part, M. ne s'est opposé ni à l'introduction d'alcool dans les locaux de la maison d'arrêt de La Roche-sur-Yon, qui était interdite par le règlement intérieur de l'établissement pénitentiaire, par deux surveillants de service durant la nuit du 11 au 12 août 1996, ni à la consommation excessive d'alcool par ceux-ci, à supposer même que l'intéressé n'en aurait pas consommé ; que, d'autre part, M. , alors qu'il en avait la responsabilité, a omis de remettre en lieu sûr la clef de l'armoire contenant les clefs de l'établissement et, notamment, celles des cellules, puisque seules deux clés étaient détenues ce soir, l'une par le directeur adjoint de la maison d'arrêt, l'autre par M. ; que c'est, dès lors, à tort, que le Tribunal administratif de Nantes s'est fondé, pour annuler la rétrogradation de M. , sur l'inexactitude matérielle de ces faits ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. devant le Tribunal administratif de Nantes ;
Considérant, en premier lieu, que M. Y, directeur de l'administration pénitentiaire, était titulaire d'une délégation de signature du garde des sceaux, ministre de la justice, en date du 6 juin 1997, publiée au Journal officiel du 10 juin 1997 ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que le directeur de l'administration pénitentiaire n'était pas compétent pour signer la sanction infligée à M. doit être écarté ;
Considérant, en deuxième lieu, que l'autorité disciplinaire aurait pu se fonder, pour rétrograder M. , non, comme elle l'a fait, sur les dispositions de l'article D.220 du code de procédure pénale qui prévoient qu'indépendamment des défenses résultant de la loi pénale, il est interdit aux agents des services extérieurs de l'administration pénitentiaire de fumer ou de boire à l'intérieur de la détention ou d'y paraître en état d'ébriété, mais sur les dispositions du règlement intérieur de la maison d'arrêt de La Roche-sur-Yon qui interdit toute introduction et consommation d'alcool ; que, dès lors, la rétrogradation de M. au motif pris de ce que celui-ci n'a pas empêché l'introduction et la consommation d'alcool durant la nuit du 11 au 12 août 1996 n'est pas entachée d'une erreur de droit ;
Considérant, enfin, que les comportements de M. qui, par son manque de rigueur, n'a pas empêché la consommation d'alcool par deux surveillants et qui, par sa négligence, a oublié de remettre en lieu sûr les clefs de l'armoire à clefs, permettant ainsi à ces deux surveillants en état d'ébriété d'ouvrir des portes de cellules occupées par des détenus et leur laissant la possibilité d'ouvrir l'ensemble des autres portes, ont été à l'origine de graves désordres durant la nuit du 11 au 12 août 1996 ; qu'eu égard à la gravité des fautes commises par M. et aux fonctions d'encadrement du personnel de surveillance que celui-ci exerçait, le directeur de l'administration pénitentiaire a pu, sans commettre une erreur manifeste d'appréciation, prononcer à l'encontre de l'intéressé sa rétrogradation ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le garde des sceaux, ministre de la justice est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nantes a annulé l'arrêté de rétrogradation de M. ;
Sur l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à payer à M. la somme que celui-ci demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Nantes du 20 janvier 2000 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. X... devant le Tribunal administratif de Nantes et ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au garde des sceaux, ministre de la justice et à M. X... .
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