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10/04/2003 | FRANCE | N°00NT00077

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3eme chambre, 10 avril 2003, 00NT00077


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 21 janvier 2000, présentée pour M. Trevor X, demeurant ..., par Me Olivier COUDRAY, avocat au barreau de Paris ;

M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler l'article 2 du jugement nos 95-2109 et 96-511 du 16 novembre 1999 par lequel le Tribunal administratif d'Orléans a rejeté ses conclusions dirigées contre l'arrêté du 22 décembre 1995 par lequel le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche l'a nommé dans le corps des professeurs agrégés sans prendre en compte les services q

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Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 21 janvier 2000, présentée pour M. Trevor X, demeurant ..., par Me Olivier COUDRAY, avocat au barreau de Paris ;

M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler l'article 2 du jugement nos 95-2109 et 96-511 du 16 novembre 1999 par lequel le Tribunal administratif d'Orléans a rejeté ses conclusions dirigées contre l'arrêté du 22 décembre 1995 par lequel le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche l'a nommé dans le corps des professeurs agrégés sans prendre en compte les services qu'il a antérieurement accomplis à l'Université de Lyon et dans des établissements scolaires en Grande-Bretagne ;

2°) d'annuler l'arrêté attaqué ;

C CNIJ n° 30-02-02-02-01

n° 01-03-01-02-01-01-04

n° 15-05-01-01

3°) d'enjoindre sur le fondement de l'article L.911-1 du code de justice administrative, et sous astreinte de 500 F par jour de retard, la prise en compte dans son ancienneté de ses services antérieurs avec reconstitution de sa carrière ;

4°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 16 581 F au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le Traité instituant la Communauté européenne, et notamment son article 39 ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu le décret n° 51-1423 du 5 décembre 1951 modifié portant règle-ment d'administration publique pour la fixation des règles suivant lesquelles doit être déterminée l'ancienneté du personnel nommé dans certains corps de fonctionnaires relevant du ministère de l'éducation nationale ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 mars 2003 :

- le rapport de M. GEFFRAY, premier conseiller,

- et les conclusions de M. MILLET, commissaire du gouvernement ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article R.200 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, repris à l'article R.741-2, alinéa 2 du code de justice administrative, le jugement contient l'analyse des conclusions et mémoires ;

Considérant qu'il ressort des termes mêmes de la pièce transmise par le Tribunal administratif d'Orléans à la suite de la demande de la Cour tendant à ce que soit produite une copie de la minute du jugement attaqué du 16 novembre 1999 que ce jugement ne comporte pas dans ses visas l'analyse des moyens des parties, contrairement aux exigences des dispositions précitées ; qu'ainsi, l'article 2 dudit jugement doit être annulé ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur les conclusions de la demande présentée par M. X devant le Tribunal administratif d'Orléans dirigées contre l'arrêté du ministre de l'éducation nationale du 22 décembre 1995 en tant qu'il fixe ses droits à reclassement ;

Sur la légalité de la décision attaquée ;

En ce qui concerne les services accomplis à Lyon :

Considérant que si, par sa décision du 22 décembre 1995, le ministre de l'éducation nationale a nommé M. X dans le corps des profes-seurs agrégés, il a refusé de prendre en compte au titre de son ancienneté les services d'enseignement antérieurement accomplis par l'intéressé à Lyon du 1er octobre 1978 au 30 septembre 1979 ; que ce refus est au nombre des décisions qui, en vertu de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 modifiée relative à la motivation des actes administratifs, refusent un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir et doivent être motivées par application de ces dispositions ; que la feuille de classement jointe à l'arrêté attaqué ne comporte aucune mention des textes, ni des faits qui le fondent ;

En ce qui concerne les services accomplis à l'étranger :

Considérant qu'aux termes de l'article 3 du décret n° 51-1423 du 5 décembre 1951 modifié susvisé : (...) Peuvent également entrer en compte sans limitation de durée, après avis du ministre des affaires étrangères et de la commission administrative paritaire compétente, les services accomplis en qualité de professeur, de lecteur ou d'assistant dans un établissement d'ensei-gnement à l'étranger ;

Considérant qu'aux termes de l'article 39 du traité instituant la Communauté européenne susvisé : 1. La libre circulation des travailleurs est assurée à l'intérieur de la Communauté au plus tard après l'expiration de la période de transition. 2. Elle implique l'abolition de toute discrimination fondée sur la nationalité, entre les travailleurs des Etats membres, en ce qui concerne l'emploi, la rémunération et les autres conditions de travail. 3. Elle comporte le droit, sous réserve des limitations justifiées par des raisons d'ordre public, de sécurité publique et de santé publique : a) de répondre à des emplois effecti-vement offerts ; b) de se déplacer à cet effet librement sur le territoire des Etats membres ; c) de demeurer, dans des conditions qui feront l'objet de règlements d'application établis par la Commission, sur le territoire d'un Etat membre, après y avoir occupé un emploi ;

Considérant qu'il résulte de ces stipulations telles qu'elles ont été interprétées par la Cour de justice des Communautés européennes, notamment dans son arrêt du 23 février 1994 rendu dans l'affaire C-419/92 que, lorsqu'un Etat membre prévoit, à l'occasion du recrutement du personnel, de prendre en compte des activités professionnelles antérieures exercées par les candidats au sein d'une administration publique, il ne peut, à l'égard des ressortissants communautaires, opérer de distinction selon que ces activités ont été exercées dans le service public de ce même Etat membre ou dans celui d'un autre Etat membre ;

Considérant qu'il suit de là que les dispositions précitées de l'article 3 du décret du 5 décembre 1951 qui prennent en compte, pour le classement des personnes recrutées dans le corps des professeurs agrégés, les services accomplis antérieurement en qualité de professeur, de lecteur ou d'assistant dans un établissement à l'étranger ne peuvent être regardées comme excluant la prise en compte de services de même nature lorsqu'ils ont été accomplis pour le compte d'un autre Etat membre de l'Union européenne ; qu'il ressort des pièces du dossier qu'en excluant, à l'occasion du reclassement de M. X en tant que professeur agrégé, la prise en compte de ses services aux universités de Leeds et de Salford, en Grande-Bretagne, pendant la période allant du 1er septembre 1983 au 31 août 1993, en tant que maître assistant puis maître de conférences, l'arrêté du ministre de l'éducation nationale du 22 décembre 1995 est entaché d'illégalité ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X est fondé à demander l'annulation de l'arrêté du ministre de l'éducation nationale du 22 décembre 1995 en ce qu'il a limité à trois mois la prise en compte dans son ancienneté des périodes de services antérieurement accomplis par M. X ;

Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :

Considérant qu'aux termes de l'article L.911-2 du code de justice administrative : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juri-dictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé ;

Considérant que, compte tenu des développements qui précèdent, le présent arrêt implique seulement que le ministre réexamine les droits à reclassement de M. X en tenant compte des services antérieurement accomplis par celui-ci ; qu'il y a lieu, en application des dispositions précitées, de lui prescrire de procéder à ce réexamen dans un délai de quatre mois à compter de la notification du présent arrêt ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces dispositions, de condamner l'Etat à payer à M. X une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : L'article 2 du jugement du Tribunal administratif d'Orléans du 16 novembre 1999 et l'arrêté du ministre de l'éducation nationale du 22 décembre 1995, en tant qu'il a limité à trois mois la prise en compte des services antérieurement accomplis par M. Trevor X, sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au ministre de l'éducation nationale de réexaminer dans un délai de quatre mois à compter de la notification qui lui sera faite du présent arrêt les droits à reclassement de M. Trevor X compte tenu des services effectués par lui du 1er octobre 1978 au 30 septembre 1979 et de 1983 à 1993.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. Trevor X est rejeté.

Article 4 : L'Etat versera à M. Trevor X la somme de 1 000 euros (mille euros) au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. Trevor X et au ministre de la jeunesse, de l'éducation nationale et de la recherche.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3eme chambre
Numéro d'arrêt : 00NT00077
Date de la décision : 10/04/2003
Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. SALUDEN
Rapporteur ?: M. GEFFRAY
Rapporteur public ?: M. MILLET
Avocat(s) : COUDRAY

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2003-04-10;00nt00077 ?
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