Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La SAS STR Industries a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2006, 2007 et 2008 et des pénalités correspondantes.
Par un jugement n° 1203417 du 12 avril 2016, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté la demande.
La SAS STR Industries a également demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2009, 2010 et 2011 et des pénalités correspondantes.
Par un jugement n° 1405494 du 12 avril 2016, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté la demande.
Par un arrêt n° 16NC01079 - 16NC01080 du 28 décembre 2017, la cour administrative d'appel de Nancy a rejeté les requêtes de la société STR Industries.
Par une décision n° 418615 du 1er avril 2019, le Conseil d'Etat a annulé cet arrêt en tant qu'il s'est prononcé sur les cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à la charge de la société STR Industries procédant de la réintégration, dans ses bénéfices imposables, au titre des exercices clos en 2006 et 2007, des honoraires versés par cette société à la société Inca.Tec et sur les pénalités correspondantes et a, dans cette mesure, renvoyé l'affaire devant la cour administrative d'appel de Nancy.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés respectivement le 7 juin 2016 et le 14 décembre 2016, la SAS STR Industries, représentée par Me B..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 12 avril 2016 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2006, 2007 et 2008 et des pénalités correspondantes ;
2°) de prononcer la décharge de ces impositions et des pénalités correspondantes ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 20 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la rémunération des prestations de services, réalisées par la société Inca.Tec dans le cadre de la convention d'analyse technique et de suivi, sont des charges déductibles en application de l'article 39 du code général des impôts ;
- les prestations réalisées par la société Inca.Tec, dans le cadre de la convention d'apport d'affaires sont réelles et par suite déductibles ;
- les pénalités pour manquement délibéré ne sont pas fondées.
Par un mémoire en défense, enregistré 13 septembre 2016, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par la société STR Industries ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Barteaux,
- et les conclusions de Mme Seibt, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. La société STR Industries, qui exerce une activité dans les domaines de la chaudronnerie, de la mécano-soudure, de la tuyauterie, des structures métalliques et des chantiers industriels, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er octobre 2005 au 30 septembre 2007. A l'issue de ces opérations de contrôle, l'administration a remis en cause notamment la déductibilité des rémunérations versées à la société Inca.Tec en application d'une convention d'analyse technique et de suivi et lui a notifié, par une proposition de rectification du 14 décembre 2009, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre des exercices clos en 2006, 2007 et 2008. Par un jugement du 12 avril 2016, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté la demande de la société STR Industries tendant à la décharge de ces cotisations supplémentaires ainsi que des majorations correspondantes. Par un arrêt du 28 décembre 2017, la cour administrative d'appel de Nancy a rejeté l'appel formé par la société STR Industries contre ce jugement. Par une décision du 1er avril 2019, le Conseil d'Etat a annulé cet arrêt en tant qu'il s'est prononcé sur les cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à la charge de la société STR Industries procédant de la réintégration dans ses bénéfices imposables au titre des exercices clos en 2006 et 2007 des honoraires versés par cette société à la société Inca.Tec et sur les pénalités correspondantes et a renvoyé, dans cette mesure, l'affaire devant la cour. Cette annulation a été prononcée au motif que la cour avait commis une erreur de droit en se bornant à constater le caractère excessif des honoraires versés à la société Inca.Tec par la société STR Industries sans rechercher dans quelle proportion l'administration était fondée à procéder à la réintégration de ces honoraires dans le résultat imposable alors qu'elle avait constaté que la société Acomuro, filiale de la société Inca.Tec avait effectivement réalisé des prestations de suivi de marchés pour le compte de la société STR Industries.
Sur le bien-fondé du jugement :
2. Aux termes du 1 de l'article 39 du code général des impôts : " Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (...69 % par la société MB Innov et, depuis le mois d'août 2006, à 30 % par la société Inca) notamment : /1° Les frais généraux de toute nature (...69 % par la société MB Innov et, depuis le mois d'août 2006, à 30 % par la société Inca) ". Si, en vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits qu'elle invoque au soutien de ses prétentions, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci. Il appartient, dès lors, au contribuable, pour l'application des dispositions du 1 de l'article 39 du code général des impôts, de justifier tant du montant des charges qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 38 du code général des impôts que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité. Le contribuable apporte cette justification par la production de tous éléments suffisamment précis portant sur la nature de la charge en cause, ainsi que sur l'existence et la valeur de la contrepartie qu'il en a retirée. Dans l'hypothèse où le contribuable s'acquitte de cette obligation, il incombe ensuite au service, s'il s'y croit fondé, d'apporter la preuve de ce que la charge en cause n'est pas déductible par nature, qu'elle est dépourvue de contrepartie, qu'elle a une contrepartie dépourvue d'intérêt pour le contribuable ou que la rémunération de cette contrepartie est excessive. En vertu de ces principes, lorsqu'une entreprise a déduit en charges une dépense réellement supportée, conformément à une facture régulière relative à un achat de prestations ou de biens dont la déductibilité par nature n'est pas contestée par l'administration, celle-ci peut demander à l'entreprise qu'elle lui fournisse tous éléments d'information en sa possession susceptibles de justifier la réalité et la valeur des prestations ou biens ainsi acquis. La seule circonstance que l'entreprise n'aurait pas suffisamment répondu à ces demandes d'explication ne saurait suffire à fonder en droit la réintégration de la dépense litigieuse, l'administration devant alors fournir devant le juge tous éléments de nature à étayer sa contestation du caractère déductible de la dépense. Le juge de l'impôt doit apprécier la valeur des explications qui lui sont respectivement fournies par le contribuable et par l'administration.
3. L'administration a réintégré, dans le résultat des exercices clos en 2006 et 2007 de la société STR Industries, des honoraires versés à la société Inca.Tec à concurrence respectivement de 160 000 et de 55 000 euros.
4. Pour justifier de la réalité de ces charges, la société STR Industries a produit, d'une part, une convention d'analyse technique et de suivi du 12 avril 2006 conclue entre la société MB Innov et la société Inca.Tech aux termes de laquelle cette dernière s'engage à mettre à la disposition des sociétés du groupe MB Innov sa filiale en Roumanie afin d'effectuer le suivi et la gestion des commandes passées par la société STR Industries dans ce pays, d'autre part, deux avenants du 18 mai 2006 et du 31 juillet 2006 par lesquels ces mêmes sociétés ont convenu de la mise à disposition par la société Inca.Tec des moyens humains et techniques de sa filiale roumaine pour le suivi d'un marché de " cadres à pinces " et d'un marché de " transport de collecteurs des poussières " en contrepartie d'une rémunération fixée forfaitairement respectivement pour chacun de ces marchés à 105 000 et 110 000 euros. Enfin, la requérante a fourni quatre factures des 31 juillet 2006, 31 août 2006, 25 septembre 2006 et 10 janvier 2007 afférentes à ces prestations techniques.
5. Si pour contester la réalité de ces prestations, l'administration se prévaut des liens unissant ces sociétés, la société STR Industries étant détenue à ...69 % par la société MB Innov et, depuis le mois d'août 2006, à 30 % par la société Inca.69 % par la société MB Innov et, depuis le mois d'août 2006, à 30 % par la société IncaTec, de l'existence d'un contrat de prestations de services conclu le 1er octobre 2001 entre la société STR Industries et la société MB Innov et, plus généralement, de l'absence d'éléments justifiant les prestations fournies par la société Inca.Tec, la société STR Industries a produit les commandes passées auprès de la société roumaine Tehnomecanica pour la réalisation des " cadres à pinces " et des " collecteurs de transport de poussières " ainsi que les lettres de mission que la société Inca.Tec a adressées à sa filiale roumaine, la société Acomuro, le 18 mai 2006 et le 20 novembre 2006, pour le suivi de ces deux commandes. En appel, outre ces documents, la société STR Industries a produit, pour ces marchés, la traduction des ordres de mission et des comptes-rendus établis par la société Acomuro. Ainsi, contrairement à ce que soutient l'administration, la société STR Industries doit être regardée comme justifiant de la réalité du suivi technique par la société Inca.Tec, par l'intermédiaire de sa filiale, des commandes qu'elle avait passées à la société roumaine Tehnomecanica.
6. Toutefois, il résulte de l'instruction que, dans le cadre de ces conventions d'assistance, la société Inca.Tec, qui au demeurant ne disposait d'aucun personnel qualifié et était nouvellement créée, s'est bornée à transmettre à la société Acomuro les deux commandes passées par la société STR Industries à la société roumaine Tehnomecanica. La prestation de suivi technique pour ces deux commandes, passées à la société Tehnomecanica le 18 mai 2006 et le 5 octobre 2006, a été intégralement assurée par la société Acomuro. Si la société STR Industries fait valoir que les honoraires forfaitaires de 105 000 et 110 000 euros versés à la société Inca.Tec en contrepartie du suivi de chacune de ces commandes ne sont pas disproportionnés, elle n'apporte aucun élément de nature à justifier de tels montants au regard du rôle de la société Inca.Tec et des prestations limitées qu'elle a réalisées. A cet égard, la société Acomuro a reçu pour le suivi de ces commandes une rémunération forfaitaire de 40 000 et 20 000 euros. Par ailleurs, les conventions conclues entre la société MB Innov et la société Inca.Tec ne comportent aucune précision sur l'étendue et la nature des prestations réalisées, ni sur les modalités de calcul des honoraires qui ont été fixés forfaitairement. En outre et ainsi que l'a relevé l'administration, il existe entre la société STR Industries, la société Inca.Tec et la société MB Innov des liens capitalistes. Dans ces conditions, nonobstant l'importance de la marge réalisée par la société STR Industries, l'administration apporte suffisamment d'éléments permettant de regarder les rémunérations versées à la société Inca.Tec comme excessives.
7. Les parties n'ont fourni à la cour aucun élément permettant de comparer les rémunérations habituelles pour des prestations de suivi technique. Eu égard notamment au montant des rémunérations versées à la société Acomuro en contrepartie du suivi des commandes passées par la société STR Industries, de l'absence de moyens humains et techniques au sein de la société Inca.Tec et de l'absence d'expérience de cette dernière en matière de prestation technique, il y a lieu de fixer le montant ayant un caractère excessif des rémunérations versées par la société STR Industries pour le marché des " cadres à pinces " et le marché de " collecteurs de transport de poussières " respectivement à 55 000 et 80 000 euros. Par suite et compte tenu des exercices au cours desquels les factures ont été réglées, la société STR Industries est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que l'administration a réintégré les sommes de 65 000 et 15 000 euros dans les résultats imposables au titre des exercices clos en 2006 et 2007.
8. Il résulte de tout ce qui précède que la société STR Industries est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté, à concurrence de 65 000 et de 15 000 euros, sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés qui lui ont été assignées respectivement au titre des exercices clos en 2006 et 2007, ainsi que des majorations et intérêts de retard y afférents et à demander, dans cette mesure, l'annulation de ce jugement.
Sur les frais de l'instance :
9. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme que la société STR Industries demande au titre des frais qu'elle a exposés, en application des dispositions précitées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
Article 1er : Les bases d'imposition à l'impôt sur les sociétés de la société STR Industries sont réduites de 65 000 et 15 000 euros en ce qui concerne respectivement les exercices clos en 2006 et 2007.
Article 2 : La société STR Industries est déchargée des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés qui lui ont été assignées au titre des exercices clos en 2006 et 2007 et des majorations et intérêts de retard y afférents correspondant à la réduction des bases d'imposition mentionnée à l'article 1er.
Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 12 avril 2016 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de la société STR Industries est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la société STR Industries et au ministre de l'action et des comptes publics.
N° 19NC01009 2