Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A...F...a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler la décision du 28 novembre 2012 par laquelle le maire de Lunéville a refusé de retirer les étais apposés sur son immeuble et de condamner la commune de Lunéville à l'indemniser des préjudices qu'il a subis du fait de l'arrêté de péril imminent pris par la commune le 1er octobre 2009.
Par un jugement n° 1300197 du 10 mars 2015, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.
Par un arrêt n° 15NC00938 du 18 octobre 2016, la cour administrative d'appel de Nancy a rejeté son appel.
Par une décision n° 406080 du 7 décembre 2017, le Conseil d'Etat a annulé l'arrêt du 18 octobre 2016 en tant qu'il se prononce sur les conclusions de M. F...tendant à l'annulation de la décision du 28 novembre 2012 par laquelle le maire de Lunéville avait refusé de faire retirer les étais mis en place devant son immeuble et à ce qu'il soit enjoint au maire de faire retirer ces étais et a renvoyé l'affaire à la cour administrative d'appel de Nancy.
Procédure devant la cour :
Eu égard à la décision du Conseil d'Etat, la cour se trouve à nouveau saisie de la requête enregistrée le 14 mai 2015 dans la mesure de la cassation prononcée.
Par sa requête enregistrée le 14 mai 2015 et par un mémoire après cassation enregistré le 21 février 2018, M.F..., représenté par MeE..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nancy du 10 mars 2015 en tant qu'il a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de la décision du 28 novembre 2012 du maire de Lunéville refusant de faire retirer les étais mis en place devant son immeuble ;
2°) d'annuler la décision du maire de Lunéville du 28 novembre 2012 en tant qu'elle refuse de retirer les étais ;
3°) d'enjoindre à la commune de Lunéville de retirer les étais et blocs de béton déposés le 9 novembre 2009 devant l'immeuble situé 22 rue du Château à Lunéville, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard après l'expiration du délai qui sera octroyé pour la réalisation de ces travaux ;
4°) dans le dernier état de ses écritures, de mettre à la charge de la commune de Lunéville le versement d'une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'étaiement mis en place n'est pas utile, ce qui peut être vérifié par un expert ;
- aucune obligation de travaux n'a été mise à sa charge ;
- il convient d'enjoindre à la commune de retirer les étais afin qu'il puisse retrouver la jouissance de son immeuble.
Par des mémoires en défense, enregistrés le 22 octobre 2015 et le 5 novembre 2018, la commune de Lunéville, représentée par Me C...et en dernier lieu par MeD..., conclut :
- au rejet de la requête ;
- à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de M. F...sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la demande d'annulation de la décision rejetant la demande de retrait des étais formulée par M. F...aurait dû faire l'objet d'un recours distinct ;
- cette décision est justifiée.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de la construction et de l'habitation ;
- le code général des collectivités locales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Stefanski, président,
- les conclusions de M. Favret, rapporteur public,
- et les observations de MeB..., pour la commune de Lunéville.
Considérant ce qui suit :
Sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la demande de première instance :
1. Il ressort des pièces du dossier que le 1er octobre 2009, les services de secours ont été appelés par des occupants des immeubles situés 22 et 24 rue du Château à Lunéville en raison de crépitements alarmants émanant de la structure des bâtiments et que les pompiers ont pris la décision d'évacuer les immeubles. Le même jour, le maire de Lunéville a pris, sur le fondement de l'article L. 511-1 du code de la construction et de l'habitation, un arrêté de péril imminent portant sur ces deux immeubles, celui du numéro 22 appartenant à M. F.... En novembre 2009, à la suite d'un rapport d'expertise ordonné par le tribunal administratif, le maire a fait placer des étais et blocs de béton contre la façade de cet immeuble et a également fait renforcer les fenêtres et le 23 novembre le maire a mis fin au péril imminent. Si par arrêté du 18 novembre 2010, le maire a mis fin à l'arrêté portant interdiction d'habiter les immeubles des numéros 22 et 24 rue du Château, il constatait toutefois que l'étaiement ne devait pas être retiré.
2. L'arrêté de péril imminent du 1er octobre 2009 a été annulé pour vice de forme par un jugement du 29 décembre 2011 du tribunal administratif de Nancy.
3. M. F...a demandé à la commune, d'une part, de l'indemniser des préjudices résultant pour lui de l'arrêté du 1er octobre 2009 et, d'autre part, de faire déposer les étais. Par une décision du 28 novembre 2012, le maire a rejeté ces demandes. M. F...a alors saisi le tribunal administratif de Nancy d'une demande tendant à la condamnation de la commune à lui verser une indemnité, à l'annulation du refus du maire de faire déposer les étais et à ce qu'il soit enjoint au maire de faire supprimer l'étaiement. Par un arrêt du 18 octobre 2016, la cour administrative d'appel de Nancy a rejeté l'appel formé par M. F... contre le jugement du 10 mars 2015 par lequel le tribunal administratif avait rejeté sa demande. Par une décision du 7 décembre 2017, le Conseil d'Etat a annulé l'arrêt de la cour du 18 octobre 2016 en tant qu'il se prononçait sur les conclusions de M. F...tendant à l'annulation de la décision du 28 novembre 2012 par laquelle le maire de Lunéville a refusé de faire retirer les étais et a renvoyé l'affaire à la cour administrative d'appel de Nancy dans cette mesure.
4. M. F...soutient qu'il ressort du rapport établi en novembre 2011 par un expert nommé par le juge judiciaire, qu'aucun désordre n'étant survenu le 1er octobre 2009, les mesures prises par le maire de Lunéville étaient inutiles. Il fait valoir que le maire ne pouvait donc légalement justifier son refus de retirer les étais par la nécessité de faire au préalable des travaux qui ne pouvaient être exigés dès lors que la solidité de l'immeuble n'était pas menacée et qu'aucune obligation de réaliser des travaux, dont la nature n'avait jamais été précisée, n'avait été mise à sa charge.
5. Il ressort toutefois des pièces du dossier, et notamment du rapport établi le 15 octobre 2009 par l'expert désigné par le tribunal administratif de Nancy, que le mur mitoyen entre les deux immeubles situés 22 et 24 de la rue du Château comportait des dégradations qui avaient conduit à une désolidarisation des façades avec ce mur. Le rapport mentionnait également qu'au droit de ce mur, la façade de l'immeuble de M. F...présentait un ventre d'une quinzaine de centimètres au niveau du plancher du rez-de-chaussée, que le linteau de la porte d'entrée était déformé et que des fissures extérieures et intérieures affectaient diverses parties du bâtiment.
6. L'expert indiquait aussi que ces désordres présentaient " un caractère de gravité importante pour les usagers " et que " la progression des déformations observées du 3 au 5 octobre 2009 confirmait le caractère imminent du péril ". Par comparaison avec un constat d'huissier établi le 6 mars 1984, il relevait également une " nette aggravation du pivotement des deux linteaux cintrés des portes d'entrée ", une aggravation significative de certaines fissurations et que si le ventre de la façade n'avait pas évolué depuis 1984, les désordres s'étaient aggravés en périphérie. Il concluait à l'existence d'un péril grave et imminent et à l'exclusion du retour des locataires tant que les travaux de remise en état n'auraient pas été exécutés.
7. Le rapport du second expert, dont se prévaut l'appelant, n'est pas suffisamment précis pour remettre en cause les conclusions du premier expert. En effet, si le second expert conclut qu'aucun désordre n'était survenu le 1er octobre 2009 dès lors qu'aucune aggravation par rapport au procès-verbal de 1984 n'était apparue, il mentionnait toutefois qu'existait un désordre tenant à la lézarde des façades et au bombement du mur de séparation entre les immeubles, qu'il était nécessaire de reprendre la lézarde, de relier le mur mitoyen aux façades des deux immeubles et que s'il était possible de retirer les étaiements, ceux-ci devraient cependant être remis pour effectuer les réparations nécessaires afin d'assurer la pérennité des immeubles. Il relève également qu'il n'était " pas sain de laisser ainsi une discontinuité des éléments structurants d'un immeuble ", celle-ci pouvant " constituer une amorce de désordre sous l'effet d'un choc ou de phénomènes vibratoires ou d'une décompression sous l'assise des points porteurs ".
8. Dans ces conditions et alors que les étaiements prescrits par la commune de Lunéville étaient nécessaires à la réalisation de travaux indispensables compte tenu des risques courus notamment par l'immeuble de M. F...et relevés par les deux experts, le refus du maire de faire retirer les étais et autres éléments destinés à conforter l'immeuble, n'est pas illégal, sans qu'ait d'influence la circonstance qu'aucune obligation de travaux n'ait été mise à la charge de M.F....
9. Il résulte de ce qui précède que M. F...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
10. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Lunéville, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme à verser à M. F... au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. En revanche, il y a lieu de mettre à la charge de M. F...le paiement d'une somme de 2 000 euros à verser à la commune de Lunéville à ce titre.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. F...est rejetée.
Article 2 : M. F...versera à la commune de Lunéville une somme de 2 000 (deux mille) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...F...et à la commune de Lunéville.
Copie en sera adressée au préfet de Meurthe-et-Moselle.
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N° 17NC02947